Biosimilaires : au cœur du prochain budget de l’Assurance maladie

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Biosimilaires : au cœur du prochain budget de l’Assurance maladie

Publié le 5 juillet 2023
Par Anne-Hélène Collin
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Si la substitution des biosimilaires par le pharmacien peine aujourd’hui à décoller, l’Assurance maladie ne jette pas l’éponge et a déjà des propositions pour le prochain Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

« Il y aura certainement, d’une façon ou d’une autre, une ambition dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 autour des biosimilaires », annonce sans détour le directeur de la Sécurité sociale (DSS) Franck Von Lennep lors du Café Nile de ce 5 juillet. « On peut avoir, un peu comme pour les génériques, des réflexions sur qui on incite et à quel moment. Est-ce que c’est plutôt le prescripteur ? Est-ce que c’est plutôt le pharmacien ? Aujourd’hui, on a les deux modèles qui sont en train de se tester. Je ne sais pas vers quel modèle on ira, peut-être qu’il faut garder un modèle mixte, hybride avec des différences par produit. Mais derrière, ce n’est pas la même manière de faire des économies que pour les génériques, ce n’est pas la même incitation pour les pharmaciens donc ce n’est pas le même modèle économique global et cela, on en tient compte », poursuit-il.

« Il y a des gains réels pour le système de santé sur les biosimilaires pour permettre de financer, par exemple, la forte évolution du coût de l’innovation sur les médicaments en ce moment. » Combien ? Comment ? Le DSS n’a pas voulu se prononcer : « c’est encore trop tôt et il n’y a rien d’arbitré ». Mais dans son projet de rapport « charges et produits 2024 » qui devrait être discuté au sein du conseil de la Caisse nationale de l’Assurance maladie puis de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) le 6 juillet, l’Assurance maladie propose d’« atteindre l’objectif de 80 % de taux de pénétration des médicaments biosimilaires en mettant en place un dispositif de tiers-payant contre biosimilaire » (proposition n°24).

Bilan 2022 : peut mieux faire

En 2022, les dépenses de biomédicaments en ville ont coûté 1,9 milliard d’euros à l’Assurance maladie dont 680 millions d’euros pour les biosimilaires (36 %). L’adalimumab et le ranibizumab représentent à eux seuls 49 % de ce marché, est-il indiqué dans le projet de rapport.

L’Assurance maladie a reversé 3,6 millions d’euros aux 2 833 médecins libéraux qui ont interchangé en 2022 leur prescription pour des biosimilaires. Pour rappel, les médecins libéraux reçoivent un intéressement à la prescription de biosimilaires équivalent à 30 % des économies générées par la prescription de 5 molécules biologiques : étanercept, adalimumab, follitropine alpha, énoxaparine et insuline asparte. Là où le pharmacien attend toujours un arrêté de marge pour obtenir un intéressement sur la substitution de filgrastim et pegfilgrastim, les deux seules molécules biosimilaires qu’il peut substituer.

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« La substitution par le pharmacien (+ 5,7 points entre avril et décembre 2022 pour le pegfilgrastim et seulement + 0,9 point pour filgrastim) peine à être effective en l’absence d’incitation financière pour les pharmaciens d’officine », reconnait cependant l’Assurance maladie. Côté médecin, l’augmentation de la pénétration d’enoxaparine sur l’année 2022 est de 4,4 % (taux de pénétration en décembre 2022 : 15 %), 3 % (taux de pénétration de 3 %) pour l’insuline asparte, 10,6 % pour la follitropine alpha (72 %), 17,1 % pour l’adalimumab (48 %) et 14, 2 % pour l’étanercept (50 %).

Tiers payant contre biosimilaires

«  La substitution par le pharmacien d’officine pourra être étendue à de nouveaux biomédicaments en lien avec l’ANSM (notamment l’enoxaparine, l’insuline glargine et asparte…) », annonce l’Assurance maladie dans son projet de rapport, mais reste vague. Ce qui est plus certain est l’ajout de l’aflibercept (Eyléa) dans le processus pour les médecins, comme le ranibizumab (Lucentis) qui a intégré le dispositif d’intéressement pour les prescripteurs ophtalmologues le 1er juillet 2023.

L’Assurance maladie propose aussi un dispositif « tiers payant contre biosimilaires », à l’instar du mécanisme « tiers payant contre générique », lorsque le pharmacien propose la substitution d’un médicament biologique de référence par un biosimilaire qu’il est autorisé à substituer. Le patient qui refuse un biosimilaire sans motif médical légitime fera l’avance des frais et ensuite devra envoyer à sa caisse d’assurance maladie la feuille de soins pour être remboursé. « Dans ce cadre, l’Assurance maladie envisage de porter le principe d’égalité de marge pour le pharmacien pour les produits substituables. »

« Par ailleurs, pour améliorer les effets de l’avenant 9 (de la convention médicale, NdlR), l’Assurance maladie étudie la possibilité de ne plus réserver à certaines spécialités la prescription hospitalière en prescription initiale et prévoit dans ce cadre une saisine de l’ANSM », avance encore l’Assurance maladie.