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Elections européennes : le groupe LFI souhaite la création d’un pôle public du médicament
Bureaux de vote. Dans le cadre des élections européennes, Le Moniteur des pharmacies a sollicité de nombreux partis pour leur demander leurs avis et préconisations concernant la pharmacie. Les réponses de Manon Aubry du groupe La France Insoumise (LFI).
Qu’est-ce qu’une Europe du médicament et quels sont les bénéfices pour les pharmaciens français ?
Une Europe du médicament est une Europe qui aura regagné sa souveraineté dans la production de médicaments en se lançant dans une réindustrialisation pharmaceutique sous contrôle démocratique. Cette réindustrialisation ne se fera pas sans la création de pôles publics du médicament, nationaux ou européens, suffisamment financés pour s’affranchir des grands groupes pharmaceutiques. Elle permettra de combattre les tensions et ruptures d’approvisionnement en médicaments. De plus, nous lutterons contre les dérives de l’industrie pharmaceutique qui consistent à fixer un prix de marché à un médicament, alors même que ces produits doivent être accessibles à toutes et tous. La crise sanitaire a mis en exergue ces comportements, le vaccin étant la propriété de certains grands groupes alors
même que l’humanité en avait besoin. C’est pourquoi nous proposons de pouvoir lever les brevets sur les médicaments, les vaccins et les équipements nécessaires à une réponse sanitaire urgente et mondiale. Nous refuserons également la libéralisation des laboratoires de biologie médicale et leur rachat par des fonds de pension, qui conduisent à une concentration dangereuse pour la continuité des soins (dans certains départements, un seul groupe détient tous les plateaux techniques) et la qualité des analyses (les temps de collecte, de transport, de stockage et d’analyse connaissant un gonflement insupportable). Une Europe du médicament est aussi une Europe dans laquelle les États membres renforcent leur coopération, permettant de réelles innovations via la création d’une plateforme européenne de publication scientifique gratuite et libre d’accès gérée par les chercheurs et en excluant de tous les travaux de l’agence réglementaire du médicament les études provenant des lobbys. Enfin, plus que pour une Europe du médicament, nous défendons une Europe de la santé pour tous, basée sur des politiques publiques construites à partir du principe « une seule santé », en vertu duquel la protection de la santé humaine passe par celle du monde animal et des écosystèmes. Nous protégerons également notre santé par une alimentation saine (renforcement du Nutri-Score complété par l’indicateur NOVA, taux maximum en sel et sucre, interdiction des additifs et du glyphosate), une eau non polluée. Il est important de garantir un accès total aux biens de santé, dans un contexte où plus d’une personne sur trois a déjà renoncé à des soins par manque d’argent. Nous défendrons la reconstruction du service public de santé et en particulier de l’hôpital public, ce qui doit passer par la fin des règles budgétaires austéritaires européennes. Il est nécessaire de réorganiser les entités chargées de la régulation et de la fixation du prix des médicaments.Les conflits ou liens d’intérêts privés doivent en être exclus. En cas de nécessité impérieuse, l’utilisation de licences d’office permettra à ce pôle de fournir à prix coûtant les médicaments et produits de santé essentiels.
276 officines ont fermé leurs portes en 2023. La plupart se trouvaient dans une zone de désert médical. Quelles solutions pourraient être envisagées au niveau européen pour maintenir le maillage officinal français ?
Les déserts médicaux sont un rempart à l’accès aux soins pour les habitants qui vivent sur : les territoires touchés. Au niveau européen, nous défendrons la sécurité sociale et le service public de santé notamment l’hôpital public et combattrons les demandes de la Commission européenne d’y porter atteinte. Par ce combat, nous créerons également des réseaux de centres de santé pluridisciplinaires publics en lien avec les hôpitaux publics pour combler les déserts médicaux. Nous améliorerons ainsi l’accès et le recours aux soins pour les habitants des déserts médicaux. Pour combattre les déserts médicaux, nous devons actionner tous les leviers au niveau national également : recrutement de médecins fonctionnaires, augmentation des moyens des facultés de médecine pour permettre une véritable suppression du numerus clausus, mobilisation de la médecine libérale et hospitalière, coopératives médicale, etc.
4 000 médicaments sont aujourd’hui en tension en France. Quelles solutions envisagez-vous au niveau européen pour y remédier ?
Le nombre de médicaments en tension est en hausse constante depuis une dizaine d’années, atteignant aujourd’hui les 4 000 références manquantes contre 400 seulement en 2014. Ces tensions et ruptures de stocks concernent un large panel de produits, de certains traitements contre les maladies de longue durée, à des médicaments du quotidien comme le paracétamol, ou l’amoxicilline. Cette situation est insupportable. Elle est notamment due aux nombreuses délocalisations de sites industriels de fabrication de médicaments vers l’Inde, la Chine, ou certains pays d’Europe de l’Est, mais aussi aux monopoles de grands groupes sur certains médicaments. La France insoumise propose depuis plusieurs années la création d’un Pôle Public du médicament. La santé, et particulièrement la production de médicaments, est entrée dans une logique de marché, qui permet aux grands industriels pharmaceutiques d’extraire des profits via les brevets à partir de découvertes financées par des fonds publics, via la recherche publique ou des crédits d’impôt comme le Crédit Impôt Recherche (CIR). Cette privatisation de la recherche s’observe notamment dans l’incapacité française de produire un vaccin contre le Covid-19 alors que notre pays compte parmi les meilleurs chercheurs du monde. Au niveau européen, nous proposons donc la création de pôles publics du médicament, ayant pour objectif d’assurer l’approvisionnement en matière de dispositif médical. Ces pôles auront notamment pour mission de relocaliser et de planifier la production de médicament en favorisant la production locale, afin de faire face aux pénuries. Ils assureront enfin la transparence sur l’ensemble des financements de la recherche et du développement, de communication des coûts de productions réels, d’information sur les médicaments importés, ouvrant la voie à une rémunération juste par les régimes de Sécurité sociale, plutôt qu’un achat à des prix exorbitants fondés sur du simple déclaratif de fabricant.
Certains pays européens autorisent la vente en ligne de médicaments sur ordonnance. Qu’en pensez-vous ?
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’environ 50 % des médicaments faisant l’objet d’une vente sur internet sont des produits dont la qualité n’a pu être contrôlée. Ces médicaments vendus en ligne peuvent contenir des produits toxiques, des principes actifs en trop faible quantité, ou au contraire en quantité trop importante. Dans ce dernier cas, il peut s’avérer très dangereux de le consommer. Depuis l’ouverture du marché aux sites de vente en ligne de médicaments, l’Ordre national des pharmaciens a déposé plainte contre plusieurs sites Internet au motif qu’ils usurpent le nom d’une pharmacie en ligne française et réorientent les internautes vers des sites proposant des médicaments contrefaits. Ces premières données suffisent à nous alerter. Par ailleurs, le risque est grand d’aller vers une dérégulation de l’encadrement de la vente en ligne. En effet, le cadre préfixé depuis le 2 janvier 2013 suite à la transposition en droit français de la directive européenne 2011/62/UE du 8 juin 2011, permettant la vente de médicaments en ligne par les titulaires d’une pharmacie d’officine a déjà fait œuvre de dysfonctionnements mettant en danger les patients quand bien même il était tenu à s’appuyer sur une pharmacie. Qu’en sera-t-il en l’absence de gestion par les pharmacies ? Au-delà des dangers liés à un risque de compliance insatisfaisante aux traitements et au risque de commandes sur des sites frauduleux pour de nombreux citoyens ; ce sont les échanges humains entre professionnels de santé et patients qui se verront amputés par de tels procédés. Echanges pourtant essentiels dans le suivi de maladies chroniques, pour prodiguer des conseils et dans le cadre du suivi d’un parcours multidisciplinaire entre prescripteurs et pharmaciens d’officine. La recherche du profit et l’économie d’une masse salariale de professionnels de santé sont à l’œuvre dans ces dispositions qui détruisent le savoir, les compétences des professionnels
d’officine et éloigneront davantage les Français d’un accès aux soins déjà précaire. Cela fragilisera encore plus les personnes n’ayant pas accès aux plateformes internet en raison de leur âge, handicap ou précarité socio-économique. Par conséquent, nous sommes favorables au maintien de l’encadrement actuel, qui permet d’éviter le développement d’une activité commerciale en ligne incontrôlée et périlleuse pour les patients. Aussi, nous soutenons la mobilisation des pharmaciens ayant eu lieu le jeudi 30 mai. Leur inquiétude face aux pénuries et à la possible libéralisation du marché du médicament est légitime. Leur mobilisation est d’intérêt général.
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