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L’ordonnance d’une patiente souffrant de dermatite atopique

Publié le 13 octobre 2001
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L’ordonnance présente les objectifs thérapeutiques suivants :

– le traitement des lésions d’une dermatite atopique par Diprosone ;

– la prévention du dessèchement cutané par Dexeryl et par l’utilisation du pain surgras physiologique La Roche-Posay pour la toilette ;

– le soulagement du prurit par Atarax.

Validation du choix des médicaments

Diprosone (bêtaméthasone) est un dermocorticoïde. Les dermocorticoïdes sont classés en 4 niveaux d’activité d’après leurs réponses aux tests de vasoconstriction cutanée : activité très forte, forte, modérée et faible. Diprosone, à activité forte (classe II), est actif sur certains processus inflammatoires et sur l’effet prurigineux qui leur est lié. Il est vasoconstricteur et inhibe la multiplication cellulaire.

Il est utilisé lorsque la corticothérapie locale est tenue pour le meilleur traitement, notamment dans la dermatite atopique.

Le traitement doit être limité à une ou deux applications par jour. Certaines dermatoses, dont la dermatite atopique, nécessitent un arrêt progressif, qui peut être obtenu par la diminution de fréquence des applications ou par l’utilisation d’un corticoïde moins fort (d’activité modérée ou faible) ou moins dosé.

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Atarax 25 mg (hydroxyzine) est un dérivé de la pipérazine qui possède à la fois une activité anxiolytique et antihistaminique H1.

Atarax 25 mg est indiqué en neuropsychiatrie, dans les troubles de l’anxiété mineurs et en allergologie dans le traitement symptomatique de certaines manifestations allergiques, parmi lesquelles la dermatite atopique n’est toutefois pas citée. L’effet sédatif peut être mis à profit en instaurant une prise unique le soir au coucher, destinée à combattre l’insomnie liée au prurit des lésions eczémateuses.

En allergologie, la posologie recommandée est de 50 à 100 mg/jour chez l’adulte. Chez l’enfant (de 30 mois à 15 ans) la dose est de 1 mg /kg/jour.

Dexeryl (glycérol, vaseline, paraffine liquide) est une crème émolliente et hydratante. Elle est indiquée dans le traitement d’appoint des états de sécheresse cutanée, notamment dans la dermatite atopique. Dans cette indication, le tube de 250 grammes est remboursé.

La crème est appliquée en couche mince sur les zones à traiter, une à deux fois par jour ou plus si nécessaire.

Le pain Surgras physiologique La Roche-Posay est une base lavante végétale surgraissante (sodium palmitate et laurate, lipoaminoacides, silicate d’aluminium, huile d’amande douce, glycérine, eau…). Ce savon surgras respecte et maintient le pH et le degré d’hydratation de l’épiderme grâce à la présence des lipoaminoacides végétaux. Il est indiqué chez l’adulte et l’enfant pour la toilette des peaux sensibles ou ayant tendance à se dessécher.

Elaboration d’une opinion pharmaceutique

Cette ordonnance ne présente pas d’interaction médicamenteuse mais nécessite quelques recommandations.

Contexte

La dermatite atopique est une dermatose prurigineuse chronique qui évolue par poussées, et touche essentiellement l’enfant jusqu’à deux ans. Cependant, les récidives sont possibles tout au long de la vie. Elles surviennent volontiers lors de périodes de stress, par exemple au moment de la période pubertaire chez l’adolescente, comme dans le cas de Julie.

Plus de 70 % des patients atteints de dermatite atopique ont des antécédents familiaux d’asthme, d’eczéma ou de rhinite allergique.

L’existence d’un premier épisode de dermatite atopique à l’âge de un an, les antécédents familiaux de Julie (père souffrant de rhinite allergique et d’asthme) et les localisations caractéristiques des lésions confortent le diagnostic de dermatite atopique.

Analyse des posologies

Toutes les posologies de l’ordonnance sont correctes. Atarax est prescrit à posologie réduite (25 mg), uniquement le soir, pour faciliter le sommeil. En l’absence de précision, c’est le tube de 15 grammes de Diprosone qui doit être délivré.

Cependant, les règles de prescription d’un dermocorticoïde recommandées par l’Agence du médicament précisent qu’il faut :

– utiliser un dermocorticoïde au plus de classe III chez l’enfant (mais Julie, 13 ans, compte tenu de sa taille et de son poids, peut être considérée comme un adulte ; la prescription de Diprosone est donc justifiée) ;

– ne pas interrompre brutalement le traitement en cas de prescription prolongée au-delà de 8 jours en raison du risque d’effet rebond (reprise évolutive brutale de la dermatose).

La réduction progressive de la puissance du traitement recommandée par l’AMM de Diprosone (espacement des applications et/ou utilisation d’un corticoïde moins fort ou moins dosé) n’apparaît pas sur l’ordonnance.

Par acquit de conscience, le pharmacien appelle le prescripteur. Celui-ci explique qu’il n’est souvent pas nécessaire de diminuer progressivement le dermocorticoïde. La décroissance se fait naturellement, l’application de la crème se faisant uniquement sur les lésions, dont la surface diminue de jour en jour ; de plus, les lésions disparaissent souvent en moins de 8 jours.

Suivi du traitement

– Avant sa mise en place

Le diagnostic de dermatite atopique est clinique, fondé sur l’association prurit, topographie des lésions (souvent symétriques et dans les plis de flexion pour l’enfant de plus de 2 ans) et évolution chronique par poussées déclenchées par de multiples stimuli (stress, allergènes, chaleur…).

Il n’y a pas de marqueurs biologiques spécifiques, l’augmentation des IgE totales n’étant retrouvée que dans 80 % des cas.

– Après sa mise en place

Le suivi est surtout clinique : le dermatologue doit être à nouveau consulté au cours du traitement pour réadapter la prescription si la poussée d’eczéma ne régresse pas. Un eczéma de contact au corticoïde est alors à rechercher.

Lors d’une poussée de dermatite atopique, aucun suivi biologique n’est nécessaire.

Propositions de conseils à la patiente

– S’assurer de la bonne compréhension du traitement, notamment en cas de diminution progressive de la fréquence d’application du corticoïde.

La corticothérapie locale est le traitement de choix de l’inflammation, mais elle doit être effectuée avec précautions, en limitant la quantité totale de dermocorticoïde utilisée pour ne pas risquer l’apparition d’effets systémiques.

L’application doit être diminuée progressivement pour éviter les phénomènes rebonds ; on peut ainsi conseiller une application par jour jusqu’à amélioration nette des lésions, puis un soir sur deux pendant une semaine, puis trois fois par semaine pendant deux semaines.

Les effets indésirables locaux des dermocorticoïdes résultent en général d’une mauvaise utilisation (durée excessive, puissance trop importante).

– Rappeler que le dermocorticoïde doit être appliqué sur une peau préalablement nettoyée. Les lésions d’eczéma sont spontanément riches en staphylocoques dorés qui peuvent se développer à la faveur de l’effet immunosuppresseur du dermocorticoïde.

– Les bains doivent être courts (environ 5 min) et tièdes (33 °C-35 °C), éventuellement enrichis en huile de bain émolliente, en extraits d’avoine ou en amidon de blé (Aveeno colloïdal, Exomega huile de bain, Oilatum…). Préférer l’utilisation de produits nettoyants sans savon, riches en agents surgraissants.

– La peau doit être hydratée quotidiennement, surtout en période hivernale, pour lutter contre la sécheresse cutanée constitutionnelle.

– Utiliser des vêtements en coton pour le contact avec la peau, éviter les vêtements de laine, synthétiques, rugueux : ils sont responsables d’une accentuation du prurit. Le linge doit être lavé avec une quantité limitée de lessive et être toujours bien rincé, sans assouplissant.

– Eviter la transpiration et les frottements qui exacerbent le prurit.

LE CAS

Julie T., 13 ans, 50 kg, 1,57 m, consulte pour une éruption au niveau de la face antérieure des coudes et des creux poplités apparue il y a 48 heures, et occasionnant des démangeaisons en particulier nocturnes.

A l’examen, il s’agit de lésions érythématovésiculeuses suintantes et croûteuses à bords émiettés, très prurigineuses évoquant un eczéma. Il existe également une xérose cutanée.

Julie n’a appliqué aucun produit au niveau des lésions. Dans ses antécédents, le dermatologue retient une dermatite atopique à l’âge de un an qui a régressé spontanément après l’âge de deux ans, et, chez son père, une rhinite allergique saisonnière et un asthme léger.

Le diagnostic d’une nouvelle poussée de dermatite atopique est posé.

Le dermatologue prescrit à Julie l’ordonnance suivante :

L’ordonnance

– Diprosone crème : 1 application par jour sur les lésions jusqu’à disparition.

– Atarax 25 mg : 1 comprimé le soir pendant 5 jours.

– Dexeryl crème : 1 à 2 applications par jour (1 tube grand modèle de 250 g).

– Pain Surgras physiologique La Roche-Posay : pour la toilette.

Plan de prise conseillé

– Diprosone : à appliquer le soir sur les lésions après la toilette avec le pain Surgras. Bien masser pour faire pénétrer totalement le produit : une fois par jour jusqu’à disparition des lésions, puis si le traitement a été long, 1 jour sur 2 pendant une semaine, puis un jour sur trois pendant 15 jours

Atarax 25 mg : à prendre au coucher avec un verre d’eau.

– Dexeryl crème : à appliquer en couche mince le matin juste après la douche, sur la peau encore humide, au niveau des lésions sèches. Faire une seconde application le soir si nécessaire.

La dermatite atopique est une affection chronique qui touche essentiellement l’enfant avant 2 ans mais qui peut persister ou récidiver à l’âge adulte.

Les dermocorticoïdes sont à la base du traitement des lésions eczémateuses, relayés par l’application de topiques hydratants.