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PHARMACIEN DANS LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES
Ils sont 192 pharmaciens militaires dont 101 femmes, engagés, commissionnés ou sous-contrat. Comme les 2024 médecins, ils sont rattachés au service de santé des armées (SSA) dont la mission prioritaire est d’assurer en métropole, outre-mer ou en opérations extérieures le soutien médical des forces armées et de la gendarmerie. Le service fait également appel à 184 réservistes pour des périodes allant de 5 à 30 jours. Parfois plus longues si ceux-ci participent à des opérations extérieures. Pourquoi choisit-on la pharmacie militaire ? Qui sont celles et ceux qui l’incarnent ? Comment exercent-ils leur profession ? Nous sommes allés à leur rencontre.
Ils passent tous par l’école de santé des armées (ESA). La première année de formation d’un « santard » (élève médecin) ou d’un « potard » (élève pharmacien) coûte 15 000 € à l’Etat, 25 000 € pour les suivantes. Sommes qui intègrent études, pension et logement. Les élèves pharmaciens signent un contrat pour une durée de dix ans à partir de l’obtention du diplôme d’Etat. Si celui-ci est rompu, le « contractant » remboursera proportionnellement à l’Etat les sommes engagées (1). Les trois premières années se font sous le régime de l’internat.
Actuellement, il y a 750 élèves en formation à Bron (Rhône). 25 sont pharmaciens, dont 18 femmes. Les plus jeunes, des élèves médecins, ont seize ans et demi. Ces élèves qui assistent en uniforme aux trois premières années de cours à la faculté perçoivent une solde mensuelle de 452 € la première année, pour passer à 1 474 € les années suivantes. Les élèves pharmaciens intègrent l’école sous le statut d’élève officier, deviennent aspirant au début de la troisième année, grade qu’ils conservent jusqu’à l’obtention de leur diplôme universitaire. Mais pharmaciens, vétérinaires et dentistes militaires ne porteront jamais les deux barrettes de lieutenant. Ils disposent en effet d’une hiérarchie spécifique eu égard au nombre d’années d’études effectuées (2). Leur premier grade correspond à celui de capitaine. Les médecins ont un statut très proche (3). Les élèves pharmaciens et médecins sont répartis au cours de leurs études en trois bataillons, correspondant aux trois cycles traditionnels (LMD). « Les missions de l’école sont la formation médicale, le soutien universitaire mais aussi la formation militaire de l’officier », rappelle le médecin en chef Olivier Prost, adjoint au directeur des études et de la formation à l’ESA.
En 2014, aucun pharmacien ne sortira de l’école de santé des armées
Outre les formations militaires initiale, complémentaire et spécialisée réalisées respectivement avant le début de la 1re, 2e et 4e années de faculté, les élèves inscrits en filière pharmacie bénéficient, comme tout élève de l’ESA (4), d’une formation médico-militaire. Ainsi, à la fin de la 2e année, ils suivent un stage de trois semaines en unité suivi d’un mémoire (présenté oralement) et un examen de validation de compétence en langue anglaise, « indispensable, lorsque vous vous trouvez en opération extérieure », précise le médecin en chef Alain Queyroy, également adjoint au directeur des études et de la formation à l’ESA. Au début de la 3e année, un stage Erasmus défense est encore possible. Chaque élève participe aussi au séminaire d’une semaine des grandes écoles de défense. Les aspirants pharmaciens doivent également effectuer deux stages de découverte de quinze jours de la pharmacie hospitalière militaire, le second étant orienté « démarche de soins ». En 4e et 6e années, les élèves pharmaciens seront formés au sauvetage au combat. Cette sixième année s’effectue à l’école d’application du SSA au Val-de-Grâce à Paris où l’accent est mis sur l’urgence opérationnelle. En 2014, aucun pharmacien ne sortira de l’ESA. Résultat d’échecs universitaires ou de réorientation. Il s’agit là « d’un phénomène exceptionnel », commente le médecin en chef des services Thierry Fusaï, directeur des études et de la formation à l’ESA.
Un métier offrant des spécialités très variées
En 2015, trois pharmaciennes seront affectées, en fonction de leur rang de classement, dans l’un des établissements du SSA. Justement, une fois diplômées, quelle voie choisir ? Elles auront le choix entre plusieurs métiers. Dans le ravitaillement sanitaire, qui comprend la direction des approvisionnements (DAPSA) à Orléans, la pharmacie centrale (voir page 30), les établissements de ravitaillement (ERSA) en métropole (Vitry-le-François et Marseille) ou outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Polynésie, Réunion) et à l’étranger (Djibouti). Mais aussi la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, le bataillon des marins-pompiers de Marseille, le centre de transfusion sanguine des armées à Clamart, ou encore la direction centrale du service de santé à Vincennes.
Au sein des pharmacies hospitalières, les pharmaciens ont la responsabilité de la dispensation des médicaments, des différents produits de santé, de la stérilisation, de la reconstitution des cytostatiques. « La qualité du circuit du médicament est un domaine de leur activité qui devient particulièrement d’actualité du fait de la certification des hôpitaux et de la réglementation de plus en plus prégnante », commente le pharmacien général Pascal Burnat, inspecteur technique des services pharmaceutiques des armées. Quatre autres champs peuvent occuper les pharmaciens. Tout d’abord, la biologie. Dotés du DES, les pharmaciens exercent dans les neuf hôpitaux militaires au sein des laboratoires qui regroupent biochimie, microbiologie, hématologie, immunologie et parasitologie. Ensuite, les laboratoires d’analyses environnementales de la marine de Toulon, Brest et Cherbourg, l’institut de recherche criminelle de la gendarmerie en toxicologie médicolégale et le service de radioprotection des armées à Clamart. Cette partie de la toxicologie, notamment environnementale, a pour fonction l’analyse de milieux très divers au profit des armées. Troisième champ, la recherche. Les pharmaciens chercheurs exercent dans le cadre de l’institut de recherche biomédicale des armées à Brétigny-sur-Orge, qui conduit des recherches dans les domaines nucléaire, radiologique, radiologique, biologique et chimique, la lutte contre le paludisme, les techniques nouvelles (thérapie cellulaire…). Enfin, des postes de conseillers sont également occupés par des pharmaciens dans les cinq directions régionales du SSA, à l’état-major de la marine, au contrôle général des armées…
De capitaine à pharmacien général inspecteur
Restent les opérations extérieures (Opex). C’est là, très souvent dans des zones de guerre, que le choix de la carrière militaire prendra tout son sens. Au cours de cette carrière, les praticiens pourront accéder à trois niveaux de qualification attribués par concours : praticien confirmé, praticien certifié ou, comme Claude Dussart, praticien professeur agrégé. 40 ans, 15 ans de service, il est le patron de la pharmacie de l’hôpital Desgenettes à Lyon depuis juin 2013. Ce pharmacien en chef a, en début de carrière, commandé une compagnie au 1er régiment médical à Metz, ce qui n’est pas très fréquent pour un pharmacien. « Nous n’avons pas de parcours type. Mais une multitude de trajectoires qui s’inscrivent dans la même direction. On bouge en début de carrière, on fait des Opex ensuite, on se spécialise puis on se stabilise. »
Quant aux grades, ils sont spécifiques au SSA. Ainsi, un pharmacien est capitaine, un pharmacien porte les barrettes de commandant lorsqu’il est principal, un pharmacien en chef est d’abord lieutenant-colonel puis colonel. Deux grades intermédiaires ensuite : pharmacien en chef des services de classe normale puis hors classe. Ce sont des praticiens hospitaliers qui sont appelés « Mon général » ou « Général ». Huit pharmaciens ont atteint le grade de général dont deux femmes. La première est directrice adjointe de la direction régionale du service de santé des armées de Saint-Germain-en-Laye. La seconde est détachée auprès du ministère de la Santé, directrice générale adjointe de l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) et pharmacien responsable de l’établissement pharmaceutique. Enfin, au sommet, deux derniers grades : pharmacien-général (deux étoiles, exerçant un commandement) et pharmacien-général inspecteur (trois étoiles). Ce qui, dans l’armée de terre et de l’air, correspond à général de brigade et général de division, et contre-amiral et vice-amiral dans la marine.
(1) Ce contrat peut être résilié pendant la scolarité : sur simple demande pendant les six premiers mois ou d’office lors de l’exclusion de l’école pour échec aux examens, ou pour faute disciplinaire grave. Les élèves doivent dans les deux cas un remboursement à l’État, sauf s’ils sont exclus en fin de première année d’études pour résultats insuffisants. Le montant du remboursement est égal au montant des rémunérations perçues depuis l’admission à l’école, affecté d’un coefficient de majoration de 1,5.
(2) La formation initiale dans les écoles d’officiers étant de trois années.
(3) L’interne est lieutenant.
(4) Dont la devise est : « Sur mer et au-delà des mers, pour la patrie et l’humanité, toujours au service des hommes. »
Pharmacien sur un théâtre d’opérations
Pharmacienne microbiologiste, le lieutenant-colonel Tiphaine* termine un séjour de trois mois et demi au Mali au sein du dispositif Serval.
Une opération extérieure, n’est-ce pas l’école de la polyvalence ? Oui, le pharmacien ravitaille ainsi les postes où il y a un médecin. Certains sont isolés. Je gère sur l’aéroport de Bamako six tentes ; je suis à la fois pharmacienne d’officine et pharmacienne hospitalière. Je fais donc de la délivrance en stock à destination d’une quinzaine d’unités au Mali, mais aussi au Burkina Faso, au Niger et en Mauritanie.
Il y a beaucoup de logistique ?
Sur le terrain, je dois préparer les commandes, trouver des vols, inventorier les arrivées, gérer les stocks, transférer le sang aux unités médicochirurgicales, être vigilante quant à l’hygiène, la stérilisation (avec l’anesthésiste), et être un conseil pour le commandant de l’opération. Ce qui fait qu’un tel séjour est palpitant ! En outre, cette mission m’a appris que la logistique santé fonctionne bien.
En Afghanistan auparavant, au Mali aujourd’hui… Vous faites la guerre ?
Non ! Je soutiens les hommes qui mènent des opérations, mais je ne me prends pas pour une guerrière. Mon travail est très clair : en cas de pépin, il faut que le militaire blessé puisse être pris en charge de manière optimale.
* Durant les opérations extérieures, l’anonymat est la règle pour les militaires.
Héloïse, étudiante en pharmacie
« Bonjour lieutenant ! » La jeune fille est longue, mince. Un visage réfléchi, vigilant. La monture foncée des lunettes n’atténue pas sa jeunesse. L’aspirant Héloïse Gervot a 22 ans. Dans un an et demi, elle sera docteur en pharmacie. Un père cadre dans le secteur privé. Une mère qui travaille dans le secteur public en tenue. L’armée de terre. « Elle a effectué en 2011-12 un séjour de six mois en Afghanistan. » Héloïse évoque l’inquiétude ressentie alors par la famille. Mais il y a aussi dans sa manière de raconter une fierté dissimulée. Sa sœur est actuellement en 6e année de médecine à Maisons-Alfort. Celle-ci devrait opter pour la psychiatrie. Héloïse est le lien entre elles. Scientifique, elle a choisi la pharmacie militaire. « Ma sœur m’a conseillé cette orientation, ma mère m’a parlé du service de santé des armées », explique-t-elle. Le 15 mai 2009, quelques semaines avant de passer le bac, c’est l’écrit du concours. Quatre places en pharmacie. « Ma lettre d’admissibilité arrive entre deux épreuves du bac ». Lui aussi réussi. Le 10 juillet, oral au Val-de-Grâce à Paris. Les résultats arrivent à la fin du mois. Acceptée. L’incorporation a lieu le 11 août à Bron à l’Ecole de santé des armées (ESA). Promotion « Carabin rouge ». Les quatre futures pharmaciennes s’équipent d’un treillis et partent aussitôt apprendre les rudiments militaires au camp de Chambaran en Isère : marche, topographie, ordre serré. Et la cohésion. Esprit aussi cultivé à l’ESA. Puis c’est le temps des cahiers pour la première année commune des études de santé puis pharmacie avec les étudiants civils de Lyon-Est. Aujourd’hui en 5e année hospitalo-universitaire à l’hôpital d’instruction des armées Desgenettes à Lyon, Héloïse Gervot travaille sur sa thèse qui porte sur l’étude d’une molécule inhibitrice d’une pompe à efflux qui pourrait être utilisée afin de diminuer les chimiorésistances. Thèse qu’elle soutiendra en juin ou en septembre, avant d’effectuer sa dernière année au Val-de-Grâce à Paris. Ensuite, elle aimerait intégrer l’institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale à Rosny-sous-Bois.
Enfant, elle rêvait de faire carrière au sein de la police scientifique. Lorsque les postes disponibles seront connus, il faudra aux néopharmaciennes – qui ne sont plus que trois – s’entendre ou ceux-ci seront alors attribués en fonction des résultats. Quel que soit son lieu d’affectation, on dira alors à Héloïse « bonjour capitaine ! ».
Pharmacien au Val-de-Grâce
« Notre pharmacie est organisée en unité fonctionnelle », explique son responsable, le pharmacien en chef David Almeiras, à la tête de 36 collaborateurs dans ce célèbre hôpital parisien, en majorité civils. Deux voies d’approvisionnement existent : les laboratoires (majoritairement) ou les ERSA (établissements de ravitaillement sanitaire des armées), qui jouent le rôle de grossiste-répartiteur militaire. « J’achète 6 000 références. 1 600 sont stockées ici. 120 produits représentent 98 % de ce stock. »
Ce jeune chef de service hospitalier qui a participé à trois opérations extérieures à Sarajevo (1995), Mostar (2005), et en Côte d’Ivoire (2011), se raconte ainsi : « J’ai participé à la définition des unités de stérilisation des hôpitaux de campagne. Ce qui est un exercice un peu particulier. En fait, un équilibre ! Je crois ainsi que notre appellation est idéale : pharmacien militaire. »
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