Hygiène intime : Bottez les tabous !
Les campagnes d’information et de communication grand public ont porté leurs fruits, le marché de l’hygiène intime a fortement décollé ces deux dernières années. Et il continue tranquillement son ascension, méritant tout l’intérêt des pharmaciens.
Les produits de toilette intime représentent l’une des meilleures rotations de l’univers de la parapharmacie en ce qui concerne l’hygiène/beauté. Elles peuvent atteindre 60 unités par mois », affirme Joëlle Hermouet (Formaplus). « En deux ans, le marché en pharmacie et parapharmacie a évolué de plus de 20 % »,précise Carlo Sada, directeur marketing-ventes chez Rottapharm (Saugella). Et, selon IMS Health, les ventes réalisent 31 725 000 euros de chiffre d’affaires. Elles progressent encore de 7,4 % en valeur et de 6 % en volume (cumul annuel mobile à mai 2003).
Les raisons de ce succès sont bien identifiées : les laboratoires ont mis l’accent sur la communication grand public à une époque où les femmes prennent de plus en plus soin de leur corps. « Elles sont en attente d’explications en matière de gynécologie et les médecins ne disposent pas d’assez de temps à leur consacrer », assure Corinne Dardel, chef de gamme GSK.
La garantie de confiance officinale. Publireportages, articles dans la presse, spots télévisés…, les femmes ont désormais pris conscience de l’importance de la prévention en matière de toilette intime. Côté produits, elles bénéficient d’un vaste choix. De nouvelles références se sont immiscées sur ce segment prometteur, notamment Femilyn (Biorga) et Dermactive (Giphar) en 2002, ou, plus récemment, Lactamousse (Lyocentre) et Saugella Poligyn, dernier-né de la gamme Saugella qui cible plus particulièrement les femmes ménopausées et les jeunes filles.
Bien sûr, la GMS profite aussi de ce courant porteur en affichant des augmentations à deux chiffres. Mais les parts de marché restent majoritaires en pharmacie (65 % du CA global gel + lingettes). « Le principe est le même qu’avec les soins cosmétologiques très techniques, la pharmacie véhicule une garantie de confiance jouant en sa faveur », note Joëlle Hermouet. Raison de plus pour accorder au rayon « toilette intime » la place qu’il mérite !
Actuellement, une femme sur trois utilise un produit pour son hygiène intime quotidienne*. Autant dire qu’il existe un réel potentiel. « Mais, si de nombreux tabous sont tombés, le dialogue autour de la sphère intime demeure difficile à instaurer à l’officine », constate Françoise Soudanas, en charge des ventes en pharmacie pour Saforelle (laboratoires Iprad).
Prime à l’image dermatologique des produits. Force est cependant de constater que l’acte d’achat se voit facilité par la présentation des produits dans l’espace client. Françoise Soudanas souligne : « Aujourd’hui, le pharmacien qui ne détient pas de rayon d’hygiène intime fait figure d’exception. » Oui, mais où placer ce rayon ? « Surtout pas avec les tampons et les serviettes périodiques qui sont souvent mal positionnés, plus ou moins bien cachés, en raison d’une faible demande à l’officine », insiste Joëlle Hermouet.
Qu’on se le dise : les produits de toilette intime représentent un rayon à part entière. La spécialiste en merchandising est formelle : pour être suffisamment visibles, ils doivent occuper au minimum une étagère, l’implantation idéale correspondant à quatre étagères dans les pharmacies qui disposent d’espace. Son conseil : associer l’hygiène intime à l’hygiène corporelle des peaux sensibles. Le lien se fait d’ailleurs de lui-même via la marque Rogé Cavaillès et son gel intime. Lactacyd Femina se décline maintenant en crème de douche que le laboratoire désire implanter au sein de l’espace d’hygiène intime. Et la boucle est bouclée.
Indispensable également, l’effet de masse – c’est-à-dire une demi-étagère par référence – s’impose pour capter l’attention de la clientèle. « Attention à ne pas mélanger les produits avec AMM réservés au traitement ponctuel des infections et les produits d’hygiène quotidienne ! », met en garde Corinne Dardel. Au-delà de l’infraction à la législation, la consommatrice ne perçoit pas le bon message.
Pas de tarifs promotionnels sans conseils. Côté référencement, mieux vaut ne pas se disperser tout en sachant que les produits leaders tirent le marché. Lactacyd Femina et Saforelle se partagent plus de 50 % des ventes (en volume), suivis par Hydralin Apaisa, Rogé Cavaillès Gel intime (ex-Intimea) et Saugella (Dermoliquide plus antiseptique). Rien n’empêche bien sûr de proposer un produit moins connu, à condition de le positionner avec une valeur ajoutée ou de pratiquer un prix attractif. « Le produit de toilette intime fait partie de ceux que l’on rachète régulièrement », souligne Corinne Dardel, qui se félicite du succès récolté par le modèle économique (400 ml) Lactacyd Femina, lancé fin 2002.
A prendre en compte : les ventes fluctuent en fonction des promotions et non des saisons, hormis pour les lingettes dont les performances s’essoufflent en pharmacie (- 2,4 % en volume, cumul annuel mobile à mai 2003, source IMS Health), mais se concentrent plutôt en été. « Leur boom annoncé en officine n’a pas eu lieu », lance Carlo Sada. Sur ce minisegment, la concurrence acharnée de la grande distribution, où les ventes explosent (+ 113,5 % en valeur, cumul annuel mobile à mai 2003, source ACNielsen), est pointée du doigt.
Face à cette menace sous-jacente, les pharmaciens se doivent d’orienter correctement les consommatrices dans leurs choix et de mettre en valeur le côté pratique des mouchoirs imprégnés. Le b.a.-BA pour réussir cette « prise en main » : bien indiquer les spécificités des produits en rayon.
Plus que jamais, les conseils sont les bienvenus. Ne serait-ce qu’au détours de la délivrance d’un traitement antifongique.
* Source : étude « Omnibus » menée par GlaxoSmithKline Beecham en 2002.
Animation : jouez la cohésion
Les journées à thème permettent de promouvoir la toilette intime auprès des femmes. C’est l’occasion de distribuer des échantillons et des leaflets d’information. Une animation autour de la ménopause peut représenter une excellente porte d’entrée. Positionnez alors les produits près des compléments nutritionnels à base de soja. Le thème de la maternité se prête également bien au message « Prendre soin de soi ». L’effort de merchandising associe alors les produits d’hygiène intime à ceux contre les vergetures.
« Mais ces opérations ne se révèlent positives qui si elles sont ponctuelles. A trop multiplier les positionnements, les consommatrices ne s’y retrouvent plus », affirme Joëlle Hermouet.
Expérience
Géraldine Baretti (enseigne Alphéga), titulaire à Paris dans le VIIe arrondissement :
« Les gels pour la toilette intime sont devenus des produits d’hygiène utilisés au quotidien, au même titre que les brosses à dents ou les gels douche. Les femmes se servent toutes seules. La preuve : nos ventes ont progressé de 14 % en volume à partir du moment où nous avons placé le rayon dans l’espace clients. Il occupe actuellement deux étagères. En tout, nous écoulons 150 produits par an représentés par trois marques. L’achat est majoritairement guidé par la publicité. On observe des pics de vente au moment des campagnes de publicité de Lactacyd Femina et de Rogé Cavaillès. Le conseil intervient peu, sauf par exemple quand les personnes utilisent du Gyn-Hydralin à longueur d’année. Nous orientons alors vers les produits appropriés. »
A retenir
Améliorer la visibilité des produits.
Assurer un facing important.
Pratiquer des tarifs promotionnels.
Placer le rayon près de l’espace hygiène corporelle des peaux sensibles.
Echantillonner et ouvrir le dialogue.
Clarifier l’offre pour mieux orienter les femmes dans leur choix.
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