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“Une plante efficace contre les bouffées de chaleur ?”

Publié le 23 mars 2023
Par Nathalie Belin
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1 Je questionne

Préciser la demande

« Êtes-vous ménopausée (= un an d’arrêt des règles) ? » et « Avez-vous fait le point avec le gynécologue récemment ? » évaluent le contexte, les bouffées de chaleur pouvant débuter en pré-ménopause, et le suivi médical. « Les symptômes sont-ils très invalidants ? » Si oui, un traitement hormonal de la ménopause (THM) peut être indiqué.

Rechercher certains critères

« Pas de cancer du sein, de l’utérus ou des ovaires ou d’antécédents ? Ni dans votre famille du côté mère, sœur, grand-mère… ? » et « Avez-vous déjà utilisé quelque chose pour vous soulager ? » orientent le choix.

2 J’évalue

Les solutions d’automédication dans la ménopause s’adressent aux femmes dont les bouffées de chaleur sont gênantes, mais pas au point d’altérer leur qualité de vie, et/ou à celles ne souhaitant pas ou ne pouvant pas prendre un THM.

Une fois la ménopause installée, un suivi gynécologique annuel est recommandé, d’autant plus sous phytoestrogènes, avec palpation des seins, et frottis cervico-utérin tous les cinq ans, ou avant selon les cas. Il faut aussi sensibiliser à la mammographie de dépistage du cancer du sein, qui est recommandée tous les deux ans entre 50 et 74 ans.

3 Je passe en revue

Des études montrent des preuves d’efficacité pour certaines plantes. Elles sont parfois associées entre elles ou à d’autres composants agissant sur l’équilibre nerveux (magnésium, oméga 3…), le sommeil, la circulation sanguine…

Phytoestrogènes

Leur structure proche de celle de l’estradiol leur permet de se fixer sur ses récepteurs et d’en induire certains effets, mais de manière moins puissante.

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• Isoflavones de soja. Elles ont les preuves d’efficacité les plus convaincantes(1). Toutefois, « tout le monde ne les métabolise pas et ne les élimine pas de la même façon, ce qui explique qu’elles ne fonctionnent pas chez certaines personnes et que les doses efficaces peuvent être très variables selon les individus », explique le Pr Catherine Bennetau-Pelissero, endocrinologiste de la reproduction et à l’origine de nombreux travaux sur les phytoestrogènes. En pratique : selon les études, la dose efficace est d’environ 35 à 40 mg d’isoflavones de soja par jour sous forme aglycone, la forme hydrolysée et active, mais parfois bien davantage, au-delà des doses préconisées (voir Précautions). Les bénéfices sont perceptibles après quelques jours mais la pleine efficacité peut n’être observée qu’après trois mois(1). Exemples : Ergyflavone, Gynea Synergia, Phyto Soya, Serepause…

• Lignanes du lin. Très étudiés également, les lignanes ont des résultats moins concluants que le soja, notamment en raison de grandes variations individuelles d’absorption ; environ 30 % des personnes ne disposent pas de la flore colique adéquate pour les transformer en molécules actives. Pour le Pr Bennetau, ils ont néanmoins un avantage, s’ils fonctionnent, du fait d’une action protectrice vis-à-vis du risque de cancer du sein, à la différence des autres phytoestrogènes. Exemples : gamme Triolinum, Ménophytea Équilibre Bouffées de chaleur… En pratique : la dose efficace serait d’au moins 50 mg par jour de SDG (diglucoside de sécoisolaricirésinol), principal lignane présent dans les extraits(2).

• Trèfle rouge et kudzu. Les isoflavones du trèfle rouge sont moins bien assimilées que celles du soja. Des études cliniques sont en faveur de son efficacité « mais il faut en prendre de fortes doses pour observer un bénéfice », indique l’experte. Moins étudié, le kudzu peut être une alternative aux isoflavones de soja si ces dernières s’avèrent peu efficaces : « il renferme les mêmes isoflavones mais en proportion inversée, ce qui peut mieux fonctionner chez certaines personnes ». À utiliser selon les mêmes modalités que le soja. Exemples : Trèfle rouge Arkogélules ou New Nordic, Kudzu Phytomance, MiumLab Ménopause…

• Cônes (= fleurs) de houblon. Des extraits spécifiques, standardisés en 8-PN (8-prénylnaringénine, un flavonoïde), ont montré une efficacité sur les bouffées de chaleur selon quelques études.

En pratique : la dose efficace est d’au moins 100 µg de 8-PN. Exemples : Granions Somdor+ Femme ménopausée, Gynofenol, Ménocia Ménopause, Menogyne… (lire Porphyre, La phyto, n° 595, février 2023).

• Précautions.

→ En commun. Tous sont déconseillés en cas d’antécédents personnels ou familiaux de cancers hormonaux dépendants, même le lin par précaution.

→ Isoflavones (soja, trèfle rouge, kudzu, luzerne…). Il est recommandé de ne pas dépasser 1 mg/kg par jour d’isoflavones sous forme aglycone (généralement mentionnée sur les compléments alimentaires), apports alimentaires inclus. Il est donc préférable de limiter les aliments à base de soja (tofu, miso…) en cas de supplémentation en isoflavones. Les isoflavones de soja peuvent diminuer l’absorption des hormones thyroïdiennes (lévothyroxine…).

Plantes à action non hormonale

• Cimicifuga (Actaea racemosa). « Elle est sans doute la plante qui fonctionne le mieux après les phytoestrogènes », note le Pr Bennetau. Elle bénéficie d’ailleurs d’un usage bien établi pour soulager les bouffées de chaleur, selon l’Agence européenne du médicament (EMA). Précautions : en raison d’une hépatotoxicité, la cimicifuga est déconseillée en cas d’atteinte hépatique et son utilisation doit être limitée à six mois. Selon des travaux anciens, elle pourrait avoir des effets estrogéniques. La monographie de l’Agence européenne du médicament préconise un avis médical en cas d’antécédents de cancer hormonodépendant. Exemples : Féminabiane Méno’Confort, Confort Ménopause Inovance, MiumLab Ménopause, MyVeggie Ménopause, Taïdo Ménoa et MénoActiv…

• Extraits de pollens. Une étude clinique versus placebo sur cinquante-quatre femmes, et des études observationnelles incluant des centaines de femmes montrent que l’apport de 320 mg d’un extrait de pollens purifiés améliore la qualité de vie, avec réduction des bouffées de chaleur, de la fatigue et des troubles du sommeil après deux à trois mois de prise. Précautions : aucune en particulier. Exemples : Sérélys Méno, Climéal, Léro Ménopollen, Menogyne, Isiopause…

• Valériane (Valeriana officinalis). Selon une étude clinique chez soixante-quatre femmes ménopausées, la valériane pourrait réduire la fréquence et l’intensité des bouffées de chaleur versus placebo. Exemples : Confort Ménopause Inovance, Somdor+ Granions Femme ménopausée…

4 Je choisis

Selon le contexte

• En pré-ménopause : solutions non hormonales ou hormonales en interrompant par prudence ces dernières si les règles surviennent.

• Symptômes gênants : phytoestrogènes, notamment soja en première intention, ou solution non hormonale en préférant le cimicifuga, durant six mois maximum.

• Si efficacité insuffisante : après quinze jours à un mois, augmenter les doses jusqu’aux doses maximales. Après deux à trois mois, changer de formule.

Selon les antécédents médicaux

• Antécédents personnels ou familiaux de cancer hormonodépendant : pas de phytoestrogènes. Cimicifuga sur recommandation d’un gynécologue-phytothérapeute.

• Prise d’hormones thyroïdiennes : éviter les isoflavones de soja, et autres isoflavones par prudence.

• Troubles hépatiques : pas de cimicifuga.

5 J’explique

Des solutions d’automédication sont efficaces pour limiter les bouffées de chaleur, mais il existe de grandes variations selon les personnes. Il peut être nécessaire d’en essayer plusieurs.

L’amélioration des bouffées de chaleur s’accompagne également souvent d’un bénéfice sur les troubles du sommeil ou de l’humeur.

6 Je conseille

• Modalités de prise. Il est possible d’associer des solutions non hormonales aux phytoestrogènes si besoin, mais il ne faut pas combiner plusieurs phytoestrogènes entre eux, par exemple le soja et le houblon.

• Habitudes de vie. Limiter les boissons chaudes, l’alcool, les épices. Avoir à disposition un spray d’eau thermale ; dormir dans une chambre fraîche. Même si ce n’est pas clairement démontré, l’activité physique pourrait améliorer les symptômes.

• Pratiques alternatives. Le yoga, sous la forme de postures ou d’enchaînements de mouvements associés à une respiration spécifique et à des techniques de pleine conscience, et l’hypnose réduisent la sévérité et la fréquence des bouffées de chaleur(1). L’acupuncture pourrait également être bénéfique.

Avec la collaboration du Pr Catherine Bennetau-Pelissero, endocrinologiste de la reproduction.

(1) Alternatives non hormonales de prise en charge des bouffées vasomotrices post-ménopausiques, RPC, CNGOF et GEMVI, Gynécologie obstétrique, fertilité & sénologie, 2021. https://doi.org/10.1016/j.gofs.2021.03.020

(2) https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24013641

Le contexte

Les bouffées de chaleur affectent environ 80 % des femmes occidentales ménopausées, dont 25 % de façon invalidante. Elles durent en moyenne de cinq à sept ans, mais peuvent perdurer au-delà de quinze ans(1).

→ Leur apparition est en lien avec la chute du taux circulant des estrogènes.

→ Fréquentes la nuit, elles se caractérisent par une sensation soudaine de chaleur, notamment sur le haut de la poitrine et le visage, qui s’étend rapidement au reste du corps. Elles sont parfois associées à des palpitations et suivies de frissons et d’une sensation d’anxiété.

→ Elles semblent plus fréquentes chez les femmes en surpoids ou en situation d’obésité, ayant une activité physique réduite et fumeuses(3).

(3) Menopausal Hot Flashes, Santen et coll., UpToDate 2022.