Petit à petit, la RSE fait son nid

Jeudi 14 décembre, Porphyre a franchi les portes coulissantes de la pharmacie des Tilleuls, à Villiers-sur-Marne (94). Cette officine est engagée dans la responsabilité sociale des entreprises (RSE), une démarche visant à réduire son impact environnemental et à améliorer le bien-être et les conditions de travail de l’équipe, tout en développant l’économie de l’officine et de son territoire. À ce titre, l’équipe de la pharmacie des Tilleuls a remporté le 2^e prix du Trophée RSE du préparateur organisé puis remis en décembre par Giropharm et Porphyre (voir encadré ci-dessous). « Les questions posées dans le dossier de candidature nous ont fait comprendre que nous menions déjà des actions de RSE sans le savoir ! », s’est étonné Bastien Werner, l’un des préparateurs, désormais référent RSE dans son officine. Preuve qu’au-delà d’un objectif à atteindre, la démarche est avant tout un état d’esprit. Les idées émergent, puis se concrétisent quand on se soucie de l’autre et de son environnement.

Dans cette pharmacie, toute l’équipe semble animée par un même but, porté ou secondé par la titulaire, Anne Barranx : se questionner et faire mieux chaque jour pour le patient, l’environnement ou le bien-être à l’officine. Gros plan sur une expérience de RSE collective bien enclenchée…

À dupliquer sans modération !

Adieu Pampers, bonjour Dodie !

En vitrine, puis à gauche de l’entrée, les petits paquets de couches de la marque Dodie nous font de l’œil. Démarche pédagogique oblige, l’explication se trouve en vitrine (voir photo vitrine ci-contre). À l’initiative de Zaharati Mbae, préparatrice mais aussi jeune maman, l’officine a délaissé les Pampers pour des couches plus vertueuses pour l’environnement. Zaharati Mbae a d’abord scruté les compositions. Sa source ? Le site de référence www. objectifbebebio.com « qui compare et classe les marques selon la composition de leurs produits, saine ou non », explique la jeune femme. Lieux de fabrication, prix pour le patient et marges de l’officine sont également au crible par Anne Barranx. Un référencement RSE doit non seulement être gage de qualité, préserver au mieux l’environnement, mais aussi respecter les parties prenantes, soutenir si possible le territoire local et le développement économique de l’entreprise, qui est le levier d’action. « Notre choix s’est porté sur un fournisseur qui remplissait les critères, et avec lequel nous travaillions déjà, explique Anne Barranx. Cela nous permet de réduire le nombre de livraisons, d’interlocuteurs, les frais de port, mais aussi les stocks car les cartons peuvent être remplis ou complétés par des produits différents. » La titulaire groupe désormais ses commandes de lait Biostime et de compotes Good Goût avec celles de ses couches Dodie, « testées et approuvées par les bébés de l’équipe ! » s’enorgueillit sa vitrine. Mais attention, « le prix du gros paquet peut rebuter le client qui ne connaît pas la marque », lui a glissé Zaharati Mbae. Anne Barranx a pris en compte la remarque et opté pour des petits paquets.

Quand développement économique et professionnel vont de pair

En face des écorecharges, qui surplombent le vrac dont les ventes ont pour l’instant du mal à décoller, le rayon bébé, lui, se porte très bien. Avec ses nouvelles couches et son référencement « clean », il a le vent en poupe. « Notre clientèle s’est étoffée de façon générale, et en particulier sur ce secteur », confie Anne Barranx. Il faut dire que l’espace de vente du rayon bébé s’est agrandi en 2020, quand la pharmacienne a racheté les locaux de l’ancien cabinet médical situés à l’étage, auxquels on accède depuis l’entrée au rez-de-chaussée. Avec trois écoles et une crèche à proximité, Anne Barranx a flairé le créneau. Ainsi, sa préparatrice, Zaharati Mbae, a pu déployer ses conseils et son expertise dans deux domaines qui la stimulaient, la maternité et le jeune enfant.

La considération portée aux salariés est aussi un pan de la RSE. Côté progression de carrière, d’ailleurs, « nous avons un accès au centre de formation Ma formation officinale et nous pouvons choisir nos thèmes de formation pour développer nos compétences en fonction de nos envies et de nos qualités », se réjouit Jessica Lebon, préparatrice, titulaire d’un diplôme universitaire (DU) en phyto et aromathérapie et spécialiste des médecines naturelles.

Le troisième préparateur de l’équipe, Bastien Werner, se positionne quant à lui sur l’orthopédie et le conseil aux sportifs.

Le service avant tout !

Dans cette officine de quartier, la clientèle est régulière et le souci de l’autre est flagrant. Les échanges avec les patients sont simples et chaleureux. Le service est le fil rouge. Les locaux de l’étage ont d’ailleurs été rachetés pour mieux servir encore. À côté de la salle dédiée aux tests Covid-19 et à la vaccination, le local d’orthopédie « devrait avant tout servir de salle de confidentialité, pour les patients qui auraient quelque chose à nous dire à l’abri des oreilles indiscrètes », confie la titulaire.

Anne Barranx a déboursé autant dans les travaux d’aménagement de l’étage et son accès – avec, notamment, l’installation audacieuse d’un ascenseur moderne au cœur du bâtiment 1900 –, que dans l’acquisition de son robot. C’est dire l’attention qu’elle accorde au service.

Au quotidien, toute l’équipe s’interroge : comment améliorer encore le service, tout en incluant les parties prenantes dans sa démarche de RSE ? « Certains patients rapportent des radios, nous questionnent sur leur recyclage, raconte Anne Barranx. Nous avons trouvé deux points de collecte, dans les 13^e et 14^e arrondissements de Paris, mais cela fait loin. Nous avons donc envoyé une demande sur franceenvironnement. com pour savoir s’il en existe plus près de nous. » Les lunettes aussi, rapportées par des patients, ont posé question. « Nous avons appelé les opticiens de la ville, note la titulaire. Ils les reprennent, mais n’ont pas su nous dire précisément ce qui était recyclé. Verres ? Monture ? » Quoi qu’il en soit, la question est soulevée et discutée avec des acteurs locaux. L’officine fait rayonner son questionnement sur son territoire.

Toujours plus loin !

Pour Anne Barranx, l’engagement dans la RSE découle directement d’une démarche d’amélioration continue de la qualité. Une démarche familière pour la pharmacie des Tilleuls, certifiée ISO 9001. Le réflexe à adopter ? « S’interroger au quotidien pour faire évoluer peu à peu les pratiques », selon Bastien Werner. Le préparateur a d’ailleurs revu ses habitudes personnelles de tri, quand l’équipe a récemment fait le point sur la gestion de ses déchets : « Je pensais que tous les emballages fins de jambon souillés n’étaient pas recyclables… »

Ce qui sert à l’équipe peut aussi renseigner les patients. Des affichettes, en évidence dans l’officine rappellent les règles de tri. Toutes les occasions sont sources de progression. « Les questions posées dans le dossier de candidature au trophée RSE Giropharm/Porphyre nous ont incités à pousser la réflexion plus loin concernant notre engagement sociétal », explique Anne Barranx À la suite du concours, la titulaire a développé un partenariat avec une boutique voisine, « l’épicerie du coin », vendant des produits locaux et naturels. « Les objectifs étaient de faire travailler le tissu local et d’encourager l’équipe à consommer éthique, notamment sur l’alimentation. » La boutique vend des plats locaux « faits maison » dans des bocaux consignés en verre (voir photo page ci-contre). La pharmacienne verse désormais à ce magasin 20 euros par mois et par salarié soit 120 euros au total. La cuisine équipée, installée à l’étage de la pharmacie depuis les travaux, invite les salariés qui le souhaitent à déjeuner sur place. Et ainsi réduire leurs déplacements et leur empreinte carbone.

« La pause de midi étant longue, une chaise longue peut même être dépliée pour celui qui aurait besoin de sa petite sieste ! » précise en souriant Anne Barranx. L’équipe dirige aussi vers la boutique éthique les patients qui recherchent certains produits alimentaires, des protections périodiques lavables, etc.

Chacun tente de faire un peu mieux chaque jour et tout le monde y va de sa petite idée : « instaurer un challenge “beau temps” pour inciter à venir à vélo les jours de soleil, prendre la trottinette à la place du scooter. » Dans la course à la RSE, il n’y a pas de ligne d’arrivée !

Qu’est-ce que la RSE ?

La responsabilité sociale des entreprises (RSE) vise un développement économique durable de l’entreprise (pilier économique), dans le but de réduire son impact sur l’environnement (pilier environnemental), qui inclut un respect de l’homme (salariés, clients…) et un ancrage dans son territoire d’implantation via des partenariats locaux, actions de sensibilisation, etc. (pilier social/sociétal).

Les actions de RSE concernent tous les domaines de l’entreprise, de la gouvernance aux achats, en passant par la rénovation des bâtiments, le contrôle de la qualité de l’air, la réduction des consommations d’eau, la gestion des déchets, la gestion des carrières, la prise en compte de la satisfaction des usagers, etc.

Entre septembre et octobre 2023, le groupement de pharmacies Giropharm, en partenariat avec Porphyre, a organisé un Trophée du préparateur visant à mobiliser les équipes officinales sur la thématique de la RSE. Les idées les plus inventives ont été récompensées. La pharmacie des Tilleuls, à Villiers-sur-Marne (94), a obtenu le second prix.

IMPLIQUER LES PATIENTS

Communiquer sur les actions menées pour sensibiliser les parties prenantes – clients, fournisseurs… – participe de la démarche de responsabilité sociale des entreprises (RSE). Il s’agit de transmettre les bonnes pratiques et tenter de créer l’émulation.

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