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Pas de pitié pour les fraudeurs
Opération mains propres à Marseille où des pharmaciens ont été mis en cause pour fraude à la Sécurité Sociale. Au plan national, la CNAM lance en ce moment même des contrôles massifs destinés à être pérennisés.
Le 28 septembre, La Provence titre : « Le pharmacien vole un million à la Sécu ». Et explique, en publiant son nom et la photo de son officine, qu’il a falsifié les « ordonnances d’une quarantaine de médecins avec une infirmière et une préparatrice ». Le lendemain, le quotidien publie la photo du pharmacien écroué. En cause, « des prescriptions falsifiées, de fausses prescriptions, des facturations a posteriori en l’absence de carte Vitale, des délivrances inférieures au volume prescrit ». Renseignement pris, le préjudice subi s’élèverait en fait à 270 000 Û et concernerait des produits onéreux : pansements antiescarres, poches urinaires, compresses. Les enquêteurs ont même été jusqu’à soupçonner l’officinal d’avoir commandité l’incendie criminel des archives de la CPAM pour effacer des preuves ! Cette affaire n’est malheureusement pas la seule à s’étaler dernièrement dans la presse, entre fausses ordonnances de Glivec, trafic de Subutex ou de médicaments entre la France et l’étranger.
Assainir la profession
Pour le syndicat des pharmaciens des Bouches-du-Rhône, la coupe est pleine. Trop même. Il a donc organisé au pied levé une réunion sur l’éthique avec l’Ordre, la caisse, l’Inspection et la faculté. Selon Charles Fauré, son président, « il s’agit de discuter entre les forces vives de l’officine, de trouver des solutions pour prévenir de telles dérives et assainir la profession ». Il ne décolère pas : « La profession est salie. Et ces affaires, dont celle de Bayonne [voir Le Moniteur n°2694], arrivent en même temps. Est-ce une coïncidence ? Quand on entend Nicolas Sarkozy attaquer ceux qui jouissent d’une rente de situation, nous sommes inquiets. Si nous voulons garder notre monopole, nous devons être irréprochables. »
Indiscutable. Sur l’action « mains propres » que pourrait mener le syndicat, Charles Fauré est plus nuancé : « Nous adressons régulièrement des informations à nos adhérents, nous les mettons en garde, mais c’est à la Sécu de faire le travail de contrôle, plutôt que de payer à l’aveugle. » Il questionne : « Qu’attend-elle pour sanctionner les 54 pharmaciens qui renouvellent les hypnotiques et nous font une concurrence déloyale ? » Le syndicat propose également de « déplacer de la deuxième à la sixième année d’étude l’enseignement de l’éthique, et fournir ainsi des arguments aux étudiants qui disent constater que, pendant leur stage officinal, la pratique est très différente de ce qu’ils ont appris en cours »…
Pas de tribunal révolutionnaire
De son côté, François-Emmanuel Blanc, directeur de la CPAM-13, rappelle que « nos moyens d’analyse sont de plus en plus sophistiqués. Nous disposons de bases de données puissantes. Nous nous coordonnons avec le national. Cela nous permet d’échanger nos expériences, d’utiliser les typologies d’anomalies, les signalements qui nous parviennent tous les jours et de cibler nos contrôles ». Il évacue l’accusation de lenteur dont on le taxe : « Notre travail ne s’arrête pas à la suspicion de fraude. Il faut enquêter et transmettre les preuves au procureur. Cela prend du temps. » A la DRASS, Pierrette Mélé, inspectrice, regrette que « les moyens ne soient pas suffisants. En allant plus souvent dans les officines, nous pourrions détecter des fraudes et les signaler au parquet ».
Pour l’heure, Stéphane Pichon, président de l’Ordre régional, réfute l’accusation d’immobilisme : « Ceux qui s’écartent du code de déontologie seront sanctionnés sans états d’âme, sans complaisance et sans esprit corporatiste. Mais nous vivons dans un Etat de droit, pas dans un tribunal révolutionnaire. D’où le délai entre la découverte de l’affaire et le moment où elle est jugée. De plus, nous devons toujours laisser prévaloir la présomption d’innocence. »
Il reste que l’Ordre entend jouer son rôle : « Nous souhaitons que les fournisseurs de tout établissement pharmaceutique aient la possibilité, voire l’obligation, de détecter les comportements anormaux (par rapport à une moyenne ou selon des critères à établir) et de les faire connaître aux autorités, informe Jean-Luc Audhoui, membre du Conseil national. D’où la nécessité de modifier le Code de la santé publique. Et pourquoi pas dès le PLFSS 2008 ? » Quant à l’affaire de Marseille, « nous nous constituerons partie civile sur ce type d’anomalies », affirme-t-il
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