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Bilan partagé de médication RECRUTEMENT : lever les objections des patients
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RECRUTEMENT : LEVER LES OBJECTIONS DES PATIENTS
Lancé en janvier 2018, le bilan partagé de médication (BPM) est un dispositif qui modifie les relations habituelles entre pharmaciens et patients, de la même façon que les entretiens pharmaceutiques pour les patients asthmatiques ou sous anticoagulants oraux. Patients et médecins ne connaissent pas encore bien ce nouveau service proposé par le pharmacien. Il convient donc de faire preuve de pédagogie pour convaincre la population ciblée par ces entretiens de leur intérêt et être armé d’arguments solides au moment du recrutement. Nous nous sommes appuyés sur des retours d’expérience de pharmaciens qui ont mené des bilans partagés de médication au sein de leurs officines pour vous proposer des éléments de réponses aux possibles objections des patients.
DE QUOI S’AGIT-IL ?
Le terme de bilan partagé de médication est peu explicite pour le patient voire inquiétant. Il vaut mieux, du moins dans un premier temps, s’en affranchir pour privilégier une autre appellation telle que « point sur les traitements » ou « discussion autour des médicaments ». L’utilisation de l’acronyme « BPM » est à proscrire.
« Si vous êtes d’accord, j’aimerais que l’on prenne quelques minutes pour parler de vos médicaments et de certains points liés à vos traitements que nous n’avons pas le temps d’aborder lorsque je vous délivre vos ordonnances.
Vous avez peut-être vu les affiches à l’entrée de l’officine. Nous proposons des entretiens entièrement pris en charge par l’Assurance maladie pour faire un point sur vos traitements et les éventuelles difficultés que vous rencontrez. »
ÇA SERT À QUOI ?
Parmi les sujets âgés polypathologiques, 3,9 millions de personnes sont considérées comme particulièrement exposées aux risques liés à la polymédication (au moins 5 médicaments différents prescrits en traitement chronique). Ce risque augmente en cas de multiplicité des prescripteurs. La survenue d’effets indésirables médicamenteux est en moyenne deux fois plus fréquente après 65 ans. De 30 % à 60 % de ces effets seraient évitables. L’Assurance maladie estime qu’ils occasionnent 130 000 hospitalisations et 7 500 décès par an chez des personnes de 65 ans et plus. Dans ce contexte, le bilan partagé de médication a été pensé comme un outil de lutte contre l’iatrogénie médicamenteuse. Ses objectifs doivent être présentés de façon positive, avec un bénéfice concret pour le patient. Vous pouvez vous appuyer sur des cas réels et votre expérience pour justifier l’intérêt de ces bilans.
– « L’Assurance maladie a observé que de nombreux patients de plus de 65 ans, atteints de plusieurs maladies et prenant plus de 5 médicaments, étaient plus à risque de rencontrer des difficultés avec leur traitement, qui peuvent, dans certains cas, mener à une perte d’autonomie et une hospitalisation. Elle a donc confié comme mission aux pharmaciens d’accompagner de façon plus structurée ces patients pour leur permettre d’éviter les risques liés à leurs traitements et de maintenir une bonne qualité de vie. »
– « L’objectif est de vous apporter des conseils pour que votre traitement soit le plus efficace possible avec le moins d’effets indésirables. Il s’agit également de faciliter la prise de vos médicaments au quotidien et de vous proposer des aides adaptées à vos besoins. »
– « Par exemple, une patiente que j’ai vue en entretien m’a avoué qu’elle avait des douleurs à l’estomac depuis longtemps mais qu’elle ne s’en était jamais plainte à personne. Je me suis rendu compte, au cours de notre discussion, qu’elle prenait un de ses traitements à jeun alors qu’il est préférable de le prendre au cours des repas. En changeant juste le moment de prise, elle a été vraiment soulagée. »
POURQUOI C’EST LE PHARMACIEN QUI FAIT ÇA ? VOUS AVEZ LES COMPÉTENCES NÉCESSAIRES ?
Les entretiens pharmaceutiques et le bilan partagé de médication mettent en place de nouveaux rapports entre les patients et leurs pharmaciens qui les sortent de leur « zone de confort relationnelle » habituelle. La prise de rendez-vous en pharmacie reste déstabilisante pour les patients. La discussion autour des nouvelles missions des pharmaciens est l’occasion de valoriser vos compétences scientifiques et médicales et de vous positionner en tant qu’expert du médicament.
Pharmaciens et médecins ne sont pas mis en concurrence mais il s’agit d’un partage de tâches et d’une coordination dans l’intérêt du patient.
« L’Assurance maladie a choisi les pharmaciens pour mener ces entretiens car nous sommes les spécialistes du médicament. Nous sommes formés au cours de nos 6 années d’études et tout au long de notre exercice professionnel à la sécurisation de la prise des traitements. Nous travaillons en collaboration avec les médecins. Je vais prendre le temps de vous réexpliquer des éléments que votre médecin n’a pas pu approfondir. Il y a certainement des questions que vous avez oublié de lui poser ? Par ailleurs, je vous rappelle que je suis soumis au secret professionnel, comme votre médecin. »
QUE VA PENSER MON MÉDECIN ? JE VAIS LUI DEMANDER SON AUTORISATION
Le pharmacien n’a en aucun cas besoin de l’autorisation des prescripteurs pour proposer et mener des bilans partagés de médication. En revanche, l’efficacité et la réussite de ce nouveau dispositif reposent sur le partage d’informations et la coordination pluriprofessionnelle. Il convient donc, au minimum, d’informer les médecins de la mise en place des bilans partagés de médication et de transmettre une synthèse des bilans réalisés avec leurs patients (voir encadré page 5). D’ailleurs, le formulaire d’adhésion en ligne sur le portail Amelipro de l’Assurance maladie demande que le patient donne son accord « pour que le pharmacien porte à la connaissance du médecin traitant l’adhésion du patient au dispositif d’accompagnement et prenne contact autant que besoin avec lui ». Le déploiement du dossier médical personnel (DMP) devrait également favoriser ces échanges. Certains patients peuvent être inquiets des informations qui pourraient être transmises et qu’ils ne souhaitent pas porter à la connaissance de leur médecin. Les rassurer en indiquant que les informations seront partagées avec leur accord.
« J’ai déjà informé votre médecin que nous allions proposer des bilans partagés de médication à ses patients. Je lui transmettrai une synthèse de nos échanges, avec votre accord, qui reprendra les points que nous aurons validés ensemble. »
COMBIEN ÇA VA COÛTER ?
La gratuité du dispositif pour l’assuré peut être un argument décisif pour recruter un patient. Il n’est pas nécessaire de s’attarder sur les détails de la rémunération du pharmacien qui sont compliqués et inutiles pour le patient.
« Vous n’avez aucune avance de frais. Le bilan est entièrement pris en charge par votre caisse d’assurance maladie. »
IMPLICATION DE L’ÉQUIPE
Implication de l’équipe
Si les pharmaciens diplômés sont les seuls à pouvoir mener les entretiens du bilan partagé de médication, l’ensemble de l’équipe officinale peut intervenir dans le recrutement des patients. Pour cela, les préparateurs et les étudiants doivent connaître les critères d’éligibilité, les objectifs des bilans et le déroulé des différentes étapes. Il peut être pertinent de leur proposer d’assister, avec l’accord des patients, à un entretien pour mieux en cerner le fonctionnement. Le recrutement des patients passe par une équipe bien formée et motivée.
JE CONNAIS BIEN MON TRAITEMENT, JE VAIS BIEN, JE N’EN AI PAS BESOIN
L’introduction d’un nouveau médicament, une sortie d’hôpital, la perception d’une adhésion thérapeutique fragile, la survenue de symptômes potentiellement iatrogènes, etc. sont autant de raisons de pointer l’intérêt de faire un bilan sur les traitements. Il peut également être utile de questionner le patient sur l’utilisation d’un dispositif médical, les horaires de prise, la régularité de la prise des traitements, de possibles interactions avec des médicaments de médication familiale pour repérer une faille.
Il peut également être mis en avant le fait qu’à l’issue d’un bilan, il est possible de constater que tout va bien mais, connaissant mieux le patient, il sera plus simple de repérer d’éventuels problèmes dans la suite du traitement.
Quoi qu’il en soit, il paraît difficile d’être assuré qu’il n’y a pas de points d’amélioration avant d’avoir analysé l’ensemble des informations concernant le patient. Ne pas faire le bilan constituerait une perte de chance de repérer un dysfonctionnement potentiellement nuisible à long terme pour le patient.
– « Effectivement, vous prenez le même traitement depuis longtemps et il est possible que le bilan ne mette aucun problème en évidence. Cependant, il me permettrait de mieux connaître l’ensemble des éléments qui déterminent l’efficacité et la sécurité de vos traitements et de pouvoir mieux vous accompagner dans la suite de votre prise en charge. »
– « Il est possible que nous trouvions ensemble des points à améliorer qui vous permettraient de vous sentir encore mieux et de prévenir la survenue de problèmes. »
VOUS ALLEZ ME FAIRE LA MORALE !
Les patients peuvent craindre un entretien moralisateur. Or il s’agit avant tout d’un moment d’écoute active et de motivation du patient. Proscrire donc le « il faut bien prendre régulièrement vos traitements, c’est important ! ». Il s’agit d’une analyse sans jugement de valeur dont la finalité est de trouver, avec le patient, les solutions les plus adaptées à ses capacités et ses besoins.
« Je ne suis pas là pour vous juger. C’est vous qui connaissez le mieux vos besoins. Nous allons réfléchir ensemble sur les difficultés que vous pouvez rencontrer ou les problèmes que j’aurai relevés pour trouver les solutions qui vous conviennent. »
JE NE VEUX PAS QU’ON MODIFIE MON TRAITEMENT
Le pharmacien ne peut pas modifier la prescription sans l’accord du médecin. Un changement de traitement peut d’ailleurs déstabiliser le patient âgé. Le bilan peut être présenté comme permettant d’optimiser la prise du traitement en cours. Si une modification des traitements est souhaitable, elle sera discutée au cours de l’entretien conseils, en présentant les avantages au patient, puis proposée au médecin qui jugera de sa pertinence.
« En aucun cas je ne modifierai vos prescriptions. Votre médecin est le seul à pouvoir le faire. Mais ce n’est, de toute façon, pas l’objectif principal du bilan que je vous propose. Il s’agit de faire en sorte que votre traitement soit le plus bénéfique pour vous. »
LES AIDES AU RECRUTEMENT
Les aides au recrutement
Certains logiciels métiers permettent de détecter les patients éligibles au bilan partagé de médication. Il est alors possible de sortir des listes de patients à cibler. Le logiciel peut parfois installer automatiquement des messages qui apparaissent sur la fiche patient au moment de la dispensation des traitements.
OUTILS
Outils
L’Assurance maladie a élaboré une brochure de présentation du bilan partagé de médication à remettre aux patients. Elle peut être mise à disposition des patients sur le comptoir et remise plus spécifiquement aux patients ciblés par le dispositif, à leur famille ou leurs aidants. L’apposition d’une affiche au sein de l’officine est également une façon d’attirer l’attention des patients sur ce service. L’Assurance maladie en propose une pour promouvoir l’accompagnement des patients en traitement chronique par le pharmacien. Il est également possible de créer sa propre affiche.
JE N’AI PAS LE TEMPS
Pour certains patients, le nombre d’étapes à réaliser peut paraître contraignant. Et les seniors ont parfois un emploi du temps chargé ! Il n’est pas nécessaire de détailler les différents rendez-vous prévus. La première étape peut se faire au moment de l’adhésion pour éviter de faire revenir le patient. L’entretien conseils se fera au moment du renouvellement de l’ordonnance comme l’entretien de suivi d’observance.
Il peut aussi être utile de donner la durée estimée de l’entretien et de chercher le moment qui convient le mieux au patient, en fonction des contraintes de la pharmacie.
S’il est mieux de convaincre le patient immédiatement, certaines personnes ont besoin d’un moment de réflexion qu’il faut respecter. La remise de supports d’information est alors souhaitable. Face à des patients « pressés », il peut être utile de noter un commentaire dans la fiche informatique du patient indiquant « prévenir un membre de l’équipe pour présenter le BPM ». A l’occasion d’un renouvellement d’ordonnance, un membre de l’équipe peut ainsi aborder le sujet pendant qu’un autre prépare les médicaments à délivrer.
« Notre discussion durera environ 20 minutes. Je vous verrai à l’occasion du renouvellement de vos ordonnances par exemple. Nous ferons ensuite un point sur vos traitements au moment qui vous conviendra le mieux. Si vous voulez bien, faisons dès maintenant l’inscription et voyons vos disponibilités pour fixer le premier rendez-vous. Vous préférez le début ou la fin de semaine ? »
INFORMER LES MÉDECINS
Informer les médecins
Les patients sont souvent surpris que le médecin ne leur ait pas parlé du dispositif ou même qu’il en ignore l’existence. Mais l’Assurance maladie n’a communiqué ni envers les patients ni auprès des médecins (exceptées quelques initiatives locales). Pour faciliter le travail en coordination et l’adhésion des médecins, le pharmacien doit donc prendre en charge l’information des prescripteurs. Il s’agit principalement des médecins autour de l’officine et notamment les médecins généralistes. Cela peut prendre différentes formes : courrier ou mail (un modèle de courrier est téléchargeable sur le site internet du Moniteur des pharmacies, rubrique Formation, onglet « Les cahiers Formation du Moniteur des Pharmacies »), information orale au cours d’une réunion interprofessionnelle, prise de rendez-vous, etc. Il peut également être utile d’informer les autres professionnels susceptibles de rencontrer la population cible tels que les infirmiers.ères, les podologues, les kinésithérapeutes, etc. qui peuvent ensuite relayer l’information auprès des patients.
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