Officinaux du vieux continent,unissez-vous !

La construction de l’Union européenne semble quelque peu chaotique vue de la France. Et ce n’est pas le semi-échec du dernier sommet européen de Nice ou, plus pragmatiquement, la mise en place poussive de l’euro qui viendront nous contredire. Mais si l’Europe politique et sociale est toujours à la recherche d’une réelle identité, que dire de l’« europharmacie » ? C’est à partir d’un constat de disparités mais surtout des menaces qui pèsent actuellement sur les pharmacies européennes que Gehe UK, l’homologue de l’OCP pour le Royaume-Uni, a souhaité organiser cet été le premier forum de la pharmacie européenne, intitulé « Advancing European Pharmacy ». Son objectif : amener des officinaux de différents pays de l’Union à se rencontrer. « Des pharmaciens qui pensent différemment et qui remettent en question les principes établis », selon Michael Ward, le dirigeant de Gehe UK.

Pour stimuler les échanges, plusieurs orateurs sont venus évoquer et débattre de sujets d’actualité aussi divers que l’Internet, la stratégie des caisses d’assurance maladie allemandes ou encore la mise en place de l’opinion pharmaceutique en France. Mais c’est sans conteste l’intervention de Wally Dove, membre du Groupement pharmaceutique de l’Union européenne (GPUE), instance qui représente les officinaux à Bruxelles, qui a le plus marqué les esprits, notamment côté français. Wally Dove pour qui l’heure est à l’esprit de corps, car « les pharmaciens européens doivent faire face à la plus grande menace de leur histoire. Les marges bénéficiaires se réduisent, la concurrence s’accroît. Dans plusieurs pays, la percée des chaînes est très forte. Partout en Europe des voix s’élèvent pour réclamer la libéralisation du marché pharmaceutique ».

La bataille principale se joue à Bruxelles, où de plus en plus d’eurocrates réclament un système de distribution moins onéreux. Dans le collimateur, officinaux et grossistes-répartiteurs, avec comme corollaires une bataille sur le capital et le monopole. Celui sur les médicaments OTC vient d’ailleurs de tomber aux Pays-Bas où l’on peut maintenant les acheter dans les stations-service… « Mais ce n’est pas une raison pour fermer boutique. Il y a de réelles opportunités à saisir mais cela demande une bonne organisation, des idées et aussi une prise de risque. »

Vaincre les différences

Reste le fossé immense entre les pays du Nord et ceux du Sud européen en matière de monopole, de propriété… Economiquement, les différences sont également tranchées, comme sur le chiffre d’affaires moyen (le Danemark est au sommet avec 3,68 millions d’euros et la Belgique au plus bas avec 0,446 ; la France est dans la moyenne avec 1,05 million d’euros). Même constat concernant la marge sur le remboursable qui montre que les officinaux français ne sont pas les plus mal lotis.

La France détient la palme de la consommation de médicaments sur ordonnance (92 % de la consommation médicamenteuse), devançant d’une courte tête l’Italie (91 %). A l’opposé, la consommation OTC est très développée aux Pays-Bas (30 % !) et en Autriche (28 %).

Malgré ces différences, les europharmaciens réussiront-ils à s’unir ? Car après la prise de conscience, le moment est venu de passer à l’action. Avec ou sans la répartition ?