Une carence en preuves

On ne conseille une supplémentation en vitamine D (calciférol) qu’à quelques populations ciblées? : les personnes dont la peau noire arrête en grande partie le rayonnement UVB et nuit à la synthèse de cette vitamine et les personnes ayant peu accès au soleil, comme les jeunes enfants, les femmes enceintes, les femmes voilées et les personnes âgées peu mobiles. Chez les seniors, on préférera les supplémentations associant vitamine D et calcium pour éviter un effet délétère sur l’os.

Au-delà de ses indications connues de longue date, la vitamine D connaît un engouement sans précédent, aussi bien de la part des prescripteurs que des chercheurs. En 2014, les revues médicales y ont consacré plus de 10 000 articles, toutes spécialités confondues. Connue depuis plusieurs dizaines d’années pour son rôle clé dans la croissance osseuse, il semblerait que la vitamine D agisse également dans les cellules du foie, du système immunitaire ou encore du cerveau.

« Mais attention, toutes les études ne démontrent pas de lien de causalité. Ce qui est certain c’est qu’elle a non seulement un rôle indispensable pour l’os mais aussi pour le système immunitaire », précise le D^r Grégory Debrus, nutritionniste et membre de la Fédération nationale des associations de médecins nutritionnistes.

Un déficit en calciférol corrélé à la SEP

Faut-il alors s’inquiéter du fait que la météo hexagonale place une majorité d’entre nous en situation de carence en hiver et au printemps ? L’ampoule de vitamine D doit-elle devenir un réflexe préventif pour tous à la fin des beaux jours ? Les scientifiques sont encore dans l’attente de résultats concrets. Mais, pour certaines pathologies, les premiers résultats sont encourageants.

En août dernier, une équipe canadienne a ainsi mis en évidence qu’un faible taux de vitamine D est fortement associé à la survenue de sclérose en plaques (SEP). Les auteurs envisagent donc de supplémenter les personnes à risque. Autre constat, une équipe américaine a montré en décembre que les fractures de fatigue concernaient en majorité des sportifs carencés en vitamine D, et une étude prospective doit débuter pour savoir si une supplémentation réduirait le risque de blessures.

Mais, comme les oméga-3 avaient suscité un emballement assez comparable, il y a fort à parier que la vitamine D se révèle finalement utile dans de nombreuses pathologies diverses, mais plutôt en tant que cofacteur. « Une étude est en cours dans le VIH et il semblerait que les patients supplémentés en vitamineD supportent mieux les traitements antirétroviraux et aient une charge virale mieux contrôlée », évoque le D^r Debrus.

Les compléments alimentaires surfent également sur cette « vague vitamine D ». « Dans des situations aiguës d’infection, de troubles du sommeil ou d’asthénie passagère, une cure de compléments multivitaminés peut être intéressante mais il faut savoir que le bénéfice est modéré », souligne le D^r Grégory Debrus. Et il ne doit pas y avoir de confusion dans l’esprit des patients : en cas de carence, il faut une supplémentation sur prescription médicale.

La quantité de vitamine D apportée par une cure de compléments alimentaires ne peut pas compenser un déficit de grande ampleur.