Un ami qui vous fait du bien

Je me souviens qu’à chaque rentrée des classes, on nous collait comme sujet de rédaction : « Racontez vos souvenirs de vacances. » A l’époque, c’était plutôt rose bonbon du genre : « Mamy, ce jour-là, nous avait fait un énorme gâteau au chocolat ! »

Aujourd’hui, si on me reposait la même question, je serais plus nuancée. Bien sûr, il y a des réussites éclatantes. L’année de la petite maison de pêcheur en Grèce… L’année « bouillon de culture » ou le tour de l’Italie en quinze jours ! L’année farniente intégral dans un coin tranquille du Roussillon… Bref des moments de bonheur intense à regarder griller sur le barbecue des poissons qui ne nous ont rien fait, à se délecter des accoutrements cocasses des voisins de plage ou encore à manger des yeux un coucher de soleil. Du vrai bonheur qui donne envie de déclamer « Ô temps, suspends ton vol ! », tandis qu’un de nos compagnons de fortune lance « On n’est pas bien là? », nous faisant réaliser qu’aujourd’hui, on est plus proche de la poésie « Loft-Story » que de Lamartine. Mais les vacances peuvent basculer du mauvais côté. Aux mots de l’été : bronzage, plage, pastis… s’associent parfois les maux de l’été : insolation, fracture, diarrhée et autres malaises réjouissants.

Je ne sais plus qui a dit : « Le bonheur, c’est du malheur qui sommeille », mais son auteur avait sûrement raté ses vacances… Pour en revenir à mes moutons, en cas de dérapage santé, rien de tel qu’une croix de pharmacie. Signe distinctif quasi universel que l’on retrouve aussi bien au pays des enseignes en cyrillique qu’au pays de l’écriture arabe. Seul endroit où on parle la même langue : « Paracétamol ? Si. Prozac ? Ja. Aspirine ? Yes. » En vacances, le pharmacien est le meilleur ami de l’homme !

Une année en Espagne, après trois jours paradisiaques, mes pieds ont joué des castagnettes dans l’obscurité d’un raccourci censé nous mener à la mer. Bilan : chevilles tordues. Première étape consolatrice dans une pharmacie. Conseils en français et antidouleur, avant de passer, le lendemain, entre les mains des médecins. Je quittai rapidement le territoire du flamenco (impossible de danser) avec des béquilles flambant neuf.

Une autre fois, dévorée par un herpès qui me faisait plus ressembler à « Elephant-man » qu’à Cindy Crawford (mon sosie officiel), c’est une pharmacienne grecque qui ouvrit spécialement son officine un dimanche pour me dépanner en Zovirax. Sans oublier le pharmacien de Marrakech, malicieux et souriant, qui nous procura le lopéramide miraculeux… Que de bons souvenirs !

Dans le lot, j’ai aussi en mémoire des images insolites. Ainsi cette pharmacienne de Tinos (toujours en Grèce) qui nous offrit l’ hospitalité lors d’une fête religieuse, alors qu’hôtels et chambres chez l’habitant affichaient « complet », ou encore cette terrasse de café devant une pharmacie d’Argelès (je vous rassure : aucun rapport entre les deux), où les clients attablés ne buvaient pas que du sirop. Si j’osais, je vous demanderais de me raconter quelques souvenirs de clients en vacances, mais je crains que ce ne soit pas toujours rose bonbon…