Pathologies Réservé aux abonnés

La cystite de la femme

Publié le 30 juin 2018
Par Nathalie Belin
Mettre en favori

Environ un tiers des femmes ont au moins une fois au cours de leur vie une infection urinaire. Parmi ces dernières, la cystite aiguë, qui est une infection bactérienne de la vessie, est particulièrement fréquente.

Quelles bactéries en cause ?

• L’appareil urinaire est normalement stérile sauf à l’extrémité distale de l’urètre. Une diurèse suffisante et des vidanges régulières et complètes de la vessie sont des moyens naturels de défense.

• Une cystite est une inflammation de la vessie, très souvent d’origine infectieuse, qui touche davantage les femmes que les hommes. À savoir : il existe des cystites radiques consécutives à l’irradiation d’un des organes pelviens, et des cystites interstitielles, qui sont des affections chroniques de la paroi vésicale très douloureuses.

→ Les principales bactéries en cause dans les cystites proviennent de la flore fécale : Escherichia coli dans 70 à 95 % des cas, Proteus mirabilis et des klebsielles. Staphylococcus saprophyticus est retrouvé chez la femme jeune entre 15 et 30 ans. Les germes colonisent le vagin puis remontent de long de l’urètre et se multiplient dans la vessie en adhérant à la muqueuse.

→ Si l’infection atteint les voies urinaires hautes, tels les uretères et le parenchyme rénal, elle se nomme pyélonéphrite, du grec pyelos = bassin, qui se rapporte au bassinet et nephritis = inflammation des reins.

• La présence de bactérie dans les urines ne signifie pas systématiquement « infection ». Si le patient est asymptomatique, on parle de colonisation urinaire ou bactériurie asymptomatique, plus fréquente chez les personnes âgées. En dehors de la grossesse, il n’y a pas lieu de dépister ni de traiter une colonisation urinaire car elle évolue rarement vers une infection urinaire.

Quels sont les signes cliniques ?

• La cystite aiguë se manifeste par au moins un des signes suivants : une pollakiurie (mictions fréquentes mais souvent peu abondantes), mictions impérieuses (besoin urgent d’uriner) et/ou brûlures et douleurs à la miction. Dans 30 % des cas, il y a une hématurie, c’est-à-dire la présence de sang dans les urines, mais cela ne constitue pas un signe de gravité. Il n’y a ni fièvre ni douleurs lombaires à la différence de la pyélonéphrite.

Publicité

• Les cystites aiguës récidivantes sont définies par la survenue d’au moins 4 épisodes de cystite pendant 12 mois consécutifs. Elles concernent environ 20 à 30 % des patientes ayant présenté une cystite aiguë.

• Chez la femme jeune, l’activité sexuelle est le facteur favorisant le plus souvent retrouvé. Sont également incriminés l’utilisation de spermicides, une première infection urinaire avant 15 ans, des antécédents maternels de cystites et l’obésité.

• Chez la femme ménopausée, un prolapsus vésical, une incontinence urinaire et les modifications de la flore vaginale commensale liées à l’hypoœstrogénie sont des facteurs favorisants.

• On distingue les cystites aiguës simples des cystites à risque de complication. Ces dernières surviennent chez des patientes ayant au moins un facteur de risque susceptible de rendre l’infection plus grave et le traitement plus complexe (voir tableau). Le diabète, même insulinodépendant, n’est pas un facteur de risque de complication bien que les infections urinaires soient plus fréquentes en cas de diabète.

Comment évolue-t-elle ?

• En l’absence d’antibiothérapie, une cystite aiguë simple évolue vers la guérison dans 25 à 45 % des cas. Une cystite aiguë à risque de complication peut plus fréquemment évoluer vers une pyélonéphrite ou récidiver.

• 20 à 40 % des colonisations urinaires gravidiques se compliquent d’une pyélonéphrite qui peut avoir des conséquences graves telles qu’une fausse couche, un retard de croissance intra-utérin, ou un accouchement prématuré. Un dépistage par bandelette urinaire est donc recommandé chaque mois, dès le 4e mois de grossesse ; en cas de positivité, un examen cytobactériologique des urines (ECBU) est indiqué. La grossesse est une situation à risque d’infections urinaires en raison de facteurs anatomiques et hormonaux, et de complications associées.

• Invalidante, la cystite récidivante est toutefois le plus souvent prise en charge efficacement par un traitement médical et le suivi de règles hygiéno-diététiques.

Comment la diagnostiquer ?

• En cas de cystite simple, le diagnostic est établi devant des signes cliniques évocateurs et une bandelette urinaire (voir encadré) positive. En l’absence de pathologie gynécologique associée avec présence de prurit, ou de pertes vaginales, cette association suffit pour établir le diagnostic.

• En cas de cystite à risque de complication, l’ECBU est indiqué. La bandelette urinaire n’est qu’une aide au diagnostic.

• En cas de cystite récidivante, un ECBU n’est réalisé que pour les premiers épisodes afin de connaître le profil de sensibilité des bactéries aux antibiotiques. Par la suite, une bandelette urinaire positive peut permettre à la patiente de déclencher elle-même son traitement.

Des examens complémentaires tels qu’échographie des voies urinaires, mesure du résidu post-mictionnel, débitmétrie urinaire, uroscanner… sont indiqués ou discutés dans les cystites à risque de complication ou récidivantes chez la femme ménopausée.

Comment la prendre en charge ?

• Antibiothérapie : du fait de résistances, les fluoroquinolones ne sont plus recommandées.

→ En cas de cystite simple, un traitement monodose par fosfomycine en première intention.

→ En cas de cystite à risque de complication, l’antibiothérapie sur 5 ou 7 jours est adaptée aux résultats de l’antibiogramme.

→ En cas de cystite récidivante, le traitement est identique à celui d’une cystite simple en excluant la nitrofurantoïne car des effets indésirables hépatiques et pulmonaires sont majorés par des prises répétées. Un traitement prescrit et auto-administré est possible chez les patientes éduquées. Si les récidives sont très fréquentes, c’est-à-dire au moins une par mois, une antibioprophylaxie continue sur 6 mois ou plus peut être indiquée.

• Autres mesures :

→ la correction locale de la carence œstrogénique chez la femme ménopausée limite le risque de récidive ;

→ la canneberge ou cranberry, Vaccinium macrocarpon, est préconisée en prévention des cystites récidivantes à E. coli. En pratique, elle peut aussi être essayée, associée à une bonne hydratation, pour enrayer une cystite débutante sans facteur de risque de complication. Il faut vérifier que le produit apporte au moins 36 mg de PAC A par jour. Les PAC sont des proanthocyanidines de type A, molécule active s’opposant à l’adhésion d’E. coli à la paroi vésicale. Exemples : Cys-Control, Urisanol, Gyndelta Cranberry, Urell, Monurelle, Cranberry Gifrer… Prudence sous anti-vitamines K car des augmentations de l’INR et des hémorragies ont été observées. Elle peut s’utiliser lors de la grossesse pour prévenir une infection urinaire.

→ Plantes et huiles essentielles. Bruyère, busserole, pissenlit, sarriette, arbre à thé, thym… sont souvent associées à la canneberge pour potentialiser l’action anti-infectieuse urinaire. Elles peuvent être essayées en cas de cystite simple débutante. Exemples : Cys-Control Flash, Gyndelta Flash, Cystirégul Plus, Urisanol Flash, Acygil… Ces plantes sont contre-indiquées durant la grossesse. L’extrait de propolis, antibactérien, aurait une action intéressante en association avec la canneberge. Exemple : Duab.

→ Probiotiques. L’apport de lactobacilles par voie vaginale semble intéressant chez des patientes souffrant de cystites récidivantes. Exemples : Medigyne, BactiGyn, MycoRess…

→ D-mannose. Un apport exogène de ce sucre contribue à fixer les bactéries E.coli, réduisant ainsi leur adhérence à la muqueuse vésicale. Exemples : Femannose, Cys-Control Fort…

Quels conseils donner ?

• Une consultation médicale s’impose sans tarder en cas de risque de complications de l’infection : immunodépression, grossesse, reflux vésical connu, présence de fièvre et/ou de douleurs lombaires évoquant une pyélonéphrite.

• Dès les premiers symptômes : boire suffisamment pour assurer des mictions régulières, 5 à 6 par jour, qui limitent la multiplication bactérienne. Pour soulager les douleurs, la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens peut être recommandée dans une cystite simple mais pas dans une cystite à risque de complication sans couverture antibiotique en raison du risque de dissémination de l’infection.

• En prévention des récidives : boire environ 6 à 8 verres d’eau par jour – environ 1,5 l –, pour réguler les troubles du transit, constipation notamment, qui modifient la flore intestinale. Éviter les pantalons trop serrés et les sous-vêtements synthétiques qui favorisent la transpiration, donc la prolifération des germes.

• Recueil des urines :

→ pour la réalisation d’une bandelette urinaire : prélèvement du 2e jet dans un récipient propre et sec sans toilette préalable puis trempage de la bandelette dans le flacon. Ne pas uriner directement dessus car c’est une source d’erreur ;

→ en vue d’un ECBU : prélèvement à effectuer au moins 4 heures après une miction pour un temps de stase suffisant. Recueil du 2e jet d’urine dans un flacon stérile après toilette de la région vulvaire et urétrale avec savon, voire Dakin, puis séchage car des traces de savon ou d’antiseptique faussent les résultats. À apporter dans l’heure au laboratoire ou conserver au réfrigérateur maximum 12 à 24 heures.

(1) Source : d’après « Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires de l’adulte », Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF), 2015.

Dico+

→ Une bandelette urinaire détecte les leucocytes, témoins de l’inflammation, et les nitrites, synthétisés par les bactéries. Une bandelette urinaire est négative si les 2 paramètres sont négatifs ; elle est positive si l’un des 2 paramètres est positif.

Dico+

→ Un examen cytobactériologique des urines ou ECBU permet de réaliser sur un échantillon d’urine : une cytologie, c’est-à-dire l’étude des différents types de cellules retrouvées dans l’urine telles hématies, leucocytes voire cellules épithéliales, et une bactériologie, c’est-à-dire la recherche, l’identification et le compte des germes éventuellement présents dans l’urine après sa mise en culture.

(Source : Ameli).