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Publicité TV : Le médicament fait son show
C’est la dernière tendance. Ménopause, migraine, sclérose en plaques…, aujourd’hui on communique à la télévision autour des pathologies. Le moyen de contourner la réglementation qui n’accorde le petit écran qu’aux médicaments non remboursés ! Autorisation qui reste bien encadrée. Une chose est sûre, chaque diffusion fait immanquablement bondir les ventes.
Hier encore, face à la ménopause, on avait le sentiment de tourner le dos à la vie. » Souvenez-vous, c’était en 1995 : une femme dans la pénombre évoquait ses troubles… à la télévision. Une première, réalisée par les laboratoires Fournier. Depuis, les campagnes publicitaires évoquant des pathologies se sont généralisées : herpès et Alzheimer dans la presse, migraine et dernièrement sclérose en plaques à la télévision.
Les campagnes sont variées, signées par un laboratoire, ou un groupe de laboratoires, en partenariat ou non avec des associations de médecins ou de patients. « Ces campagnes permettent de faire de la communication directe aux consommateurs, souligne Didier Brunet, manager associé chez Publicis Etoile Wellcare. On ne précise pas le nom des médicaments mais elles favorisent le développement d’un marché. On informe le consommateur que le patient peut bénéficier de thérapies sur certaines pathologies. » Et, juridiquement, ce n’est pas interdit puisqu’il n’y a pas de publicité directe sur des produits remboursés. « Et en France, ce qui n’est pas interdit est autorisé ! », plaisante ce spécialiste en communication santé. Il y voit une manière d’impliquer le citoyen comme véritable partenaire de soin : « Vous informez des risques que fait courir l’herpès, les gens se rendent ensuite chez le médecin ce qui permet d’entamer le dialogue. Informer des risques est un élément positif en matière de santé publique. »
Autre ouverture possible formulée par la Commission européenne au mois de juillet dernier : Bruxelles a suggéré de lever sous certaines conditions l’interdiction pour les laboratoires de communiquer au grand public sur les médicaments soumis à prescription dans le domaine du sida, de l’asthme et du diabète. Seule la communication via Internet ou par des brochures est concernée, mais on peut le voir comme un premier pas vers une libéralisation plus large.
Pas de surpromesses pour le médicament !
Comparée aux Etats-Unis, où il n’existe pas d’interdits en la matière, la publicité pour les médicaments en France est étroitement bornée. Réglementairement et culturellement. « Pour parler d’un produit, on traite une problématique de marque comme pour la FNAC ou Nestlé », précise Michael Aboukaya, chef de groupe chez Ogilvy Healthcare Group France, une agence spécialisée en communication grand public. Pour le reste, « on ne badine pas trop avec la santé en France, les sujets sont relativement sérieux. Il faut aussi compter avec l’Afssaps ». Toute publicité, que ce soit en presse grand public, en radio ou en télévision, nécessite l’obtention d’un visa avant diffusion auprès de la commission de contrôle de la publicité rattachée à l’Agence. « Dans la publicité, nous avons tendance à surpromettre, souligne Isabelle Genin, de l’Agence Grey Healthcare Paris. En matière de médicament, ce n’est pas possible. »
La commission n’accepte pas tous les scénarios. Certains mots sont à bannir. On enlève tous les superlatifs, on rajoute plus de probabilité : « Cela va vous aider » plus que « Cela vous aide », car un produit n’a pas la même efficacité sur tout le monde. Au fur et à mesure, les règles se sont d’ailleurs complexifiées : l’Afssaps édicte après coup des recommandations précises pour certaines classes de médicaments voire certaines situations mises en scène (voir ci-contre).
La publicité sur le médicament fonctionne en général sur des schémas classiques. Le spot se décline en trois parties : mise en scène de situations au quotidien, présentation et utilisation du produit, résultats (le soulagement est exprimé par un visage souriant). Autre schéma récurrent : les témoignages des gens qui racontent leur expérience du produit. Un scénario utilisé pour NiQuitin. « En mettant en place des groupes de consommateurs, nous nous sommes aperçus que les gens souhaitaient des exemples concrets de fumeurs, voir des gens comme eux, qui ont des difficultés pour s’arrêter et l’expriment. »
10 % du CA d’un produit passerait dans sa promotion
Pour Maalox, Théraplix a choisi de trancher avec un scénario sortant de l’ordinaire : une histoire de cracheur de feu (voir p. 21). « La concurrence est forte sur les médicaments destinés aux maux d’estomac. Il fallait que les spectateurs puissent différencier notre produit », précise Alix Pluzanski, chef de gamme Théraplix [voir p. 22]. Même démarche pour Boiron qui a choisi dès le départ le principe d’une publicité sous forme de film d’animation. Un choix qui se retrouve dans les différentes campagnes du laboratoire. Au nombre de trois : Oscillococcinum, Sédatif PC et Homéoplasmine, elles ont l’avantage de se démarquer visuellement de la concurrence, relativement présente sur les écrans. « L’achat d’espace, estime Marc Bouchu, chef de produit chez Boiron, concerne essentiellement les produits de l’hiver. »
Les médicaments ORL (contre le rhume, la toux, les états grippaux) restent effectivement les plus grands consommateurs de spots télévisés. Il faut compter également avec les antidouleurs, les antiasthéniques, anti-maux d’estomac et les produits de dermatologie.
Difficile de savoir si les laboratoires utilisent de plus en plus le média télévision comme outil de promotion. Pour Pierre Ferrer, membre de l’Union des annonceurs, la prudence s’impose : « Si vous prenez les chiffres de cette année, ils ne seront pas significatifs : le lancement des patchs à la nicotine a pu avoir un effet galvanisant. L’évolution doit sûrement se faire, mais de manière progressive. » Pierre Brunet (Publicis Etoile Wellcare) confirme : « Il y a eu des pointes quand de nouvelles catégories de produits sont passées à l’OTC comme les anti-H2, puis les ibuprofènes dans les années 90, mais pas d’explosion du marché… »
Côté industrie, pas de précisions non plus sur l’importance des investissements. Il n’y a pas de systématisme : on estime en général que 10 % du CA du produit passe dans le budget promotion. Il faut donc miser sur des médicaments à fort chiffre d’affaires (50 millions de francs par an au minimum) ou à fort potentiel (un nouveau produit par exemple). « La réalisation d’un spot peut ne pas dépasser le million de francs, détaille Isabelle Genin, de Grey Healthcare Paris. Mais il faut également intégrer dans le budget le coût des passages à la télévision. Pour une campagne efficace, comptez 5 millions de francs. »
Pour sa gamme Rennie, Roche Nicholas a adopté le principe d’une présence régulière à l’écran (voir p. 24). « Rennie est un médicament bien installé, qui bénéficie d’acheteurs fidèles, souligne Samuel Petit Perrin, chef de gamme. Mais les habitués vieillissent. Il faut rester à l’esprit des gens et attirer une nouvelle clientèle pour assurer la pérennité de la marque. »
Présent depuis une quinzaine d’années à la télévision, Oscillococcinum communique chaque année régulièrement à la même saison. Homéoplasmine, neuf ans de présence, et Sédatif PC, six ans, ont aussi une saisonnalité télévisuelle : un passage au printemps, un passage à l’automne. Le contenu n’a pratiquement pas changé. Sur le sujet, le chef de produit Marc Bouchu a une approche très pragmatique : « Les changements importants sont pertinents lorsque la concurrence a changé ou que le comportement des gens s’est modifié. C’est rarement le cas en matière de santé, à la différence des produits de grande consommation qui s’épuisent plus vite. Les gens sont assez conservateurs. »
La marque Synthol réapparaît ainsi deux à trois par an, pour une « piqûre de rappel ». Réactualisés à intervalles réguliers, les spots du célèbre antiseptique ont conservé la même trame. Ils jouent sur l’autodérision : on se moque du consommateur dès qu’il se fait mal. Dans la dernière version, le slogan a été à peine remanié : « Synthol, ça fait (plus que) du bien là ou ça fait mal. »
Les campagnes ont un impact immédiat sur les ventes : lors de la diffusion du spot publicitaire en mars dernier, Microlax (voir ci-dessus) a connu une augmentation de 23 % (60 000 unités vendues avant et 74 000 unités vendues durant le passage télévisé). Pour Maalox, la progression des ventes atteint 7 % sur le mois de mars, premier mois de la nouvelle campagne. Pour Nurofen qui communique régulièrement depuis son passage en OTC en 1996, « la télévision a fait exploser la notoriété et les ventes consommateurs, puisqu’elle a permis de multiplier le niveau de sortie consommateurs par cinq entre 1997 et 2001 », explique Servane d’Esparbes, chef de produit chez Boots Healthcare.
Clotilde Masson, chef de marque Supradyne (Roche Nicholas), préfère ne pas avancer de chiffres : « Nous faisons du « mix-media ». La communication télévisée est toujours soutenue par la mise en place de PLV dans l’officine. Difficile d’isoler l’influence des éléments les uns des autres. »
Les règles de bonne conduite
Il y a les mentions obligatoires… et puis tout ce qu’il ne faut pas faire. Il y a les règles de base fixées par la commission de publicité… et puis toutes les recommandations édictées au cas par cas. Exemples.
– « Ceci est un médicament. » Il faut que ce soit évident pour tout le monde. L’expression faisant apparaître le mot « médicament » dans le message publicitaire (« médicament des laboratoires x », « médicament contre… », « médicament pour… ») doit être obligatoirement mentionnée.
– Toute publicité doit comporter les informations indispensables pour un bon usage du médicament et renvoyer à la consultation d’un médecin en cas de persistance des symptômes ou au conseil du pharmacien.
– Ne sont pas acceptées : la référence à des personnalités et à des professionnels de santé ou la présentation directe d’un médicament ou toute recommandation d’emploi faite par un membre d’une profession médicale ou paramédicale pouvant inciter à la consommation.
– Depuis septembre 2000, il est possible de faire référence à la pharmacie, lorsqu’elle « a pour objet d’évoquer le circuit de distribution du médicament ». La croix verte, le décor de pharmacie, la présence d’un pharmacien (à condition qu’il ne conseille pas le produit) ne sont plus interdits. Les mentions « délivrance en pharmacie » ou « délivré par votre pharmacien d’officine » sont acceptées.
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