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Les allégations santé au coeur de la polémique

Publié le 30 novembre 2002
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Compléments nutritionnels et plantes médicinales sont souvent au coeur des produits dits frontière, avec le délicat problème des allégations santé et de l’évolution de la réglementation. Le point avec Loïc Bureau, pharmacochimiste*.

Les produits frontière n’existent pas en termes de composition, mais on peut parler de produits frontière au niveau des allégations santé », analyse Loïc Bureau. En effet, un complément alimentaire peut être considéré comme un médicament, soit par sa fonction, soit par sa composition, deux critères souvent liés, soit par sa présentation. C’est dans ce dernier cas que la problématique des compléments alimentaires se complique. « Théoriquement, dès lors qu’il y a allégation relative à une maladie, le produit relève du Code de la santé publique. Mais ce n’est pas si simple car la notion d’allégation santé n’est en fait pas définie juridiquement », précise le pharmacochimiste.

En l’occurrence, on peut distinguer trois types d’allégations :

1° Celles liées au rôle nutritionnel du produit : « contient du calcium ».

2° Celles liées à un rôle fonctionnel : l’allégation précisera le rôle du calcium, par exemple : « le calcium contribue à la formation osseuse et au maintien du capital osseux ».

Le Conseil national de l’alimentation s’est déjà prononcé en donnant un avis positif sur l’utilisation de plusieurs allégations fonctionnelles.

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3° Celles liées à la santé :

a) Ayant un effet physiologique ou un effet bénéfique sur la santé (ils relèvent alors du visa PP) : exemple, l’expression « antistress » (le stress n’est pas une pathologie, même s’il peut en être une composante…).

b) Liées à la maladie et relatives à la prévention ou la réduction du risque : « contient du calcium, réduit le risque d’ostéoporose ».

Les allégations de type 1° et 2° sont autorisées sans conditions pour des aliments et compléments alimentaires. Celle de type 3°b ne le sont pas. Reste un flou entourant le cas 3°a : « La doctrine de la DGCCRF repose sur l’interprétation en l’absence de textes spécifiques, commente Loïc Bureau. Au plan réglementaire, les travaux au niveau international sur le Codex alimentarius vont dans le sens d’un assouplissement des allégations santé autorisées en prévention santé. A priori, on se dirige donc vers leur autorisation pour des denrées alimentaires dès lors qu’elles sont prouvées scientifiquement. » Partant du principe qu’il s’agit de prévention et non de thérapeutique, les produits relevant de ces allégations seront donc hors monopole, « ce qui arrivera par exemple probablement au calcium ».

Modifier la définition du médicament.

Concernant la réglementation européenne, il est, selon Loïc Bureau, plus que probable que des substances comme certaines plantes et/ou extraits de plantes, acides aminés, etc., soient admises dans les compléments alimentaires au même titre que les vitamines et minéraux en tant que substances à effets physiologiques.

A noter que, parallèlement, une modification de la directive européenne sur le médicament est à l’étude, qui supprimerait la notion de « modification des fonctions organiques » pour qualifier le médicament, ne retenant que la composante pharmacologique d’un produit pour sa classification comme médicament.

Enfin, il est paradoxal de constater que c’est l’agroalimentaire qui lance aujourd’hui des études cliniques pour connaître les propriétés de produits dans le champ de la prévention. « A cet égard, c’est le dosage du produit qui le fait passer de l’état de « simple » nutriment (jusqu’aux apports journaliers recommandés) à celui d’alimentation liée à un état physiologique particulier (disons en moyenne de deux à trois fois les apports journaliers recommandés) et enfin à l’état de produit thérapeutique (au-delà de deux à trois fois les apports journaliers recommandés) dans le respect des limites de sécurité. »

* Loïc Bureau est également rédacteur d’avis technico-réglementaires dans le cadre d’actions contentieuses associées à l’exercice illégal de la pharmacie et aux produits frontière.