Plus de démocratie

Monsieur Capdeville est un homme brillant, […] un homme capable de retourner l’opinion de n’importe quelle assemblée en quelques phrases (à l’exception, malheureusement, de celle des représentants des pouvoirs publics qui savent garder la tête froide et ne se laissent pas anesthésier par son éloquence). Mais Monsieur Capdeville est incapable d’entendre sa base, et de toute façon il ne veut plus l’écouter, ce qui est d’autant plus grave que ses positions ne font pas l’unanimité, et que son analyse de la situation est parfois défaillante.

[…] Alors que le Medef fait de la résistance contre les 35 heures, Monsieur Capdeville s’empresse de signer un accord directif (… et non incitatif) anticipant la débâcle financière que représente le passage aux 35 heures : soit 20 à 30 % de charges salariales supplémentaires… […]. Le problème, c’est que l’économie française est en train de rompre avec la croissance, ce qui risque d’hypothéquer cet accroissement de charges, et nous rend inaccessibles les éventuels assouplissements du gouvernement.

Mais le pire, c’est encore quand il […] convainc 60 % de ses présidents qu’il faut accepter une baisse de 0,40 F par boîte sous prétexte que « ça aurait pu être 1,20 F ». De plus, cette baisse concerne tous les vignetés, qu’ils soient vendus avec ou sans présentation au remboursement […] ! Tout cela parce que l’écart entre 2000 et 1999 est de 2,20 MdF (soit près de 100 000 F par pharmacie), mais encore faut-il s’interroger sur les chiffres que l’Etat nous oppose : 200 MF dus au transfert des médicaments d’exception, antirétroviraux… de l’hôpital vers la ville ; 100 MF dus à l’arrondi sur le revignetage en vue du passage à l’euro ; 450 MF récupérés par les grossistes sur le dos des pharmaciens par le biais de la baisse et de la disparition des remises ; 500 MF de baisse du prix fabricant HT pour 2000 ; 600 MF de baisse du prix fabricant HT pour 2001, qui deviendront 1,10 MdF en cas de baisse de 40 centimes par boîte…

Si bien qu’à la sortie, le « surgain » de 2,20 MdF se transforme en perte malgré l’augmentation structurelle de l’activité (le nombre d’ordonnances a augmenté de 7,2 %). Et avec tout ça, il va falloir accuser le coût du déremboursement des médicaments à SMR faible, des 35 heures, de l’euro, du passage au « tout-tiers payant » SESAM-Vitale ainsi que le coût des normes européennes de qualité distillées décrets après décrets (confidentialité, vidéo, espace diagnostic…) et des exigences nouvelles des consommateurs !

[…] Nous demandons, à défaut d’une mise en retrait de Monsieur Capdeville puisque personne ne semble oser l’affronter, un fonctionnement un peu plus démocratique, reposant sur la volonté réelle de la base pour les questions engageant l’économie et l’avenir de l’officine. Il est déjà possible de recueillir sans grande difficulté l’avis des confrères équipés de messagerie Internet par le biais de questionnaires interactifs par exemple. En attendant, ceux de nos confrères qui ont fait leurs comptes considèrent l’acceptation d’une baisse de 40 centimes comme un coup de poignard dans le dos.