Contrôler les remises des grossistes
Même si elles ont tendance à se réduire comme une peau de chagrin, les remises doivent être vérifiées scrupuleusement. Voici la marche à suivre.
Il est loin le temps où le pharmacien obtenait de son répartiteur une remise uniforme sur la valeur globale de ses achats. Aujourd’hui, les remises sont pondérées. Complexes à déterminer, elles sont plus difficiles à contrôler. Cela dépendra alors des outils et du temps dont vous disposez.
1 Quatre étapes pour un contrôle simplifié
Vous manquez de temps ? Une vérification simple et rapide de la réalité des remises octroyées est possible en respectant quatre étapes :
-Prendre les récapitulatifs des factures de deux mois successifs (M et M + 1)
– Sur la facture d’achat du mois M, vous pouvez commencer par identifier le montant net facturé des achats du mois M et la valeur de la remise du mois M – 1. Cela permet de calculer le montant brut d’achat du mois M de la façon suivante :
[Brut du mois M] = [Net facturé du mois M] + [Remise du mois M – 1].
– Vous pouvez ensuite prendre la facture d’achat de M + 1, où vous retrouvez les mêmes éléments, à savoir le net facturé de M + 1 et la remise de M. Sur cette facture, repérez la valeur de la remise de M.
-Calculer le pourcentage de remise
Vous pourrez calculer le pourcentage de remise obtenu sur les achats du mois M par l’opération suivante : [% remise sur les achats du mois M] = [Remise du mois M]/[Brut du mois M].
-Calculer les taux de remise
L’étape suivante consiste à extraire de chaque facture la remise et le montant brut du mois M pour chaque taux de TVA (2,1 %, 5,5 % et 19,60 %.)
-Calculer la remise pondérée
Il suffit alors d’additionner les montants de ces différentes remises figurant sur la facture M + 1 et les montants des achats bruts figurant sur la facture du mois M pour faire l’opération suivante : [Taux de remise pondérée] = [remise/achat brut] x 100.
2 Deux factures à la loupe
Examinons deux factures réelles d’un répartiteur (en dernière page du relevé mensuel), du mois M et du mois suivant M + 1 indiquant les chiffres à prendre en compte pour contrôler ses remises.
– En prenant la facture du mois M, il faut d’abord déterminer le total des achats soumis à remises ou à tout autre avantage commercial. Il est égal à la somme des montants HT figurant sur la ventilation fiscale du relevé , soit : 68 725,80 + 4 149,61 + 856,93 = 73 732,34 Û. « Mais attention ! ne tenez pas compte du montant figurant en exonéré (- 2 738,59 Û) car il correspond la plupart du temps à des régularisations diverses », prévient Joël Vellozzi, expert-comptable, directeur de l’agence de KPMG Marseille.
-Pour obtenir le montant brut d’achat du mois M, il faut rajouter au montant précédent les avantages commerciaux du mois M – 1 , ce qui donne le calcul suivant : 894,79 + 69,49 + 1 077,28 = 2 041,56 Û.
Le cas échéant, il faut ajouter les escomptes financiers (0 Û dans ce cas) qui apparaissent dans le relevé. Dans l’exemple, le total des achats soumis à avantage commercial sur le mois M est obtenu de la manière suivante : 73 732,34 + 2 041,56 = 75 773,90 Û.
-Sur la facture du mois M + 1, il faut ensuite extraire les montants des avantages commerciaux du mois M ventilés par taux de TVA et en effectuer le total , soit : 1 725,18 + 104,16 + 52,68 = 1 882, 02 Û.
-Enfin, le taux réel de remise pondérée est obtenu en divisant le montant des avantages commerciaux du mois M (1 882,02 Û) par la totalité des achats soumis à avantage commercial (75 773,90 Û), ce qui donne un taux de 2,48 %. Le même calcul peut être fait en prenant les lignes d’achats et les remises par taux de TVA.
3 Décortiquer tous les achats
Le pourcentage que vous avez calculé est-il bien le taux qui figure dans les accords passés avec le grossiste ? Sinon, certains écarts sont faciles à comprendre :
-Tous les produits vendus par le grossiste n’ouvrent pas droit à une remise. C’est le cas, par exemple, des médicaments nécessitant le respect de la chaîne du froid ou des traitements de substitution pour toxicomanes.
uCertains produits n’ouvrent plus droit à un avantage commercial au-delà d’un prix fabricant hors taxes supérieur à 150 Û (dernière tranche de la MDL).
Aussi Joël Vellozzi conseille-t-il d’analyser les factures détaillées du grossiste pour pouvoir procéder au travail comptable de ventilation des remises par tranche de prix. L’expert-comptable suggère aussi de se reporter aux statistiques de gestion commerciale de la pharmacie pour décomposer les achats.
Dans ce cas, le pharmacien peut déduire de la base des achats le montant des médicaments non remisés (médicaments de la tranche 3 de la MDL…). Sinon, il retranchera un montant forfaitaire calculé à l’aide d’un pourcentage issu de la gestion informatique des ventes. Il faut penser aussi à soustraire du montant brut des achats celui des achats génériques réalisés auprès des laboratoires et facturés par le grossiste.
Par ailleurs, outre l’escompte, il faut considérer tous les éléments commerciaux (avoirs suite à des retours de marchandises, remises complémentaires, régularisations de lignes de remises sur le 5,5 % et 19,60 %, etc.) qui interfèrent dans le calcul des achats bruts.
C’est pourquoi Joël Vellozzi conseille de récapituler tous les achats chez le grossiste, par mois et par taux de TVA, ainsi que de réaliser le contrôle et le suivi des remises sous tableau Excel.
Que faire en cas d’anomalie ?
-Soit la facture et/ou la commande ne vous concerne pas : vous la retournez avec une explication.
-Soit des produits ont été livrés en surplus sans être facturés : vous signalez au grossiste son erreur pour conserver avec lui de bonnes relations.
-Soit la facture est trop élevée (remise oubliée, erreur de prix, produits non livrés, facturation de frais injustifiée…) : contactez le fournisseur pour qu’il régularise la facturation, en principe par un avoir.
Quatre contrôles à réaliser en amont
De la réception des commandes à la validation des remises annoncées, les contrôles doivent se succéder avec la même rigueur. Ils concernent :
-Les bons de livraison et la commande.
-La marchandise reçue et ce qui est annoncé sur le bon de livraison. Ce repérage avec le bordereau de commande du grossiste est facile.
-Les bons de livraison et la facture du grossiste. Ce contrôle réclame une attention particulière car les bons de livraison peuvent être centralisés sur une ou plusieurs factures quotidiennes, en fonction de l’heure de passage de la commande ou des modalités de transmission.
-Les montants portés sur les factures (en prenant en compte les avoirs et les éventuels frais appliqués) et des remises prévues.
Ces contrôles doivent être réalisés dès le premier niveau de factures, reçues quotidiennement. Ils doivent être doublés par une vérification, dans un second temps, des factures décadaires qui récapitulent l’ensemble des factures émises sur une période donnée.
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