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LE « OUI MAIS » DES PHARMACIENS
Direct Research a interrogé 490 titulaires sur les missions de la loi « HPST » et les entretiens pharmaceutiques rémunérés. Plus de la moitié d’entre eux se disent prêts à accompagner les patients sous anticoagulants oraux ou asthmatiques, mais plus d’un tiers sont encore indécis. Ils sont aussi nombreux à craindre les réticences des médecins.
Les pharmaciens sont-ils prêts à mettre en œuvre les nouvelles missions qui leur sont confiées ? Direct Research s’est penché sur la question et a interrogé, en juin 2012, 490 titulaires représentatifs du réseau officinal en termes de région, de taille d’agglomération et de CA annuel. Le cabinet d’études et de conseil a également mené des entretiens individuels et collectifs avec certains d’entre eux. Les résultats présentés en octobre dressent un premier état des lieux. Les titulaires ont-ils déjà mis en place des actions d’accompagnement ? 35 % d’entre eux répondent par la négative. Les principales raisons évoquées sont le manque de temps et une équipe trop restreinte (voir graphique n° 1). Le fait que de tels accompagnements ne soient pas rémunérés intervient en 3e position. Le manque d’espace fait également partie des motifs.
En revanche, 65 % des titulaires se sont lancés dans l’accompagnement de leurs clients. 89 % pratiquent ainsi le dépistage du diabète et 63 % celui des facteurs de risque cardiovasculaire (HTA), 62 % font du conseil en nutrition, 55 % proposent des programmes d’aide au sevrage tabagique et 49 % un suivi du calendrier vaccinal. Mais seuls 19 % d’entre eux réalisent des sessions d’éducation thérapeutique du patient. Et 29 % effectuent un « suivi des patients via des entretiens en face à face ». « Nous avons veillé à bien mentionner dans notre questionnaire ce terme, mais nous ne sommes pas du tout dans le cadre conventionnel. Il s’agit de rendez-vous avec des clients, pour la plupart gratuits – dans 97 % des cas –, et qui ne sont ni formalisés ni protocolisés. Ces entretiens concernent des patients âgés ou diabétiques. Ils se déroulent aussi pour le conseil en nutrition et le sevrage tabagique. Ils ont des durées et des fréquences variables ? », indique Hélène Charrondière, directrice des études et du conseil chez Direct Research, qui avoue d’ailleurs être « un peu étonnée par ce pourcentage de 29 % ». 40 % des titulaires reçoivent les patients dans un espace de confidentialité, 45 % dans leur bureau et 38 % au comptoir.
Les titulaires « recrutent » au comptoir
L’enquête révèle aussi que 96 % des pharmaciens « recrutent » leurs patients en discutant avec eux au comptoir, même s’ils utilisent aussi différents canaux de communication (voir graphique n° 2). Une démarche qui porte ses fruits : 64 % des titulaires déclarent que leurs patients accueillent très bien la proposition d’entretiens personnalisés et l’acceptent. Pour 17 %, ces patients ne voient pas leur pharmacien dans ce rôle, mais finissent par accepter. 15 % admettent cependant que les patients refusent leur proposition, même s’ils approuvent leur démarche. Seulement 1 % des titulaires disent que leurs patients ne les voient pas dans ce rôle de suivi et déclinent leur proposition.
Les titulaires ont une perception des réactions des médecins nettement moins favorable. 31 % déclarent que ces derniers sont restés réticents malgré leurs explications, mais ils ont persisté à proposer des entretiens. 20 % ont réussi à les convaincre du bien-fondé de leur démarche. Il faut quand même noter que 27 % des titulaires ont eu des réactions favorables de la part des praticiens et 21 % aucune réaction.
Des pharmaciens légitimes dans leurs missions
Dans ce contexte, les titulaires envisagent-ils de mettre en œuvre les nouvelles missions et celles qui figurent dans la convention pharmaceutique, à savoir le suivi des patients sous anticoagulants oraux et celui des patients asthmatiques ? Leurs réponses traduisent, pour Direct Research, leur « adhésion aux principes des entretiens pharmaceutiques ». Ils sont ainsi 55 % à projeter de mettre en place les deux accompagnements (voir graphique n° 3). Mais ils sont plus d’un tiers à rester indécis. 34 % d’entre eux attendent la publication des avenants avant de prendre leur décision, 31 % déclarent ne pas avoir encore eu « le temps d’étudier la question » et 15 % ont des difficultés « à évaluer le retour sur investissement de cette activité ». 9 % décideront de se lancer après un premier bilan des dispositifs et 6 % en fonction de leurs confrères. « Les pharmaciens se sentent légitimes pour ces missions et 53 % estiment que c’est valorisant, mais la majorité d’entre eux a une perception assez floue des modalités des entretiens pharmaceutiques, mais aussi du temps et des délais qu’ils vont supposer. Les pharmaciens pensent que ces entretiens leur prendront une heure par semaine », détaille Hélène Charrondière.
Une réaction défavorable des médecins
66 % des titulaires qui se déclarent prêts à accompagner leurs patients projettent de le faire en discutant avec eux au comptoir (voir graphique n° 4). Or, lors des négociations sur le suivi des patients sous anticoagulants oraux (ACO), l’Assurance maladie a présenté aux syndicats un projet où seule la CNAMTS contactera directement les patients sous ACO afin de leur proposer un accompagnement par le pharmacien (voir Le Moniteur n° 2954). Les syndicats ont demandé à revoir ce point, mais l’Assurance maladie n’a pas encore donné de réponse.
Les titulaires pour un suivi des diabétiques
Quant aux réactions des patients, 41 % des titulaires estiment qu’elles seront circonspectes et qu’il faudra bien expliquer la démarche. 8 % pensent même que l’accueil sera « médiocre » et qu’une « part importante de patients refusera de participer ». Seulement un gros tiers déclarent qu’ils n’auront aucun mal à recruter. Les titulaires s’avèrent encore plus inquiets quant aux réactions des médecins : 53 % anticipent une réaction défavorable contre 43 % une réaction favorable.
Pour autant, les titulaires sont prêts à remplir d’autres missions dans le cadre conventionnel. Le dépistage et la prévention du diabète (81 %), le suivi du calendrier vaccinal (70 %), le dépistage et la prévention des risques cardiovasculaires (64 %) remportent leurs suffrages. Le suivi de la contraception orale arrive en 7e position (43 %) et celui des patients sous traitements substitutifs aux opiacés en 9e position (34 %). Quant à l’éducation thérapeutique du patient, ils ne sont que 29 % à l’envisager. « Ils s’approprient des actions pour lesquelles ils ont déjà une expérience et sont souvent accompagnés par leur groupement, commente Hélène Charrondière. D’ailleurs, lors des entretiens qualitatifs, il est apparu que le suivi des patients diabétiques leur paraissait plus pertinent que le suivi des patients sous AVK, en termes de santé publique et de nombre potentiel de clients, même si le suivi des patients sous anticoagulants oraux est un enjeu. »
Si l’étude de Direct Research montre l’adhésion des titulaires aux missions de la loi HPST, elle souligne également le décalage entre leurs attentes et les missions négociées et à négocier dans le cadre conventionnel. Un résultat à ne pas sous-estimer…
Jean Claeys, Ailly-le-Haut-Clocher (Somme)
Avec mon adjoint j’ai suivi une formation sur les AVK mise en place par mon groupement Opa Pharm Plus. Si les pharmaciens traînent, ils ne pourront jamais être prêts en janvier, alors qu’il n’y a plus de temps à perdre pour combler les pertes de marge de 2012 par la rémunération de nouvelles prestations. Je n’ai pas non plus attendu pour me former sur l’asthme. C’est bon aussi pour notre image. Les médias pourront à l’avenir filmer un entretien pharmaceutique plutôt qu’un tiroir-caisse pour parler des pharmaciens…
Rémi Grangette, Nîmes (Gard)
Nous n’avons encore rien décidé avec mes deux associés. Nous n’avons pas encore toutes les données en main pour prendre notre décision. On ne connaît pas encore la teneur de ces entretiens. Quel temps cela va prendre ? Quel sera le volume de patients éligibles ? Nous n’avons pas d’adjoint et nous travaillons chacun 50 heures par semaine. Si nous décidons de les faire, il va falloir revoir l’organisation qui est déjà à flux tendu. Il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs. Il est préférable d’attendre l’issue des négociations entre syndicats et Assurance maladie pour démarrer. Pour le moment, nous avons d’autres soucis en tête avec les génériques.
Repères
Avez-vous décidé de suivre une formation pour accompagner les patients sous AVK ?
Maryline Le Secq, Saint-Georges-des-Groseillers (Orne)
Une formation e-learning va bientôt être proposée par mon groupement. Dans le cadre de mes activités de maître de stage, j’ai suivi une formation technique sur les AVK. Je suis aujourd’hui plus en attente d’une formation complémentaire et pédagogique sur les méthodes concernant la conduite d’un entretien avec un patient. Il faut aussi savoir ce que la Sécurité sociale attend de nous. On ne peut pas commencer des entretiens pharmaceutiques tant que leur trame n’a pas été définie.
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