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Contre vents et marée

Publié le 20 décembre 2003
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Hormis en ville, à la satisfaction de prix de cession élevés ne s’ajoute pas le confort de travail pour les officinaux. Selon le conseil régional de l’Ordre, il manque en effet une trentaine de pharmaciens adjoints sur le Morbihan.

Le Morbihan compte 265 officines, dont 27 à Lorient et 20 à Vannes, Dans ces deux villes, les coefficients pour adjoints et remplaçants oscillent entre 500 et 550.

Avec sa multitude d’îles, ses côtes, ses coutumes et sa douceur de vivre, le Morbihan mérite bien sa quatrième place nationale au palmarès du tourisme. Moins connues, sa troisième position pour la filière agroalimentaire et ses fortes activités de pêche liées à Lorient, sous-préfecture et deuxième port français. Vannes, 51 759 habitants et préfecture, à trois heures de TGV de Paris, vit une période de fièvre immobilière. Rennes et Nantes accueillent les étudiants en pharmacie.

Le Morbihan compte 265 officines dont une mutualiste pour 645 000 habitants. Avec un personnel résidant sur place et au prix d’une forte implication des titulaires, les pharmacies des îles (Groix, Belle-Ile et l’Ile-aux-Moines) semblent encore équilibrer leurs rythmes.

Mais de l’autre côté de la mer et en campagne, les difficultés s’accumulent. « Depuis quelques années la situation se dégrade. Arzon n’est qu’à 30 kilomètres de Vannes mais nous ne trouvons ni stagiaires ni saisonniers. Notre carnet d’adresses est vide. » Et pourtant, Brigitte et Bernard Rolland proposent des conditions confortables avec possibilités d’hébergement. Certes, il y a un peu de gardes l’été mais le coefficient va de 550 à 600 pour le poste « vente et suivi des paiements », avec un maximum d’autonomie.

Ouvertes six jours sur sept, les officines recherchent des collaborateurs qui travaillent aussi de temps en temps en fin de semaine. Déçue, Dominique Luco, à Quiberon, lance : « Il n’y a plus personne qui veuille faire de l’officine. Nous effectuons le travail de la Sécurité sociale et la mode va à l’industrie qui propose samedi libre et semaine de 35 heures. » Avec le constat qu’en été un bon préparateur est parfois préférable à un pharmacien inexpérimenté.

Selon Dominique Luco, il faudrait créer un IUT pour les préparateurs sur deux ans associant théorie et stages avant l’entrée directe dans la vie professionnelle. Dans le contexte actuel, les jeunes pharmaciens s’adaptent en privilégiant l’association – dont relèvent déjà 20 % des officines du Morbihan – afin de concilier capacité d’emprunt et confort de travail.

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Trop peu de diplômés.

L’option officine capte 65 % à 70 % des promos contre 30 à 35 % pour la filière industrie et recherche, suivant les statistiques de l’université de Rennes. Après une forte baisse, le nombre d’inscrits en première année remonte doucement : 368 en 1998, 239 en 2002 mais 261 en 2003. Jean-Louis Burgot, doyen de la faculté de Rennes, affirme : « Afin de pallier le manque de pharmaciens diplômés, il faut que le numerus clausus, qui est passé de 78 à 84, continue d’augmenter. »

Pour trouver du personnel, la plupart des officinaux recourent aux listes des grossistes et du syndicat, aux corpos, aux annonces, aux agences d’intérim. Au 30 septembre 2003, l’ANPE de Vannes a centralisé les demandes de 32 préparateurs et de 8 pharmaciens face à 24 offres de préparateurs et 10 d’assistants. Dans l’intérim, le marché se calme à partir d’octobre pour s’amplifier entre février et septembre. Au 21 novembre, l’Appel Médical, avec 8 pharmaciens et 5 préparateurs inscrits, annonce 3 offres d’emploi pour pharmaciens et 2 pour BP. Et Quick Médical Service, avec un potentiel de 10 pharmaciens et 3 préparateurs, publie 3 offres pour BP.

Sur les listes de l’OCP, nous trouvons au 21 novembre 5 candidatures de pharmaciens et 3 de BP face à 2 et 4 offres d’emploi. A la CERP, les candidatures d’un pharmacien et d’un BP contre 4 offres pour préparateurs. Toujours à cette même date, Marie-Pierre Le Coroller, secrétaire du syndicat, note 12 offres pour 4 postes d’adjoints, 3 remplacements et 5 offres de CDI pour préparateurs. Côté demandes, 7 pharmaciens, 8 préparateurs et 3 CAP cherchent un emploi.

Mais, selon Joël Saiget, président du syndicat, le problème de fond demeure : « Avec si peu de remplaçants et la future vague de départs en retraite, y aura-t-il assez de repreneurs ? Nous réclamons une sérieuse augmentation du numerus clausus avec adaptation année après année. » Sylvère Quillerou, président du conseil régional de l’Ordre, estime qu’il manque environ 120 pharmaciens adjoints en Bretagne dont une trentaine sur le Morbihan. « Quant au faible numerus clausus de Rennes (84 pour 3 millions de Bretons contre 436 pour 10 millions d’habitants en Ile-de-France), il serait dû à un projet abandonné de création de faculté de pharmacie à Brest. Un rééquilibrage s’impose. »

Mieux payer les préparateurs.

Comment orienter les candidats hors des villes ? Peut-être via les rémunérations et l’aménagement des temps de travail, pense Chantal Gaudin, installée à Ploeren : « Une entreprise doit tenir compte des besoins des salariés. C’est un échange qui crée un bon esprit d’équipe, entraîne un retour favorable vers l’employeur et moins d’arrêts de travail. »

Sur les secteurs de Vannes, Auray et Lorient, les coefficients pour adjoints et remplaçants oscillent entre 500 et 550. Egalement sur Pontivy et en milieu rural mais avec des pics d’urgence à 650. Titulaire à Gourin, Marie-Claude Hascoët réalise qu’à la campagne la première attraction pour les adjoints et les préparateurs reste le salaire.

Nicolas Le Quellec, préparateur, est formateur au CFA de Lorient. Ici, 74 % des 70 inscrits de la promo 2003 ont obtenu leur BP : « Aux préparateurs aussi de montrer leur volonté de réussir en associant compétence, désir de dispenser et de vendre, précise-t-il. Mais c’est clair, ils doivent être mieux payés. Mille euros net par mois pour un bac + 2, c’est un peu juste pour les inciter à faire carrière… »

Et, selon Alain Lailler, directeur de l’OCP Rennes, l’intéressement des salariés permet de pérenniser les équipes officinales. En attendant, de nombreux titulaires font comme Françoise Gouzer à Plouharnel : « Je cherche d’abord le remplaçant, et ensuite j’adapte la date des vacances. »

Le Morbihan en chiffres

– 3 arrondissements, 42 cantons, 261 communes.

– 645 000 habitants.

– 265 officines dont une mutualiste à Lorient.

– 1 officine pour 2 429 habitants.

– Taux de chômage : 8,6 %.

– Principales villes (recensement de 1999) : Lorient (59 189 habitants, 27 officines), Vannes (51 759 habitants, 20 officines), Lanester (21 897 habitants, 8 officines), Ploemeur (18 304 habitants, 6 officines), Pontivy (13 508 habitants, 7 officines), Auray (10 911 habitants, 6 officines), Ploërmel (7 525 habitants, 4 officines), Locminé (3 346 habitants, 3 officines).