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Une économie sans influence sur les transactions
Les performances économiques plus que mitigées des pharmacies en 2006 auront-elles un effet correcteur sur la valeur des fonds ? La logique économique le voudrait mais rien n’est moins sûr.
Pour un pharmacien sur deux, les prix de cession vont se maintenir ou grimper en 2007 contre 41% qui pensent l’inverse. Les banquiers, eux, sont plus partagés : autant répondent en faveur d’un fléchissement que d’une fermeté du marché. Les intermédiaires envisagent en majorité un maintien des prix au niveau actuel. « Il y a une course aux bons emplacements en zone urbaine et suburbaine qui explique que les prix de cession restent au-delà de la valeur intrinsèque des officines », explique Marc Mackie.
Face à la cherté des fonds et à la baisse de la rentabilité, il est tentant pour alléger les charges de remboursement et rendre solvable l’acquéreur vis-à-vis du banquier d’allonger la durée des financements. Souvent à 15 ans. Une majorité des répondants de l’enquête KPMG prédit un allongement de la durée des prêts. Une tendance déjà amorcée depuis quelque temps.
Pourtant, Luc Fialletout, directeur général adjoint d’Interfimo, s’insurge contre cet allongement : « Tout ce qui vise à alléger les charges de remboursement se traduit automatiquement par une hausse artificielle des prix. » L’allongement des crédits ne va pas, selon lui, dans le bon sens. « La pharmacie est trop patrimonialisée par rapport aux autres entreprises. D’autres professions réglementées comme les notaires réfléchissent actuellement aux conséquences d’un financement trop long sur la valeur de leur outil de travail. » « Les prêts sur 15 ans ne se justifient pas dans une période où les taux d’intérêts sont historiquement bas, abonde dans le même sens Patrice Lamblin, chargé de mission à la Banque Populaire du Nord. De plus, les prêts initiaux qui ont été contractés n’arrivent pratiquement jamais à leur terme et sont souvent renégociés avant, à la faveur d’un nouveau prêt finançant, par exemple, des travaux. »
Concernant maintenant les taux de crédit – autre élément déterminant la capacité d’endettement des acquéreurs – la vision des banquiers est sans doute la plus probable. La réponse est claire et sans ambiguïté : pour 95 % d’entre eux, les taux vont monter. Compte tenu de l’environnement international, ils s’attendent à une hausse des taux directeurs à court terme qui se traduira par une remontée des taux à long terme. D’après Hervé Renard, de la Banque Populaire du Nord, « les taux remonteront en 2007, mais l’ampleur de cette hausse sera assez limitée et, compte tenu de la concurrence des établissements bancaires, interférera peu (de l’ordre de 0,1 à 0,2 point) dans l’immédiat sur les conditions globales d’acquisition des pharmacies ». Selon KPMG, l’augmentation des taux explique ou entraîne l’allongement de la durée des crédits.
L’équation est simple. Les prix de cession n’étant visiblement pas prêts de baisser, et l’érosion de la rentabilité des officines faisant que les banques seront de moins en moins disposées à mettre en place un volume de crédit disproportionné, c’est sur les capitaux personnels que l’acquéreur trouvera la sécurité de son investissement. En outre, un apport personnel raisonnable donne au banquier une marge de sécurité par rapport à la valeur de gage du bien financé. Pour 45 % des banquiers interrogés, les apports nécessaires à une reprise d’officine vont augmenter.
Inflation sur l’apport personnel
Ils sont néanmoins moins exigeants que ne le pensent les intéressés, puisque la proportion de pharmaciens du même avis est plus importante (69 %). Parmi les cabinets de transactions, aucun ne dit que l’apport personnel ira en s’amenuisant, alors que 9 % des banquiers et des autres acteurs s’accordent à le croire, peut-être parce que de plus de plus de pharmaciens vont s’installer à l’avenir en association. Cette opinion semble se confirmer dans la réalité. « Depuis le début de l’année, les prix de cession se stabilisent un peu à la hausse, et la quotité d’emprunt est plus faible, ce qui signifie que l’apport personnel des acquéreurs augmente », signale Pascale Bancillon, d’Interfimo. Une tendance qui ne surprend pas Marc Mackie pour qui le montant de l’apport personnel dépend de la qualité de l’emplacement et des paramètres personnels du futur repreneur : « Si un acquéreur n’est pas connu de la banque pour ses réalisations et performances antérieures, celle-ci ne demandera pas la même sécurité dans l’engagement financier de cette personne. » De son côté, Armand Sebban, du cabinet de transaction Pharmathèque fait remarquer que « le montant de l’emprunt ne baisse pas puisque l’augmentation de l’apport personnel ne fait que financer le surplus de prix, d’où des financements qui vont devenir de plus en plus tendus ».
Le marché semble ignorer les mesures gouvernementales qui affaiblissent l’officine dans une période où les tendances négatives se conjuguent (remontée du loyer de l’argent, rentabilité en diminution, baisse de la démographie médicale…) et qui font qu’il sera plus difficile de rembourser les emprunts d’acquisition dans les prochaines années. Le risque d’un « décrochage fort » s’en trouve augmenté.
L’effet de taille sera une condition de survie. Preuve en est, les « belles affaires » se vendent cher, les autres se vendent moins bien ou ne se vendent pas. La problématique des petites officines est donc aujourd’hui réellement posée et cette question va devoir être traitée intelligemment par la profession pour que le maillage territorial soit préservé. Si l’on en croit les réponses à cette enquête, l’année 2007 devrait voir le renforcement des grandes lignes de force de la transaction pharmaceutique : un marché toujours soutenu, mais plus sélectif, au profit des unités les plus importantes, un clivage du marché entre petites officines et grosses unités. « Le marché va se resserrer encore plus sur les officines importantes, tandis que les pharmacies de moins d’un million d’euros, dont la marge se réduit en pourcentage et en valeur, auront beaucoup de mal à se maintenir et donc à se vendre », affirme Armand Sebban.
Les prix vont a priori se stabiliser, ce qui n’empêchera pas les banquiers de continuer à financer les installations des pharmaciens, même si certains se montreront plus circonspects à l’avenir. Les jeunes pourront encore acheter avec un apport limité, « à condition aussi que les prix de cession des officines deviennent plus raisonnables et qu’ils soient fonction de critères économiques », nuance Lionel Canesi, expert-comptable du cabinet C2C Pharma. « De plus, les pharmaciens ne pourront pas longtemps se priver des structures juridiques adaptées au monde économique moderne tout en sauvegardant l’indépendance d’exercice du titulaire. »
Mais en cette année électorale cruciale pour notre pays, la réorganisation structurelle des officines, mais aussi la réévaluation du mode de rémunération et la reprise économique, ne sont pas à envisager avant 2008. Les pharmaciens vont devoir encore patienter un peu avant d’entrevoir le changement.
Toujours plus d’apport
Selon une statistique réalisée à partir d’un échantillon des cessions intervenues dans les cabinets du réseau CGP en 2006, le montant moyen de l’apport personnel progresse de 25 % par rapport à 2005. Il est de 270 000 Û, soit 18 % du prix d’achat moyen d’une officine (1 513 000 Û) contre 216 000 Û en 2005 (16 % pour un prix d’achat moyen de 1 358 000 Û). Cette hausse de deux points résulte de la demande des banques qui imposent un apport croissant. Ainsi, on est passé en quelques années d’un financement le plus souvent intégral (100 %) à un financement moyen de 82 %.
Recherche potentiel de capitalisation
La taille de l’officineest indéniablement un critère de valorisation. Plus que les profits que l’on pourra retirer d’une affaire, c’est son potentiel de capitalisation qui est de plus en plus recherché. Et certains sont prêts à le payer au prix fort. Une mécanique économique pertinente si ce potentiel ne fléchit pas dans les années à venir… mais rien n’est moins sûr. Comme l’a indiqué Luc Fialletout, directeur général adjoint d’Interfimo à Pharmagora, la moyenne des acquisitions se faisait aujourd’hui à 8 fois l’EBE alors que le seuil de rentabilité idéal se situe à 5-6 fois seulement.
Toujours selon Interfimo, le ticket moyen s’élevait l’an dernier à 1,3 million pour acquérir une pharmacie, mais une transaction sur quatre a dépassé 1,6 million. Près d’un acheteur sur deux (46 %) est un primo-accédant et 22 % ont moins de 35 ans. 2006 a vu 30 % de départs à la retraite en plus par rapport à 2005. L.L.
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