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la mucoviscidose

Publié le 1 décembre 2005
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La mucoviscidose est une maladie génétique responsable d’anomalies respiratoires et digestives. Sa prise en charge précoce et symptomatique permet d’améliorer le confort de vie des patients.

Signes cliniques

Maladie génétique, la mucoviscidose est liée à des mutations d’un gène du chromosome 7, entraînant des anomalies dans le fonctionnement cellulaire, notamment au niveau du transport du chlore.

Sur le plan respiratoire, une toux est présente avec des expectorations purulentes et visqueuses. Elles sont le signe d’infections et de surinfections bronchopulmonaires récurrentes, causées par plusieurs germes : Hæmophilus influ-enzæ, Staphylococcus aureus (staphylocoque doré) et, plus tardivement, Pseudomonas æruginosa (bacille pyocyanique). D’autres germes, souvent résistants aux antibiotiques, peuvent apparaître.

Les signes digestifs regroupent une insuffisance pancréatique à l’origine d’une diarrhée chronique graisseuse et de carences nutritionnelles entraînant des troubles de la croissance. Sont en cause : des bouchons muqueux qui obstruent les canaux pancréatiques et engendrent la malabsorption des protéines et des lipides ingérés. Il en résulte également un déficit en vitamines liposolubles (A, D, E, K), B12 et en zinc.

D’autres troubles sont retrouvés en fonction de la gravité de l’atteinte: sinusite, polypose nasale, diabète sucré, anomalies biliaires et hépatiques, et stérilité masculine (malformation des canaux déférents). La principale cause de décès est l’insuffisance respiratoire, à plus ou moins long terme. Aujourd’hui, l’espérance de vie des patients est de 40 ans.

Objectifs du traitement

La mucoviscidose est une maladie évolutive sans traite-ment curatif. Dès le diagnostic posé, les patients sont régulièrement suivis dans un des cinquante centres de ressources et de compétences pour la prise en charge multidisciplinaire de la mucoviscidose (CRCM), afin de dépister les signes d’aggravation et d’intervenir rapidement. Le traitement est lourd et contraignant, parfois très technique (perfusion, oxygène). Il se fait très souvent à domicile, occupant près de trois heures par jour. Il vise à corriger les symptômes :

– lutter contre l’encombrement et les infections bronchiques,

– limiter les conséquences de l’insuffisance pancréatique (diarrhée graisseuse, dénutrition),

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– prendre en charge les trou-bles associés au cas par cas.

Prise en charge pulmonaire

Traitement de fond

La kinésithérapie respiratoire

Pierre angulaire du traitement de fond, elle désencombre les bronches obstruées, éduque le patient aux autodrainages et prévient ou corrige les troubles staturaux. Les séances, qui se font à un rythme variable (une à quatre fois par jour selon les périodes), sont réalisées après avoir bougé et s’être hydraté, à distance du repas et, souvent, après un aérosol de fluidifiant.

Les fluidifiants (Pulmozyme)

Sortie de la réserve hospitalière, la dornase alfa (Pulmozyme) en nébulisation est un fluidifiant bronchique qui facilite l’évacuation des sécrétions afin d’améliorer la fonction respiratoire. Mécanisme d’action : en-zyme obtenue par génie génétique, la dornase alfa hydrolyse l’ADN du mucus des sécrétions bronchiques purulentes et diminue la viscosité des expectorations. L’aérosol de Pulmozyme est fait tous les jours, y compris en cas de survenue d’infection bronchique. Indication : traitement de l’encombrement bronchique pour améliorer la fonction respiratoire chez les patients âgés de plus de 5 ans dont la capacité vitale forcée est supérieure ou égale à 40 % de la valeur attendue. Ce sont des patients qui ont la capacité de cracher. Effets indésirables : ils sont rares, modérés et transitoires (douleur thoracique, conjonctivite, dyspepsie, modification de la voix…). Posologie : la nébulisation (1 à 2 ampoules/jour) est suivie de la séance de kinésithérapie respiratoire 30 minutes à 3 heures après. Les systèmes de nébulisation (appareil pneu-matique et nébuliseur) autorisés selon la liste de l’AMM sont fournis par des prestataires de services. Les appareils ultrasoniques ne sont pas adaptés car ils risquent de dégrader le produit.

Les bronchodilatateurs : une hyperactivité bronchique est parfois présente, surtout en cas d’exacerbation d’infection bronchique. Le recours à des bronchodilatateurs est alors utile en traitement continu avec des bêta-2-mimétiques de longue durée d’action (salméterol-Serevent, formotérol-Foradil), généralement associés à une corticothérapie inhalée, avant la réalisation des séances de kinésithérapie respiratoire avec des bêta-2-mimétiques de courte durée d’action (pirbuterol-Maxair, salbutamol-Ventoline, terbutaline-Bricanyl).

Prise en charge des infections

Prévenir la colonisation bactérienne : le patient peut s’infecter à partir de son environnement. Il est primordial d’assurer une parfaite hygiène domestique ainsi qu’un entretien rigoureux du matériel d’aérosolthérapie.

Traiter les infections : le choix des antibiotiques dépend de l’antibiogramme et du stade de l’infection: il peut s’agir d’une colonisation primaire, chronique, ou d’une surinfection. L’antibiothérapie est administrée par cures de 14 à 21 jours, soit de façon séquentielle (tous les 3-4 mois), soit sur des critères biologiques et cliniques, par voie orale, injectable et/ou par nébulisation. Dans la mucoviscidose, les antibiotiques pénètrent difficilement dans le mucus respiratoire, d’où des posologies souvent supérieures à l’AMM.

Une grande majorité des antibiotiques administrés font partie de la réserve hospitalière.

Les antibiotiques en aérosol (aminosides comme tobramycine et colistine), qui prennent souvent le relais des cures d’antibiotiques IV ou VO, sont administrés après désencombrement et l’emploi de bronchodilatateurs et de Pulmozyme.

Prise en charge digestive

L ‘objectif est de corriger l’insuffisance pancréatique. Les extraits pancréatiques gastroprotégés (Créon, Eurobiol) pallient les troubles pancréatiques et diminuent la stéatorrhée (éjection de graisses dans les fèces). Leur action peut être renforcée en réduisant l’acidité gastrique par des anti-H2 ou des inhibiteurs de la pompe à protons. Posologie : exprimée en unités lipase (UL), elle est adaptée à la teneur en lipides des repas, au degré d’insuffisance pancréatique et à la tolérance clinique. Nourrisson : 2 000 à 4 000 UL/120 ml de lait ; enfant : 1 000 UL/kg/repas, 500 UL/kg/collation. La dose initiale est de 2 500 unités lipase/kg/jour. Chez les nourrissons et les enfants, la dose totale de 10 000 UL/kg/jour ne doit pas être dépassée. Chez les adultes, le maximum est de 250 000 UL/kg/jour. Administration : les gélules peuvent être ouvertes et leur contenu mélangé à de l’eau ou une boisson acide (jus de fruits par exemple). Elles doivent être ingérées en cours de repas, avec la possibilité de répartir la moitié de la dose au début d’un repas, l’autre étant prise en cours de repas. Précaution : en cas d’apparition de constipation, s’assurer que la ration hydrique et sodée est suffisante et enrichir le régime en fibres.

Troubles associés

Les infections ORL (rhinopharyngites, polypes du nez et des sinus) sont traitées localement par lavages et chirurgie. L’aspergillose pulmonaire est soignée par l’itraconazole (Sporanox, réserve hospitalière).

L’insuffisance respiratoire chronique avec hypoxie (man-que d’oxygène) relève de l’oxygénothérapie de longue durée, la ventilation nasale se justifie et en cas d’hypercapnie (trop de CO2). Au stade évolué et quand le pronostic vital est en jeu, la transplantation pulmonaire est envisagée.

Le reflux gastro-oesophagien est fréquent. Traité avec un modificateur du péristaltisme oesogastrique, un antisécrétoire (anti-H2, inhibiteur de la pompe à protons) et des mesures hygiénodiététiques (position posturale, épaississement de l’alimentation chez le nourrisson…).

Le diabète de la mucoviscidose, qui partage certaines spécificités avec les deux types de diabète, est pris en charge par des conseils nutritionnels, une autosurveillance glycémique et, le plus souvent, une insulinothérapie.

L’acide ursodésoxycholique (Delursan, Ursolvan), devant toute atteinte hépatique chronique, améliore les signes biologiques de cholestase dus au reflux de la bile dans le sang. Mode d’action : l’acide ursodésoxycholique dissout la lithiase biliaire cholestérolique, permettant ainsi de diminuer la saturation de la bile en cholestérol. Il augmente la sécrétion biliaire et protège l’hépatocyte contre la toxicité des acides biliaires accumulés. Administration : 20 mg/kg/jour en deux prises matin et soir aux repas. Contre-indications : hypersensibilité aux constituants ; syndrome de malabsorption glucose/galactose. Précaution d’emploi : surveillance rectocolique recommandée.

Hygiène de vie

La « Javel-dépendance »

Il faut éviter au maximum toute contamination bactérienne, dont la plus redoutée est celle par le pyocyanique. Les conseils à donner sont les suivants :

– Désinfecter les surfaces à la Javel, laisser couler l’eau avant d’utiliser les robinets, les détartrer régulièrement…

– Privilégier les jouets en plastique pouvant être désinfectés (éviter jouets creux). Changer fréquemment le linge de maison ; privilégier les textiles javelisables et repassables.

– Éviter l’eau stagnante (plantes et fleurs) ou ajouter quelques gouttes d’eau de Javel. Les animaux aquatiques (poissons, tortue…) sont interdits. Bien nettoyer les fruits et légumes consommés crus.

Vie quotidienne

Pratiquer un sport, si l’état du patient le permet, contribue à complémenter le drainage bronchique et à entretenir les muscles. Privilégier la marche, la course, le tennis, le rock acrobatique, la natation. Attention cependant aux pertes de sel et d’eau lors de toute pratique physique, notamment l’été !

Supprimer le tabac : la fumée renforce les effets de la maladie sur les bronches et accélère tous les phénomènes de dégradation pulmonaire.

Avec nos remerciements au Dr François Bremont du CRCM de Toulouse.

gros plan

Pulmozyme : une délivrance particulière

Pulmozyme est un fluidifiant bronchique en nébulisation sorti de la réserve hospitalière (boîte de 30 ampoules)

Délivrance : prescription initiale hospitalière valable 6 mois ; renouvellement non restreint.

Conservation : avant utilisation, conservation au réfrigérateur (+ 2 ; + 8 °C), à l’abri de la lumière ; peut être exposé durant 24 heures à température ambiante (jusqu’à 30 °C).

Mode d’emploi : sortir le produit du réfrigérateur quelques minutes avant la nébulisation pour éviter qu’il ne soit trop froid (risque de bronchospasme). Utiliser une ampoule pour une seule administration. Ne jamais mélanger ou diluer le contenu de l’ampoule à d’autres produits dans la cuve de nébulisation. La nébulisation dure environ 7 minutes. Inhaler à l’aide d’un système nébuliseur/ compresseur pneumatique autorisé.

Précaution d’emploi : ne pas réaliser la nébulisation avant le coucher.

Lutter contre la dénutrition

Le régime alimentaire doit être hypercalorique et riche en graisses pour limiter la malnutrition et le retard de croissance.

Chez le nourrisson : l’allaitement au sein est recommandé, les laits avec hydrolysats de protéines et triglycérides à chaînes moyennes (Alfaré, Pregestimil…) sont pris en charge (LPPR*) par la Sécurité sociale.

Chez l’adulte :

L’alimentation est souvent complétée par des produits diététiques hypercaloriques pris en charge à la LPPR : Ressource (Novartis), Fresubin (Fresenius Kabi), Fortimel (Nutricia)… Si cette mesure se révèle insuffisante, la nutrition entérale ou parentérale prend le relais.

La supplémentation est systématique pour les vitamines liposolubles (A, D, E et K), au double des posologies usuelles. Une complémentation en oligoéléments peut s’envisager (fer, zinc, magnésium…).

Il peut être nécessaire d’apporter du sodium en raison de la déperdition de chlorure de sodium dans la sueur, sous forme de solutés de réhydratation (nourrisson) ou de gélules (NaCl) en cas de transpiration exagérée.

* LPPR : liste des produits et prestations remboursables.

Où adresser les familles ?

Les associations sont importantes pour l’écoute, le soutien moral et l’aide financière des familles :

SOS Mucoviscidose

Zac de la Bonne-Rencontre, 1, voie Gallo-Romaine, 77860 Quincy-Voisins.

Tél. : 01 64 63 15 04.

Fax : 01 60 04 41 86.

Internet :

Vaincre la mucoviscidose

Siège national :

181, rue de Tolbiac,

75013 Paris.

Ouvert de 9 h à 18 h,

du lundi au vendredi

Tél. : 01 40 78 91 91

Fax : 01 45 80 86 44

Internet :