PLFSS pour 2020 voté à l’Assemblée nationale : ce qui vous attend

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PLFSS pour 2020 voté à l’Assemblée nationale : ce qui vous attend

Publié le 29 octobre 2019
Par Anne-Hélène Collin
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Les députés viennent d’adopter en première lecture le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2020. Avant les discussions au Sénat, bilan des avancées (ou pertes) pour l’officine.

Biosimilaires

Supprimé dès le stade de l’avant-projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020, le droit de substitution des biosimilaires par le pharmacien (droit jamais appliqué faute de décret d’application) a été enterré par les députés. Pour le moment ? Certaines propositions, notamment celle d’associer la substitution des biosimilaires à l’exercice coordonné et plus particulièrement aux communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), ont retenu l’attention du rapporteur Olivier Véran : « La proposition me paraît intelligente en ce qu’elle atténue le caractère restrictif de l’interdiction générale. D’un autre côté, j’ai bien entendu les arguments avancés par le gouvernement sur la grande difficulté qu’il y a à appliquer la substitution en pratique clinique. C’est pourquoi je vous propose de nous donner rendez-vous l’année prochaine », lance le député.

Génériques

Si le gouvernement n’est pas favorable à la substitution des médicaments biologiques par le pharmacien, il lui renouvelle en revanche toute sa confiance dans la substitution d’un princeps par son générique. Pour « conserver une incitation positive et efficace [pour le générique] et ainsi maintenir la concurrence entre médicaments », le gouvernement a déposé un amendement à l’article 29 qui vise à maintenir le dispositif « tiers payant contre générique » même dans les cas où les prix des génériques seraient identiques à ceux des princeps. Et ose même, pour répondre à un « besoin d’assurer la stabilité de la dispensation des médicaments particuliers que sont les médicaments à marge thérapeutique étroite », assouplir les règles de substitution de ces médicaments sur lesquels le pharmacien garde la main. Ainsi il pourra délivrer le médicament princeps même en l’absence de mention « NS », sans que le patient soit pénalisé financièrement. Un pied de nez au tant décrié article 66 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2019, qui doit entraîner au 1er janvier 2020 une réforme du « non substituable », avec le risque d’une généralisation des tarifs forfaitaires de responsabilité (TFR).

Dispensation conditionnelle

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Pour « limiter la prescription d’antibiotiques à mauvais escient en cas d’angine virale », l’article 43, adopté sans discussion ou presque, autorise la prise en charge par l’assurance maladie des tests d’orientation diagnostique (TROD) angine réalisés en pharmacie et instaure « l’ordonnance de dispensation conditionnelle », une ordonnance conditionnée à des résultats de TROD pour la dispensation de médicaments. Ce principe s’inscrit dans la mouvance de l’avenant 18 à la convention pharmaceutique signé en septembre dernier.

Rémunération des entretiens et bilans pharmaceutiques au fil de l’eau

Le même article 43 inscrit le paiement à l’acte des entretiens pharmaceutiques et des bilans partagés de médication, jusqu’ici rémunérés sur ROSP (rémunération sur objectifs de santé publique)… l’année suivant l’acte. Un signe fort du gouvernement « pour favoriser le développement de ces nouvelles missions, encore trop marginales ».

Prescription de substituts nicotiniques

Rejetée par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, puis par les députés en première lecture, l’extension de la prescription des substituts nicotiniques aux pharmaciens n’est fermement pas à l’ordre du jour d’Agnès Buzyn, ministre de la Santé, qui y voit un conflit d’intérêt en puissance : « Cet élargissement amènerait à autoriser des professionnels à prescrire eux-mêmes des produits qu’ils vendent, et dont ils retirent des bénéfices. C’est selon nous un principe assez fondamental que le prescripteur ne soit pas le bénéficiaire de la vente. C’est pour le faire respecter que nous nous opposons aux amendements. Ce principe vaut d’autant plus à nos yeux que nous parlons d’un produit remboursé par l’assurance maladie. » Pour autant, les députés autorisent la délivrance à titre gratuit, à l’occasion de l’initiation d’un traitement, des substituts nicotiniques dans les structures de protection maternelle et infantile (PMI) et dans les centres d’examens de l’assurance maladie.

Dispositifs médicaux

Le PLFSS pour 2020 prévoit des modifications de prise en charge des dispositifs médicaux « afin de limiter le reste à charge pour les assurés tout en maîtrisant mieux les dépenses d’assurance maladies afférentes ». Pour cela, l’article 28 créé un référencement sélectif « afin de rembourser les dispositifs médicaux considérés comme offrant le meilleur rapport qualité/prix » et permet la prise en charge de DM « de seconde main », plus écologiques et moins coûteux. Ce qui n’est pas sans inquiéter les acteurs du secteur et les usagers.

Contraception gratuite pour les mineures de moins de 15 ans

La prise en charge sans avance de frais de la contraception, déjà effective chez les mineures « d’au moins 15 ans », sera étendue aux jeunes filles de moins de 15 ans. Ainsi la prescription, la délivrance et les consultations et examens liés à une contraception seront « gratuits » pour toutes les jeunes filles mineures, et, si elles le souhaitent, confidentiels.

Bulletin officiel des produits de santé

Les informations et les décisions relatives au remboursement, aux prix, aux tarifs et à l’encadrement de la prescription et de la dispensation des médicaments, des dispositifs médicaux et des autres produits de santé, éparpillées entre le Journal officiel et le site du ministère de la Santé, devraient prochainement être réunies dans le Bulletin officiel des produits de santé (BOPS), une base de données dématérialisée, « exhaustive et opposable », accessible à tous. L’ambition du gouvernement est de déployer l’outil dans le courant de l’année 2020. Mais, compte tenu « des incertitudes pesant sur l’avancée du chantier relatif au système d’information des produits de santé déployé par la Caisse nationale de l’assurance maladie », la date butoir du 1er mars 2022 a été fixée. Le BOPS devrait faire faire des économies de temps (raccourcir les délais de publication) et d’argent (de l’ordre de 10 millions d’euros).

Expérimentation du cannabis à visée thérapeutique

Porté par le député Olivier Véran depuis le début des débats, l’amendement autorisant l’expérimentation du cannabis à visée thérapeutique a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, sous les « bravo ! » de députés. Si l’expérimentation commence en milieu hospitalier, les officinaux seront sollicités dès que le patient est équilibré. « Je tiens à préciser qu’il ne s’agit en aucun cas d’une martingale : le cannabis n’est pas le graal de l’antidouleur, rappelle Olivier Véran, par ailleurs neurologue de son état. Je veux être très clair : il ne s’agit pas de développer un nouveau médicament qui remplacerait le paracétamol ou d’autres antalgiques, mais de trouver un nouveau traitement antidouleur adjuvant et d’en déterminer les effets et l’efficacité en vie réelle, auprès d’un panel de malades suffisamment large, dans un cadre scientifique, validé, sécurisé et évalué, en espérant qu’à terme, il permette d’apporter un soulagement à des milliers de Français. »