Etudes de santé : décidément la réforme frôle le ratage

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Etudes de santé : décidément la réforme frôle le ratage

Publié le 29 février 2024
Par Magali Clausener
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Les fédérations d’étudiants en santé dressent un bilan plus que mitigé de la réforme d’entrée en études de santé (REES) plus de trois ans après sa mise en œuvre. Elles pointent notamment une hétérogénéité des pratiques au sein des universités. Et constatent que les objectifs de la réforme, à savoir une diversité des profils et une égalité des chances, sont loin d’être atteints.

L’Anepf, la Fage, l’Anemf, l’Anesk, la Fnek et l’Unecd* ont présenté le 29 février 2024 leur deuxième rapport sur la REES, le premier datant de 2020. Basé sur un questionnaire adressé aux associations d’étudiants, aux étudiants au sein des conseils universitaires et des comités de suivi locaux de 36 universités, le rapport révèle de nombreux dysfonctionnements.

Déjà, 75 % des universités ne proposent qu’une ou deux modalités d’évaluation écrite alors que l’un des buts de la réforme était de diversifier ces modalités d’évaluation. De plus, seulement la moitié des universités ont mis en place un comité de suivi de la réforme et 28 % de ces comités n’intègrent pas les étudiants.

Pour rappel, la REES donne la possibilité d’accéder aux études de santé après le bac soit par le parcours d’accès spécifique santé (Pass) et la licence « accès santé » (LAS) avec une mineure santé. Or, les étudiants déplorent que la LAS nécessite l’obtention de 70 ECTS (European Credits Transfer System) au total pour valider les unités d’enseignement alors que le socle européen des années de licence est égal à 60 ECTS. Ce qui implique une surcharge de travail. En outre, 41 % des mineures santé se déroulent en distanciel, généralement via des « capsules vidéo ». Les étudiants de LAS ont aussi trois fois moins d’enseignements dirigés et deux fois moins de séances en groupe qu’en Pass. De fait, les étudiants des LAS sont « délaissés » et « perdus », d’autant qu’ils sont généralement éloignés des campus « santé ». Pour les fédérations étudiantes, la réforme est donc loin d’atteindre ses objectifs de diversité des profils et d’égalité des chances, les étudiants des Pass étant finalement favorisés en termes de ressources et de suivi au détriment des étudiants des LAS.

Enfin, la réforme a complexifié l’orientation des bacheliers, rendant « invisibles » certaines filières comme la pharmacie et la maïeutique. Pour preuve, l’Anepf a rappelé les 15 % de places vacantes sur les deux dernières années (environ 1 500).

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Pour toutes ces raisons, les fédérations vont travailler sur des propositions en mars et avril. Elles lancent dans le même temps une consultation nationale de tous les étudiants, y compris ceux qui n’ont pas intégré des études de santé après leur Pass ou LAS.

Elles attendent également le lancement par le ministère de la Santé des groupes de travail sur les modalités d’épreuves suite à la décision du Conseil constitutionnel, saisi par le Collectif Pass LAS.

Quant aux positions de l’Académie de médecine et de l’Académie de pharmacie, qui regrettent un manque d’enseignement scientifique et la disparition des séries S, les fédérations étudiantes rappellent que le but de la réforme était justement de ne pas avoir uniquement des profils scientifiques.

* Association nationale des étudiants en pharmacie de France ; Fédération des assemblées générales étudiantes ; Association nationale des étudiants en médecine de France ; Association nationale des étudiants sages-femmes ; Fédération nationale des étudiants en kinésithérapie ;  Union nationale des étudiants en chirurgie dentaire.