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Madame T., 23 ans, souffre d’herpès oculaire récidivant
C’est le troisième épisode d’herpès oculaire pour Madame T. après un dimanche au soleil. L’ophtalmologiste confirme une nouvelle kératite herpétique et prescrit un traitement de crise et de prévention des récidives.
Ce que je dois savoir
Législation
L’ordonnance ne pose pas de problème.
Contexte
C’est quoi ?
L’ordonnance prend en charge un herpès oculaire récidivant, infection due à Herpes simplex, le plus souvent de type 1. Après primo-infection, le virus se loge dans les ganglions voisins de la zone oculaire, où il reste quiescent (au repos). Parfois, sous l’influence de facteurs favorisants, tels que le stress, le soleil, la fatigue…, il se réactive et migre vers les cellules de la cornée, où il s’exprime. C’est la récurrence.
Quels sont les signes cliniques ?
• La primo-infection, parfois inaperçue, associe en général fièvre, adénopathie, conjonctivite et kératite (voir lexique), très souvent unilatérales.
• Les récidives s’expriment en général sous forme de kératites, dont les lésions d’ulcération, révélées par la fluorescéine, sont plus ou moins profondes, punctiformes, ou en étoile, en placard ou dendritique en « feuille de fougère ».
→ Les kératites épithéliales sont superficielles.
→ Les kératites stromales, au niveau du stroma, sont profondes et responsables d’opacités locales, parfois associées à une uvéite (voir lexique).
• Le patient ressent une douleur locale, une baisse d’acuité visuelle, une photophobie et une rougeur autour de la cornée.
Madame T. présente une rougeur et une douleur modérée de l’œil droit, le diagnostic est celui d’une kératite superficielle.
Quelle évolution ?
• Sans traitement, les lésions peuvent évoluer vers une opacification de la cornée, une néovascularisation, parfois une perforation, qui diminuent de façon irréversible l’acuité visuelle et peuvent conduire à la perte de l’œil.
Objectif
• Traiter la crise avec un antiviral local et un collyre atropinique, pour limiter la douleur et réduire le délai de guérison et la durée de contagiosité.
• Prévenir les récidives avec un antiviral oral au long cours, instauré après deux à trois récidives annuelles selon la gravité de l’atteinte, qui diminue les récurrences, le risque de complications et les épisodes d’excrétion virale asymptomatique et donc le risque de contamination. Il doit être réévalué tous les six à douze mois.
Médicaments
Ganciclovir (Virgan)
Cet antiviral analogue nucléosidique inhibe la synthèse d’ADN viral par compétition avec les bases puriques qui entrent dans sa composition. Il est indiqué dans le traitement des kératites herpétiques aiguës superficielles.
Atropine (atropine Alcon 1 %)
Cet anticholinergique dilate la pupille et paralyse l’accommodation pour mettre l’œil « au repos ». Surtout indiqué dans le traitement des uvéites, il est ici prescrit comme antalgique.
Valaciclovir (Zelitrex)
Précurseur de l’aciclovir, analogue nucléosidique antiviral de mécanisme d’action similaire à celui du ganciclovir. Il n’agit que sur les virus en réplication, pas sur les latents. Il est indiqué en traitement de certaines infections oculaires herpétiques ou en prévention des récidives.
Repérer les difficultés
• Délai entre les administrations les premiers jours de deux produits ophtalmiques.
• L’infection, très contagieuse, peut se transmettre à l’entourage ou à soi (auto-inoculation, à l’autre œil) par le biais d’objets, de linge, des mains… Des conseils d’hygiène sont importants.
• Les corticoïdes sont contre-indiqués dans l’herpès oculaire car ils peuvent faire « flamber » l’infection et conduire à la perte de l’œil, même s’ils sont parfois prescrits en cas de kératites stromales. Alertez la patiente, qui en a peut-être d’une précédente prescription.
• L’antiviral oral doit être pris au long cours. La patiente doit en comprendre l’intérêt.
Ce que je dis à la patiente
J’ouvre le dialogue
« Une nouvelle infection oculaire virale, est-ce de l’herpès ? Ce n’est pas la première cette année ? » s’assure de la récurrence. « Le médecin a ajouté un produit pour éviter les récidives, vous l’a-t-il expliqué ? » sonde la compréhension. « C’est important de limiter les crises. Si elles se multiplient, elles peuvent endommager la cornée » introduit l’observance.
J’explique le traitement
Mécanisme d’action
• Ganciclovir : cet antiviral local empêche la multiplication des virus pour soulager, limiter la durée de la crise et éviter les complications.
• Atropine : ce collyre va dilater votre pupille et mettre l’œil au repos pour vous soulager davantage.
• Valaciclovir : cet antiviral oral bloque le développement du virus afin d’éviter une récidive. Il ne guérit pas la maladie, le virus reste dans votre organisme mais ne s’exprime pas.
Modes d’administration
• Ganciclovir : gel à instiller dans l’œil malade à raison de 1 goutte cinq fois par jour pendant sept jours jusqu’à cicatrisation, puis trois fois par jour pendant sept jours. Débuter le plus tôt possible pour une efficacité optimale. Tirer la paupière inférieure vers le bas, regarder vers le haut, puis déposer une goutte de gel dans le cul-de-sac conjonctival. Lâcher puis fermer les paupières.
• Atropine : 1 goutte à instiller dans l’œil malade trois fois par jour pendant trois jours. Tirer la paupière inférieure vers le bas, regarder vers le haut, déposer une goutte sur l’œil, fermer l’œil.
Pour éviter un passage systémique, comprimer l’angle interne de l’œil pendant une minute après et essuyer l’excédent sur la joue.
Pour les deux produits : se laver les mains avant et après, éviter de toucher l’œil ou la paupière avec l’embout du tube/flacon et ne pas doubler la dose suivante en cas d’oubli. Attendre quinze minutes au moins entre chaque instillation, et commencer par le collyre.
• Valaciclovir : 1 comprimé par jour, à la même heure, pendant ou en dehors des repas.
Effets indésirables
• Ganciclovir : sensations de brûlures, picotements, irritation, vision trouble.
• Atropine : risque de glaucome aigu par fermeture de l’angle si prédispositions, troubles de l’accommodation, irritation, picotement. En cas de surdosage, effets indésirables systémiques atropiniques : sécheresse de la bouche, fièvre, irritabilité, tachycardie, rougeur de la face, constipation, confusion, agitation…
• Valaciclovir : nausées et céphalées, vertiges, vomissements, diarrhées, photosensibilité, prurit.
J’accompagne
Surveillance
La cicatrisation complète est attendue sous sept jours environ. Si ce n’est pas le cas, il faut reconsulter rapidement.
Attention, l’ingestion accidentelle du collyre Atropine présente un risque toxique grave pour les enfants, avec convulsions, délire, voire coma.
Automédication
Proscrire tout autre produit local, et les corticoïdes sont contre-indiqués. Rapporter les traitements non utilisés à l’officine pour éviter les erreurs. Ne pas prendre, avec l’atropine, d’autres anticholinergiques, dont certains anti-histaminiques, au risque de potentialiser les effets indésirables.
Conservation
Après ouverture, quatre semaines maximum pour Virgan et quinze jours pour Atropine.
Hygiène de vie
• Se laver les mains fréquemment.
• Éviter de frotter/gratter l’œil malade, de partager son linge de toilette, pour limiter la contagion et l’auto-inoculation, et le contact avec les personnes fragiles, bébés, immunodéprimées ou âgées pendant la crise.
• Déconseiller la conduite durant les traitements locaux car ils peuvent troubler ou gêner la vue.
• Mettre des lunettes de soleil, ce dernier étant un facteur favorisant pour Madame T.
Vente associée
Un gel hydroalcoolique désinfectant peut être conseillé quand l’eau n’est pas disponible. Des compresses stériles essuient l’excédent de collyre sans risque de surinfection.
Prescription
Dr O., ophtalmologiste Sonia T., 23 ans, 1,71 m, 57 kg
• Virgan gel ophtalmique 1 goutte cinq fois par jour pendant sept jours, puis 1 goutte trois fois par jour pendant sept jours.
• Atropine Alcon 1 % collyre 1 goutte trois fois par jour pendant trois jours.
• Zelitrex 500 mg 1 comprimé par jour pendant six mois.
La patiente me demande
« Quand pourrai-je remettre mes lentilles souples ? »
Virgan contient du chlorure de benzalkonium, connu pour jaunir les lentilles de contact souples, d’où un délai de quinze minutes au moins entre l’instillation et la pose des lentilles. Dans votre cas de kératites herpétiques récidivantes, je vous déconseille de toute façon le port de lentilles car elles créent des microtraumatismes locaux et sont un facteur de risque de récidives. Si vous pouvez vous en passer, mieux vaut opter pour des lunettes au long cours.
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