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- 55 % des rétrocessions de l’AP-HP passent par l’officine
55 % des rétrocessions de l’AP-HP passent par l’officine
Un service centralisé de vente aux particuliers (ou rétrocession hospitalière) rétrocède les médicaments hospitaliers, premièrement à la place des hôpitaux publics qui n’ont pas les moyens de le faire, deuxièmement pour des structures privées, qui elles n’en ont pas le droit. La rétrocession hospitalière n’est qu’une dérogation à la réglementation. Le circuit qui inclut les officines est, lui, officieux. Faire venir une ordonnance via un circuit s’appelle du colportage, c’est interdit… mais toléré dans ce cas précis pour le bien du patient.
Dans les faits, les petites structures hospitalières ne font souvent pas l’effort de rétrocéder. Soit le faible volume en jeu ne justifie pas économiquement l’ouverture et l’entretien d’un service de rétrocession, soit le trop gros volume en jeu rendrait au contraire un tel service beaucoup trop cher. « Légalement, les structures publiques sont tenues de le faire pour leurs patients*, explique Sylvia Puglièse, responsable du service de vente aux particuliers du CHU de Nice. Normalement, quand on rétrocède, on a des crédits. Le problème c’est la mise en place de la structure. Nous, on a mis dix ans pour avoir un box de confidentialité, des locaux et une informatique conformes… et surtout les moyens en personnel car il faut savoir que nous ne sommes pas rétribués sur 90 % des produits rétrocédés. »
A Marseille, le service centralisé de rétrocession gère environ 220 ordonnances par jour mais, sauf exception, les patients ambulatoires viennent retirer leur traitement à l’hôpital, comme à Lyon. Le service de dispensation aux patients externes, pour la région parisienne, est, lui, mis à contribution à raison de 200 à 300 ordonnances par jour : soit les patients viennent retirer leurs médicaments au comptoir, rue des Fossés-Saint-Marcel à (45 % des cas), soit chez leur officinal (55 % des délivrances). A contrario, certains hôpitaux ont créé un tel service mais les patients n’y ont pas recours, souvent par manque d’information, en particulier de la part des praticiens hospitaliers qui, de l’aveu même de l’AP-HP, « lâchent souvent leurs patients dans la nature sans les prévenir du caractère d’exception de leur traitement et de leur indisponibilité en ville », avec tout ce que cela implique. C’est le cas à Longjumeau ou Pontoise, qui ont créé leur propre service de rétrocession – mais il est relativement peu utilisé par les patients, semble-t-il au grand étonnement des pharmaciens responsables. Enfin, les grosses structures hospitalières ont presque toujours leur propre service de rétrocession comme à Cochin, Lariboisière, Bicêtre ou Georges-Pompidou en région parisienne ou au CHU de Nice.
* Une loi du 31.12.70 autorisait les pharmacies hospitalières publiques à délivrer des médicaments en ambulatoire uniquement en cas d’urgence ou de nécessité. Mais un texte du 8.12.92, qui pour la première fois donne un fondement légal à la rétrocession hospitalière, établit que ce ne sont plus l’urgence ni la nécessité qui autorisent cette dérogation au Code de la santé publique, mais juste les caractéristiques des médicaments.
Produits délicats et indélicats…
Si la rétrocession oublie le plus souvent l’officine en province, le système qui fonctionne à Paris pose quelques questions concernant la mise en circulation dans le circuit grossistes et officinal de quelques produits délicats, au premier rang desquels ceux nécessitant le respect de la chaîne du froid, les produits chers et ceux susceptibles d’être détournés. Là encore, on laisse la décision de rétrocéder ou non au libre arbitre du service hospitalier. Pas de règle écrite donc, pas non plus d’instruction stricte pour telle spécialité ou telle catégorie de produit. Néanmoins, il apparaît que les dispensations nécessitant des trajets supérieurs à 24 heures sont étudiées de très près dans le cas des médicaments congelés ou réfrigérés, qui ne souffrent aucune tolérance. Quant aux délivrances de spécialités très particulières comme l’EPO, le thalidomide, les stupéfiants ou les produits dérivés du sang, elles sont également étudiées à la loupe. Enfin est posé le risque pris en cas de perte ou de casse, par exemple dans le cas d’ampoules, de produits chers. Ainsi l’Adagen, indiqué dans des cas d’immunodépression sévère, coûte-t-il plus de 57 500 Euro(s) par mois quand le traitement de la maladie de Gaucher atteint les 33 700 Euro(s) mensuels. On comprend ici certaines réticences… A Marseille, la décision définitive d’arrêter de passer par l’officine a été prise après la perte d’un produit cher qui était en plus susceptible d’être détourné.
Vendée : Un partenariat réussi
Une fois n’est pas coutume, hôpital et officine se sont rapprochés pour améliorer la distribution des médicaments hospitaliers. Cela se passe en Vendée, et l’initiative a été remarquée, notamment par la pharmacie centrale de Paris…
Voila dix mois, Sylvie Bergeau, Martine Fras et Isabelle Brieau, animatrices de la commission syndicale chargée du MAD, ont mis au point une « valise de garde » avec leurs confrères du centre hospitalier départemental de La Roche-sur-Yon. Ces derniers ont recensé, pendant un an, les médicaments et les dispositifs médicaux que les patients avaient du mal à se procurer à leur sortie de l’hôpital. A partir de cette liste les grossistes ont confectionné une caisse de médicaments par zone de garde. Il y en a vingt sur le département. Et lors des gardes les pharmaciens paient uniquement ce qu’ils ont pris : des sétrons comme le Zophren ou le Kytril, en accompagnement des chimiothérapies, beaucoup d’injectables (Clamoxyl, Pro-Dafalgan, Kenacort, Solu-Médrol, Tanganil, Spasfon, Atropine…), des héparines de bas poids moléculaire à dosage curatif (Lovenox, Fraxiparine, Innohep…), du Monuril, du Logiflox, des dispositifs médicaux comme un perfuseur, un cathéter 22G, une épicrânienne 22G, une sonde vésicale pour homme et pour femme, et tous les dosages du Subutex, soit une trentaine de produits. Cette valise est en constante évolution. La communication avec les différents services du centre hospitalier départemental sort également améliorée de ce partenariat. Ainsi, avant la sortie du patient de l’hôpital, le service faxe son ordonnance à sa pharmacie habituelle afin d’éviter toute rupture de traitement. Inversement, quand un patient veut renouveler une ordonnance contenant des médicaments de la réserve hospitalière et pour lui éviter de retourner au centre hospitalier départemental, il lui sera possible de les obtenir directement dans la pharmacie de sa commune, suivant une procédure codifiée. Ce service est très apprécié des habitants de Noirmoutier ou du sud de la Vendée, qui sont à plus d’une heure du centre hospitalier départemental. Cent trente officines vendéennes ont signé une convention avec le centre hospitalier départemental pour bénéficier de ce service gratuit. Selon Sylvie Bergeau, « ces différentes actions avec nos confrères hospitaliers ont pour but à moyen terme de constituer des réseaux de santé ». –
Aly Mé Mougamadou
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