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Les entérostomies

Publié le 31 août 2018 | modifié le 1 janvier 2025
Par Caroline Bouhala et Christine Julien
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Les stomies digestives ou entérostomies sont réalisées dans le but de dériver le transit digestif, temporairement ou définitivement, à la suite de pathologie, de traumatisme abdominal ou de déformation. La perte de la continence implique d’appareiller une stomie avec des poches adaptées à la nature des effluents.

La maladie

Définition

Une stomie digestive ou entérostomie n’est pas à proprement parler une maladie mais plutôt une conséquence d’une maladie ou d’un traumatisme du tube digestif.

Une dérivation artificielle du transit

Une entérostomie, du grec enteron = intestin et stoma = bouche, est une déviation chirurgicale du tube digestif quand celui-ci n’est plus fonctionnel à cause d’un traumatisme, d’une maladie ou d’une ablation. Réalisée chirurgicalement, elle consiste en l’abouchement – ou jonction – d’un segment sain du tube digestif à la peau de l’abdomen. Positionnée en amont de la lésion, une stomie assure l’évacuation des selles tout en préservant la zone endommagée.

Plusieurs localisations

Selon leur localisation, les entérostomies se divisent en colostomies et iléostomies.

• Une colostomie correspond à un abouchement du côlon droit (ou ascendant), transverse, ou gauche (ou descendant) à la peau de l’abdomen (voir infographie).

• Une iléostomie correspond à un abouchement de l’iléon à la peau, l’iléon étant la dernière partie de l’intestin grêle (voir infographie).

Durée

L’entérostomie est définitive en cas de chirurgie palliative ou d’impossibilité de conserver la fonction sphinctérienne. Elle peut être temporaire, 6 semaines minimum, dans certains cas (voir tableau p. 26).

Nature des selles

Plus la stomie est proche du rectum, plus les selles sont fermes et moulées et de volume plus faible (voir infographie et Info+).

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• Colostomie gauche : les selles sont de consistance normale, solides ou pâteuses, odorantes, discontinues, 2 à 3 par jour, selon les individus et l’alimentation, avec gaz.

• Colostomies transversales ou droites : les selles sont semi-liquides.

• Iléostomie : les selles sont émises de façon presque continue selon le péristaltisme, avec une recrudescence postprandiale, en moyenne 700 ml par jour. Elles sont peu odorantes, âcres, corrosives en raison de la teneur en trypsine et du pH alcalin, liquides voire pâteuses avec parfois des particules alimentaires reconnaissables.

Description

Caractéristiques

Idéalement, l’orifice stomial est de 25 à 30 mm, mais cela dépend de la pathologie et de l’anatomie du patient. L’entérostomie peut être plane ou « en trompe », avec une hauteur d’environ 20 mm, forme réalisée lors de la confection d’une iléostomie. En cas d’entérostomie plane, une hauteur de 5 mm facilite l’appareillage.

Choix de l’emplacement

• Le plus souvent :

→ une colostomie transverse est située au niveau de l’hypocondre droit ;

→ une sigmoïdostomie (dernière partie du côlon) : au niveau de la fosse iliaque gauche ;

→ une iléostomie latérale se situe dans la fosse iliaque droite si possible.

• Autres critères. Idéalement, une entérostomie :

→ est positionnée en dehors d’une cicatrice, des plis cutanés et des reliefs osseux ;

→ doit être visible par le patient pour faciliter les soins et l’appareillage ;

→ est positionnée en regard du muscle grand droit de l’abdomen qui s’étend verticalement du thorax jusqu’au pubis, afin d’éviter une hernie péristomiale ;

→ sur une surface plane d’environ 5 cm pour faciliter la pose de la poche de recueil.

Indications

Les entérostomies pallient le plus souvent l’ablation d’un organe, mais elles sont aussi utilisées pour des traitements ou pour éviter l’ablation (voir tableau ci-dessus). Le cancer est une cause prédominante de recours à une stomie. Exemples : en cas de tumeur du rectum, l’entérostomie pallie une occlusion si l’ablation du rectum n’est pas réalisable chez un patient trop âgé ou trop fragile ; si la radiothérapie pour un cancer de l’anus est mal tolérée avec douleurs, diarrhées…, la déviation des selles évite qu’elles empruntent la partie traitée ; une colostomie permet l’évacuation des matières fécales en urgence en cas d’occlusion intestinale aiguë, etc.

Techniques chirurgicales

Latérale ou terminale

Une entérostomie peut être :

• latérale : technique dite en « canon de fusil ». Les deux orifices des parties supérieure et inférieure de l’intestin sortent côte à côte de la peau de l’abdomen (voir schéma ci-dessous).

• terminale : soit seule l’extrémité de la partie d’amont de l’intestin est extériorisée, la partie inférieure étant maintenue dans l’abdomen (opération de Hartmann), soit les 2 segments intestinaux sont extériorisés dans un même orifice ou dans 2 orifices éloignés l’un de l’autre.

Entérostomie sur baguette

Dans ce cas, une baguette est insérée sous l’anse intestinale extériorisée pour la soutenir pendant une dizaine de jours (voir schéma p. 27). La baguette, qui ne doit pas blesser l’intestin, est retirée sans douleur pour le patient par l’infirmière ou la (ou le) stomathérapeute. La baguette peut aussi être placée sous la peau de l’abdomen ; elle est alors retirée par le chirurgien au moment de refermer l’entérostomie.

Évolution

L’entérostomie est rouge violacée et plus ou moins œdémateuse, pendant 3 à 5 semaines en moyenne, avant de prendre son aspect définitif rond ou ovalaire. Elle perd ensuite de 2 à 10 mm en devenant « mâture ». À ce stade, l’entérostomie est un orifice « naturel ». Ce n’est pas une plaie mais une muqueuse intestinale de la couleur de la muqueuse buccale, insensible – elle ne doit pas faire mal –, et qui peut parfois saigner si elle est malmenée. Toute modification morphologique par perte ou gain de poids peut modifier l’entérostomie.

Complications

Les précoces

Malgré des hospitalisations courtes, les complications sont encore repérées et traitées le plus souvent à l’hôpital, avant la sortie du patient.

• La nécrose, due à une mauvaise vascularisation du segment intestinal ou à une traction de l’entérostomie qui change de couleur et passe du rouge-rosé au violacé, voire au noir.

• L’éviscération parastomiale, très rare, correspond à une extériorisation d’une partie des anses intestinales. Elle nécessite une reprise chirurgicale en urgence.

• La désinsertion, c’est-à-dire la réintégration partielle ou totale de l’intestin qui a tendance à repartir vers l’intérieur de l’abdomen.

• L’occlusion intestinale précoce du grêle ou du côlon : c’est un blocage partiel ou complet du transit normal des selles et des gaz.

Les tardives

Elles peuvent survenir à distance de l’intervention chirurgicale, après le retour à domicile.

• L’éventration correspond au passage d’anses intestinales ou du gros intestin à travers l’orifice de la stomie. Une reprise chirurgicale est nécessaire dans les cas où la stomie ne peut plus être appareillée correctement, si l’évacuation du transit n’est plus satisfaisante ou si l’éventration est douloureuse.

• Le prolapsus stomial est une excroissance de la stomie qui sort de plus en plus de l’abdomen. Il doit faire alerter un(e) stomathérapeute ou le service de chirurgie. Le prolapsus peut causer un inconfort, un appareillage difficile, des troubles du transit. Il expose à un risque de nécrose de l’anse extériorisée en cas d’étranglement. Il y a deux niveaux de traitement :

→ une réduction manuelle par rétraction de la muqueuse à l’aide d’une compresse humide froide sur un patient allongé ;

→ une chirurgie en cas de prolapsus volumineux, difficile à réduire et qui menace de s’étrangler.

• La sténose stomiale peut être directement visible s’il s’agit d’un rétrécissement de l’orifice de l’entérostomie. Elle est repérée par des selles plus fines et par un toucher stomial. Une sténose peut très bien être supportée, mais peut entraver l’évacuation des selles. Deux traitements :

→ manuellement par des dilatations digitales ou instrumentales si la sténose est peu serrée ;

→ chirurgicalement si elle est trop importante.

• Hémorragies et saignements :

→ les saignements digestifs par l’orifice de l’entérostomie : le sang est mêlé aux selles. C’est une hémorragie digestive qui relève du médecin afin de traiter la pathologie en cause ;

→ les saignements de la peau péristomiale : ils relèvent de l’infirmière ou d’un(e) stomathérapeute pour des soins de cicatrisation ;

→ les saignements de la muqueuse intestinale peuvent être dus à une fragilisation de la muqueuse par la prise d’anticoagulants, une chimiothérapie… Lorsque ces saignements sont consécutifs à des soins un peu agressifs, ils sont améliorés par une adaptation de la technique. Utiliser de l’eau froide, éviter de frotter avec une compresse et laver plutôt à la douchette, et utiliser des pansements hémostatiques, particulièrement en présence de traitements favorisants.

• Les complications cutanées. Les problèmes cutanés autour de la stomie peuvent être liés aux soins, à la qualité des effluents ou à une pathologie dermatologique (voir plus loin).

Son traitement

Objectif

La perte de la continence impose d’utiliser des poches de recueil fixées sur l’abdomen (voir tableau p. 28) afin de recueillir les effluents.

Stratégie

Cet appareillage est adapté à la nature des selles, à la situation de la stomie sur l’abdomen, à sa forme ainsi qu’à la dextérité et aux activités du patient. Un bon appareillage doit être étanche, discret, fiable, confortable et facile d’utilisation. Choisi avec un(e) stomathérapeute, il peut évoluer en fonction des aléas du mode de vie : irritation ou allergie, diarrhées, perte ou gain de poids…

Les appareillages de recueili

Deux types de systèmes

Les effluents sont recueillis dans une poche fixée sur l’abdomen de 2 façons.

• Soit la poche est solidaire d’un support assurant l’adhésivité du système à la peau. Il s’agit alors de systèmes « une pièce » ou 1P. L’ensemble est retiré à chaque changement de poche.

• Soit la poche vient se fixer sur un support protecteur qui peut rester en place 24 à 72 heures. Il s’agit alors de systèmes « deux pièces » ou 2P. La poche est soit collée (collerette adhésive), soit emboîtée (anneau de fixation ou système de type Tupperware) sur le support protecteur. Seule la poche est changée quotidiennement ou plusieurs fois par jour en fonction des besoins, le support pouvant rester en place 48 à 72 heures. Les systèmes 2P sont recommandés sur peau fragile ou abîmée pour éviter les changements d’appareillage répétés.

Les poches

Elles sont choisies en fonction de la localisation de l’entérostomie et de la consistance des selles.

Leur forme

Elle varie selon la nature des effluents.

• Les poches fermées, non vidables, sont généralement préconisées pour une colostomie gauche donnant des selles solides. Elles sont munies de filtre de dégazage désodorisant intégré. Elles sont changées une fois pleines.

• Les poches « vidables » sont ouvertes et obturables par clamp intégré avec bande auto-agrippante ou par un robinet. Elles permettent l’évacuation régulière des effluents importants et corrosifs, liquides ou semi-liquides, émis quasiment en continu notamment en cas d’iléostomie, de colostomie transverse droite et de diarrhée chez les colostomisés. Elles permettent d’espacer les changements de poche en cas de colostomie droite ou d’iléostomie. Un filtre désodorisant intégré permet l’élimination permanente et inodore des gaz, ce qui empêche la poche de gonfler.

• Les collecteurs de matières fécales permettent le recueil à distance des effluents liquides. Il s’agit d’une poche collectrice vidangeable graduée munie d’un tuyau crénelé et d’un robinet de vidange, raccordée à une poche de stomie compatible (de la même marque). Ces collecteurs sont utilisés chez des patients iléostomisés ayant un haut débit de selles liquides avec présence de débris. Par exemple en cas d’iléostomie, d’intestin grêle court ou d’épisodes de débâcle avec une colostomie, notamment après une chimiothérapie. Exemples : Collecteur Coloplast Express (Coloplast) compatible avec Alterna Magnum et Post-op, Sensura Magnum et Post-Op, Flow Collector (B. Braun) pour système Almarys Twin + Haut Débit.

Leur diamètre et leur contenance

Les poches se caractérisent par un diamètre permettant d’ajuster le support au pourtour de la stomie et une contenance exprimée soit en ml, soit en une unité propre à un fabricant : mini, standard, midi ou maxi.

Leur paroi

Transparentes ou opaques, toutes les poches sont recouvertes d’un voile qui absorbe la transpiration, protège des risques de macération et d’irritation cutanée, et atténue les bruits.

Les supports

Suivant la forme et la composition de la protection adhésive (hydrocolloïdes seuls ou mixtes avec adhésif hypoallergénique, alternance de gommes), les supports pour poche sont dits « standards » ou plans, « Haute protection HP » pour s’adapter à tous les reliefs (stomies rétractées, plis cutanés…), « Haute résistance HR » pour les effluents liquides ou « Convexes » pour les stomies irrégulières.

Pour les systèmes 1P ou 2P, le support protecteur, intégré ou pas, peut être prédécoupé ou « à découper », ce qui permet de l’ajuster au pourtour de l’entérostomie. Il peut être muni d’œillets permettant d’attacher une ceinture (voir Accessoires). La forme convexe est mieux adaptée aux entérostomies rétractées où elle évite l’écoulement d’effluent entre la peau et le support.

Les systèmes d’irrigation colique

Ce sont des ensembles de dispositifs médicaux destinés aux patients colostomisés pratiquant l’irrigation colique (voir encadré). Plusieurs marques proposent des systèmes d’irrigation colique. Exemples : Iryflex trousse d’irrigation complète (B. Braun), Visi Flow Kit, trousse d’irrigation (ConvaTec) utilisable avec les manchons et les poches Visi Flow (à ajouter) ; Coloplast Irrigation (Coloplast).

Les accessoires

Le tampon obturateur

Il est inséré dans l’entérostomie pour stopper les émissions de selles quand la poche est retirée. Ce type de tampon absorbant peut être utilisé chez les colostomisés avec selles moulées après une irrigation colique ou pour pratiquer certaines activités tels sport ou relation sexuelle à des moments où le transit intestinal est faible. Un filtre intégré laisse passer les gaz et capte les odeurs. Exemples : Alterna système obturateur (Coloplast)…

Bouchon et filtre d’obturation

Ce capuchon adhésif comporte un tampon absorbant et un filtre de charbon ou bouchon avec filtre, fixé par un adhésif hydrofuge pour éviter les écoulements de l’orifice stomial. Exemple : Iryfix (B. Braun).

Le clamp de fermeture

Un clamp de sécurité est une sorte de baguette en plastique qui permet de fermer le bas des poches vidables. Il est réutilisable. Exemples : Coloplast Clamp (Colopast), Hollister Clamp de sécurité (Hollister)…

Les filtres indépendants

Ils sont très peu utilisés car les poches sont, pour la plupart, équipées de filtres intégrés. À base de charbon actif et à fixer sur la poche, ils laissent échapper les gaz de façon inodore. Exemple : Filtre Biotrol (B. Braun).

La pâte protectrice cutanée

Présentée en tube de 60 g ou en barrettes de 6 g de pâte malléable, découpable, pliable et adhésive, la pâte protectrice forme un joint d’étanchéité entre la stomie et le support qui protège la peau des effluents. Elle permet aussi de prévenir le risque de fuite et d’égaliser le pourtour de la stomie en complément des protecteurs cutanés. Pour des peaux très abîmées, les pâtes en tube ou en barrettes sans alcool, les anneaux et les plaques d’hydrocolloïde sont préconisés. Exemples : Brava pâte, Superfiller (B. Braun), Alterna (Coloplast), Stomahesive (CovaTec), Adapt protecteur cutané (Hollister)…

Les anneaux péristomiaux préformés

Alternative aux pâtes protectrices, les anneaux péristomiaux préformés permettent de combler les irrégularités cutanées et apportent une résistance accrue aux effluents. Ils protègent la peau péristomiale et facilitent l’appareillage des entérostomies difficiles : rétractées, à fleur de peau, sur pli cutané… Exemples : anneau protecteur Adapt Cerarings (Hollister), Brava anneau protecteur (Coloplast), Eakin Cohesive (fabriqué par les Laboratoires Eakin, commercialisé par B. Braun)…

Les plaques de protection péristomiale

Les plaques de protection absorbent l’humidité et préviennent les risques de macération. Elles se placent sous le protecteur cutané pour protéger temporairement une peau irritée au niveau de la zone d’adhérence du support protecteur. Exemples : Brava plaque de protection (Coloplast), Adapt plaque (Hollister), Askina Biofilm Transparent (B. Braun)…

Les sprays protecteurs

À base de silicone, ils visent à protéger la peau des effluents autour de l’entérostomie. Non pris en charge à la LPPR. Exemples : Brava (Coloplast), Spray Askina Barrier (B. Braun)…

La poudre absorbante

Appliquée sur le pourtour de la stomie, une poudre absorbante à base de CMC et/ou de gommes permet le maintien d’une peau sèche et l’absorption de suintements avant l’application d’un support lors d’irritations cutanées. Elle est largement saupoudrée sur la peau, son excédent étant balayé avec une compresse pour ne pas contrecarrer l’adhésivité du support. Non prise en charge à la LPPR. Exemples : Brava poudre (Coloplast), Adapt poudre (Hollister), Désodorisant Deodour (B. Braun)…

Les sprays antiadhésifs

À base de silicone, ils facilitent le décollement du support et des résidus d’adhésif. Non pris en charge à la LPPR. Exemples : Brava spray de protection (Coloplast), Adapt spray médical retrait adhésif (Hollister), Niltac (ConvaTec), B.Braun Spray Adhesive Remover (B.Braun)…

La ceinture de stomie

Il s’agit d’une ceinture lavable et réutilisable en tissu extensible, réglable, avec un système d’accroche adapté aux encoches ou aux œillets des poches de recueil. Convient aux systèmes 2P et aux systèmes 1P convexes. Exemples : Urimed Fix (B. Braun), Brava ceinture (Coloplast), Adapt ceinture (Hollister)…

Prise en charge

• Inscription. Les appareillages et accessoires pris en charge par l’Assurance maladie sont inscrits soit sous lignes génériques, soit sous nom de marque, notamment pour les collecteurs ou l’obturateur Iryfix, sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR) dans : « Dispositifs médicaux pour incontinents urinaires, fécaux et stomisés et pour le traitement des troubles colorectaux par atteinte neurologique ».

• Indication. La principale indication ouvrant droit au remboursement est essentiellement fonctionnelle et concerne tous les patients dans l’impossibilité temporaire ou définitive de retenir l’écoulement des matières fécales. Les pathologies concernées sont extrêmement variées.

• Prescription. Tous sont autorisés à la prescription médicale et infirmière.

• Tarifs. Poches, supports, pâte, protecteurs cutanés et ceintures sont pris en charge totalement ou en partie. Sprays protecteurs et antiadhésifs et poudres absorbantes ne sont pas remboursés.

Conseils aux patients

Observance

Il faut du temps

Provisoire ou définitive, une stomie altère l’image de soi. L’alimentation, la reprise d’une vie socioprofessionnelle et intime, les activités sportives sont parfois remises en jeu après l’intervention. Une stomie est toujours un traumatisme psychique. Perdre la continence est une blessure narcissique, un signe de régression qui renvoie au « pipi caca » et peut altérer l’estime de soi. La personne ressent comme une mutilation avec la perte de l’intégrité physique, il faut du temps pour l’accepter et apprendre les bons gestes. Informer si possible, rassurer et orienter toujours vers un(e) stomathérapeute en cas de problèmes.

Gérer les fuites

Les fuites qui surviennent en bordure de stomie doivent être prises en charge rapidement. Si elles se produisent après un changement d’appareillage à l’identique, quelques questions se posent : est-ce que le modèle de poche est adapté ? La découpe est-elle correcte ? La peau est-elle assez sèche ? Le rythme de changement est-il respecté ? En cas de difficulté, le patient doit contacter son ou sa stomathérapeute à l’hôpital. S’il n’en a pas, orienter vers le site de l’Association française d’entérostoma-thérapeutes (www.afet.asso.fr : menu « Répertoire »).

Traiter rapidement les complications cutanées

Les problèmes cutanés autour d’une stomie sont liés aux soins, au matériel utilisé, à la qualité des effluents, à une récidive de la maladie ou à une pathologie dermatologique (voir tableau ci-dessous).

Automédication

Attention à l’absorption

Une entérostomie affecte l’absorption des médicaments en limitant la longueur de l’intestin fonctionnel et en modifiant parfois la motilité digestive(1). Ce qui peut entraîner une diminution de l’absorption par exemple. Les médicaments à marge thérapeutique étroite tels la digoxine, les AVK, etc. seront à surveiller. Préférer les formes liquides et à libération immédiate chez les iléostomisés.

Des troubles gastro-intestinaux

De nombreux médicaments entraînent une constipation (trimébutine, opioïdes, anti-H1, neuroleptiques…), une diarrhée (antibiotiques, captopril, colchicine, ciclosporine…), des modifications de couleur des selles (charbon, tétracycline…), un ralentissement ou une accélération du transit, une déshydratation, etc. Attirer l’attention sur les dangers de l’automédication avec des médicaments contenant de l’aluminium ou des excipients à effet notoire comme le sorbitol, qui induisent la diarrhée. Informer sur le changement organoleptique des selles (odeur, gaz, couleur) car cela peut impacter la perception de soi.

Vie quotidienne

Soins d’entérostomies

• Ne pas médicaliser la toilette. Une entérostomie sera plus intégrée par le patient si la toilette est « dédramatisée ». Il ne s’agit pas d’une plaie et la toilette est un soin d’hygiène non stérile qui doit s’approcher le plus possible d’une toilette de l’anus naturel. Sécher à la serviette de toilette, au papier essuie-tout ou avec un mouchoir en papier, en évitant les compresses qui ont tendance à « médicaliser » la toilette.

• Éviter le savon. La toilette de la stomie et du pourtour se fait à l’eau du robinet, tiède, avec un gant changé tous les jours ou une éponge douce. Éviter les savons potentiellement allergisants à cause de parfum et/ou colorants. Ils sont souvent difficiles à bien rincer et peuvent entraîner des irritations, notamment lorsqu’il en reste sous l’appareillage. Ils peuvent néanmoins être utilisés lorsque les odeurs entraînent une sensation de dégoût importante pour le patient, à condition d’être neutres et parfaitement rincés avant de poser l’appareillage.

Assurer la tenue de l’appareillage

Une mauvaise tenue de l’appareillage, fréquente avec les colostomies sigmoïdiennes et les iléostomies, est souvent due à :

• une découpe mal adaptée de la partie adhésive, souvent trop petite alors qu’elle devrait dépasser de 2 à 3 mm autour de l’entérostomie. La découpe peut également être trop grande, laissant les effluents stagner sur la peau ;

• un pli de la peau au niveau de la stomie qui peut n’apparaître qu’en position assise. La partie adhésive est alors découpée plus largement, en ovale, allongée dans le sens du pli, en mesurant l’entérostomie à l’aide du gabarit fourni avec l’appareillage et en faisant asseoir le malade pour repérer la formation éventuelle d’un pli ;

• l’emploi de « crème cicatrisante » ou de pommade qui empêche une bonne adhésivité. Seuls les protecteurs cutanés sont adaptés à ces soins.

Changer et vider

• Éviter que les selles restent en haut de la poche en laissant un peu d’air dans la poche au moment de la pose.

• Ne pas attendre que la poche soit pleine pour la vider ou la changer. Un filtre mouillé se sature et fonctionne moins bien, voire plus du tout. Vider plutôt la poche lorsque les effluents sont à mi-hauteur pour éviter les décollements et fuites dus au poids de la poche. Si la poche de colostomie est gonflée, c’est que le filtre est saturé, il faut changer la poche.

• Si des résidus d’adhésifs restent collés sur la peau, essayer de les enlever à l’eau tiède en les roulant sous les doigts mais sans gratter. S’ils restent collés, poser le nouveau support dessus, ces résidus devraient partir au prochain renouvellement de poche. Si besoin, utiliser un spray antiadhésif pour faciliter leur décollement.

Vie quotidienne

Alimentation

• Manger normalement et prendre du plaisir à manger reste la règle, le confort du patient évitant le risque d’une « phobie » de l’alimentation. Chacun doit trouver les aliments qui lui conviennent le mieux en fonction de leurs effets sur le transit (voir tableau ci-dessus). Les patients qui recourent à des artifices pour limiter les selles (ne manger que des pâtes, éviter systématique ment les fibres…), ou consomment du lopéramide pour limiter les effluents d’une iléostomie doivent être orientés vers un(e) stomathérapeute.

• Adapter les repas. L’alimentation doit être équilibrée avec un apport hydrique suffisant de 1,5 à 2 l par jour. En cas d’iléostomie, les aliments salés permettent d’éviter la déshydratation en palliant l’absence d’absorption colique. La réintroduction des aliments est très progressive au rythme d’un aliment par jour. Par exemple, le lactose est réintroduit d’abord par des préparations lactées de type béchamel ou purée, puis des yaourts et des fromages blancs, et enfin par le lait pris en petites quantités. Conseiller au patient d’essayer un aliment à deux reprises avant d’y renoncer.

Troubles du transit

• En cas de diarrhée, boire plus de 2 l/jour pour éviter la déshydratation et privilégier une alimentation pauvre en fibres. Une diarrhée se caractérise par des selles liquides avec une colostomie ou par une augmentation du volume des effluents avec une iléostomie. La poche est renouvelée plus souvent et la peau péristomiale fait l’objet d’une attention particulière. Les poches vidables peuvent être utilisées chez un patient colostomisé.

Un ralentisseur de transit type lopéramide peut aussi être prescrit. Une diarrhée qui dure plus de 48 heures, ou s’accompagnant de fièvre ou d’une altération de l’état général, doit être signalée au médecin traitant.

• En cas de constipation

→ Chez le patient colostomisé, le transit doit être similaire à celui antérieur à l’intervention. En cas de constipation, conseiller de boire davantage, de manger des légumes verts, des fruits frais et des yaourts. Rappeler qu’une glace accélère la progression du contenu intestinal et qu’un café accroît la motricité colique. Dire d’alerter le médecin traitant en cas de douleur de type colique ou d’absence de selles pendant une semaine.

→ Chez le patient iléostomisé, l’absence de selles est le plus souvent une urgence et doit faire alerter le médecin.

Préserver le sommeil

Une entérostomie change les habitudes du patient. Par exemple, une iléostomie qui « donne » tout le temps empêche de dormir à plat ventre. Position qui reste possible avec une colostomie et un transit bien réglé, sans selle la nuit, et si elle n’est pas douloureuse. Le patient peut dormir sur le côté si la poche ne vrille pas et n’empêche pas le bon écoulement. Il est possible d’ajouter un maintien de la poche pour la nuit sans le serrer : culotte, ceinture légère… En cas d’iléostomie, une vidange nocturne programmée peut être nécessaire.

La crainte d’une fuite de la poche dans le lit peut être un problème. Conseiller de vider la poche avant le coucher. Et si les selles sont irrégulières, de mettre une poche propre avant d’aller se coucher.

Activités

• Sexualité. La stomie ne craint rien lors des activités sexuelles durant lesquelles on peut adopter un matériel discret en cas de colostomie, telle une poche mini opaque.

• Vie sociale. Poches plus petites, désodorisants, le matériel d’aujourd’hui permet de conserver une vie sociale classique. Emporter toujours du matériel de rechange.

• Sport. Toutes les activités sont possibles, mais éviter les sports violents et de combat. La baignade est possible car les appareillages résistent à l’eau mais il faut les changer après le bain.

Avec l’aimable collaboration du docteur Adeline Germain du Service de chirurgie digestive, hépatobiliaire, endocrinienne et cancérologique du CHRU de Nancy – Hôpital de Brabois (54), de Danièle Chaumier, stomathérapeute, présidente de l’Association française d’entérostoma-thérapeutes (Afet), et de Thierry Pennable, infirmier journaliste.

(1) « Le pharmacien et la prise en charge des patients entérostomisés », Katalin Toth, Guillaume Hébert, Pétronille Roy, Antoine Lechaud, Michelle Keirle, J. pharmacie clinique 2015, 34 (4) : 167-78 doi:10.1684/jpc.2015.0320

Info +

→ Le terme « effluents » est préférable à celui de « selles » car ce qui « sort » d’une stomie n’est pas forcément moulé, selon l’endroit où le tube digestif va aboucher à la peau.

L’irrigation colique

→ Le principe de l’irrigation colique est de provoquer l’émission des selles pour ne plus en avoir pendant 48 à 72 heures, le temps du transit intestinal.

Elle consiste à vider complètement le côlon tous les 2 ou 3 jours, et permet le port d’une mini-poche ou d’un tampon obturateur. L’irrigation colique améliore le confort et la qualité de vie du patient.

→ Personnes concernées. Cette technique est réservée aux colostomisés gauches car même si l’anus et le rectum ont été ôtés, tout le circuit intestinal supérieur est intact (réabsorption de l’eau et moulage des selles qui seront stockées avant d’être éliminées) et demande en moyenne 48 heures.

→ Technique : une poche à lavement contenant 700 ml à 1 litre d’eau tiède du robinet (36 à 38 °C) est suspendue à hauteur de l’épaule du patient. L’eau coule rapidement et remonte dans le côlon gauche, transverse et droit. L’évacuation se fait en 30 à 45 minutes dans un manchon d’irrigation au-dessus des toilettes au départ, le temps d’évacuer majoritairement l’eau injectée puis manchon replié le temps de l’évacuation des selles.

L’avis du spé

“L’éducation du patient se prolonge à domicile

Danièle Chaumier, infirmière stomathérapeute, présidente de l’Association française d’entérostomathérapeutes (Afet).

« Le nombre de stomathérapeutes en exercice ne peut répondre aux besoins de tous les patients entérostomisés et, pour diverses raisons, certains sortent de l’hôpital sans être autonomes. C’est le cas de patients qui sont dans un tel déni qu’ils refusent d’apprendre à faire les soins de leur entérostomie, du moins au début. Les proches peuvent être impliqués dans certains cas et lorsque ce n’est pas possible, le recours à une infirmière libérale s’impose. Officinaux et infirmières à domicile sont des relais en ville pour donner des conseils aux patients, y compris à ceux qui ont bénéficié d’une consultation avec un(e) stomathérapeute. »

Info +

→ La substitution des dispositifs médicaux par l’officinal n’est autorisée « qu’avec l’accord exprès et préalable du prescripteur, sauf en cas d’urgence et dans l’intérêt du patient » (art. L. 5125-23 du Code de la santé publique).

En savoir +

→ Trouver un(e) stomathérapeute

L’Association française d’entérostomathérapeutes (Afet), propose un annuaire : www.afet.asso.fr ; menu « Répertoire ».

→ « Mémento de la prescription infirmière » présente les dispositifs médicaux autorisés à la prescription infirmière (serviceclients@espaceinfirmier.fr, tarif : 10 €)

→ « Rapport d’évaluation des dispositifs de drainage et de recueil des urines et des selles », Haute autorité de santé, 2017.

Principales difficultés rencontrées

Une enquête internationale réalisée par le laboratoire Coloplast en 2010 renseigne sur les difficultés rencontrées par les personnes stomisées :

→ 6 personnes sur 10 font face à des fuites lors des six premiers mois suivant l’intervention ; 53 % des personnes stomisées depuis cinq ans rapportent encore au moins une fuite par an ;

→ 57 % des personnes stomisées ont des problèmes d’adhésivité de l’appareillage, dus à la présence de cicatrices, sillons, plis cutanés, hernie, ou de prise ou perte de poids. Parmi ceux qui souffrent socialement et psychologiquement de fuites dues à une mauvaise adhésivité de l’appareillage, 29 % en parlent à leur stomathérapeute, 23 % à leurs proches et 8 % à un(e) ami(e), mais 35 % n’osent pas en parler.

Info +

→ Pendant 1 à 2 semaines après l’intervention, une alimentation pauvre en résidus est maintenue. Sachant que la reprise du transit se fait généralement au bout de 8 jours pour une colostomie et 15 jours pour une iléostomie. Puis les fibres sont progressivement réintroduites.

À RETENIR

→ Le choix de l’appareillage est fait en fonction du patient et de ses aptitudes, et du type d’entérostomie. Il doit parfois être modifié de retour à domicile pour être adapté aux activités que le patient n’avait pas à l’hôpital.

→ Poches et accessoires doivent être étanches, discrets, fiables, confortables et faciles d’utilisation. Les appareillages ne sont pas des génériques, chaque marque a des caractéristiques plus ou moins adaptées à chaque situation.

→ La toilette de l’entérostomie et de son pourtour est réalisée à l’eau du robinet, tiède, avec un gant ou une éponge douce.

→ La peau péristomiale doit toujours être propre et sèche, surtout après la toilette, au risque d’empêcher la tenue de l’appareillage.

→ Les fuites en bordure de stomie doivent être gérées rapidement. Les patients qui en souffrent socialement et psychologiquement n’en parlent pas toujours. Les questionner sur d’éventuels problèmes de fuites et/ou sur la bonne tenue de l’appareillage.

Idem pour les complications cutanées car sources d’inconfort et de douleurs et qui compliquent les changements d’appareillage.

L’alimentation doit être maintenue normalement. Le confort et le plaisir à manger évitent une « phobie » de l’alimentation qui doit être surveillée et rapidement prise en charge.

L’information du patient sur les différents soins et sur les dispositifs médicaux existant favorise sa qualité de vie et l’observance de la prise en charge de la situation médicale.