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DANS LES PAS D’UN FUTUR SPÉCIALISTE
Et si la podologie, c’était le pied ? Une chose est sûre, les jeunes diplômés en pharmacie se ruent sur le DU d’orthopédie, et les titulaires qui ont franchi le pas ne le regrettent pas tant cette activité s’avère gratifiante professionnellement… et financièrement.
Porté par les besoins de catégories de population en croissance comme les seniors, les diabétiques et les sportifs amateurs, le marché de la podologie progresse de 2 à 5 % par an », fait valoir Alain Cardinet, P-DG de Podofrance. De plus, les marges dégagées par les orthèses plantaires ont de quoi séduire des pharmacies en quête de ressort, avec un coefficient multiplicateur situé entre 2 et 3. Selon Hervé Ménard, orthopédiste et chargé de cours à la faculté de pharmacie de Besançon, « il faut entre deux et trois ans pour atteindre un régime de croisière d’une centaine de paires écoulées par an, mais la vente d’une dizaine de paires suffit à amortir l’investissement de départ ».
La podologie sur mesure représente une compétence supplémentaire et différenciante pour le pharmacien. « Cette activité implique une prise en charge plus personnalisée », souligne Hervé Ménard. Même son de cloche du côté de Michaël Podguszer, titulaire à Stains (Seine-Saint-Denis) : « La barrière du comptoir disparaît, et la personne est suivie sur la durée, ce qui est d’autant plus enrichissant. » D’autant qu’« avec des techniques et des outils assez simples à maîtriser, on a accès à la prise en charge d’une grande variété de pathologies, que l’on peut traiter en combinant différents appareillages », ajoute Hervé Ménard. « Les patients peuvent venir pour une ordonnance, et se retrouver suivis au niveau podologique également, avec un seul référent qui a une vue d’ensemble sur leur dossier : c’est un argument de recrutement et de fidélisation », plaide Anne-Sophie Garreau, orthopédiste à la Pharmacie des Capucins à Compiègne (Oise). Et c’est aussi ce qui fait la plus-value de l’officine par rapport aux autres nombreux acteurs du marché.
Se former pour décrocher l’agrément
La dispensation de prestations d’orthopédie à l’officine passe par un agrément indispensable à leur prise en charge par la Sécurité sociale, délivré par les caisses régionales d’Assurance Maladie. Pour ce faire, il faut justifier d’un DU d’orthopédie. De nombreuses facultés de pharmacie dispensent la formation nécessaire, d’une durée d’environ 120 heures réparties sur plusieurs semaines ou mois, pour un coût de 1 500 euros (avec possibilité de prise en charge par un organisme conventionné).
La consultation d’orthopédie comprend, dans un premier temps, l’examen clinique du pied malade et la prise d’empreintes, voire le moulage complet du pied. Elle est suivie d’au moins de deux autres rendez-vous pour l’essayage des semelles et le suivi. En matière d’orthèses plantaires, l’équipement incontournable se compose d’un podoscope (appareil d’analyse de la voûte plantaire) et d’un podographe (appareil de prise d’empreintes). Les obligations réglementaires portent aussi sur l’aménagement des locaux, qui doivent comporter une cabine d’habillage, une table ou un lit d’examen, un éclairage correct, et permettre un isolement phonique et visuel lors de l’essayage. L’espace nécessaire peut être de taille modeste : « Un bureau de 5 à 9 mètres carrés suffira, s’il est bien agencé, estime Hervé Ménard. Pour gagner en efficacité, on prévoira une table inclinable et un siège pivotant pour le professionnel. » L’investissement de base « s’élève à environ 1 000 euros pour le matériel, auquel il faut ajouter les accessoires, les thermoformables à découper représentant un budget d’environ 200 euros », informe Michael Podguszer. En matière d’organisation, « je programme mes consultations d’une durée de 20 minutes environ dans les moments creux de la journée », explique le pharmacien, tandis que dans l’officine où travaille Anne-Sophie Garreau, l’orthopédiste et le titulaire se répartissent la tâche, ce qui leur permet d’accueillir les patients sans rendez-vous.
Passer à la pointure supérieure
On peut rebondir sur la mise en place de rendez-vous podo-orthopédiques pour valoriser et développer le rayon des soins des pieds. L’officine où exerce Anne-Sophie Garreau a ainsi installé une véritable boutique d’orthopédie où sont regroupés l’ensemble des produits et services. De son côté, Michaël Podguszer propose à sa clientèle aussi bien du petit appareillage type attelles que des pansements spécifiques, mais envisage également de développer une offre de chaussures thérapeutiques et, plus largement, d’appareillage médical.
Communiquer à bon escient
Différentes possibilités s’offrent au pharmacien pour faire connaître son activité de podologie en respectant les règles de la communication officinale. « Nous en parlons directement à nos clients susceptibles d’être concernés, et nous laissons aussi sur le comptoir des cartes de visite mettant en avant la fabrication de semelles orthopédiques pour lancer le dialogue », témoigne ainsi Michaël Podguszer, qui prévoit aussi de concevoir une vitrine à la promotion de cette spécialité.
Enfin, « le pharmacien est autorisé à communiquer à l’extérieur non sur les produits mais sur l’examen clinique qu’il pratique, et peut donc le faire, par exemple, auprès des médecins, clubs de sport et autres partenaires potentiels dans le périmètre de l’officine », précise Hervé Ménard, citant le cas d’un titulaire devenu le prestataire attitré de… la base militaire voisine.
Les semelles font peu d’émules
« Seulement 5 % des pharmaciens fabriquent les semelles à l’officine, le plus souvent en embauchant des orthopédistes pour le faire, indique Alain Cardinet, P-DG de Podofrance. Les autres envoient les empreintes réalisées par leurs soins dans des centres qui s’occupent de la confection des orthèses. » Le marché compte une dizaine d’acteurs, nationaux et locaux : si Podofrance, l’inventeur de la semelle thermoformée, et Alteor sont considérés comme des spécialistes de l’officine, citons aussi Manachau, Gibaud, Capron… Michaël Podguszer, jeune titulaire à Stains, s’est tourné vers la sous-traitance. Il pratique le diagnostic et l’essayage, et juge « la fabrication chronophage, peu rentable et trop technique ». De son côté, Anne-Sophie Garreau, pédicure-podologue et orthopédiste passée par l’exercice libéral, est salariée depuis un an dans une pharmacie qui a opté pour la fabrication en interne des semelles orthopédiques. « Le titulaire possède lui-même un DU d’orthopédie et avait déjà développé la podologie sur mesure, mais il souhaitait pouvoir couvrir des besoins cliniques plus pointus. Je dispose ainsi d’un atelier à l’étage de l’espace orthopédie. » Pour elle, « fabriquer les semelles sur place permet aussi d’éviter les mauvaises surprises avec les fournisseurs ». L’officine assure au minimum une dizaine de rendez-vous par semaine. Une alternative pour les pharmacies qui ne peuvent embaucher un spécialiste à plein temps consiste à faire intervenir un professionnel extérieur sur des créneaux préétablis.
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