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Voie royale vers le BP
Le bac pro commerce devait amener à l’officine de nouveaux salariés au profil commercial et administratif. Dans les faits, il pourrait devenir une voie royale pour le BP.
Quatre années d’apprentissage. C’est la solution qu’ont trouvée Stéphanie et Géraldine pour devenir préparatrices. Il leur fallait un bac pour accéder au BP. Seul le bac pro commerce était à leur portée. Alors elles n’ont pas hésité. D’autant que la formation sur deux ans se passe en alternance, avec la possibilité d’effectuer leur d’apprentissage en officine. Elles ont décroché le bac pro en juin dernier et sont désormais en première année de BP. Et débutent leur troisième année d’apprentissage à la Pharmacie de la Commanderie, à Tournefeuille, aux portes de Toulouse.
Stéphanie Minestrini, 23 ans, constate : « Par rapport à d’autres, venant par exemple de bacs généraux ou SMS, souvent plus à l’aise en chimie et biologie, notre atout à nous, c’est cette expérience de deux années dans une pharmacie. » Après un BEP de secrétariat-comptabilité, Stéphanie Minestrini avait interrompu ses études. « Intéressée par la pharmacie et le métier de préparateur, je me suis inscrite en bac pro option officine, raconte-t-elle. Je ne le regrette vraiment pas. La qualité d’enseignement (commerce, merchandising, gestion…) est au top au lycée de Blagnac. » Son acolyte, Géraldine Denri, 20 ans, niveau première S, a eu la même démarche. Les deux jeunes ont pu mettre en pratique l’enseignement. À la pharmacie, elles s’occupent de la réception, du contrôle des commandes, de l’étiquetage, de la mise en rayon, du marchandisage, et ont gagné une véritable place au sein d’une équipe officinale par ailleurs seulement composée d’un duo de jeunes associés et d’une secrétaire.
Ainsi, contrairement à une idée fausse encore assez largement répandue, le profil de futur préparateur titulaire d’un bac pro commerce n’est pas réservé aux seules grandes ou moyennes officines. Cotitulaire de la Pharmacie de la Commanderie, Olivier Le Grand témoigne : « Si nous pouvons les garder toutes les deux, nous le ferons. Que ce soit en merchandising ou en informatique, pas besoin de leur expliquer dix fois ce qu’il faut faire : Stéphanie et Géraldine ont déjà des compétences que je n’avais jamais repérées jusque-là chez des préparateurs et des pharmaciens. À Toulouse, la formation au bac pro semble en tout cas de qualité. » Et passer de la vente de parapharmacie au médicament tente la plupart des bac pro. « Ce bac pro est vraiment une formation complémentaire à celle du BP, estime Stéphanie. Nous étions vingt-trois élèves en 2e année, et la grande majorité poursuit maintenant par un BP de préparateur. »
Passeport pour le BP.
Fort du soutien des instances professionnelles départementales, en partenariat avec le lycée professionnel de Blagnac, le CFA pharmacie de Toulouse s’est investi dans le bac pro commerce option officine dès sa création, en 2001. Si cette année le bac pro commerce a perdu son option, le CFA ne s’est pas désengagé pour autant. « Nous proposons toujours 650 heures de formation par an, dont 80 heures au CFA pharmacie. L’objectif de ce bac pro commerce est bien de recréer la filière préparatoire au BP et de permettre aux officines d’avoir des préparateurs à double compétence, pharmaceutique et commerciale », explique Jean-Philippe Rousseau, responsable de formation bac pro au CFA commerce et services de Blagnac. Avec 29 élèves en 1re année et 23 en 2e année pour 2004-2005, contre 35 l’an passé pour les deux années confondues, la filière est en voie de développement en Midi-Pyrénées. Pharmacien, directeur du CFA pharmacie de Toulouse, Jean-Robert Gracis conteste avec force l’image d’inadaptation aux besoins de l’officine qui colle encore au bac pro : « Pour amener au BP, il n’y a vraiment pas photo entre un bac général non scientifique et un bac pro qui a passé deux ans en apprentissage dans une pharmacie, estime Jean-Robert Gracis. La suppression de l’option n’a pas changé grand-chose, si ce n’est que la formation est encore plus axée sur les techniques de vente et le conseil. Pour faciliter l’entrée de ces jeunes en BP, nous essayons d’apporter un soubassement technique à leur formation commerciale. Celle-ci n’a pas été accueillie par la profession d’une manière assez favorable. C’est dommage, car les responsables du CFA commerce se démènent vraiment pour adapter ce bac pro à l’officine. »
L’exemple toulousain n’est pas un cas isolé. Parmi la quinzaine de CFA pharmacie préparant au bac pro, celui de Bétheny, près de Reims, s’est également lancé dans l’aventure dès la création de l’option officine. Il compte cette année 45 inscrits en 1re année, 31 en 2e année. Il pointe ainsi en première position nationale devant le CFA pharmacie de Paris et ses 67 bac pro en 2004/2005. « Nous nous sommes engagés dans cette filière parce que nous avions beaucoup de demande en CAP mention complémentaire avant cela, explique Marie-Pierre Demay, préparatrice, responsable pédagogique pharmacie au CFA de Bétheny. Non habilités à délivrer au comptoir, ce sont des jeunes à qui l’on peut confier bien d’autres tâches que la délivrance de médicaments : la gestion des commandes et des stocks, par exemple. Les pharmaciens ne les gardent pas avec un seul bac pro et la plupart poursuivent en BP. »
En décembre 2002, Porphyre avait consacré plusieurs pages aux « CFA pionniers du bac pro ». Deux ans plus tard, nous avons voulu connaître la suite du parcours d’Alexandra Biet, Audrey Collet, Élodie Vercilleux et Aurélie Favereaux, alors en 2e année de bac pro au CFA de Bétheny. Toutes quatre y sont actuellement en 2e année de BP. « Toutes les filles que j’ai connues en bac pro ont enchaîné par le BP », témoigne Alexandra, 24 ans, niveau 1re SMS, CAP d’employé technique de laboratoire, BEP carrières sanitaires et sociales et bac pro derrière elle. Alexandra a la chance de poursuivre son apprentissage pour la quatrième année dans la même officine. « Surtout attirée par le côté commercial et la parapharmacie », elle participe activement à la vie de l’officine : déballage et rangement des commandes, conseil en parapharmacie, livraisons à domicile.
Un bac peu connu et encore moins reconnu.
Tous les apprentis bac pro commerce n’ont pas la chance de découvrir et de contribuer à la vie officinale dans toute sa variété d’activités. Quatre ans après son entrée à l’officine, le bac pro n’y a pas encore conquis la place qui pourrait être la sienne. Sur quelque 12 000 jeunes actuellement en CFA, seulement 350 sont en bac pro. Celui-ci n’est donc pas loin d’être un flop, faute d’être trop peu connu et encore moins reconnu par les pharmaciens. « Il est beaucoup plus difficile de trouver un maître d’apprentissage bac pro que pour le BP, observe Florence Hertel, responsable pédagogique au CFA pharmacie d’Avignon, qui ne s’est lancé dans le bac pro que l’an dernier (9 inscrits en 2003, 10 en 2004). Nous avons envoyé des mailings aux pharmaciens du département et organisé des réunions d’information, mais sans grand succès : les pharmaciens ont longtemps espéré la création d’une filière remplaçant vraiment celle du CAP avec mention complémentaire. D’ailleurs, environ un pharmacien sur deux qui prend un bac pro lui fait faire ce qu’il faisait faire à un apprenti CAP au lieu de s’occuper de l’espace marchand. »
Un plus pour dynamiser les ventes.
« Petite main bonne à tout faire » ou apprenti pouvant œuvrer à la dynamisation des ventes parapharmaceutiques et destiné à devenir préparateur, l’ambiguïté persiste auprès de nombreux pharmaciens quant à la place de ces apprentis d’un nouveau genre au sein de l’équipe officinale. « Le bac pro, passerelle vers le BP, c’est l’idée que s’en font les jeunes engagés dans cette filière, constate lui aussi Olivier Kirsch, directeur du CFA de Talant, près de Dijon (15 inscrits en 2003, 13 en 2004). De notre côté, nous pensions plutôt en faire des salariés d’officine appelés à des tâches administratives. » Pharmacienne enseignante au CFA de Nancy-Metz, Valérie Peltre regrette quant à elle la disparition du CAP mention complémentaire, « qui était une filière tournée vers le médicament, bien plus indiquée pour poursuivre ensuite en BP et plus adaptée aux besoins du plus grand nombre d’officines. » Si Valérie Peltre reconnaît l’intérêt que peut présenter un tel bagage pour de futurs préparateurs appelés à exercer dans de grandes officines urbaines, « ce n’est pas le cas dans une pharmacie rurale comme la mienne par exemple, qui réalise 90 % de son chiffre d’affaires en ordonnances. » Sous couvert d’anonymat, un pharmacien de la Drôme résume assez bien les griefs de nombre de ses confrères à l’encontre du bac pro. « C’est un fiasco, parce que le bac pro est un faux-fuyant, une formation bâtarde, estime-t-il. Je n’étais pas chaud pour prendre un bac pro, au contraire de mon fils et associé qui le voyait comme un plus pour l’officine en matière de merchandising. En fait, ces jeunes sont faits pour le commerce, pas pour la pharmacie. D’ailleurs, celui que nous avons eu nous a quittés pour partir en BTS commercial. »
Rendez-vous en 2006
Quel que soit le diplôme préparé en alternance, le contrat d’apprentissage « est aussi une histoire de personnes entre l’employeur, l’équipe et le jeune en formation », tient à souligner Marie-Françoise Herscher, titulaire de la pharmacie de Cernay-lès-Reims, qui a ouvert ses portes depuis cet automne à une apprentie bac pro 1re année : « C’est une jeune fille du village, très motivée, très consciencieuse, qui a envie d’être préparatrice. L’équipe se compose actuellement de deux associés, d’une adjointe à temps partiel et d’une préparatrice, mais comme nous aurons besoin d’une préparatrice supplémentaire dans quelque temps, nous avons choisi de prendre cette jeune fille en bac pro à qui nous montrons ce que nous attendons d’elle et cela se passe très bien pour l’instant. »
Pharmacienne, directrice du CFA de Saint-Laurent-du-Var où le bac pro n’est proposé que depuis 2003 (21 inscrits en 1re année pour 2004-2005, 23 l’an dernier), Marie-Claude Bauzit voit dans les projets qu’ont à réaliser les élèves à l’officine dans le cadre de leur cursus « un point très important du bac pro ». Selon elle, « c’est un diplôme qui ouvre sur plein de choses, et même si ma formation de pharmacien me fait préférer un préparateur passé par un bac SMS, je suis pour la diversification des diplômes à l’officine, et le bac pro me semble vraiment pouvoir être d’un apport intéressant ».
Les premiers préparateurs ayant accédé au BP par la voie du bac pro commerce arriveront sur le marché du travail à l’été prochain. Il faudra donc attendre quelques mois pour commencer à mesurer, en 2006, si cette nouvelle génération de préparateurs à double compétence est un peu, beaucoup ou pas du tout adaptée aux besoins actuels des officines françaises. Cette même année 2006 sera aussi celle des enseignements à tirer du contrat d’étude prospective sur le paysage officinal à l’horizon 2015, récemment confié par la Commission paritaire nationale de l’emploi à un cabinet d’études spécialisé. L’objectif est de procéder à un état des lieux et de déterminer le contenu des formations et métiers nécessaires à l’officine d’aujourd’hui et de demain. Le bac pro commerce sera-t-il alors pleinement reconnu ? Il est encore trop tôt pour avancer une réponse tranchée. Celle-ci appartient avant tout aux pharmaciens employeurs…
RepèresLe bac pro commerce se maintient à chaque rentrée scolaire
Le baccalauréat professionnel commerce se fait soit dans un CFA en alternance, soit dans un lycée professionnel. En CFA la durée minimale légale de formation théorique est de 1 380 heures (38 semaines) en deux ans, auxquelles s’ajoutent 630 heures en entreprise (6 semaines en 1re année, 10 semaines en 2e année).
Une première marche vers le BP
« J’ai été de ceux qui ont argumenté en faveur de formations techniques parallèles à celles en place. Le bac pro commerce me semble être une bonne première marche vers le BP pour de futurs préparateurs appelés à participer à la vie de l’officine, celle-ci étant aussi une entreprise qui a des contraintes de vente. Comme le disait ma grand-mère, le commerce, cela ne s’apprend pas à l’université. Mais il n’en demeure pas moins qu’il y a des techniques très simples à mettre en œuvre et des questions à se poser qui méritent un réel apprentissage. Nous vivons encore trop sur notre savoir-faire de base – le médicament –, et si ce genre de formation permet d’apporter quelques compétences commerciales à de futurs préparateurs, c’est très bien. Car le BP est aujourd’hui trop centré vers le pharmacologique et la délivrance. »
André Rouayroux Titulaire de la Pharmaciee Wilson à Toulouse, président régional de l’UNPF en Midi-Pyrénées.
ZoomLe bac pro reformaté
Le bac pro commerce avait une option officine en 2001. Et bien d’autres : bijouterie, vente de produits frais… Il les a perdues en 2003. Il est voué à former des vendeurs, et peu importe le lieu de vente. Résultat : il n’a pas perdu pour autant sa vocation officinale. Les CFA déjà impliqués dans cette formation n’ont pas jeté l’éponge. Même si les maîtres de stage restent encore difficiles à trouver, les réticences des pharmaciens s’estompent à l’égard d’un diplôme reconnu par la plupart d’entre eux comme voie d’accès au BP de préparateur. Les compétences que doit acquérir l’apprenti bac pro commerce s’articulent autour de trois pôles :
• L’animation de l’espace de vente avec mise en place de l’offre produit, opérations de promotion et animation.
• Le volet gestion comprend « réapprovisionnement et réassortiment, gestion des produits, participation à la gestion de l’unité commerciale avec la mesure de performance d’actions commerciales, notamment, et à la prévention des risques ».
• La vente : préparation de la vente (exploiter l’offre commerciale, qualifier la clientèle…), sa réalisation (en officine, produits non réglementés exclusivement) ou encore opérations de fidélisation de la clientèle.
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