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Une activité en trompe-l’oeil
En 2023, l’activité économique des officines a continué de progresser. Mais cette croissance cache une réalité plus inquiétante. Explications.
CONTRIBUTEURS
Joël Lecoeur (CGP)
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En apparence tout va bien. « Après les 41 milliards enregistrés en 2022, les médicaments totalisaient déjà un chiffre d’affaires (CA) de 43 milliards fin octobre, alimenté par une croissance soutenue de 9 % sur les neuf premiers mois de l’année, confie Joël Lecoeur, du cabinet LLA (groupe CGP). La tendance étant encore plus marquée pour les médicaments chers et onéreux qui ont, eux, respectivement progressé de 16 % et 23 %. » Même constat du côté du Gers Data. « Nos statistiques font ressortir un CA de 43,6 milliards d’euros à fin septembre sur 12 mois, le médicament sur prescription contribuant à lui seul à hauteur de 80 % à la croissance du CA des officines, note David Syr, directeur général adjoint du Gers Data. Le problème, c’est que cette progression est essentiellement nourrie par les médicaments chers et onéreux qui sont passés de 1 à 5 milliards entre 2017 et 2023. Or, sur tout ce qui sort de la réserve hospitalière, les marges sont plafonnées et altèrent la lecture de la rentabilité de l’entreprise pharmaceutique. »
Le hors-vignetté devrait, lui, davantage souffrir. « Comme nous avons rencontré, jusqu’à présent, un peu moins de pathologies que l’année dernière, l’OTC, l’aromathérapie et la phytothérapie devraient afficher une baisse comprise entre 2 et 3 %, prédit Joël Lecoeur. La parapharmacie devrait, pour sa part, légèrement progresser du fait de l’inflation sur le prix des produits et des changements de taux de TVA sur des médicaments qui sont passés de 10 à 20 % en intégrant la catégorie des dispositifs médicaux. »
L’arbre qui cache la forêt
A première vue, 2023 a tout pour être une bonne année. « En réalité, on se retrouve actuellement dans une situation où les pharmacies ont l’impression que tout va bien, car leur CA reste stable, voire en légère progression, mais l’augmentation du poste des médicaments chers et onéreux se traduira par une baisse significative de leur marge brute en euros, qui est le critère de référence pour mesurer la croissance d’une officine », explique Joël Lecoeur. « C’est même la première fois, à ma connaissance, que l’on a une telle déconnexion entre la croissance du CA et la rentabilité des officines qui vont voir leur excédent brut d’exploitation baisser. La bonne tenue de l’activité cache en effet des baisses de taux de marge sur la TVA à 2,1 % avec les médicaments chers et onéreux, mais aussi sur la TVA à 2,1 % et à 20 %, du fait des dispositifs médicaux remboursables. Si les officines ne rentrent pas dans une analyse catégorielle pour rechercher des relais de croissance en matière de CA et de marge, beaucoup de titulaires s’exposent à de mauvaises surprises », prévient David Syr.
Joël Lecoeur invite donc les propriétaires d’officines à la vigilance. « Ils doivent désormais surveiller au mois le mois leur marge brute et prendre très vite des mesures correctives si elle venait à se dégrader. Or, étant donné que la marge de manœuvre est faible sur les frais généraux et de personnel et que le développement de la substitution est devenu très compliqué avec les ruptures qui empêchent d’atteindre les objectifs de remise avec les laboratoires fournisseurs, 2024 s’annonce préoccupante concernant la rentabilité et la fragilité du réseau. Avec la hausse des taux d’intérêt, les officines pourront plus difficilement que par le passé mobiliser un refinancement. Il est donc à craindre que le nombre de procédures collectives, qui est déjà reparti à la hausse en 2023, s’accélère encore en 2024 », conclut Joël Lecoeur.
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