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Distinguer la faute de l’insuffisance professionnelle
Vous devez vous séparer d’un collaborateur dont le travail n’est pas satisfaisant ? Il va déjà falloir qualifier le grief que vous lui reprochez. Faute ou insuffisance professionnelle ? La différence est capitale. Ce qu’il faut savoir avant d’entamer toute procédure de licenciement.
Lorsqu’un employeur s’engage dans une procédure de licenciement, il s’expose à un contentieux devant les prud’hommes en cas de litige », prévient d’emblée Alain Fallourd, avocat. Dans ces conditions, il ne faut laisser aucune place à l’improvisation. En clair, l’employeur doit non seulement s’assurer que sa démarche est légitimement fondée, mais il doit aussi respecter un formalisme juridique strict.
Bien définir la cause du licenciement
Tout licenciement doit reposer sur une cause réelle et sérieuse. Secundo, la qualification du licenciement doit être irréprochable. « Si l’employeur invoque une faute alors que les faits reprochés au salarié caractérisent en réalité une insuffisance professionnelle, et inversement, le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse », explique Alain Fallourd. Puisque le choix des mots est déterminant, quelle est leur signification ? La faute est le résultat d’une négligence, d’un manque d’attention du salarié dans l’accomplissement d’un travail, alors que ce même salarié est par ailleurs pleinement compétent.
Quant à l’insuffisance professionnelle, elle peut être définie comme l’incapacité du salarié à exécuter correctement son travail, faute de compétences. « La faute a un caractère instantané, alors que l’incompétence s’inscrit dans la continuité », précise Assunta Sapone, avocate.
Accumuler des preuves tangibles
Si la seule mention d’une insuffisance professionnelle est suffisante au stade de la lettre de licenciement, l’employeur doit cependant être en mesure de motiver sa décision par des exemples précis (en revanche, en cas de licenciement pour faute, les griefs reprochés seront en sus mentionnés dans la lettre). Car en cas de contestation devant les prud’hommes, il devra rapporter des faits objectifs, précis et imputables au salarié pour étayer le grief. « Les preuves écrites telles que des courriers relatant une insuffisance professionnelle, des erreurs répétées et grossières sont essentielles car l’employeur devra démontrer l’incompétence du salarié », précise Alain Fallourd. Les juges apprécieront évidemment les attributions du salarié par rapport à sa qualification. « Le diplôme constitue d’ailleurs une présomption de compétences », souligne Assunta Sapone. Pas question donc de sanctionner par un licenciement les erreurs de délivrance d’un étudiant. Car il est censé assurer la dispensation des médicaments sous le contrôle et la surveillance effective d’un pharmacien.
Les reproches de l’employeur risquent également de s’écrouler s’il n’a pas rempli ses obligations en termes de formation et d’adaptation du salarié à l’évolution de son emploi. Dans ce cas, l’insuffisance professionnelle devient imputable à l’employeur. Attention également à demander des objectifs réalistes à ses collaborateurs ! Puisque à l’impossible nul n’est tenu… Dans ce contexte, des objectifs fixés sans prendre en considération la faible marge de manoeuvre du salarié ont été reconnus comme excessifs.
En cas d’insuffisance professionnelle
L’employeur mettra en oeuvre la procédure classique du licenciement personnel. Dans un premier temps, il convoquera le salarié (par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge) à un entretien préalable. Cet échange ne pourra avoir lieu avant un délai de cinq jours ouvrables qui court à compter du lendemain de la présentation ou de la remise de la lettre. Au cours de l’entretien, l’employeur exposera les faits reprochés au salarié. Ainsi, le salarié pourra s’expliquer et avancer ses arguments pour se défendre. Si la tentative de conciliation échoue, l’employeur notifiera au salarié le licenciement au moins deux jours ouvrables après l’entretien. La lettre de licenciement ne peut donc être envoyée au plus tôt que le troisième jour suivant l’entretien.
En cas de faute
En invoquant une faute du salarié pour justifier le licenciement, l’employeur se place automatiquement sur le terrain disciplinaire. En pratique, il doit entamer la procédure sans tarder. A partir du moment où l’employeur a connaissance de la faute, il dispose d’un délai maximal de deux mois pour convoquer le salarié à l’entretien préalable au licenciement. Puis, la lettre de rupture sera expédiée au moins deux jours ouvrables après l’entretien, sans dépasser un mois. Si l’employeur ne respecte pas cette procédure, non seulement le licenciement est irrégulier, mais il sera également jugé sans cause réelle et sérieuse.
à retenir
L’insuffisance professionnelle se caractérise par le manque de compétences. Selon la jurisprudence, elle constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Le comportement fautif consiste en des négligences délibérées, un manque d’attention ou de soin dans l’exécution d’un travail. Sont également visés les actes d’insubordination.
Une faute légère ne suffit pas à motiver un licenciement.
Le manque de motivation au travail n’est pas un motif suffisant de licenciement, car ce simple grief est subjectif et incontrôlable par les juges.
Un CDD peut être rompu avant son terme en cas de faute grave mais pas en cas d’insuffisance professionnelle.
l’avis de l’expert – Alain Fallourd Avocat : Comment qualifier une erreur de délivrance commise par un adjoint ?
« Une erreur de délivrance peut être le résultat d’une incompétence. C’est le cas lorsque l’aptitude professionnelle du salarié est jugée insuffisante. Le plus souvent, il s’agit d’une faute. On distingue quatre types de faute : légère, sérieuse, grave et lourde. Dans tous les cas, la détermination de cette faute relève des pouvoirs disciplinaires de l’employeur. Pour cela, il utilisera différents critères dont l’ancienneté du salarié, son comportement dans l’officine, les faits antérieurs, la nature du produit délivré, la lisibilité de l’ordonnance. La nature du produit est bien souvent le critère le plus à même de justifier un licenciement pour faute grave. En effet, une erreur dans la délivrance d’un produit médicamenteux, exposant directement autrui à un risque immédiat, constitue une violation particulière de sécurité ou de prudence. Il faut par ailleurs savoir qu’une faute légère ne justifie pas un licenciement. »
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