L’insuffisance cardiaque

Publié le 23 janvier 2015
Par Maïtena Teknetzian
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Souvent consécutive à une autre maladie cardio-vasculaire, l’insuffisance cardiaque est l’incapacité du cœur à assurer un débit sanguin suffisant aux besoins de l’organisme. Elle est responsable d’une morbi-mortalité importante. L’âge moyen des patients est de 75 ans. Toutefois, des mesures hygiéno-diététiques et un traitement médicamenteux bien codifié améliorent le pronostic.

La maladie
PHYSIOPATHOLOGIE
Le fonctionnement du cœur
Rôle du système cardiovasculaire
Ce système distribue du sang oxygéné aux différents organes et assure le retour du sang chargé de gaz carbonique jusqu’au cœur.

Deux pompes
Le cœur est constitué de deux pompes : le cœur droit et le cœur gauche (voir infographie).
Le cœur droit assure la récupération, dans l’oreillette droite, du sang veineux (sang bleu), riche en oxyde de carbone, via les veines caves. Puis le sang arrive dans le ventricule droit et est éjecté dans l’artère pulmonaire jusqu’aux poumons, qui éliminent le gaz carbonique et oxygènent le sang .
Ce sang oxygéné (sang rouge) retourne au cœur par les veines pulmonaires en se déversant
dans l’oreillette gauche , puis le ventricule gauche. Ce dernier va ensuite propulser le sang vers l’aorte, pour qu’il soit distribué aux différents organes.

Systole et diastole
La systole correspond à la phase de contraction simultanée des deux ventricules permettant
d’éjecter le sang vers les poumons (ventricule droit) et les organes (ventricule gauche).
La diastole correspond à la phase de relâchement des ventricules, qui se remplissent et se préparent à la systole suivante.

Débit cardiaque (DC)
Il est d’environ 5 litres par minute et est défini par : DC = fréquence cardiaque x volume d’éjection systolique. Le volume d’éjection systolique est le volume de sang éjecté par le ventricule lors de la systole.

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L’insuffisance cardiaque
Elle correspond à l’incapacité du cœur à assurer un débit de sang suffisant aux besoins de l’organisme. Le cœur a des difficultés à pomper le sang et ne fournit donc pas assez d’oxygène aux organes. Le débit sanguin cardiaque diminue. La pression intravasculaire augmente en amont du cœur, ce qui se traduit par une accumulation de liquide dans les membres inférieurs et dans les poumons.

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Systolique ou diastolique
Sur le plan physiopathologique, on distingue deux formes d’insuffisance cardiaque (IC).

Insuffisance cardiaque systolique ou à fraction d’éjection altérée
Elle correspond à une difficulté du cœur à se vider en raison d’une altération des capacités
de contraction ventriculaire. Caractérisée par une baisse de la fraction d’éjection (FE) inférieure à 40- 50 %, elle représente 60 % des cas d’insuffisance cardiaque.

Insuffisance cardiaque par défaut de remplissage ou à fraction d’éjection conservée
Ici, le cœur présente des difficultés à se remplir du fait d’une perte d’élasticité de ses parois.
Dans ce type d’IC, anciennement appelée IC diastolique, les capacités de relaxation du myocarde sont altérées. La fonction systolique est préservée, et par là même, la fraction d’éjection conservée. Elle représente 40 % des cas.

Droite, gauche ou globale
En fonction du ventricule défaillant, on distingue l’insuffisance ventriculaire gauche ou
droite. L’insuffisance est dite globale quand les deux ventricules sont défaillants.
Lorsqu’elle est systolique (à fraction d’éjection altérée), l’insuffisance cardiaque concerne le
plus souvent le ventricule gauche.
Une IC droite résulte souvent d’une IC gauche.

Mécanismes de compensation
En cas d’insuffisance cardiaque, l’organisme va s’adapter pour tenter de conserver un débit
cardiaque suffisant. Il va stimuler des systèmes neuro-hormonaux afin de corriger la pression
artérielle et d’augmenter la volémie.

Stimulation du système sympathique
Elle vise à accroître la fréquence cardiaque pour augmenter le débit cardiaque. Cette stimulation est responsable d’une vasoconstriction artérielle et veineuse qui tend à faire monter les pressions de remplissage ventriculaire gauche (et conduit à l’œdème pulmonaire).

Stimulation du système rénine-angiotensine-aldostérone (RAA)
Elle vise à accroître la volémie pour augmenter le volume d’éjection systolique.
L’hypoperfusion rénale stimule le système rénine-angiotensine, ce qui augmente la sécrétion
d’angiotensine II, vasoconstrictrice, et de l’aldostérone (voir Info+), responsable d’une
rétention hydro-sodée.
De plus, cette stimulation du système RAA entraîne celle de la sécrétion d’hormone antidiurétique, ce qui exagère la rétention hydrique.

Délétères à long terme
Ces réactions d’adaptation sont néfastes à long terme.
La stimulation sympathique est à l’origine d’une tachycardie et explique les palpitations
ressenties par le patient.
La stimulation du système rénine-angiotensine entretient l’insuffisance cardiaque par un cercle vicieux. La vasoconstriction et la rétention hydrosodée augmentent le travail cardiaque, ce qui favorise un remodelage ventriculaire et contribue à l’évolution péjorative de la maladie,
le remodelage entretenant lui-même une stimulation neuro-hormonale permanente.

INFO+
Le remodelage peut s’effectuer selon deux modalités :
> une hypertrophie cardiaque : la paroi est épaisse. Le remplissage est
anormal, même si la contraction peut rester longtemps normale.
(IC à FE préservée) ;
> une dilatation : les parois du cœur sont amincies et le volume d’éjection est anormal.
(IC à FE altérée).

INFO+
L’aldostérone, hormone minéralocorticoïde sécrétée par les glandes surrénales,
favorise la réabsorption de l’eau et du sodium et l’élimination du potassium. En cas
de perte d’eau, le corps sécrète plus d’aldostérone pour préserver son sodium.
L’augmentation de la kaliémie (potassium) stimule sa production et vice versa.

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Avis d’expert : Dr Christophe Berlemont. Cardiologue, centre cardiologique d’Évecquemont (78), membre de la Société française de cardiologie.

« L’insuffisant cardiaque se distingue d’un hypertendu par son bêta-bloquant et son diurétique »
À l’officine, comment identifier un patient insuffisant cardiaque ?
Il peut se distinguer d’un hypertendu grâce à son traitement. Par son bêta-bloquant bien sûr,
mais aussi par son diurétique. Les hypertendus ont le plus souvent un diurétique thiazidique
comme l’indapamide, tandis qu’une prescription de furosémide (Lasilix) peut faire
suspecter une insuffisance cardiaque.

Quelle est l’iatrogénie médicamenteuse ?
De façon générale, les traitements et la pathologie sont pourvoyeurs d’hypotension,
surtout orthostatique. Il faut conseiller aux patients de se lever en deux temps. Ils en
prennent d’ailleurs souvent l’habitude car ils comprennent vite qu’ils ne se sentent pas bien
quand ils se lèvent trop vite ! Ces problèmes sont plus volontiers marqués la nuit, lors des
levers pour uriner. La miction provoque un réflexe vagal et majore les risques d’hypotension,
d’où des chutes nocturnes, conduisant le patient aux urgences. Les bêta-bloquants
peuvent…

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À lire dans Porphyre n°509 de février 2015