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L’ordonnance d’une patiente âgée souffrant d’une escarre sacrée
La prescription présente les objectifs suivants :
– traiter et protéger l’escarre en utilisant Biatain Escarre, un pansement aidant la résorption et améliorant le confort du patient ;
– prévenir et traiter toute perte protidique grâce au Renutryl, afin de favoriser la cicatrisation de l’escarre.
Validation du choix des produits
– Biatain Escarre Standard 15 x 15 est un pansement alvéolaire spécifique de l’escarre. Son pourtour adhésif est en hydrocolloïde et sa zone centrale non adhésive est à base de mousse en polyuréthanne. Biatain appartient à la classe des pansements hydrocellulaires qui possèdent les mêmes propriétés (à l’exception de l’action de détersion) que les pansements hydrocolloïdes : pouvoir absorbant, cicatrisation en milieu humide, protection des bourgeons cicatriciels. En milieu humide, Biatain ne se gélifie pas ce qui facilite le nettoyage de la plaie et évite le dégagement d’odeurs. Pour une meilleure efficacité, le pansement doit être changé le moins souvent possible.
Le rythme de renouvellement oscille entre 2 et 7 jours. Il est fonction de la quantité d’exsudats qui varie au cours du processus de cicatrisation.
– Renutryl est un complément nutritionnel hyperprotidique et hypercalorique apportant des sels minéraux et des vitamines. Les protéines représentent 25 % de l’AET et 1 ml apporte 1,33 kcal. La posologie usuelle varie de 1 à 6 boîtes par jour. Elle dépend de l’âge et de l’état du malade.
Elaboration d’une opinion pharmaceutique
Il n’y a pas d’interaction entre les deux produits de l’ordonnance.
– Contexte
Les escarres se forment aux points de pression et d’irritation, la plupart du temps chez des malades débilités ou alités depuis longtemps. L’hôpital ayant délivré une autorisation de sortie, on peut penser que le problème est en voie de guérison et que la plaie est en phase de bourgeonnement. Dans le processus de cicatrisation des plaies chroniques, cette étape précède l’épidermisation. A ce stade, la plaie est peu exsudative, et elle doit petit à petit se refermer jusqu’à parfaite épidermisation. Ce temps de cicatrisation est variable d’un individu à l’autre.
– Choix du pansement
La taille de la plaie de madame L. est limitée sinon le médecin n’aurait pas prescrit cette taille carrée standard. Il lui aurait préféré le modèle Biatain Sacrum, de forme anatomique et de dimensions plus importantes.
Ne pas confondre le pansement prescrit avec la gamme Biatain Ulcère. Dans les références Escarre, la partie centrale du pansement présente une épaisseur augmentée pour soulager les zones d’appui. La largeur de l’adhésif en périphérie assure une bonne tenue.
– Analyse des posologies
-> Pour Biatain, la posologie mentionnée « jusqu’à complète cicatrisation » n’est pas très précise. Les hydrocellulaires peuvent effectivement être utilisés de la fin de la phase de détersion jusqu’à la guérison totale.
Cependant, au fur et à mesure de la cicatrisation, la plaie de madame L. va diminuer de taille. On peut l’encourager à reconsulter le médecin afin qu’il prescrive la référence Biatain Escarre Petit 12,5 x 12,5 dès que la plaie sera moins grande que la partie centrale active du pansement qui mesure 6 x 6 cm.
Lorsque la plaie est en voie d’épidermisation, elle devient peu ou pas exsudative. Le pouvoir absorbant de l’hydrocellulaire n’est plus utile. Dans ces conditions, un simple hydrocolloïde mince de taille 10 cm x 10 cm ou 5 cm x 10 cm suffit comme protecteur cutané (Algoplaque Film, Comfeel Plus transparent, Duoderm Extramince…).
-> Pour Renutryl, lors de l’hospitalisation de madame L., un bilan nutritionnel a sûrement été réalisé. Les escarres provoquent en effet un hypercatabolisme protidique à prendre en charge. Pour le retour à domicile, le médecin a légitimement jugé nécessaire de prescrire une complémentation orale protéinoénergétique car celle-ci favorise la cicatrisation. Renutryl est ici prescrit en complément de l’alimentation. La posologie de une boîte par jour est donc suffisante.
– Gestion des effets indésirables
La masse adhésive destinée à assurer un bon maintien peut provoquer chez certaines personnes des réactions allergiques et/ou des lésions lors du retrait du pansement, au niveau de la peau périlésionnelle quand celle-ci est fragilisée. Dans ce cas, des pansements entièrement non adhésifs doivent être prescrits : Allevyn non adhésif, CombiDerm non adhésif… Il est impératif de les maintenir en place : une simple bande de gaze peut suffire.
Propositions de conseils à la patiente
– Avec Biatain Escarre
-> La pose d’un pansement d’escarre en phase de cicatrisation ne réclame pas de compétences particulières si les consignes sont comprises. Il est souhaitable de remettre à la fille de Mme L. un document qui reprenne les différents points.
– Se laver les mains avant le soin et les sécher avec une serviette ou des mouchoirs en papier.
– Retrait du pansement
Ne le changer qu’à saturation, c’est-à-dire lorsqu’il est gonflé. Soulever un coin et retirer en douceur le pansement en tirant horizontalement.
– Nettoyage de la plaie
Utiliser des monodoses de 10 ml de sérum physiologique, de préférence à l’eau du robinet. N’appliquer sur la plaie ni antiseptique ni antibiotique locaux.
– Mise en place du nouveau pansement
Pour un meilleur maintien, sécher le pourtour de la plaie avec une compresse avant d’appliquer le pansement. Bien appuyer autour pour le fixer. Veiller à ne pas toucher le centre de la plaie car les bourgeons charnus sont très fragiles et recouverts de facteurs de croissance qui accélèrent la cicatrisation.
-> Après la mise en place, le film de polyuréthanne qui recouvre le pansement Biatain Escarre autorise les douches et les bains.
Si le pansement a tendance à rouler et à se décoller sur les bords malgré son adhésivité, recouvrir ces bords de sparadrap hypoallergénique, type Mefix ou Hypafix. Si la plaie n’évolue plus, si elle devient sèche ou malodorante ou si elle change d’aspect, madame L. doit consulter rapidement son médecin traitant.
Plan de prise conseillé->Biatain Escarre Standard 15 x 15 : laisser en place le pansement aussi longtemps que nécessaire et ne le renouveler qu’à saturation, c’est-à-dire quand les exsudats atteignent les bords de la mousse centrale de polyuréthanne (2 à 7 jours au maximum).Appliquer le pansement sur une peau propre et sèche sans toucher le centre de la plaie. Bien appuyer sur les pourtours.-> Renutryl : verser dans un verre et boire à petites gorgées, à distance ou en fin de repas pour ne pas couper l’appétit, en plusieurs fois.– Avec Renutryl
Lors du retour à domicile d’une personne âgée, un risque de dénutrition existe toujours. Il est difficile de faire ses courses et de cuisiner quand on en a perdu l’habitude depuis plus de deux mois. Madame L. devra poursuivre la prise du Renutryl quand elle sera seule chez elle, et profiter de son séjour chez sa fille pour retrouver son appétit avec des repas équilibrés, variés et conviviaux. Renutryl ne doit pas être bu en une seule prise sinon il provoque des diarrhées. Il peut être pris tiède ou froid mais pas glacé. Son goût vanillé peut être modifié par addition de café, chocolat, sirop de fruits. Renutryl peut également être utilisé à la place du lait dans des préparations pour entremet ou flan.
Une fois ouverte, la boîte se conserve 24 heures au réfrigérateur.
– Boire suffisamment
Les personnes âgées ont tendance à oublier de boire car elles perdent la sensation de soif. Or une bonne hydratation contribue à la guérison de l’escarre. La fille de madame L. doit l’obliger à boire, même sans soif, n’importe quelle boisson (eau, tisane, bouillon de légumes…).
– Attention à la chute !
Aux traumatismes physiques s’ajoutent des traces psychologiques laissées par toute chute. La peur de tomber à nouveau peut devenir omniprésente, surtout lorsqu’il faut attendre une aide extérieure pour se relever.
Cette angoisse doit être prise en compte, car elle peut entraîner un repli sur soi et une perte d’autonomie de la personne âgée.
Des conseils utiles sur l’aménagement du domicile, des brochures expliquant comment se relever en cas de chute peuvent être donnés.
– Supprimer les zones d’appui
Lorsque madame L. est en position assise ou couchée, elle doit régulièrement changer ou être changée de position (environ toutes les deux heures).
Penser également aux coussins et matelas antiescarres.
Par Marie-Claude Guelfi, pharmacien chef, hôpital Broca, Paris, et Marie-Odile Decroix, maître de conférences, faculté de pharmacie Paris-V
Qu’est-ce qu’une escarre ?
L’escarre correspond à la destruction d’une zone tissulaire superficielle et limitée. Cette destruction est induite par une diminution de l’irrigation sanguine conduisant à la survenue d’une nécrose sèche non infectée. L’escarre apparaît habituellement aux points d’appui chez des sujets alités pendant une longue période et qui ne bénéficient pas d’une mobilité suffisante pour enrayer les perturbations de la microcirculation cutanée.
Siégeant par ordre de préférence au niveau du sacrum, des coudes ou de l’occiput, l’escarre peut s’étendre en superficie et en profondeur. Elle peut toucher les structures musculaires ou osseuses sous-jacentes. La surinfection, alors fréquemment présente, contribue à l’altération de l’état général qui peut évoluer vers la dénutrition et les complications septiques.
Epidémiologie
En France, 250 000 à 300 000 cas sont dénombrés. La moitié souffrent d’affections neurologiques. La prévalence peut d’ailleurs atteindre 30 % chez les patients atteints d’une lésion neurologique (blessés médullaires ou traumatisés crâniens). La prévalence est de 10 % pour les établissements de soins et légèrement supérieure pour les structures d’accueil des personnes âgées dépendantes.
Les services de moyen et long séjour accueillent deux fois plus de patients porteurs d’escarres que les unités de chirurgie ou de médecine. Une escarre sur deux correspond à un stade I ou II (voir page 7). Dans huit cas sur dix, elle est localisée au niveau du sacrum ou du talon.
Le coût indirect de chaque escarre est évalué à environ 15 245 euros (100 000 F).
Physiopathologie
Les cellules de l’organisme consomment de l’oxygène et des nutriments apportés par le sang grâce à la microcirculation capillaire. Lors du ralentissement ou de l’altération de l’irrigation cutanée, l’hypoxie cellulaire conduit à la formation d’oedèmes interstitiels et à la destruction des tissus par ischémie. La nécrose constituée touche la peau, les muscles et les aponévroses qui se retrouvent emprisonnés entre deux plans durs : le support (fauteuil, lit ou table d’examen) et la saillie osseuse du patient.
– Les forces de pressions verticales
Elles sont exercées par le support sur lequel repose le patient. Elles s’avèrent maximales en regard des saillies osseuses et se manifestent d’autant plus fortement que le sujet est maigre.
Le cône de pression qui en résulte explique pourquoi les dégâts constitués en profondeur se révèlent en réalité beaucoup plus importants que la lésion cutanée visible ne le laisse supposer.
– Les forces de cisaillement obliques
Elles sont trois fois plus ischémiantes que les forces verticales. Le glissement de la peau et des tissus par rapport au plan osseux sous-jacent étire les petits vaisseaux.
Les positions « assis au lit » ou « semi-assis au fauteuil » favorisent ces forces de cisaillement ainsi que l’humidité et « l’effet hamac » du matelas ou des vêtements trop serrés chez des blessés médullaires. Les effets délétères de l’humidité excessive responsable de macération peuvent être renforcés par la présence d’urines ou de selles qui provoquent des lésions cutanées caustiques réduisant la résistance des tissus sous-jacents.
– Les frottements et les étirements
Provoqués par les mouvements, ils conduisent à une abrasion de la peau au niveau des coudes, du sacrum, des talons, participant ainsi à la survenue des phlyctènes ou des fissures des plis interfessiers.
Signes cliniques
L’apparition d’un érythème de coloration rose-rouge précédant la douleur témoigne de la constitution de l’escarre qui rapidement devient noire, se durcit et se cartonne. La nécrose laisse ensuite la place à un ulcère qui risque de s’étendre et de découvrir les tissus sous-jacents.
Selon la profondeur des lésions tissulaires, il existe quatre stades d’escarres (voir page 7). Ils définissent le degré de gravité. Certains auteurs établissent un stade V, constitué par la présence d’escarres multiples.
Etiologies et facteurs de risque
Constamment présente en cas d’alitement prolongé, l’escarre peut également survenir chez un patient se déplaçant normalement mais subissant une compression localisée (plâtre).
Elle touche d’abord les populations vieillissantes en raison d’une mobilité, d’une nutrition et d’une hydratation cutanée plus réduites.
Chez un sujet jeune ou âgé, des facteurs de prédisposition (terrain…) peuvent renforcer la probabilité de développer plus facilement et plus rapidement des escarres.
-> Les pathologies vasculaires, endocriniennes ou dermatologiques peuvent générer des lésions cutanées récurrentes délicates à maîtriser.
-> Les trois grandes catégories de sujets à risque sont les traumatisés médullaires, qui associent des pertes du tonus musculaire, de la perception sensorielle et de la mobilité, les patients atteints d’une pathologie lourde comme un cancer ou le sida en phase terminale et les personnes âgées cumulant plusieurs pathologies chroniques et une maladie aiguë (fracture du col du fémur ou accident vasculaire cérébral).
Evolution de la plaie
En dehors de tout traitement, la plaie suit une évolution qui passe par les différents stades. Après l’érythème, la désépidermisation s’installe. La nécrose tissulaire se manifeste ensuite sous la forme d’une plaque noire ou d’un délitement des tissus lésés. Elle se poursuit par une importante perte de substance touchant les fibres musculaires et les tissus graisseux. Les complications infectieuses ne tardent pas à se greffer sur ce contexte propice. Elles se traduisent par une rougeur, une sensibilité ou un gonflement des bords de la plaie. Elles peuvent remettre en cause le pronostic vital du patient.
Par le Dr Christine Pradère, gériatre, et Christine Collard, pharmacienne, CHU de Poitiers
Quel est le traitement d’une escarre constituée ?
Le choix des pansements proposés dans le traitement des escarres est vaste.
La compréhension des propriétés de chaque produit, qu’il s’agisse d’une détersion de nécrose, d’une absorption d’exsudat abondant ou de la protection contre une contamination microbiologique, optimise leur utilisation.
La stratégie thérapeutique
Selon l’état d’avancement de la cicatrisation, la prise en charge s’adapte. Elle peut être de longue durée. Chaque pansement est laissé en place de un à plusieurs jours. Il est changé à saturation.
– La détersion
La détersion de la nécrose correspond à une phase de nettoyage incontournable sans laquelle la plaie ne peut évoluer favorablement. Assurée physiologiquement par des enzymes, des polynucléaires neutrophiles, des macrophages qui phagocytent les bactéries présentes, elle est potentialisée par un environnement humide. La flore bactérienne normale possède la capacité intrinsèque d’éliminer les débris nécrotiques ou fibrineux. La détersion en milieu humide permet de solliciter ces germes bénéfiques à la réparation tissulaire et évite l’emploi d’un antiseptique favorisant la sélection d’une population bactériologique pathogène.
-> Si la plaie est sèche, les propriétés hydratantes de l’hydrogel, composé à 80 % d’eau, ramollissent la plaque de nécrose (voir tableau page 9).
-> Si la plaie est suintante, la capacité d’absorption du pansement due à la présence d’alginate ou de carboxyméthylcellulose concentre les débris cellulaires, ce qui accélère le processus naturel de détersion.
– Le bourgeonnement
Le bourgeonnement se caractérise par l’apparition de nouveaux capillaires qui apportent les nutriments nécessaires à la multiplication cellulaire. Cette étape est favorisée par l’absorption des sérosités en excès souvent responsables de macération et par la protection contre les agressions extérieures susceptibles d’arracher les néotissus.
Historiquement traitée par des pansements gras couvrants imprégnés ou non d’antiseptiques, certes protecteurs mais traumatiques au retrait, la plaie bourgeonnante bénéficie désormais de produits absorbant les exsudats.
Le maintien d’un niveau suffisant d’humidité facilite la mobilisation des macrophages, des fibroblastes et des cellules épithéliales (voir tableau page 11).
– L’épithélialisation
Lors de l’épithélialisation, les cellules épidermiques de la berge de la plaie prolifèrent avant de migrer vers la surface cutanée.
Généralement peu exsudative à ce stade, la plaie doit être protégée des agressions extérieures.
-> Le pansement gras présente un intérêt lorsqu’une surveillance quotidienne s’impose. Peu confortable pour le patient, doté d’une faible capacité d’absorption, il draine les exsudats grâce à son maillage. Cependant, ce dernier emprisonne le jeune tissu de granulation, l’arrache en partie lors du renouvellement du soin et retarde ainsi la cicatrisation.
-> Les interfaces maillées non adhérentes, grasses ou non, protègent l’épidermisation sans être traumatiques.
-> Les films minces en polyuréthanne sont imperméables aux bactéries et aux liquides et perméables aux gaz. Leur conformabilité et leur transparence permettent une surveillance (voir tableau page 10).
Les principes actifs
La classification repose sur les indications préférentielles des dispositifs et non sur leurs préconisations parfois très polyvalentes.
La détersion
Le maintien en milieu humide, optimisé par les hydrogels, est essentiel.
– Essentiellement constitués d’eau, les hydrogels peuvent également renfermer de la carboxyméthylcellulose (CMC) sodique, des alginates ou de l’acide hyaluronique qui confèrent au pansement un pouvoir absorbant assurant un meilleur contrôle des exsudats.
– La présence de propylène-glycol interfère sur la viscosité de la formulation gel, donc sur sa tenue au moment de l’application puis tout au long de son action curative.
– Le gel, qui libère plus facilement l’eau que la forme compresse, nécessite en revanche un pansement secondaire de couverture.
– En sus du maintien en milieu humide, la détersion d’une nécrose fibrineuse blanche et sèche se termine de façon mécanique à l’aide d’une pince et d’une curette.
Le bourgeonnement
A cette étape, l’absorption est le maître mot.
– La CMC sodique
Associée ou non à une masse adhésive généralement protégée par un film en polyuréthanne, elle constitue le pansement hydrocolloïde. Capable d’absorption faible à modérée, elle se délite au contact des exsudats après avoir formé un gel malodorant malgré l’absence d’infection.
– La structure peut être linéaire ou réticulée tridimensionnelle. Cette dernière crée des liaisons intermoléculaires et permet une fixation accrue des exsudats. Cela entraîne un retardement du délitement et une diminution de la fréquence de renouvellement du soin.
– L’association à la pectine renforce le pouvoir absorbant alors que l’intégration de gélatine prolonge la durée de vie du pansement.
– Cumuler au sein de la même trame synthétique de polyester de la vaseline et de la CMC sodique permet d’associer la capacité de drainage de la phase lipidique à la propriété absorbante de l’hydrocolloïde.
– L’organisation de la CMC sodique en fibres non tissées plutôt qu’en particules insérées dans une matrice constitue une compresse très souple et conformable qui retient les exsudats à l’intérieur de fibres creuses par absorption et les piège également au sein du réseau par adsorption. L’augmentation du pouvoir absorbant permet de préconiser cette formulation dans les plaies très exsudatives.
– Pour faire tenir les pansements destinés aux zones mobiles ou exposées aux frottements, comme le sacrum, le coude ou le talon, des structures profilées ou renforcées par des ailettes constituent des alternatives.
– L’association de gomme guar, de vaseline ou de paraffine à la CMC sodique entre dans la composition de pâtes destinées aux plaies cavitaires (Duoderm pâte, Comfeel pâte…).
– Une plaie infectée constitue une contre-indication à l’emploi des hydrocolloïdes. Dans ce cas, une antibiothérapie systémique peut compléter les soins locaux qui associent un sondage de l’escarre à la recherche d’une collection purulente ou d’un contact osseux à une résection des tissus nécrotiques et à l’application d’une compresse au charbon.
– Les alginates sodiques ou calciques
Les alginates possèdent un pouvoir d’absorption supérieur à celui de la CMC.
– La teneur respective des deux acides entrant dans la composition du pansement conditionne ses propriétés. L’acide mannuronique influe sur la souplesse et la rapidité de formation du gel, alors que l’acide glucuronique assure un délitement plus lent.
– Le sel de calcium de l’alginate favorise l’hémostase grâce à l’échange de l’ion calcium avec les ions sodium présents dans la plaie.
– L’association au sein du même pansement de l’alginate et de la carboxyméthylcellulose permet l’obtention d’un gel plus cohésif.
– Une vigilance accrue doit accompagner l’emploi des mèches dans les cavités. Au moment du retrait, une partie du pansement peut rester au fond de la plaie, y stagner et provoquer des réactions inflammatoires et infectieuses.
– Le charbon
Le charbon activé agit sur les plaies malodorantes (infectées notamment par le bacille pyocyanique).
– Les hydrocellulaires
Constitués d’une ou de plusieurs couches plus ou moins épaisses en polyuréthanne, les hydrocellulaires ne se délitent pas après saturation, ne laissent pas de résidus dans la plaie et n’agissent pas sur l’hémostase.
La mousse centrale se gorge des exsudats alors que le film mince de couverture assure une barrière antibactérienne. Une fine couche interne constitue une interface entre la plaie et le pansement pour un retrait aisé et atraumatique.
Ces pansements récents associent efficacité et confort. Ils permettent un maintien de l’humidité, un contrôle de l’exsudat sans macération ni délitement, une protection bactériologique cutanée, un respect physiologique des berges de la plaie et un renouvellement facilité.
– L’acide hyaluronique
D’utilisation plus récente, ce glycosaminoglycane physiologiquement synthétisé par les fibroblastes, les plaquettes et les kératinocytes participe à la formation de la matrice cellulaire.
L’épithélialisation
– Les tulles
Les tulles ne présentent d’intérêt que lorsqu’il convient de surveiller très fréquemment l’évolution de la plaie. Les formulations imprégnées d’antiseptiques sont à proscrire pour les plaies chroniques. La présence d’un éventuel produit allergisant (lanoline…) déclenche parfois de vives réactions imposant l’arrêt immédiat.
– Les films en polyuréthanne
Transparents, ils autorisent un contrôle visuel, ils assurent une protection cutanée mais ils n’absorbent aucun exsudat.
– Les hydrocolloïdes minces ou transparents
Ils absorbent moins les exsudats que les hydrocolloïdes destinés au bourgeonnement car ils sont plus minces. Ils se différencient par leur transparence et par leur conformabilité qui leur permettent d’épouser des surfaces irrégulières sans se décoller lors des frottements.
– Les pansements siliconés
Une trame de polyamide enduite de silicone réalise une protection cutanée, inerte, souple, n’adhérant pas à la plaie mais collant au pourtour de peau saine qui respecte le tissu néoformé.
Le traitement chirurgical
Il est réservé aux situations d’échec de la prise en charge classique. Il consiste en une exérèse des nécroses et un nettoyage de la plaie. Il peut nécessiter le recours à une greffe.
Les cultures de peau ou l’exploitation des facteurs de croissance font partie des perspectives thérapeutiques futures.
Par Christine Collard
Quels conseils donner aux patients ?
Hygiène de la plaie
Chaque renouvellement de soin doit s’accompagner d’une toilette du pourtour de la plaie avec de l’eau et du savon suivie d’un rinçage minutieux et d’un séchage par tamponnement avec une compresse. La plaie elle-même subit un lavage avec du sérum physiologique.
En phase de bourgeonnement, le tissu de granulation est irrigué avec du sérum physiologique, à l’aide d’une seringue.
Pansement primaire et pansement secondaire
A l’exception de la phase de cicatrisation, le pansement « curatif » de l’escarre (hydrocolloïde, alginate ou hydrocellulaire) doit être recouvert par un pansement dit secondaire, absorbant ou adhésif, sur lequel la date de réalisation du soin est indiquée. Il convient d’éviter si possible les bandages.
Ce pansement secondaire de couverture peut être changé tous les jours si besoin, notamment en position sacrée. La saturation du pansement primaire se manifeste par une opalescence pour l’hydrocolloïde, la transformation de la compresse solide en un gel visqueux pour l’hydrofibre (CMC fibrillaire dans Aquacel), le gonflement pour l’hydrocellulaire.
De l’inutilité des antiseptiques
Les antiseptiques sont proscrits en utilisation systématique puisqu’ils sont inhibés par les matières organiques. Ils induisent une cytotoxicité réelle, sélectionnent des germes résistants et provoquent des allergies.
Par ailleurs, la flore bactérienne qui colonise la plaie participe utilement à une évolution favorable de la plaie vers la cicatrisation.
Les agents oxydants (eau oxygénée) peuvent détruire le polyuréthanne.
Percer ou ne pas percer les phlyctènes ?
Il n’est pas conseillé de percer les phlyctènes de petite taille, non douloureuses, qui constituent intrinsèquement toutes les conditions du milieu humide hermétique favorable à la cicatrisation.
Les bulles volumineuses et algiques seront incisées. Devant une phlyctène hématique quelle que soit sa taille, les praticiens préconisent de découper la surface décollée et de l’enlever.
Mieux vaut prévenir…
La prévention s’adapte à tout patient dont la peau est intacte mais estimée à risque. Elle passe par :
– une surveillance quotidienne des zones à risque (observation, palpation et évaluation sur des critères objectifs) ;
– des changements de position nuit et jour (au moins toutes les 2 à 3 heures) pour soulager les zones menacées ;
– des aides techniques : matelas à eau, coussins à plots (pour en savoir plus sur le matériel, se reporter au « Cahier pratique » n° 75 « Le maintien à domicile », cahier II du n° 2445 du 18 mai 2002) ;
– un maintien de l’hygiène de la peau. Il existe des crèmes protectrices ou des sprays (Epitège, Conveen Protect, Cavilon NSBF…) destinés à protéger l’épiderme de la macération ;
– un équilibre nutritionnel.
Lutter contre les idées fausses
– Proscrire les glaçons qui par vasoconstriction accélèrent l’hypoxie tissulaire.
– Le massage (qui ne fait pas l’objet d’un accord consensuel) ne doit pas se transformer en pétrissage qui provoque des microtraumatismes suivis d’oedèmes et d’hématomes. Il existe des huiles de massage spéciales à base d’huiles d’amande douce, de maïs, de pépin de raisin (Escarine, gamme Rivadis…).
S’il est déjà trop tard…
– Adapter l’apport nutritionnel avec une base énergétique de 35 à 45 kcal/kg/j dont 20 % de protéines et 60 % de glucides, associée à une hydratation renforcée.
– Prévenir la contamination et traiter rapidement et efficacement une éventuelle surinfection.
– Prendre soin de l’hygiène corporelle d’autant plus que le patient est incontinent.
– Retirer les tissus dévitalisés.
– Contrôler l’exsudat de la plaie.
Par Christine Collard et le Dr Christine Pradère
Trois questions au… D r Christine Pradère
Gériatre, service de réadaptation et gériatrie, CHU de Poitiers (86)
Qu’attend un prescripteur du pharmacien ?
Le pharmacien doit bien connaître la composition des produits, les indications et les modalités d’utilisation. A lui de se tenir régulièrement au courant, les techniques évoluant rapidement. Ce n’est pas si compliqué que cela en a parfois l’air. Le traitement des plaies chroniques semble complexe. Or les nombreux produits disponibles peuvent être regroupés en seulement quelques grandes catégories.
Quels sont les maîtres mots en matière de prévention et de traitement des escarres ?
Concernant la prévention, l’évaluation du risque reste essentielle. Il convient de prendre garde à ne pas protéger un site tout en étant délétère sur un autre. A propos du traitement, il faut savoir « donner du temps au temps ». La cicatrisation d’une escarre s’étale sur plusieurs mois. Comme différents stades se trouvent fréquemment intriqués sur une même plaie, le respect de protocoles rigoureux basés sur des critères objectifs s’avère fondamental. Il faut savoir établir une distinction entre colonisation et infection d’une plaie chronique ; une escarre d’aspect sale n’est pas obligatoirement infectée et peut évoluer normalement.
Comment traiter les souillures sur les pansements du sacrum et l’effet délétère des adhésifs sur ces peaux très fragilisées ?
La souillure du pansement en position sacrée exige souvent un renouvellement trop rapide, ce qui augmente le coût du traitement et s’avère traumatique pour le patient. Aussi l’incontinence urinaire peut-elle parfois justifier un sondage. Quant aux troubles du transit intestinal, ils doivent être gérés par une réadaptation alimentaire qui limite leur incidence. Certains pansements curatifs de l’escarre peuvent être lavés ou à défaut doivent être protégés par un pansement secondaire qui, seul, sera changé. L’adhésif des hydrocolloïdes abîme la peau lorsque le pansement est retiré trop rapidement ou avant qu’il ne soit saturé par les exsudats. Lors du renouvellement, il convient de le mouiller petit à petit avec du sérum physiologique et de le tirer en douceur parallèlement à la surface de la peau.
Par Christine Collard
Pour en savoir plus
Associations
PERSE
(Prévention, éducation,recherche, soins, escarre)
Centre de l’Arche, Le Mans (72).
Renseignements médicaux : 02 43 51 72 72.
Secrétariat administratif et abonnement (Techni Média Services) : 02 40 26 58 07
Cette association animée par des médecins et des infirmiers a pour vocation première d’aider les patients qui ont souffert, souffrent ou vont souffrir d’escarre, en particulier dans le domaine de la prévention. Elle a participé à la conférence de consensus. Tous les deux mois, l’association édite une revue, L’Escarre.
INTERNET
ANAES
« Prévention et traitement des escarres de l’adulte et du sujet âgé. Les recommandations de la conférence de consensus »
La conférence de consensus organisée en novembre 2001 par la Société française francophone Plaies et Cicatrisation, l’association PERSE et l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, en collaboration avec l’ANAES, a pour but d’uniformiser la prise en charge des escarres.
Elle est téléchargeable gratuitement sur le site de l’ANAES.
Fondée sur l’état actuel des connaissances et sur l’expérience professionnelle, elle a eu pour but d’aider les acteurs de santé mais aussi les patients à améliorer la prévention, le traitement et le pronostic des escarres de l’adulte et du sujet âgé.
LE CAS
Madame L., veuve de 82 ans, 80 kg pour 1,65 m, s’est cassée le col du fémur il y a deux mois en glissant dans sa salle de bains. Les pompiers, alertés par une voisine, l’ont découverte 24 heures plus tard.
Madame L. a d’abord été prise en charge dans un service d’orthopédie où elle a subi une intervention chirurgicale. Au cours de l’intervention, madame L. a fait un accident ischémique vasculaire qui a entraîné un alitement prolongé. Si la patiente a totalement récupéré au niveau cérébral, l’immobilisation involontaire a malheureusement provoqué une escarre sacrée. Aujourd’hui, elle sort du service de soins de suite où elle a été hospitalisée pour rééducation. L’escarre n’est toujours pas complètement guérie. Avant son retour à domicile, madame L. va séjourner chez sa fille qui se présente à l’officine avec l’ordonnance de sortie. Elle rencontre des difficultés pour obtenir le passage à domicile d’une infirmière. Désemparée, elle demande au pharmacien de lui expliquer comment effectuer le pansement de sa mère.
L’ordonnance
-> Biatain Escarre Standard 15 x 15, boîte de 10 : à renouveler jusqu’à complète cicatrisation.
-> Renutryl 375 ml, 1 boîte par jour.
qsp 2 mois.
Sept causes d’hypoxie tissulaire
– Altération des échanges gazeux et circulatoires.
– Perturbation du métabolisme (alimentation et hydratation).
– Modification de la perception sensorielle (capacité à répondre de manière adaptée à l’inconfort provoqué par la pression).
– Perte de l’autonomie.
– Infection.
– Vieillissement.
– Stade de fin de vie.
Facteurs favorisants
– Alitement prolongé et station en fauteuil.
– Mauvaise position (cisaillement).
– Macération de la peau.
– Facteurs psychosociaux (perte de vigilance psychique).
– Manque de coordination des soins.
– Equipements orthopédiques inadaptés.
Prise en charge de la douleur
– La prise en charge de la douleur en présence d’une ou plusieurs escarres est souvent négligée. Pourtant cette douleur est inhérente à la constitution de l’escarre et pénalise considérablement le patient. Loin d’être secondaire, sa prise en charge doit correspondre à une stratégie précise initiée par le médecin.
– Il est recommandé d’utiliser les antalgiques selon la progression en trois paliers recommandée par l’OMS. Le changement de niveau est motivé par l’inefficacité d’un médicament du palier précédent.
– Les douleurs intenses survenant au moment des soins peuvent justifier l’emploi direct d’un opioïde de niveau 3.
– Une évaluation permanente de la composante douloureuse de l’escarre permet d’adapter au mieux le choix du traitement en regard des effets indésirables qu’il occasionne.
Une escarre est la destruction d’une zone tissulaire superficielle limitée. Sa gravité dépend de la profondeur des lésions.
Les différents stades de cicatrisation d’une escarre (détersion, bourgeonnement et épithélialisation) nécessitent un traitement spécifique.
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