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- Médicaments anti-Alzheimer : un déremboursement irrévocable

© Le Conseil d’Etat confirme le déremboursement des médicaments à visée symptomatique de la maladie d’Alzheimer - Geralt/Pixabay
Médicaments anti-Alzheimer : un déremboursement irrévocable
A l’été 2018, elles avaient contesté le déremboursement des médicaments à visée symptomatique de la maladie d’Alzheimer : plusieurs organisations de médecins et associations de patients viennent d’être déboutées par le Conseil d’Etat. Celui-ci a rendu publiques lundi 16 décembre deux décisions qui rendent ce déremboursement irrévocable.
Deux recours avaient été déposés auprès de la juridiction administrative suprême, émanant d’une part de fédérations et associations, dont France Alzheimer, la Société française de gériatrie et de gérontologie (SFGG), la Fédération des centres mémoire ou encore la Fédération française de neurologie et d’autre part d’un interne en pharmacie. Dans les deux cas, il était demandé l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté pris par la ministre de la Santé le 29 mai 2018, qui prononce le déremboursement des quatre principes actifs prescrits dans le traitement symptomatique de la maladie d’Alzheimer : donépézil (Aricept), mémantine (Ebixa), rivastigmine (Exelon) et galantamine (Reminyl).
Les représentants des médecins et des patients faisaient valoir qu’un des membres de la commission de la transparence (instance de la Haute Autorité de santé chargée de donner un avis sur la prise en charge d’un médicament au vu de son service médical rendu) et deux des experts extérieurs sollicités ont pris publiquement position en faveur de ce déremboursement. Reconnaissant un manque de discrétion, le Conseil d’Etat estime que « cela n’est pas de nature à entacher d’irrégularités les avis rendus par la commission de la transparence ». De surcroît, il n’y a pas d’intérêt personnel ou de lien avec une entreprise intéressée aux résultats de l’examen des spécialités pharmaceutiques en litige, estime la haute juridiction.
Pour le Pr Pierre Krolak-Salmon, neurogériatre au CHU de Lyon (Rhône) et spécialiste de la maladie d’Alzheimer, qui avait porté la saisine pour la SFGG et d’autres sociétés savantes, « cette décision, décevante, va à l’encontre des publications scientifiques dans le monde, notamment dans la revue Cochrane, et des recommandations, notamment celles du National Institute for Health and Care Excellence au Royaume-Uni ». Cependant, reconnaît-il, « ce combat est derrière nous et nous avons maintenant une injonction à nous tourner vers l’avenir, à évaluer les nouveaux dispositifs de prévention de la maladie et suivre les nouveaux traitements en essai thérapeutique ».
Du côté des patients, on prend également acte à regret de ces décisions. Un sondage mené à l’automne 2018 auprès de 2463 proches aidants et 84 patients par France Alzheimer a montré que l’arrêt brutal d’un de ces traitements a entraîné dans la moitié des cas une aggravation précipitée des troubles cognitifs. De même, 70 % des familles n’envisageaient pas d’arrêter le traitement malgré son déremboursement, l’estimant en majorité efficace. Par ailleurs, dans seulement 55 % des cas, la consultation d’un spécialiste se poursuit malgré l’arrêt du traitement.
« Nous sommes bien entendu favorables aux approches non médicamenteuses de la maladie. C’est au cœur de nos actions. Mais on nous avait dit que les économies consécutives au déremboursement, soit 90 millions d’euros par an, seraient dirigées vers ces approches. Cela n’a pas été le cas », rapporte Benoît Durand, directeur général de France Alzheimer.
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