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Les arrêts maladie

Publié le 19 février 2020
Par Anne-Charlotte Navarro
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Maladie, maternité et accident professionnel riment souvent avec arrêt de travail. Quelle rémunération, quelles démarches à entreprendre, sans oublier un éventuel licenciement, voici les réponses aux questions que vous vous posez.

L’ARRÊT MALADIE

Au cours de sa vie professionnelle, le préparateur peut être absent du comptoir pour cause de maladie. Cette maladie peut être d’origine professionnelle, par exemple quand le salarié tombe d’un escabeau alors qu’il rangeait les commandes, quand un patient l’agresse ou lorsqu’il subit un accident sur son trajet entre la pharmacie et son domicile. Dans ce cas, le droit considère que l’employeur n’a pas respecté son obligation de sécurité qui lui impose de garantir la santé tant physique que psychique de ses salariés.

Le régime d’indemnisation d’un arrêt pour maladie ou accident professionnels est plus favorable au salarié qu’un arrêt maladie pour une longue maladie ou une infect ion, par exemple. Nous aborderons prochainement, dans la rubrique Vos droits, les spécificités du régime des accidents de travail et maladie professionnelle. Dans ce dossier, ne seront traités que les arrêts pour maladie et maternité.

Quelle est la première obligation du salarié malade ?

Le premier réflexe du préparateur est d’informer son employeur de son arrêt maladie.

Selon l’article 16 de la convention collective, il dispose de trois jours ouvrables, hors dimanches et jours fériés, après la rédaction de l’arrêt maladie, pour le faire parvenir à son employeur. Pour éviter tout litige, mieux vaut l’expédier par courrier recommandé avec accusé de réception, le remettre contre reçu avec l’aide d’un tiers, ou l’envoyer par courriel. Dans ce dernier cas, le salarié doit fournir les originaux à son employeur dès que possible. Cette règle vaut pour l’arrêt initial et les éventuelles prolongations. S’il ne respecte pas ce délai, le salarié malade commet une faute qui peut alors justifier une sanction telle qu’un licenciement.

Quelles démarches effectuer pour être indemnisé ?

Le salarié doit faire parvenir les volets 1 et 2 du Cerfa d’arrêt de travail à l’Assurance maladie dans les deux jours ouvrables, hors dimanches et jours fériés, qui suivent sa rédaction. Par prudence, il peut conserver une preuve en cas de perte du courrier. Cet envoi permet de lancer la procédure de versement des indemnités journalières.

Tous les salariés perçoivent-ils des indemnités journalières ?

Non, le Code de la Sécurité sociale impose au salarié d’avoir travaillé au minimum 150 heures au cours des 3 mois civils ou des 90 jours qui précèdent l’arrêt, ou d’avoir cotisé, au cours des 6 mois civils avant l’arrêt, sur la base d’une rémunération au moins égale à 1 015 fois le montant du Smic horaire fixé au début de cette période (soit 10 302,25 € en 2020 avec un Smic à 10,15 €).

Et si l’arrêt est long ?

Pour continuer d’être indemnisé si l’arrêt se prolonge au-delà de 6 mois, le salarié doit, à la date d’interruption du travail, justifier d’une affiliation à la Sécurité sociale depuis 12 mois au moins et avoir travaillé au minimum 600 heures au cours des 12 mois civils ou des 365 jours précédant l’arrêt, ou encore avoir cotisé, pendant les 12 mois civils ou les 365 jours qui précèdent l’arrêt, sur la base d’une rémunération au moins égale à 2 030 fois le montant du Smic horaire fixé au début de cette période.

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Quel est le mode de calcul de l’indemnisation de la Sécurité sociale ?

L’indemnité journalière est égale à la moitié du salaire journalier de base, égal au total des trois derniers salaires bruts perçus avant l’arrêt de travail, divisé par 91,25, dans la limite de 45,54 € cette année. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 supprime la majoration dont bénéficiaient les salariés malades ayant au moins trois enfants à charge. Par exemple, avec un salaire mensuel de 2 000 € les 3 mois précédant l’arrêt de travail, le salarié percevra des indemnités fixées à 32,87 € par jour, selon le calcul suivant : 2 000 × 3 / 91,25 = 65,75, puis 65,75 × 50 % = 32,87 €. Le montant des 3 derniers mois de salaire est communiqué par l’employeur via le déclaration sociale nominative. Ces indemnités journalières sont complétées par l’employeur lors de maintien du salaire.

Comment est calculé le maintien du salaire par l’employeur ?

À compter du 8e jour d’arrêt, l’employeur assure le maintien de la rémunération à hauteur de 90 % de son montant, déduction faite des indemnités journalières versées par l’Assurance maladie au préparateur non cadre. Si ce dernier est au coefficient 330, le maintien du salaire par l’employeur intervient à partir du 4e et jusqu’au 30e jour d’arrêt, à hauteur de 100 % de la rémunération, indemnités déduites. Dans ces deux cas, la durée du maintien dépend de l’ancienneté : 30 jours pour une ancienneté de 1 à 5 ans, 40 jours entre 6 et 10 ans (voir tableau). À l’issue de la période de maintien, le salarié perçoit les indemnités de l’Assurance maladie et de l’organisme de prévoyance, Klésia, Apgis, ou celui choisi par la pharmacie où il travaille.

Que verse l’organisme de prévoyance ?

La convention collective prévoit que l’organisme de prévoyance de l’officine, donc Apgis, Klésia, etc., verse une indemnisation au salarié malade. Celle-ci est directement payée à l’employeur car elle est soumise aux cotisations sociales lors de son versement au salarié. Elle est ainsi accordée :

→ au salarié non cadre : à compter du 4e jour d’arrêt et à hauteur de 82 % du salaire moyen des 12 derniers mois, après déduction des indemnités journalières, soit 32 % environ ;

→ au salarié assimilé cadre : à partir du 4e jour d’arrêt et à hauteur de 40 % du salaire moyen des 12 derniers mois, en complément des indemnités journalières, ce qui correspond à environ 90 % du salaire brut. Cette indemnisation doit apparaître clairement sur le bulletin de paie.

Quand l’indemnisation est-elle réglée ?

Selon le Code de la Sécurité sociale, le versement des indemnités journalières par l’Assurance maladie doit avoir lieu après l’expiration d’un délai de carence de 3 jours. Elles sont par conséquent versées à partir du 4e jour. Cette règle s’applique également aux indemnités dues par l’organisme de prévoyance. Le maintien de la rémunération assuré par l’employeur intervient à compter du 8e jour d’arrêt pour un salarié non cadre. La jurisprudence précise que la retenue sur salaire doit être proportionnée à l’absence effective du salarié. Ainsi, seuls les jours où il devait être présent à son poste, inclus dans la période de 7 jours, peuvent être retenus sur son salaire.

L’ARRÊT MATERNITÉ

L’article L. 1225-7 du Code du travail dispose que « toute salariée en état de grossesse médicalement constaté a le droit de suspendre son contrat de travail, pendant une durée déterminée, avant et après son accouchement, sans que cela constitue une cause de rupture ou une modification du contrat de travail ».

Ce droit existe quels que soient l’effectif de l’entreprise, son activité et l’ancienneté de la salariée. Il est également ouvert aux stagiaires.

Quand l’employeur doit-il être informé ?

Rien n’oblige la préparatrice à informer l’employeur de son état de grossesse tant qu’aucune absence n’en découle. Le Code du travail prévoit que la salariée ne peut pas être sanctionnée pour avoir dissimulé son état. Le titulaire doit être informé, au plus tard, au moment où la préparatrice souhaite bénéficier de son arrêt maternité. Elle doit alors lui adresser un certificat médical attestant de l’état de grossesse qui indique, selon le cas, la date présumée de l’accouchement ou la date effective de celuici et, s’il y a lieu, la durée prévisible de l’état pathologique rendant nécessaire un allongement du congé de maternité.

Combien de temps dure l’arrêt maternité ?

Le congé de maternité comprend deux périodes, dénommées respectivement congé « prénatal », correspondant à au moins 6 semaines avant la date présumée de l’accouchement, et congé « postnatal », d’au minimum 10 semaines après la date présumée de l’accouchement.

Toute salariée peut réduire, à sa demande et sous réserve d’un avis favorable du médecin, la durée du congé prénatal d’une durée maximale de 3 semaines. Le congé postnatal est alors augmenté d’autant. Dans tous les cas, la salariée doit bénéficier de 6 semaines d’arrêt au minimum après son accouchement. Ainsi, la durée totale du congé de maternité est variable (voir tableau page suivante).

Quelles sont les conditions d’indemnisation d’un arrêt maternité ?

Comme lors d’un arrêt maladie, l’arrêt maternité donne lieu au versement d’indemnités journalières, sous réserve pour la salariée :

→ d’avoir cessé son activité pendant 8 semaines au minimum ;

→ d’être affiliée en tant qu’assurée sociale depuis au moins 10 mois, à la date prévue de l’accouchement ;

→ d’avoir perçu un salaire soumis à cotisations de Sécurité sociale au moins égal à 1 015 fois la valeur du Smic horaire au cours des 6 mois civils précédant le début du congé, la date du début de la grossesse ou du début du congé prénatal, ou avoir effectué au minimum 150 heures de travail au cours des 3 mois civils ou des 90 jours qui précèdent la date du début de la grossesse ou du début du congé prénatal.

Quel est le montant de l’indemnisation lors d’arrêt maternité ?

La salariée percevra une indemnisation de l’Assurance maladie dès son premier jour d’arrêt.

L’indemnité journalière maternité est calculée selon le gain journalier de base, soit 1 / 91,25 du salaire soumis à cotisations des 3 dernières paies des mois civils antérieurs à l’arrêt de travail.

Par exemple, une préparatrice au coefficient 290 perçoit 1 983,25 € bruts par mois. Elle débute son congé de maternité en avril 2020. Les salaires perçus en janvier, février et mars sont pris en compte, soit 1 983,25 € × 3 = 5 949,75 € / 91,25 = 65,20 €. Elle percevra donc de la part de l’Assurance maladie 65,20 € par jour d’arrêt maternité. L’organisme de prévoyance de la pharmacie, Apgis, Klésia ou autres, complétera ce versement à hauteur de 82 % du salaire brut sous déduction des prestations de la Sécurité sociale. Cette indemnisation sera versée à compter du 1er jour de congé, si la maternité survient au moins 280 jours après l’entrée de la préparatrice dans la profession.

Charlotte est arrivée à l’officine pour travailler, mais elle ne se sent vraiment pas bien. Peut-elle se rendre chez le médecin sur son temps de travail malgré le refus de son employeur ?

Les magistrats ont retenu que le fait de quitter son poste en raison de son état de santé pour consulter un médecin ne constitue pas en soi une faute de nature à justifier un licenciement, même en l’absence d’autorisation de l’employeur. Si le médecin arrête Charlotte à compter du début de la journée, elle n’aura pas à récupérer ses heures. (Cass. soc. 3 juillet 2001, n° 99-41738).

Cas pratiques

Louise bénéfice d’un complément de salaire versé par son employeur. Ce dernier est-il obligé d’être subrogé ?

Non, la subrogation qui autorise l’employeur à percevoir en lieu et place du salarié les indemnités journalières n’est pas obligatoire. Elle lui permet de calculer le complément à verser, et il doit en faire la demande. Dans le cas de Louise, elle percevra, le 14 de chaque mois, les indemnités journalières de la part de la Sécurité sociale et le complément de salaire versé par son employeur.

Simon est en arrêt maladie depuis septembre. Comment son impôt sur le revenu sera-t-il prélevé ?

Si l’employeur de Simon a demandé une subrogation, alors il prélèvera le montant des impôts comme d’habitude. En l’absence de subrogation, l’organisme qui verse les revenus procédera au prélèvement à la source. Attention, les indemnités journalières de l’Assurance maladie ne font l’objet d’un prélèvement à la source que les 2 premiers mois de l’arrêt de travail. Au-delà, l’employeur n’a plus à les soumettre.

Albane atteinte d’un cancer du sein, est arrêtée depuis le 1er janvier 2019. Cette année d’arrêt maladie est-elle prise en compte dans le calcul de son coefficient ?

Ni le Code du travail, ni la convention collective n’indique si les absences du salarié ralentissent son changement de coefficient. Il est d’usage de faire référence à l’article 11 de la convention qui liste les périodes prises en compte pour le calcul de la prime d’ancienneté. Ainsi, les arrêts maladie sont pris en compte dans la limite de 6 mois par an, que ces mois soient continus ou non. Le titulaire d’Albane peut donc décider de comptabiliser cette année d’absence pour 6 mois.

Achille a été en arrêt maladie pendant sa période de congés. Peut-il récupérer les jours perdus ?

Lorsque le salarié est arrêté pour maladie durant la période de congés payés, la convention collective ne prévoit pas la possibilité de récupérer ces jours. Cependant, le juge européen considère que le report des congés payés s’impose à l’employeur, même en l’absence de mention de la convention collective. Or, le juge français n’a pas confirmé cette position. Dans un premier temps, Achille doit solliciter le report auprès de son employeur. S’il ne lui est pas accordé, il pourra alors saisir le conseil des prud’hommes pour le demander. En revanche, si Achille avait été arrêté avant de prendre ses vacances, le report de son départ après sa date de reprise aurait été automatique.

Sophie est en arrêt maladie depuis six mois. A-t-elle acquis des jours de congé pendant cette période d’absence du comptoir ?

Les partenaires sociaux ont décidé d’assimiler un arrêt maladie d’une durée de 2 mois, consécutifs ou non, à une période de temps de travail effectif. Dès lors, un salarié non cadre acquiert des jours de congés payés pendant un arrêt pour maladie professionnelle dans la limite de 5 jours ouvrables. Donc, Sophie n’a pas acquis de jours de congés payés pendant 4 mois. Toutefois, dans sa situation, la prudence est de rigueur. Le droit européen impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au minimum 4 semaines. Ce principe a été rappelé par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) le 24 janvier 2012 (affaire C-282/10, Dominguez). Ainsi, malgré les demandes régulières de clarification de la Cour de cassation, les réformes successives n’ont pas mis en conformité le droit français et le droit européen. Si l’arrêt de Sophie avait pour conséquence de ne pas lui permettre de bénéficier de 4 semaines de congés payés, elle pourrait saisir le conseil des prud’hommes.

À savoir : selon les dispositions complémentaires applicables aux cadres, les arrêts maladie d’une durée de 6 mois, consécutifs ou non, au cours de la période qui va du 1er juin de l’année N – 1 au 31 mai de l’année N, produisent des jours de congés payés. Cette clause profite aux salariés dont le coefficient est supérieur ou égal à 400.

En arrêt longue maladie depuis 2 ans, Briant justifie de 10 ans d’ancienneté. Jean, le titulaire, constate que l’absence de Briant déséquilibre l’équipe, mais le recours à l’intérim n’est pas très efficace. Jean peut-il licencier Briant ?

Bien entendu, l’employeur ne peut pas rompre le contrat de travail en raison de l’état de santé du salarié. Tout au plus peut-il invoquer la nécessité de le remplacer définitivement, en raison de la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par son absence prolongée ou répétée. Les partenaires sociaux ont prévu qu’un tel remplacement ne peut pas intervenir avant :

→ 4 mois d’absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés dont l’ancienneté est inférieure à 2 ans ;

→ 6 mois d’absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés qui ont 2 ans et plus d’ancienneté. Briant, en arrêt depuis plus de 6 mois au cours des 12 derniers mois, peut par conséquent être licencié. Dans ce cas, la lettre de licenciement doit décrire les perturbations constatées dans le fonctionnement de l’entreprise et les motifs qui rendent obligatoire le remplacement définitif du salarié.

Cas pratiques

Amanda est enceinte de 4 mois. L’équipe et le titulaire sont au courant, mais Amanda n’a pas encore envoyé le certificat médical à son employeur. Son titulaire l’informe ce jour qu’il va la licencier. Est-ce possible ?

Le Code du travail interdit à l’employeur de licencier une femme enceinte, sauf en cas de faute grave ou pour un motif économique, à compter de son information. Les magistrats ont décidé qu’une salariée bénéficie de cette protection dès que l’employeur a connaissance de la grossesse, même avant l’envoi du certificat médical. Dans ce cadre, la connaissance de l’employeur se prouve par tout moyen. Ainsi, Amanda peut démontrer, grâce au témoignage de l’équipe, que son employeur avait effectivement connaissance de son état de grossesse et faire échec à son licenciement.

Clémence, mère du petit Matéo, souhaite reprendre son poste à temps partiel à l’issue de son congé maternité, en bénéficiant d’un congé parental. Son employeur peut-il refuser ce choix ?

Clémence doit en informer son employeur par lettre recommandée avec accusé de réception au moins un mois avant le terme du congé maternité. À la condition que la salariée justifie d’une année d’ancienneté à la date de naissance de l’enfant, l’employeur ne peut pas refuser le bénéfice de ce congé. Le congé parental peut également être demandé par le père de l’enfant dans les mêmes conditions.

Christelle, la compagne de Jean, est enceinte. Peut-il l’accompagner au divers rendez-vous médicaux ayant lieu pendant son temps de travail ?

L’article L. 1225-16 du Code du travail prévoit que le conjoint salarié de la femme enceinte bénéficie d’une autorisation d’absence pour se rendre à trois des examens médicaux obligatoires au maximum. Ces absences n’entraînent aucune diminution de sa rémunération et sont assimilées à une période de travail effectif.

Avec tous nos remerciements au cabinet d’expertise comptable AdequA à Arras (62).