Métier Réservé aux abonnés

L’arrêt maladie

Publié le 31 août 2018
Mettre en favori

L’arrêt maladie ne doit pas fragiliser l’emploi. Le code du travail et la convention collective protègent le salarié malade en lui accordant des garanties à condition de ne pas commettre d’abus. Notre ordonnance pour connaître vos droits et vos devoirs pendant cette pause forcée.

Quelles sont les formalités ?

Côté salarié

Mis en arrêt maladie par son médecin traitant, le salarié doit prévenir son employeur dans les plus brefs délais et par tous les moyens : par téléphone, mail, en missionnant un proche, un parent, etc. Il doit également adresser un certificat médical, sous un délai de 3 jours. À défaut, il commet une faute qui peut justifier son licenciement. Outre les obligations envers son employeur, le salarié doit transmettre son arrêt de travail à sa caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) dans les 48 heures, afin de percevoir les indemnités journalières de la sécurité sociale.

Côté employeur

Dès réception de l’arrêt de travail, le titulaire doit remplir une attestation de salaire dont le formulaire est téléchargeable sur www.ameli.fr, et l’adresser à la caisse d’assurance maladie du salarié. Le montant des indemnités journalières de maladie sera calculé sur la base de cette attestation.

Cas pratique

Le titulaire de Julie soutient qu’elle a 48 heures pour transmettre son arrêt de travail. A-t-il raison ?

Non. En arrêt maladie, Julie a 3 jours pour justifier son absence en adressant à son employeur l’arrêt prescrit par son médecin.

Dès sa sortie du cabinet de son médecin traitant, Antoine a prévenu son titulaire qu’il ne pourrait pas travailler les prochains jours, mais il traîne pour envoyer son arrêt. Que risque-t-il ?

S’il dépasse le délai de 3 jours pour s’acquitter de cette formalité, il s’expose à une mesure de licenciement pour faute.

Quelle est la situation en arrêt maladie ?

Un repos obligatoire

Le salarié est censé se reposer. L’employeur ne peut pas lui demander d’accomplir un quelconque travail, même « léger » et depuis son domicile. En revanche, le salarié ne peut pas entraver la continuité de l’activité de l’entreprise. Par exemple, il ne peut pas refuser de communiquer son mot de passe informatique s’il en est le seul détenteur. À l’inverse, il ne peut être reproché au salarié malade d’éviter volontairement toute possibilité de contact avec ses collègues pendant son arrêt maladie.

Publicité

Des sorties réglementées

Le salarié doit être présent à son domicile de 9 heures à 11 heures et de 14 heures à 16 heures, sauf en cas de soins ou d’examens médicaux. Les sorties doivent obligatoirement se dérouler en dehor s de ces tranches horaires indiquées sur l’avis d’arrêt de travail. Il s’agit d’un cadre strict. Le non-respect des horaires peut entraîner la suppression partielle ou totale des indemnités journalières de la sécurité sociale et des indemnités complémentaires versées par l’employeur. Pour certaines pathologies, par exemple une dépression, un cancer, dont les sorties font partie de la thérapie, le médecin peut autoriser des sorties totalement libres. Dans le cas particulier où le salarié malade envisage une convalescence hors de son département, il doit au préalable obtenir l’accord de sa caisse d’assurance maladie.

Cas pratique

Sébastien est en arrêt maladie. Ses parents habitent à quelques mètres de chez lui. Peut-il se reposer chez eux ?

Aux heures auxquelles il est tenu d’être présent à son domicile, il ne peut pas se rendre chez ses parents, même s’ils habitent à seulement quelques pas. En cas de visite d’un médecin contrôleur de la sécurité sociale, Sébastien serait en tort et risquerait de perdre les indemnités journalières versées par la CPAM et, par effet de ricochet, les indemnités complémentaires à la charge de l’employeur.

Quels sont les effets de l’arrêt maladie ?

Le contrat de travail

Pendant toute la durée de l’arrêt maladie, le contrat de travail est suspendu. Le salarié continue à faire partie de l’effectif de l’entreprise bien qu’il soit absent.

L’ancienneté

L’article 11 des dispositions générales de la Convention collective nationale de la pharmacie d’officine précise que « les interruptions de travail pour maladie d’une durée totale, continue ou non, inférieure à 6 mois par an » sont prises en compte dans le calcul de l’ancienneté. Quant aux interruptions de travail pour maladies professionnelles ou accidents du travail, elles sont prises en compte en totalité dans le calcul de l’ancienneté.

Le coefficient

L’arrêt maladie ne bloque pas l’évolution dans la classification des emplois, mais quand il se prolonge et atteint plusieurs mois, le titulaire peut considérer que l’absence du salarié diffère d’autant le passage au coefficient supérieur.

Les primes

L’employeur peut poser certaines conditions au versement d’une prime. L’assiduité peut être un critère. Le titulaire peut par exemple réserver la prime de 13e mois aux salariés qui ne sont jamais absents ou appliquer sur son montant un abattement proportionnel au temps d’absence. Cette pratique n’est ni illégale, ni discriminatoire.

La période d’essai

L’objectif de la période d’essai est d’évaluer le salarié et de vérifier qu’il est suffisamment compétent pour occuper le poste pour lequel il a été recruté. Il est donc nécessaire que le salarié soit présent afin d’être effectivement en situation d’essai. Ainsi, en cas d’absences pour maladie, l’employeur est en droit de prolonger la période d’essai d’une durée égale à celle de l’interruption de travail.

Le préavis

L’arrêt maladie est sans incidence sur la durée du préavis qui continue de s’écouler bien que le salarié ne soit pas en mesure de l’exécuter. En revanche, les arrêts pour accident du travail ou pour maladie professionnelle suspendent le préavis et ont pour effet de reporter son échéance.

Cas pratique

Pendant sa période d’essai, Clara est tombée malade et a été arrêtée une semaine.

Son employeur peut légitimement prolonger sa période d’essai d’une semaine.

Comment est calculée l’indemnisation ?

Les indemnités journalières versées par la sécurité sociale

Ce sont les prestations en espèces versées par la sécurité sociale. Leur versement débute à partir du 4e jour d’absence. Les 3 premiers jours, non indemnisés, correspondent au délai de carence. Puis, les indemnités sont versées pour chaque jour de l’arrêt de travail, y compris les samedis, dimanches et jours fériés.

Les indemnités complémentaires versées par l’employeur

Cette indemnisation complémentaire à la charge de l’employeur est garantie, en partie, par le régime de prévoyance. Pendant son arrêt maladie, le salarié cumule ainsi les indemnités journalières versées par la sécurité sociale (IJSS) et les indemnités complémentaires. Le gestionnaire de la paye doit calculer les indemnités complémentaires sous déduction des indemnités journalières de sécurité sociale.

Quel est le délai de versement ?

Les IJSS sont versées par quinzaine. Les indemnités complémentaires sont versées comme pour le salaire à la fin du mois.

Le titulaire doit-il compenser la perte de salaire entraînée par les 3 jours de carence de la sécurité sociale ?

Seuls les pharmaciens adjoints ayant au moins 1 an d’ancienneté bénéficient d’une indemnisation dès le 1er jour d’absence. Pour eux, les 3 jours de carence de la sécurité sociale sont intégralement pris en charge par l’entreprise grâce aux indemnités complémentaires. En revanche, rien n’est dû pendant ces 3 jours pour les préparateurs.

Les absences pour maladie peuvent-elles justifier un licenciement ?

L’état de santé n’est pas un motif de rupture du contrat de travail. En revanche, la désorganisation de l’entreprise consécutive aux absences pour maladie peut entraîner un licenciement.

Les deux conditions

Un salarié en arrêt maladie peut être licencié si :

→ les absences prolongées ou répétées entraînent des perturbations dans le fonctionnement de l’entreprise officinale ;

→ les absences du salarié imposent son remplacement définitif. Ces deux conditions pour le licenciement du salarié sont cumulatives.

Le délai de protection

La Convention collective nationale de la pharmacie d’officine prévoit un délai de protection qui empêche le titulaire de procéder au licenciement avant un minimum de :

→ 4 mois d’absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés non-cadres et assimilés cadres ayant moins de 2 ans d’ancienneté ;

→ 6 mois d’absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés non-cadres et assimilés cadres dès 2 ans d’ancienneté, ainsi que pour les salariés cadres quelle que soit leur ancienneté.

La procédure

Comme n’importe quel autre licenciement personnel, elle se déroule en trois temps :

→ J-5 jours ouvrables minimum : convocation à l’entretien préalable ;

→ J : entretien préalable au licenciement ;

→ J+2 jours ouvrables minimum : notification du licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception (AR).

La lettre de licenciement devra expliciter l’effet « perturbateur » des absences pour maladie et la nécessité du remplacement définitif du salarié. Mais attention, cette dernière condition n’est pas remplie lorsque le remplacement est assuré par un stagiaire, un salarié sous CDD ou un intérimaire. Le remplacement définitif implique une embauche en CDI dans un délai raisonnable après le licenciement.

Quel est l’impact sur les congés payés ?

Le salarié tombe malade avant son départ en congé

Si le salarié est en arrêt maladie au moment prévu pour son départ, il conserve intacts ses droits à congé. Principale conséquence, l’employeur doit différer ses dates de congé, après sa guérison, et si possible avant le 30 avril qui marque la date de clôture des congés. Si le salarié ne revient à l’officine qu’une fois la période des congés achevée, soit après le 30 avril, il est alors dans l’impossibilité de solder ses congés acquis mais non pris en raison de son état de santé. Dans une telle situation, l’article 25 des dispositions générales de la Convention collective prévoit le versement d’une indemnité compensatrice de congés payés.

Cas pratique

Pierre, pharmacien adjoint, tombe malade le 5 juillet. Son médecin lui prescrit un arrêt de travail jusqu’au 15 juillet. Or, il devait profiter de ses congés du 11 au 31 juillet. Ses congés vont-ils être amputés de 5 jours ?

Non. Les congés de Pierre ne commenceront que le 16 juillet. Jusqu’au 15, il sera en arrêt maladie. Les 5 jours de congés non pris, du 11 au 15 juillet, seront reportés à d’autres dates.

Le salarié tombe malade pendant ses congés

Si le salarié tombe malade pendant ses congés, on considère qu’il est en congé et non en arrêt maladie. Principale conséquence, le salarié ne peut exiger une prolongation des congés dont il n’a pu profiter normalement en raison de son état de santé.

Ainsi, il devra reprendre son travail à la date initialement prévue, sauf s’il est encore en arrêt maladie. Pour la période de congé coïncidant avec l’arrêt maladie, le salarié est autorisé à cumuler l’indemnité de congés payés versée par l’employeur avec les indemnités journalières de maladie versées par la sécurité sociale. En revanche, aucune indemnité conventionnelle, payable par l’employeur, n’est due.

Cas pratique

Les congés de Claire, préparatrice, ont débuté le 1er août. Le 5 août, elle est hospitalisée d’urgence. De retour à l’officine le 5 septembre, elle souhaiterait que son employeur lui accorde de nouvelles dates de congés car elle n’a pu profiter de ses vacances. Son employeur doit-il répondre favorablement à sa demande ?

Non. La jurisprudence considère que l’employeur, qui a accordé le congé prévu par la loi, s’est acquitté de son obligation. L’employeur n’est donc pas tenu d’octroyer au salarié, après sa guérison, la fraction de congé correspondant à la durée de l’arrêt maladie.

À quoi sert la contre-visite patronale ?

L’employeur ne peut pas contester médicalement le bien-fondé d’un arrêt de t ravai l prescrit par le médecin traitant du salarié, mais en cas de doute d’un arrêt de complaisance, il peut organiser une contrevisite médicale. Il peut donc vérifier que le salarié est vraiment malade.

Cette faculté de contrôle est la contrepartie de son obligation de verser au salarié des indemnités complémentaires. En clair, si l’employeur indemnise le salarié pendant son arrêt maladie en complément des indemnités journalières versées par l’assurance maladie, il a un droit de regard. Cette contre-visite permet de dépister d’éventuels abus.

Qui est le médecin contrôleur ?

C’est un médecin de ville mandaté par l’employeur. Il prend connaissance du dossier du patient, radiographies, analyses médicales, ordonnances, etc., il évalue l’observance du traitement, boîtes de médicaments intactes ou entamées, et il effectue un examen afin de vérifier que le patient présente bien une pathologie l’empêchant de travailler.

Où et quand a lieu la visite médicale de contrôle ?

En principe, le médecin contrôleur se rend à l’improviste chez le salarié. Celui-ci doit être présent à son domi cile, tous les jours y compris les jours fériés et les dimanches, de 9 heures à 11 heures et de 14 heures à 16 heures, sauf en cas de soins ou d’examens médicaux l’obligeant à s’absenter. Par exception, certains salariés ont des arrêts de travail autorisant les « sorties libres » lorsque celles-ci font par t ie de la thérapie, par exemple, en cas de dépression ou de pathologies cancéreuses.

Que se passe-t-il si le salarié est absent lors du passage du médecin contrôleur ?

L’employeur est en droit de cesser le versement des indemnités complémentaires, sauf si le salarié dispose d’un motif légitime pour justifier son absence. Par exemple, en cas de consultation chez son médecin traitant au moment de la contre-visite médicale.

Quels sont les effets du contrôle médical ?

Le médecin transmet son avis à l’employeur. S’il conclut au bien-fondé de l’arrêt de travail, le salarié continuera à percevoir les indemnités complémentaires. À l’inverse, s’il conclut à l’aptitude du salarié à reprendre son travail, le droit aux indemnités complémentaires disparaît pour la période postérieure à la contre-visite. Cette sanction financière n’oblige cependant pas le salarié à reprendre son travail avant le terme de l’arrêt prescrit par son médecin traitant.

Cas pratiques

Marc peut-il refuser de se soumettre au contrôle ?

S’il refuse, il perd automatiquement le bénéfice des indemnités complémentaires, sauf dans deux cas. Lorsqu’il ne souhaite pas subir un examen clinique douloureux alors qu’il met à disposition du médecin contrôleur son dossier médical et les comptes rendus opératoires. Son refus est également légitime s’il est muni d’un avis d’inaptitude délivré par le médecin du travail.

En cas d’arrêt de travail injustifié, Anne risque-t-elle un licenciement ?

Non. Son employeur ne peut pas rompre pour cette raison son contrat de travail. En revanche, il peut immédiatement interrompre le versement des indemnités complémentaires de maladie qui sont à sa charge.

Le contrôle de la sécurité sociale

Le service médical de l’assurance maladie contrôle systématiquement les arrêts de travail de longue durée à partir du 60e jour d’indemnités journalières. Pour les arrêts de travail de courte durée, le contrôle est ciblé.

Quand l’arrêt est d’origine professionnelle

Le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle bénéficie d’une protection spécifique de son emploi. Il est interdit à l’employeur de rompre le contrat pendant toute la durée de l’arrêt de travail, sauf s’il est en mesure de justifier de l’un des deux motifs suivants :

→ une faute grave, voire lourde, du salarié ;

→ l’impossibilité de maintenir le contrat pour une raison économique.

L’acquisition des congés

Bien qu’absent, le salarié en arrêt maladie continue d’acquérir des jours de congé dans la limite de :

→ 2 mois d’absence, en une ou plusieurs fois, pendant la période de référence* pour les salariés non-cadres et assimilés cadres ;

→ 6 mois d’absence, en une ou plusieurs fois, pendant la période de référence* pour les salariés cadres.

* La période de référence s’étend du 1er juin au 31 mai de l’année suivante.

Le secret médical doit être préservé

Comme n’importe quel autre médecin, le médecin contrôleur est soumis au secret médical. Il ne peut révéler à l’employeur les causes médicales de l’absence du salarié. Il doit uniquement renseigner l’employeur sur la capacité du salarié à reprendre ou non son travail.

Le retour dans l’entreprise

Après une absence d’au moins 21 jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnels, ou en cas d’absences répétées pour raisons de santé et ce, quelle que soit la durée des absences, l’employeur doit programmer une visite de reprise auprès de la médecine du travail. Ce rendez-vous doit intervenir au plus tard dans les 8 jours suivant le retour du salarié à l’officine.