Le boom des eaux micellaires
Stars du démaquillage, les eaux micellaires ont évincé le Sacro-Saint Duo « lait + tonique ». Depuis une dizaine d’années, leurs ventes progressent en officine… qui doit désormais faire face à la concurrence des autres circuits.
Très largement en tête de la catégorie démaquillage, l’eau micellaire représente 52 % des ventes en valeur, selon IMS Health, en cumul annuel mobile à fin février 2015. Elle doit son succès à la simplification de la gestuelle du nettoyage, mais surtout à sa formule. Soit de l’eau purifiée dans laquelle de fines particules huileuses appelées micelles sont en suspension. Ainsi, à l’usage, la partie hydrophobe va venir emprisonner les impuretés au coeur de la micelle. La peau est donc parfaitement nettoyée. Autre atout et non des moindres : l’eau micellaire ne contient pas d’émulsionnant – qui lie la phase aqueuse et huileuse d’un cosmétique, comme pour les laits ou les crèmes -, ce qui en fait un produit mieux toléré. « La sensation de douceur sans film gras a été la clé de leur succès », estime Florence Grasser, chef de produit Ducray. « La formule à l’eau, symbole de propreté et de pureté mais aussi de sécurité apparente, représente un avantage technique », explique le Dr Michèle Sayag, directrice de la stratégie médicale de Bioderma.
EFFET boule de neige
Prescrite par les dermatos, vantée par les maquilleurs de stars, l’eau micellaire est devenue en quelques années le geste incontournable du démaquillage. « Aujourd’hui, un flacon de Créaline H2O est vendu toutes les trois secondes dans le monde », constate Michèle Sayag. Pourtant, ce geste, initié il y a 20 ans par la marque, s’est heurté avant de percer au scepticisme des professionnels de santé habitués au bon vieux duo lait et tonique. « Au début, même les médecins n’y croyaient pas. Il y avait une suspicion à nettoyer la peau avec de l’eau, le produit était perçu comme un gadget », poursuit la directrice de la stratégie médicale de Bioderma. Lancée en pharmacie, la formule fait néanmoins recette auprès des peaux intolérantes et de certaines pathologies comme la rosacée. Puis ce sont les maquilleurs professionnels qui s’en emparent. Le bouche-à-oreille a fait le reste.
En effet, depuis, le produit a fait du chemin. Sur un an à fin février 2015, les eaux micellaires sont en croissance de 6,9 % en valeur selon IMS Health, pour un chiffre d’affaires de plus de 32 millions d’euros. Aujourd’hui, elles sont complètement en phase avec les attentes des consommatrices. D’une part, elles estiment de plus en plus avoir une peau sensible (9 femmes sur 10 en France). D’autre part, elles sont à la recherche de produits tout en un.
VALORISATION en marche
Les laboratoires ont compris le potentiel de cette eau aux mille vertus et l’ont déclinée autour de différentes typologies de peaux. Avène a appliqué le concept à ses gammes Cleanance et Hydrance Optimale. Chez Bioderma, Créaline H20 existe aussi pour peaux acnéiques et peaux très sèches… Pour se démarquer, d’autres acteurs ont décidé de faire évoluer la galénique. C’est le cas d’Ictyane (Ducray) qui a abordé la catégorie tardivement – l’année dernière – sur un marché déjà très bataillé. « Il était primordial d’arriver avec une proposition différenciante, décrit Florence Grasser. Nous proposons donc une version plus technique aux propriétés non seulement nettoyantes mais aussi hydratantes. De plus, notre référence est testée sur les yeux sensibles et porteurs de lenti. ».
A-Derma va encore plus loin dans l’innovation en ayant créé, l’année dernière, une nouvelle catégorie, celle du lait micellaire pour les femmes à la recherche de solutions plus « enveloppantes ». La Roche-Posay vient de mettre sur le marché une gelée d’eau micellaire, à la texture pouvant être massée sur la peau pour plus de confort. Vichy se fait également remarquer avec une huile micellaire qui nettoie même le maquillage waterproof. Aujourd’hui, la tendance est à la valorisation du produit. Car, revers de la médaille, l’eau micellaire souffre d’une certaine banalisation due aux offres promotionnelles. Tous les laboratoires en lice conduisent une politique de prix assez agressive via notamment les grands formats, ou des lots de deux. En témoigne l’évolution des volumes de ventes à + 12,7 %, largement supérieure à la progression du CA (+ 6,9 %).
OFFRES venues d’ailleurs
L’officine doit jouer l’attractivité car l’eau micellaire ne s’est pas arrêtée à ses portes. La concurrence est de taille. Mixa a littéralement démocratisé le produit en lançant d’emblée en grande distribution 4 références physiologiques en octobre 2014. La marque s’inspire clairement des codes de la pharmacie : bouteilles arrondies et translucides, couleurs pastel pour les capots… et surtout des promesses à destination des peaux sujettes aux rougeurs, à tendance acnéique, sèches et irritées. A prix défiant comme toujours toute concurrence : 5,75 € les 400 ml ! L’eau micellaire se développe tout autant dans les parfumeries sélectives car Lancôme, Yves Saint Laurent ou Dior ont mis sur le marché leur version à prix d’or : il faut débourser entre 25 et 35 € pour 200 ml du précieux élixir. Cette fois, on est loin des 9,95 € les 250 ml annoncés hors promotion par Bioderma…
LEADERS. Avène mène la danse des eaux micellaires avec 27,4 % de parts de marché en valeur, devant La Roche-Posay à 23,5 % et Bioderma à 6,5 % (IMS, en cumul annuel mobile à fin février 2015).
SECONDE GÉNÉRATION. Peaux acnéiques, rosacée, peaux sèches, pour chaque type de peau son eau micellaire.
NOUVELLES GALÉNIQUES. Les micelles peuvent aussi être formulées dans une huile ou un lait, en témoignent les lancements d’A-Derma, Decléor ou Vichy.
CONSO
Une femme sur 2 utilise une eau micellaire selon une étude beauty Care Women europe 2012.
+ 12,7 %
C’est l’évolution en volume des ventes, estimées à 3 119 195 unités, en cumul annuel à fin février 2015.
SociétéUn geste européen
Si l’eau micellaire est entrée dans les moeurs en Europe, « aux Etats-Unis ce sont les produits qui se rincent qui historiquement sont les plus utilisés », décrit Leila Rochet-Podvin, fondatrice de l’agence de conseil Cosmetics Inspiration & Creation.
« Là-bas, le terme de micellaire n’est pas forcément mis en avant, on parle plus d’“eau nettoyante” pour conserver une vision puriste du nettoyage », poursuit-elle. En Asie, ce n’est pas la simplification du démaquillage qui séduit les consommatrices, car elles pratiquent un rituel qui consiste à utiliser beaucoup de produits pour un nettoyage très complet et ce, deux fois par jour. « L’eau micellaire y a trouvé sa place, notamment après un lavant à rincer et avant une lotion rééquilibrante », explique la spécialiste.
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