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Déficit de la Sécu ou comment faire coexister embellie et rigueur

Publié le 16 juin 2018
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Ainsi le déficit de la Sécu disparaîtra cette année ! Une première depuis 1999. Il passerait ainsi de 5,1 Mds€ en 2017 à 300 M€ en 2018. Une broutille. On était certes depuis plusieurs années sur une pente de résorption tendancielle mais un tel résultat n’était pas attendu pour avant 2019, voire 2020.

Ce retour à un quasi-équilibre est présenté comme « gratuit » car intégralement imputable à l’effet vertueux d’une croissance retrouvée. Les recettes seront en effet supérieures de 2,8 Mds€ à la prévision initiale pour 2018 en raison d’une progression estimée de la masse salariale de l’ordre de 3,9 % (+ 1,5 % pour l’emploi et + 2,4 % pour les salaires).

Mais les choses ne sont pas si simples et le pays en général – et le médicament en particulier – ont lourdement payé ce retour à l’équilibre.

Côté recettes, on ne l’a pas assez souligné, les comptes 2018 bénéficient de l’augmentation de 1,7 point du taux de la CSG au 1er janvier 2018. Le solde net CSG-cotisations sociales est positif de 3,3 Mds€ pour les salariés (la baisse de la cotisation maladie compensant la hausse de la CSG), mais négatif de 4,3 Mds€ pour les retraités et de 2,1 Mds€ pour les détenteurs de revenus du capital qui ne bénéficient d’aucune compensation. D’où une rentrée « parafiscale » nette « non gratuite » de l’ordre de 3 Mds€…

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Et côté dépenses, il ne faut pas oublier que l’année 2018 est celle du plan d’économies le plus sévère de l’histoire de la Sécurité sociale voté par le Parlement à hauteur de 4,165 Mds€ dont une large partie supportée directement ou indirectement par le médicament (baisses de prix, contrôle des prescriptions, encadrement des achats hospitaliers, etc.). Et ce plan n’est que la continuité de plans successifs menés depuis 2010 pour maintenir dans la limite de 2-2,5 % une croissance qui serait spontanément de l’ordre de 4-5 %.

Questions : cette embellie est-elle permanente ? Va-t-elle conduire à un desserrement des contraintes imposées aux dépenses de santé ? Réponses : sans doute oui à la première si les prévisions de croissance macro-économique se confirment. Sans doute non à la seconde, même si le gouvernement perd le principal argument justifiant la rigueur imposée depuis dix ans au système de santé. Les syndicats et les fédérations professionnelles ne manqueront pas de le lui faire savoir. Mais il est peu probable qu’il revienne sur ses options d’un ONDAM* à 2,3 % pour les années futures – ce qui impose des sacrifices – et il est encore moins probable que la politique du prix du médicament soit desserrée ! Embellie et rigueur vont sans doute coexister !

* Objectif national des dépenses d’Assurance maladie

DR