Préparation des doses à administrer : des titulaires qui passent à la vitesse supérieure
Dotés d’un nouveau robot ou d’un équipement manuel récent, quatre pharmaciens titulaires témoignent de leur engagement dans la PDA. Une activité à prendre fermement en main quel qu’en soit le bénéficiaire : patient à son domicile ou résident d’un Ehpad.
Vlad Vasile développe des services pour approvisionner plusieurs centaines de résidents
C’est en 2021 que Vlad Vasile se lance dans la préparation des doses à administrer. Après avoir étudié les différentes solutions du marché, ce pharmacien, installé à Saint-Maurice (Val-de-Marne), opte pour le système semi-automatisé d’Oréus. « J’ai débuté avec un hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) pour mettre en place un système qui tienne la route quel que soit le nombre de résidents à servir. Dès le départ, je savais que je voulais aller plus loin, mais je devais me sentir prêt pour cela. » Le titulaire sait qu’il lui faut aussi atteindre un certain seuil d’activité. « La préparation des doses à administrer (PDA), cela n’apporte pas une rentabilité au premier jour. C’est une réflexion qui porte sur le long terme. » Aujourd’hui, son officine prépare les traitements de plusieurs centaines de résidents dans différents établissements. Chacune des cinq préparatrices s’y emploie à tour de rôle un jour par semaine. « Si elle est réalisée non-stop, la PDA peut être un peu usante pour l’équipe. » Même si le rythme n’est pas si soutenu. Une douzaine de piluliers sont préparés toutes les heures quand l’équipement permet d’en confectionner jusqu’à 18, souligne le pharmacien. Chacun leur tour, trois pharmaciens sont impliqués à deux étapes clés de la préparation, lors de l’analyse de l’ordonnance et une fois le pilulier scellé, pour le contrôler. « C’est nous qui assurons le suivi des traitements car les établissements manquent de personnel et font souvent appel à des vacataires. Mon équipe finit par connaître les lignes de médicaments des résidents dans tous les établissements, même si elle ne les a jamais vus. » Un point est fait chaque fin de mois avec l’infirmière de coordination (Idec) lorsqu’il s’agit de renouveler les médicaments non intégrés aux piluliers. Cela afin d’éviter gaspillage et surstockage. Le personnel de l’officine a accès au logiciel de l’Ehpad mais n’apporte pas de modification sur les ordonnances. « Nous n’y touchons pas. Quand il y a nécessité d’un changement de traitement, même dans le cas d’une substitution par un générique, nous appelons le médecin coordonnateur pour qu’il fasse lui-même cette modification dans le logiciel. La préparation du pilulier est mise en stand-by et nous poursuivons avec d’autres blisters avant de la reprendre. » Pour Vlad Vasile, l’implication ne s’arrête pas là. « La PDA, c’est 40 % du temps consacré à la préparation elle-même et 60 % du temps pour la gestion des urgences ! » Les établissements sont livrés tous les jours, au cas où une nouvelle prescription serait instaurée. Un parcours de livraison, cela s’optimise. Plutôt que d’attendre un coup de fil de l’Ehpad, la préparatrice prend contact chaque jour avec les établissements pour noter leurs tout derniers besoins en médicaments. « Cela nous permet de gérer 90 % des demandes en urgence. » Les établissements ont pris le pli. « Lors du tout premier rendez-vous, je rencontre le médecin coordonnateur et l’Idec en présence du directeur de l’établissement. Je leur rappelle mes trois mots d’ordre, qui sont d’égale importance : sécurité, qualité et réactivité. Je les informe de nos procédures et leur expose ce qui va peut-être devoir changer de leur côté si nous travaillons ensemble. » Le titulaire a identifié les points critiques, qui sont à peu près les mêmes dans tous les Ehpad, quel que soit le groupe auquel ils sont rattachés. C’est le cas en particulier de la gestion des stocks d’urgence et de stupéfiants. « C’est pour cela que, dès l’année prochaine, nous proposerons un nouveau service d’accompagnement. Un binôme pharmacien-préparateur se rendra tous les mois dans chaque établissement pour faire le point avec les équipes soignantes. »
Lewis Wright joue la carte de la diversification
Voilà une quinzaine d’années que la PDA était réalisée dans l’officine dont il est devenu titulaire il y a deux ans. Pour s’assurer la reconduite de sa convention avec l’un des Ehpad qu’elle approvisionne, Lewis<0x00A0>Wright a investi dans un nouveau robot du même fournisseur de matériel (JVM). « Le système était devenu obsolète. Il n’était, par exemple, pas possible de proposer des sachets de rappel, c’est-à-dire qui ne contiennent pas de médicaments mais mentionnent l’ensemble du traitement », précise le cotitulaire de la pharmacie des 4 Vallées à Loures-Barousse (Hautes-Pyrénées). En prenant en main l’activité, il s’est penché sur les besoins de deux établissements desservis et a souhaité aller plus loin dans la sécurisation du circuit du médicament. Dans le même temps, le pharmacien est confronté à la pénurie de personnel et à des départs à la retraite au sein de son équipe. Finalement, il décide de s’équiper d’un système automatisé de contrôle du contenu des sachets. « Désormais, ce ne sont plus deux préparateurs mais un seul qui est affecté à la PDA. Le contrôle final est toujours assuré par un pharmacien. » La préparation pour près de 250 résidents hébergés dans ces deux Ehpad occupe une journée et demie de travail chaque semaine. On pourrait penser que l’accès au logiciel de ces établissements et la capacité de leur faire un retour d’informations fassent gagner du temps à l’équipe. Mais le titulaire ne veut pas uniquement s’y fier. « Si par ce biais nous disposons des plans de posologie des résidents en temps réel, nous travaillons sur la base des ordonnances originales, qui nous sont adressées par fax. Dans le logiciel, nous consultons les observations des soignants au sujet des résidents. Elles permettent d’expliquer pourquoi le traitement a été arrêté, par exemple. » Selon le pharmacien, la principale difficulté est d’obtenir des ordonnances valides dans le bon timing alors que la pénurie de médecins libéraux se fait sentir dans le secteur. « Nous mettons une alerte à 10 jours puis à sept avant l’expiration d’une prescription pour qu’elle soit renouvelée. Si cela n’est pas fait, c’est le médecin coordonnateur qui prescrit en tout dernier recours. » A l’arrivée d’un nouveau résident, un bilan de médication est effectué en présence de l’équipe soignante. Cela concerne au total 15 à 25 patients chaque année. L’officine réalise aussi des préparations de sachets-doses pour une maison d’accueil spécialisée (MAS) hébergeant des adultes handicapés. « Ces patients sont surtout des jeunes. Leurs traitements ne sont pas très lourds et ne changent pas souvent. La convention qui nous lie à la MAS prévoit une participation financière. Nous facturons deux heures de travail de pharmacien par semaine. » Dix patients bénéficient également de la PDA dans le cadre d’un service de soins infirmiers à domicile. « Une fois par semaine, l’infirmière coordonnatrice vient chercher les rouleaux de sachets. » Pour les autres, non suivis mais en difficulté par rapport à la gestion de leur traitement au domicile, Lewis<0x00A0>Wright voudrait monter un protocole de mise en place de PDA au sein d’une société interprofessionnelle de soins ambulatoires. En attendant et malgré la diversification qu’il a opérée, le titulaire se préoccupe de ne pas centrer l’activité de l’officine essentiellement sur la PDA. « Nous faisons en sorte que chacun s’y investisse et que ça tourne. Mais nous voulons aussi alléger les préoccupations de l’équipe vis-à-vis de cette activité. Car elle peut être pesante et source de stress en donnant le sentiment de devoir être réactif en permanence. Face à cela, les procédures que nous avons mises en place apportent de la sérénité. »
Laurence Grimaldi répond à la demande de cabinets infirmiers
C’est à la demande de deux infirmières libérales que Laurence Grimaldi a mis en place une préparation de piluliers en 2019. « Cette activité était trop chronophage pour elles. Nous savions qu’un potentiel d’une quinzaine de patients pouvaient avoir besoin de PDA. Cela correspondait en même temps pour nous à une volonté de proposer ce service au comptoir », explique la titulaire de la pharmacie Les Etudes à Carcassonne (Aude). Après une revue des solutions existantes, les infirmières participent au choix du système adopté (Multimeds). Plus récemment, un second cabinet de trois infirmières prend contact avec la pharmacienne. « Il a fallu les rassurer sur le fait que la préparation à l’officine n’affecte pas leur rémunération sur les soins au domicile. » La PDA s’adresse à une trentaine de patients présentant une dépendance du fait de leur âge ou d’une pathologie psychiatrique qui peut les mener en hôpital de jour. Les infirmières viennent chaque semaine chercher les piluliers à l’officine, qui leur présente une facture de prestation. Le tarif s’élève à 1,80 € par pilulier préparé. « Il inclut le coût du consommable. Finalement, cela revient pour nous à travailler à prix coûtant. » Deux préparatrices s’occupent de cette préparation à tour de rôle. Chacune y consacre quelques heures par semaine. « Il peut y avoir un besoin urgent, pour le jour même, en cas de changement de traitement, de sortie d’hôpital. » Même si la PDA ne constitue pas un volet important de son activité, Laurence Grimaldi l’a incluse dans une démarche de qualité aboutie. Si elle ne souhaite pas se lancer dans l’approvisionnement des Ehpad, perçu comme complexe, la titulaire veut étendre la proposition au comptoir. Une poignée de patients seulement sont bénéficiaires de piluliers, déboursant de 3 à 5 €, livraison comprise. « Je sais que pour certaines personnes cela peut déjà être beaucoup. Mais là encore, compte tenu de ce qu’il me coûte, ce service ne peut pas être offert. Dans l’esprit des patients, le médicament est gratuit. Tout autant que ce qui s’y rapporte », constate la pharmacienne. Le potentiel est immense. « Cela va dans le sens de la recherche de la sécurité, de la praticité et de l’observance. Avec la PDA, il n’y a plus de confusion entre boîtes de génériques qui se ressemblent et plus d’oublis, les médicaments se trouvant à un seul endroit. » Des arguments rappelés de manière régulière par une communication sur ce service. « C’est vrai que, pour l’instant, il n’est pas vraiment rentable. Mais les officines alentour ne le proposent pas. Il renforce notre image professionnelle et d’offre de services. Lorsqu’il sera pris en charge pour les patients en perte d’autonomie, nous serons prêts. »
Xavier Journel vient de passer à une solution automatisée
Il est tout nouveau le robot installé à la pharmacie du centre commercial La Mare Rouge au Havre, en Seine-Maritime. Xavier Journel, son titulaire depuis 35 ans, se trouvait en limite avec un système manuel qui ne présentait pas suffisamment de garanties pour sécuriser la préparation. « Cela faisait 12 ans que nous l’utilisions. Suivant la volonté de sa maison mère, l’Ehpad que nous approvisionnons m’a demandé de faire évoluer le système. » Une année n’a pas été de trop pour mûrir le projet. Depuis trois mois, c’est dans ce qui fut une partie de la réserve qu’a pris place le dispositif automatisé de la marque Robotik Technology. « Le travail de mise en place a été assez long et fastidieux. Nous l’avions un peu sous-estimé au préalable. Il a fallu recenser toutes les ordonnances, sélectionner les médicaments pour lesquels les cassettes devaient être calibrées puis enregistrer et revérifier chaque prescription, explique Alexandrine Vasse, pharmacienne adjointe responsable et chargée des relations avec l’Ehpad. Des relations facilitées par la stabilité des personnels de part et d’autre. Les contacts téléphoniques sont quotidiens avec cet établissement de quelque 120 résidents. L’adjointe vient aussi de faire le point avec l’équipe soignante sur les ajustements à finaliser. C’est Hélène, préparatrice, qui consacre la journée du vendredi à la préparation. Elle doit prévoir un temps pour le remplissage des cassettes après déconditionnement et enregistrement des données de traçabilité pour chaque boîte. Des gestes avec lesquels la préparatrice s’est rapidement familiarisée. Dans l’Ehpad, la distribution des sachets aux résidents débute le mardi après une vérification supplémentaire de la production pendant le week-end. Depuis la mise en fonctionnement du robot, l’officine prépare des sachets pour quelques autres infirmiers libéraux. La pharmacie se tient prête à répondre à de nouvelles demandes. « C’est un engagement financier important de notre part. L’objectif est de développer l’activité pour de nouveaux Ehpad dans les mois à venir. Il nous est possible de fournir quatre établissements dans la semaine », confie le titulaire, enthousiaste.
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