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L’hémodialyse

Publié le 23 mai 2019
Par Marianne Maugez
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En France, environ 47 000 patients atteints d’insuffisance rénale chronique terminale sont traités par dialyse (1). L’hémodialyse est la technique la plus utilisée.

De quoi s’agit-il ?

• L’hémodialyse est une méthode d’épuration du sang, utilisée chez les patients souffrant d’insuffisance rénale terminale chez lesquels les reins ne fonctionnent plus correctement. Aussi appelée « rein artificiel », elle consiste à filtrer le sang d’une personne à l’extérieur du corps. Le but est de débarrasser l’organisme des déchets accumulés et d’éliminer l’eau en excès.

• Elle se distingue de la dialyse péritonéale qui utilise les capacités de filtration du péritoine, la membrane qui entoure les organes de la cavité abdominale et le tube digestif, et qui, elle, s’effectue à l’intérieur même du corps du patient. L’hémodialyse concerne 90 % des patients sous dialyse.

Quel en est le fonctionnement ?

Les échanges entre le sang du patient et le liquide appelé dialysat, qui permet son épuration, se font au travers d’un filtre artificiel nommé dialyseur (voir schéma).

• Le dialyseur est un cylindre composé de deux compartiments. L’un est parcouru par le sang du malade, l’autre par le dialysat. Entre les deux, une membrane semi-perméable permet le passage de l’eau et des molécules de petite taille.

• Le dialysat ou bain de dialyse est la solution en contact avec le sang du malade. Elle est composée d’eau purifiée et de sels minéraux dont la concentration varie en fonction des besoins du patient. Au fur et à mesure de la séance, le dialysat se charge en déchets.

• Le générateur de dialyse fait circuler le sang et le dialysat dans le dialyseur en contrôlant la température et la pression du dialysat.

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• Le circuit extracorporel achemine le sang du bras du malade vers le dialyseur et reconduit le sang « propre » du dialyseur vers le patient.

Quels sont les principes ?

L’hémodialyse combine 2 principes physiques.

• La diffusion. Des échanges d’éléments chimiques (ions…) se font entre 2 liquides de compositions différentes en contact afin d’homogénéiser les concentrations. Les éléments du liquide le plus concentré passent vers le milieu le moins concentré. C’est le principe du gradient de concentration mis à profit pour éliminer les déchets du sang vers le dialysat, vide d’éléments toxiques. À l’inverse, selon les besoins du patient, un dialysat concentré en certains éléments est utilisé, tel le calcium, pour « recharger » le sang.

• L’ultrafiltration. Éliminer l’eau en excès dans le sang du patient nécessite une différence de pression entre les liquides. Le dialysat qui rencontre le sang a une pression plus basse pour attirer l’eau et l’évacuer.

Quel est l’abord vasculaire ?

L’hémodialyse fonctionne si le sang arrive au dialyseur avec un débit suffisant. Parce que les veines superficielles de l’avant-bras ne le permettent pas, deux techniques rendent possible un abord vasculaire adéquat.

• Réalisation d’une fistule artério-veineuse. Elle consiste à relier une veine à une artère proche, au niveau de l’avant-bras en général (voir dessin). Une partie du sang artériel est détournée dans la veine qui va se dilater, augmentant progressivement le débit sanguin. La fistule est réalisée 3 à 6 semaines avant le début de la dialyse pour obtenir un débit sanguin suffisant.

• Pose d’un cathéter central dans une grosse veine du cou, de l’épaule ou de la cuisse en cas de capital veineux épuisé ou en urgence.

Comment ça se passe ?

• Les séances de dialyse ont lieu le plus souvent dans un établissement de santé, plus rarement à domicile. Dans ce cas, le patient doit être formé à son traitement et une personne de son entourage présente pour intervenir si besoin.

• Les séances durent en moyenne 4 heures et sont répétées 3 fois par semaine. Elles sont planifiées selon les contraintes du patient.

• Préparation. Il est recommandé de porter des vêtements amples pour être à l’aise. Des patchs anesthésiants type Emla sont appliqués sur la fistule 1 heure avant pour que le branchement à la machine ne soit pas douloureux. Le patient est pesé systématiquement. La différence de poids par rapport à la pesée en fin de séance précédente détermine la quantité d’eau à éliminer lors de la dialyse.

• Installation. Après un lavage minutieux de la fistule, le patient s’installe à son poste de dialyse, assis ou couché. Des paramètres tels tension artérielle, fréquence cardiaque… sont vérifiés. Après le branchement, une injection d’anticoagulant évite que le sang coagule dans le circuit.

• Déroulé. Indolore, la séance permet au patient de s’occuper : sieste, lecture, télévision, cours dispensés par des instituteurs détachés de l’Éducation nationale pour les enfants. Une collation autorisant des écarts par rapport au régime alimentaire quotidien (voir ci-après) est possible et appréciée la première heure. Au-delà, les molécules n’ont pas le temps d’être absorbées dans le sang et ne seront pas dialysées. À la fin de la séance, une solution saline est injectée dans le circuit pour « chasser » le sang vers le patient. Une prise de tension est effectuée avant que le patient ne se lève ainsi qu’une nouvelle pesée afin de vérifier que l’objectif de perte de poids ou poids sec a été atteint (voir Dico+).

Et au quotidien ?

• Entretien de la fistule. Une hygiène rigoureuse limite le risque infectieux : lavage du bras à l’eau et au savon au moins 2 fois par jour, port de manches longues pour les activités type jardinage ou bricolage afin d’éviter les blessures. Ne pas porter de bracelets ou montres serrés pour ne pas gêner le débit sanguin.

• Alimentation. Elle est cruciale pour limiter l’accumulation des toxines dans l’organisme. Une consultation avec une diététicienne apprend à gérer ses apports en potassium, phosphore et sodium, et en protéines pour éviter une dénutrition car la dialyse augmente les besoins en protéines. La consommation d’eau est surveillée et régulièrement réévaluée avec le médecin néphrologue selon la diurèse.

• Médicaments. Quand la dialyse et la surveillance alimentaire ne suffisent pas à équilibrer kaliémie et phosphorémie, on recourt au :

→ polystyrène sulfonate de sodium (Kayexalate) ou de calcium (Resikali), résines échangeuses d’ions, qui libèrent les ions sodium ou calcium au niveau de l’intestin pour fixer le potassium et l’éliminer dans les selles ;

→ carbonate de lanthane (Fosrenol), de calcium (Calcidia), acétate de calcium (Phosphosorb) et polymères non calciques (Renagel et Renvela), chélateurs de phosphate, qui réduisent son absorption dans le tractus gastro-intestinal pour l’hyperphosphorémie.

• Exercice physique. La sédentarité, importante chez les gens dialysés, est associée à une surmortalité. Une activité physique de 30 minutes par jour maintient la masse musculaire, améliore les fonctions cardiaque et respiratoire et évite un repli sur soi. Éviter les sports à risque de coups au bras et donc de saignements.

• Vacances. En France, à l’étranger et sur certains bateaux de croisière, des centres de dialyse accueillent les voyageurs. Il faut anticiper son départ et réserver ses séances.

(1) Agence de la biomédecine, Rapport annuel Rein 2016.

Reins et insuffisance rénale

Les reins filtrent le sang pour éliminer les déchets endogènes tels l’urée et l’acide urique, ou exogènes tels les médicaments. Ils interviennent dans l’équilibre en eau et en sels minéraux (Na, K…), produisent des hormones telle l’érythropoïétine pour fabriquer les globules rouges, la rénine, enzyme régulant la pression artérielle, et le calcitriol, forme active de la vitamine D, pour l’absorption du calcium dans l’intestin et sa fixation sur les os. En cas d’atteinte des néphrons, unités fonctionnelles des reins, la fonction d’épuration n’est plus assurée. L’insuffisance rénale est aiguë quand elle survient brutalement, après une infection par exemple. Elle est chronique quand elle s’installe peu à peu suite à un diabète, une HTA mal contrôlée, etc. Selon la quantité de néphrons non fonctionnels, il y a 4 stades d’insuffisance, de légère à terminale avec mise en jeu du pronostic vital à court terme. Dans ce cas, la prise en charge repose sur la greffe ou sur l’épuration extracorporelle de l’eau et des déchets si la greffe est impossible par manque de donneurs ou si des maladies la contre-indiquent.

Dico +

→ Poids sec. Il est déterminé par le néphrologue en tenant compte de différents paramètres cliniques. HTA, essoufflement, notamment, font diminuer le poids sec. Fatigue, chute de tension font revoir cette valeur à la hausse.