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BILAN DE L’OFFICINE : Ce que regarde votre banquier
Que se passe-t-il derrière le sourire et les bonnes manières de votre banquier ? Refus ou acceptation, qu’est-ce qui motive ses réactions ? Que notera-t-il dans votre personnalité ? Analyses.
1 La bonne attitude
Règle d’or pour vivre heureux avec son banquier : miser sur la transparence, insistent les intéressés. « C’est ce qui permet de bâtir une vraie relation de partenariat fondée sur la confiance », assure Marcel Deruy, directeur du réseau Sud-Est de la Banque de développement des PME. Patrice Lamblin, chargé de développement à la Banque populaire du Nord, tient le même langage : « Considérez votre banquier comme un partenaire et non exclusivement comme un fournisseur. En d’autres termes, faites-lui partager la vie de votre entreprise. »
Le pharmacien titulaire a tout intérêt de présenter à son banquier – en toutes circonstances – des tableaux de bord périodiquement mis à jour, des plans de développement, même de façon informelle, et à tenir des prévisions de trésorerie prouvant que l’officine est bien pilotée. Le chef d’entreprise doit anticiper la communication des difficultés prévisibles et préparer ses demandes (autre règle d’or à respecter). « Il n’y a rien de plus désagréable pour un banquier que d’être mis devant le fait accompli », précise Marcel Deruy.
Dans les périodes de difficultés, le banquier va chercher à jauger son interlocuteur, sa volonté et sa capacité à rebondir. « Le plus important dans une entreprise, c’est le chef d’entreprise ! », lance Marcel Deruy. S’il est vrai que la personnalité du pharmacien entrepreneur et la crédibilité de son projet, au-delà de sa surface financière, sont des éléments déterminants qui conditionneront l’accompagnement plus ou moins étendu des banquiers, ces derniers regardent ses comptes et analysent les ratios de l’officine avant tout.
2 Le degré d’autonomie financière
Le niveau de l’autonomie financière est mesuré par le ratio fonds propres/financements stables. Par ce biais, le banquier s’assure qu’il n’est pas le seul à financer les investissements de l’officine et qu’il existe une marge de sécurité. Dans l’exemple retenu (voir tableau), le ratio est de 29,06 %, c’est-à-dire que les capitaux propres de l’officine (apports initiaux du titulaire et résultats accumulés depuis la reprise de l’affaire) représentent 29 % des financements à long terme ; le banquier couvre ainsi de son côté les 71% restants. Le ratio d’autonomie financière est souvent de 20 % en début d’activité, et il est de 100 % lorsqu’il n’y a plus d’endettement à long terme. Le banquier s’assurera inévitablement que ce ratio s’améliore au fil du temps. Un ratio d’autonomie financière faible en début d’activité n’est donc pas forcément le signe d’une mauvaise santé financière, si le fonds de roulement est stable (lire ci-contre) et si les perspectives d’amélioration sont programmées dans les années à venir.
Il peut arriver que les capitaux propres soient négatifs ou faibles. Il importe alors d’en rechercher la cause. Si elle provient de la constitution d’un enrichissement personnel et d’un patrimoine, le banquier peut l’admettre. Si cette situation provient d’un train de vie en inadéquation récurrente avec les revenus, il faut s’attendre à des réserves de sa part.
3 La valeur nette théorique de « réalisation »
Le banquier rapproche le niveau de l’endettement de l’officine du niveau de sa valeur théorique si elle devait être vendue. Il existe des situations où le pharmacien rencontre des difficultés financières (forte fiscalité, contrôle fiscal douloureux, détournements internes, revers commerciaux…) et peut être amené à solliciter le banquier, parfois de manière significative, par l’octroi d’un crédit à plus ou moins long terme. Ainsi, une pharmacie réalisant un chiffre d’affaires de 1,5 million d’euros et dont l’endettement serait de 300 000 euros pourrait obtenir un crédit de restructuration ou plutôt de consolidation. En effet, la valeur nette théorique de « réalisation » de l’affaire va bien au-delà de son endettement, ce qui sécurise le banquier (sous certaines réserves tenant à la taille, à l’environnement, à l’avenir de l’officine…). Dans ce contexte, le titulaire doit bien comprendre la raison pour laquelle le banquier lui a maintenu sa confiance.
4 Fonds de roulement et BFR
Pour le banquier, le fonds de roulement (FR) doit rester stable et proche de l’équilibre. C’est-à-dire que les financements à long terme doivent couvrir les investissements à long terme. Le besoin en fonds de roulement (BFR) doit présenter un niveau normal et maîtrisé. Un crédit fournisseur exorbitant peut traduire une situation financière en réalité difficile (en dehors du cas d’un crédit consenti ponctuellement par le grossiste). Paradoxalement, le poste trésorerie au bilan (FR – BFR) ne fait pas forcément l’objet d’une interprétation particulière du banquier. En revanche, un découvert excessif inscrit au passif n’échappera pas à de légitimes interrogations de sa part.
5 La performance commerciale et de gestion
Le banquier analysera la rentabilité de l’officine à la lecture de son compte de résultat retraité (les SIG : soldes intermédiaires de gestion). La répartition du chiffre d’affaires et le niveau de la marge sont dès lors observés à la loupe, ainsi que le poids des frais de personnel. L’EBE (excédent brut d’exploitation) n’est pas un indicateur sur lequel se fonde Patrice Lamblin qui lui préfère la PCG (performance commerciale et de gestion). La PCG est mise en valeur en soustrayant de la marge commerciale les charges suivantes : charges externes (loyers, assurances, honoraires, frais postaux et télécommunications, services bancaires, etc.) ; impôts et taxes (taxe professionnelle, taxe foncière et taxes assises sur les salaires) ; salaires bruts augmentés des charges sociales et CSG déductible du titulaire.
Ces ratios clés permettent au banquier de s’assurer que l’affaire sera en mesure, à long terme, de faire face à ses engagements financiers (remboursement des emprunts notamment) et à maintenir une rémunération décente au chef d’entreprise. Cette attitude prospective et la gestion des risques sont de nature à anticiper largement les difficultés.
A retenir
Jouez la transparence, même en temps de crise, sur la situation de l’entreprise.
N’oubliez pas votre dossier personnel. Votre train de vie intéresse votre banquier (fiscalité, remboursement d’emprunts privés, financements des études des enfants, charges fixes…).
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