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LE DÉSAMOUR
Les tendances amorcées les années passées se confirment : moins de pharmaciens, une profession qui vieillit et n’attire plus, une « évaporation » des jeunes diplômés en hausse… Les chiffres démographiques 2011 de l’Ordre ont de quoi interroger sur l’avenir du secteur pharmaceutique.
En 2011, l’effectif des pharmaciens inscrits à l’Ordre continue de diminuer. C’est ce que confirment les chiffres de la démographie professionnelle pour 2011 présentés jeudi dernier par l’instance ordinale, laquelle compte, au 1er janvier 2012, 73 127 pharmaciens, soit 114 de moins qu’en 2010.
La baisse des effectifs en section A, entamée en 2009, s’est accélérée légèrement en 2010 (– 0,77 %) et se poursuit en 2011 (– 0,4 %). Le léger déclin du nombre d’adjoints (– 0,3 %) souligne la tendance pour l’officine, dont les effectifs pour les deux sections représentent près des deux tiers inscrits. Cette baisse ne se vérifie cependant pas totalement en section E (départements et collectivités d’outre-mer) où le nombre d’inscrits a augmenté de 1,9 %. Trois territoires regroupent la majorité des pharmaciens : la Réunion (44,5 %), la Guadeloupe (24,5 %) et la Martinique (20,6 %), où les pharmaciens exercent principalement à l’officine (75 %). Quant au nombre de pharmaciens étrangers inscrits, il est en augmentation (1,49 % contre 1,37 % en 2010) et ce sont les officines qui recrutent le plus de diplômes étrangers.
Une répartition territoriale encore harmonieuse
La population officinale continue de vieillir : c’est la tranche 53/57 ans qui rassemble le plus gros effectif – un titulaire sur trois a plus de 55 ans –, suivie de près par les 48/52 ans. A la différence des jeunes médecins diplômés, les jeunes pharmaciens ne délaissent pas leur région d’étude : deux tiers d’entre eux (69 %) y travaillent après leur diplôme. On observe cependant des mouvements différents en fonction de la région et de l’activité professionnelle. Ainsi, en Poitou-Charentes, Franche-Comté ou Limousin près de la moitié des jeunes diplômés ont choisi de quitter leur région d’étude pour leur premier exercice.
Le nombre d’officines, 22 706, a également diminué en 2011 de 0,5 %. De fait, on constate plus de 3 pharmacies pour 100 km2etune augmentation du nombre d’habitants (2 900) par pharmacie. « En Allemagne, Italie, Royaume-Uni, Pays-Bas, c’est plus de 5, relativise l’Ordre, en Belgique plus de 15 ! » Contrairement aux médecins, les nouveaux titulaires ne fuient pas les zones rurales. Les jeunes (– de 40 ans) s’installent dans la moitié nord, particulièrement dans les territoires les plus ruraux de l’Ouest normand ou du quart Nord-Est quand les plus âgés préfèrent le Sud-Ouest, la Corse, le Centre et l’Ile-de-France. Alain Delgutte, nouveau président de la section A, estime néanmoins que l’Ordre doit se pencher sur le maillage territorial : « L’Ordre entend être partie prenante des réflexions menées dans le cadre de la convention pharmaceutique sur l’optimisation du réseau officinal. Je pense qu’il ne faut plus se focaliser sur le nombre de 2 500 habitants, qui est un seuil difficile à atteindre en zone rurale. »
Il est intéressant enfin d’observer la répartition des pharmacies par taille : le croissant Nord-Est/Midi (frontières et zones touristiques), où les officines accueillent plus de deux pharmaciens, s’oppose aux territoires moins peuplés de l’Ouest et du Centre.
Une hausse du taux d’évaporation dramatique
L’an passé, l’Ordre des pharmaciens avait pointé l’envolée du taux d’« évaporation », autrement dit le pourcentage de jeunes diplômés qui ne se sont pas encore inscrits à l’Ordre dans les trois ans qui ont suivi l’obtention de leur diplôme, préférant sans doute d’autres secteurs (cosmétologie, agroalimentaire…). En 2010, ce pourcentage avait atteint le taux record de 20,1 %. Il est cette année de 26,2 %, soit 681 diplômés, pour 1 920 inscriptions de sorties d’études.
Cette génération a bénéficié de la réévaluation du numerus clausus de 2 250 places à 2 400 places en 2004, puis de 2 600 en 2005, avant de se stabiliser (3 090 places depuis 2008, 3 095 en 2011). Le taux de nouveaux inscrits à l’Ordre aurait donc dû en profiter, ce qui est loin d’être le cas. « Ce taux d’évaporation est incompréhensible, fait remarquer Alain Delgutte. Et c’est une source inquiétudes. Cela signifie que sur quatre pharmaciens formés, trois vont exercer… »
Les structures d’exploitation continuent à évoluer
La baisse d’inscription en section A interroge l’Ordre quant à une moindre attraction de l’exercice libéral : « Néanmoins, commente-t-il, le niveau de désintérêt de l’exercice libéral n’atteint pas celui des autres professions de santé, où les libéraux choisissent de plus en plus l’exercice salarié ». Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l’ordre des pharmaciens, avait, pour 2010, estimé que les jeunes pharmaciens voulaient exercer de manière différente, se montrant attachés à un exercice en groupe. Cela se vérifie dans la double tendance qui marque l’évolution des structures juridiques. 56 % des pharmaciens d’officine préfèrent la forme d’exploitation associative à celle en nom propre, le nombre d’officines exploitées en EURL et SARL continuant de croître légèrement depuis 2008. Premier mode d’exploitation en association depuis 2009, les sociétés d’exercice libéral (SEL) se révèlent très attractives « en termes de prise de participation et parce qu’elles facilitent l’intégration de nouveaux associés ». En 2011, 39 % d’entre elles ont au moins deux sources de capital (associés exerçants, pharmaciens individuels associés extérieurs ou autres SEL).
Pour Alain Delgutte, le revers de la médaille est « la transmission des parts pour des raisons fiscales, qui pose problème pour la revente de parts aux jeunes ». Et de souhaiter la sortie du décret sur les SPF-PL. Les fermetures, qui comptabilisent les regroupements, ont augmenté : 141 licences supprimées en 2011 contre 116 en 2010. « Les pharmaciens n’arrivent pas à céder leur officine », constate Alain Delgutte, qui veut renforcer le rôle de l’Ordre auprès des pharmaciens en difficulté, notamment ceux qui font face à des procédures collectives.
Quant aux centrales d’achats pharmaceutiques (CAP), officielles depuis le décret du 19 juin 2009, elles constituent une nouvelle source d’approvisionnement puisqu’elles peuvent acquérir des médicaments OTC en leur nom propre ou pour le compte de pharmaciens. Depuis leur création, l’Ordre en a recensé 18 en France métropolitaine, réparties sur 9 régions dont la majorité se trouve en Ile-de-France et en région Centre.
REPÈRES
• 27 733 inscrits à la section A et 25 633 adjoints.
• Moyenne d’âge : 49,2 ans et une répartition hommes/femmes de 45/65 % pour la section A ; 43,4 ans en moyenne et 18 % d’hommes pour 82 % de femmes en section D.
• 83 % des nouveaux accédants à la propriété des officines ont moins de 36 ans.
• Un taux d’évaporation (jeunes diplômés ne s’inscrivant pas à l’Ordre dans les 3 ans) de 26,2 %.
• 292 transferts, + 26 % par rapport à 2010. L’immense majorité a eu lieu à l’intérieur de la commune d’implantation.
• 22 706 officines dont 22 080 en métropole et 626 dans les départements d’outre-mer.
• 141 officines ont fermé en 2011, soit plus d’une tous les trois jours.
• Seulement 18 regroupements ont été réalisés, 31 avaient été recensés en 2010, l’Ordre en soulignant déjà le petit nombre.
Certains sénateurs veulent réformer l’accès aux pharmacies rurales
Une proposition de loi a été déposée le 9 mai par la sénatrice UMP du Var Christiane Hummel et vingt-quatre autres sénateurs « tendant à l’amélioration de l’accès aux pharmacies en milieu rural ». L’article unique de cette proposition de loi, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission, stipule que l’ouverture d’une officine dans une commune qui en est dépourvue peut être autorisée lorsque la population est au moins égale à 2 500 habitants ou si elle compte moins de 2 500 habitants, « lorsque cette ouverture permet de desservir, dans la commune et dans une ou plusieurs communes limitrophes également dépourvues d’officine, une population totale au moins égale à 2 500 habitants ». Les sénateurs constatent que dans les zones rurales et montagneuses une « dégradation préoccupante des conditions d’accès aux médicaments, compte tenu des effets, souvent cumulatifs, de l’impossibilité d’ouvrir des officines, des distances à parcourir, de l’absence de transports collectifs, du vieillissement de la population ».
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