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UNE INDISPENSABLE ORGANISATION
Plus de deux ans après la mise en route des entretiens pharmaceutiques sur les AVK, les pharmaciens ont désormais le dispositif bien en main. Il reste néanmoins porteurde quelques frustrations, concernant notamment le tempsà y consacrer. Et donc l’aspect financier.
Mis en place durant l’été 2013, les entretiens pharmaceutiques sont devenus une pratique bien ancrée dans l’activité quotidienne des officinaux (voir encadré ci-contre). Ceux qui les pratiquent ne semblent pas avoir été confrontés à des problèmes d’aménagement de locaux. « Nous avions déjà un espace de confidentialité car nous faisons de l’accompagnement au sevrage tabagique. Nous l’utilisons donc pour les entretiens pharmaceutiques », explique Bruno Julia, titulaire à Lherm (Haute-Garonne), qui compte 10 personnes dont deux titulaires. Pour la plupart des officines dont la surface ne permet pas la création d’un box de confidentialité à part entière, le bureau du titulaire sert d’espace d’entretien. « Nous avons sommairement aménagé notre bureau pour recevoir les patients », précise de son côté Valérie Pilandon, installée à Riom (Puy-de-Dôme) dans une officine de 5 personnes.
D’une manière générale, les titulaires ont limité drastiquement les investissements pour organiser les entretiens. Pour ceux qui ne disposent même pas d’un bureau, pas question de bouleverser l’aménagement de l’espace de vente. A Lyon, la titulaire d’une petite officine de quartier (qui tient à garder l’anonymat) travaille avec deux préparatrices à temps partiel et ne peut pas « s’isoler pour réaliser des entretiens formalisés ». Elle n’a donc pas adhéré au dispositif. Celui-ci est en revanche très courant dans les pharmacies où l’on trouve au moins deux diplômés à temps plein.
L’idéal est de former toute l’équipe
La formation est aussi un passage obligé pour organiser les entretiens pharmaceutiques, mais elle a été bien acceptée. Si c’est un même pharmacien qui mène la quasi-totalité des entretiens, c’est l’ensemble des diplômés de l’officine qui se forme. Certains vont même plus loin. « En plus des quatre pharmaciens de l’équipe, nous avons formé nos préparatrices car nous souhaitions recruter le plus possible de patients. C’est important que chacun, au comptoir, puisse expliquer en quoi consistent ces entretiens », raconte Véronique Rigaud-Jury, titulaire à Yenne (Savoie). Une initiative plébiscitée par Nicolas Deguilhem, consultant en management. « L’idéal est de former en interne l’ensemble du personnel de l’officine, notamment les préparateurs car eux aussi sont en contact avec la clientèle et participent activement au recrutement des patients. Par ailleurs, au-delà du recrutement pour les entretiens pharmaceutiques, cette formation est un moyen de renforcer la cohésion au sein de l’équipe et de responsabiliser chacun. »
Reste à trouver le temps de mettre en place une telle démarche de management. Car le recrutement prend du temps. C’est au comptoir qu’il se fait majoritairement. « Nous avons fait de l’affichage dans l’officine et nous en avons beaucoup parlé au comptoir », se souvient Bruno Julia. Guillaume Froment, titulaire à Mourmelon-le-Grand (Marne), a attendu le départ du dispositif. « Des patients nous ont interrogés après avoir reçu le courrier de l’Assurance maladie. Nous avons aussi sollicité la vingtaine de patients réguliers de l’officine sous antivitamines K, et peu ont refusé les entretiens. »
A Annecy (Haute-Savoie), à la Pharmacie Clarine les résultats ne sont pas aussi positifs. L’officine a mis en place un service de prise de rendez-vous en ligne sur son site Internet, pensant « que cela pourrait être un moyen d’attirer des patients ». En vain : personne ne s’est manifesté et le service est désormais à l’arrêt.
Lors du recrutement, les rendez-vous sont planifiés. C’est là qu’il faut avoir une organisation bien rodée. « Il faut trouver le créneau où toute l’équipe est présente à la pharmacie pour que l’une des titulaires puisse s’absenter du comptoir pour un entretien », explique Valérie Pilandon. Dans l’officine de Bruno Julia, qui compte trois pharmaciens, pas de souci. « Lorsque l’un d’entre nous est en entretien, un autre peut rester disponible pour le comptoir. »
Un premier entretien chronophage
En outre, au moment de l’entretien, les pharmaciens constatent qu’ils dépassent largement les 20 minutes prévues dans le cadre du dispositif. « En moins de trente minutes, il est impossible de bien faire le premier entretien », affirme Nicolas Meningaud, titulaire à Cugnaux (Haute-Garonne). Entre les explications nécessaires au comptoir et un premier entretien qui peut prendre 45 minutes à 1 heure, l’organisation de cette nouvelle mission est donc particulièrement chronophage. Comme le second entretien est peu suivi, les pharmaciens doivent aussi prendre le temps de relancer les patients concernés pour s’assurer que les messages passés antérieurement ont bien été entendus. « Même si beaucoup de patients refusent le second entretien, nous réalisons une sorte de suivi au comptoir », se résigne Valérie Pilandon.
Cette perte de temps laisse le sentiment aux pharmaciens d’être quelque peu perdants. « Il faudrait que la rémunération de cet acte soit au moins doublée pour que nous en tirions un bilan positif sur le plan financier », plaide Nicolas Meningaud. D’autant que les patients concernés sont en général fidèles et que leur panier moyen d’achats n’augmente pas après les entretiens.
Pour diminuer le temps passé en entretien, le consultant Nicolas Deguilhem suggère aux équipes officinales de le préparer en amont, selon le profil des patients, afin de délivrer des conseils ciblés. « La plupart des pharmaciens ne prennent pas le temps d’analyser finement le profil de leur patient, pensant que cela leur prendrait encore beaucoup de temps. Pourtant, cela leur ferait gagner du temps lors de l’entretien », plaide le consultant.
Même si les entretiens pharmaceutiques des patients sous antivitamine K sont chronophages et peu rémunérateurs, le bilan reste positif pour la plupart des pharmaciens interrogés. « Ils valorisent notre métier et les patients nous voient de façon différente », souligne la pharmacienne riomoise. « C’est une contrainte supplémentaire, mais c’est une évolution positive du métier de pharmacien qui nous positionne comme un professionnel de santé », assure Bruno Julia.
Des pharmaciens très engagés
En décembre 2014, 18 mois après être entrés en vigueur, la Caisse nationale d’assurance maladie avait dressé un premier bilan positif de l’organisation des entretiens pharmaceutiques des patients sous AVK :
– 14 584 officines (63 %) y ont participé,
– 161 110 entretiens réalisés,
– 74 % des pharmaciens estiment que les patients améliorent la connaissance de leur traitement,
– pour 71 %, les relations avec les patients sont améliorées,
– 92 % des pharmaciens sont prêts à poursuivre la démarche,
– note de satisfaction : 6,8/10 pour les pharmaciens, 8,7/10 pour les patients.
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