Mobilisation de la profession : la grève est-elle possible ?

Mobilisation de la profession : la grève est-elle possible ?

Publié le 29 août 2014
Par Anne-Charlotte Navarro
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Sur les réseaux sociaux, en particulier, certains pharmaciens évoquent d’ores et déjà la grève pour protester contre la réforme gouvernementale de libéralisation de la pharmacie. Mais est-elle vraiment possible s’agissant d’une pharmacie d’officine ? Et que faire si vous êtes réquisitionné par la préfecture ?

L’opération « Soirée verte », qui se tiendra dans la nuit du lundi 1er au mardi 2 septembre, est le premier acte d’une mobilisation qui voit la profession s’opposer au projet gouvernemental de libéralisation de la pharmacie. D’autres actions sont déjà envisagées, pouvant aller jusqu’à la grève du service officinal.

Juridiquement est-ce possible ?

En langage juridique, seuls les salariés disposent du droit de grève, le but de cette action étant de présenter des revendications auprès de l’employeur. Ainsi, un pharmacien non salarié qui n’ouvre pas sa pharmacie ne bénéficie pas du régime juridique de la grève, contrairement aux salariés de l’officine. Il est néanmoins possible pour les titulaires de fermer leur officine en guise de protestation, en semaine ou lors du service des gardes. Dans ce dernier cas, le préfet peut décider de réquisitionner la pharmacie.

Qu’est-ce-que la réquisition préfectorale ?

Le préfet est le représentant de l’Etat en région. A ce titre, il est garant de la sécurité, de la tranquillité, et de la salubrité publique. Ces trois éléments composent l’ordre public. Ce rôle l’autorise à réquisitionner tout bien ou service pour assurer l’ordre public. Le refus collectif des pharmaciens de participer à un service de garde est considéré comme une atteinte à l’ordre public. Dès lors, les préfets peuvent contraindre des pharmacies à assurer le service de garde.

Quelles sont les conditions de validité de la réquisition préfectorale ?

La réquisition est un acte administratif. Il est soumis au respect de certaines règles :
– la situation doit porter une atteinte suffisamment grave à l’ordre public ;
– la réquisition doit être dictée par l’urgence ;
– les mesures doivent être proportionnées à l’atteinte ;
– il doit être notifié aux pharmaciens concernés.

En pratique, l’acte de réquisition doit préciser en quoi le refus des pharmaciens d’assurer des gardes constitue une atteinte à l’ordre public. Le préfet indique traditionnellement que ce refus porte atteinte à la protection de la santé publique et au principe de continuation du service public. La réquisition est proportionnée lorsque le préfet réquisitionne les pharmacies strictement nécessaires à la réalisation d’un service de garde. Enfin, l’acte doit être notifié, c’est-à-dire qu’il doit être remis aux pharmaciens concernés par un huissier, un policier, un gendarme, ou envoyé en courrier recommandé avec accusé de réception.

Que faire si vous êtes réquisitionné ?

Si votre pharmacie est réquisitionnée, vous serez contraint d’ouvrir l’officine et de servir les patients se présentant dans les mêmes conditions que pour un service de garde. Vous pouvez indiquer par tout moyen vos revendications et votre situation auprès des patients sans que le service n’en soit pénalisé.

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Que risquez-vous en cas de non respect de la réquisition ?

Le non respect de la réquisition expose le pharmacien à une sanction pénale pouvant aller jusqu’à 6 mois d’emprisonnement et 10 000 euros d’amende. De plus, le juge peut vous contraindre à exécuter des gardes sous astreinte. Dans ce cas, vous devez vous acquitter du paiement d’une somme d’argent jusqu’à l’ouverture de la pharmacie.