« Le commerce physique doit miser sur l’Humain »
Sébastien Tourné estime que le merchandising en pharmacie entre dans une phase de maturité et devient un outil de performance économique.
PM Qu’est-ce qu’une démarche merchandising ?
ST Le merchandising répond avant tout à une problématique consommateur, afin de développer des performances commerciales. Il est souvent à l’initiative d’un laboratoire ou d’un groupement, lorsqu’un rayon est stratégique pour eux. On doit pouvoir mesurer, quantitativement ou qualitativement, son influence positive sur le comportement des shoppers et sur le business du rayon.
PM Comment donner envie au consommateur d’entrer dans un point de vente et d’y revenir ?
ST Si la fidélité dépend principalement de la relation humaine et du service reçu, le merchandising a une réelle influence sur le temps passé, l’accès aux produits recherchés, le confort de circulation… Les règles sont les mêmes depuis la nuit des temps. A l’extérieur, des vitrines travaillées avec soin et renouvelées fréquemment. En pharmacie, une vitrine doit servir à affirmer ses spécialités, ses services, et proposer des offres produits pertinentes. A l’intérieur, la circulation doit être fluide et confortable, avec une organisation intuitive des univers et des rayons pour faire gagner du temps, accompagner les achats en libre-service et en vente assistée.
PM Comment fidéliser sa clientèle ?
ST Dans le commerce physique, avant de travailler les leviers d’impulsion, c’est sur l’Humain qu’il faut miser, en capitalisant sur le service, la confiance et l’éthique. Vient ensuite le confort d’accès à des offres techniques, spécifiques, si possible plus performantes que celles des circuits de distribution concurrents. En officine, le prix, la promotion sont des outils importants qui augmentent le prix des paniers moyens, plus qu’ils ne fidélisent.
PM Comment améliorer l’expérience client ?
ST En stimulant les sens positivement, avec un lieu vivant, beau, agréable à découvrir à chaque visite, dans lequel je suis reconnu comme un individu à part entière, où on m’appelle par mon nom et on prend le temps de me questionner, de me conseiller… Il est également possible de travailler de concert le magasin physique et le canal internet pour prendre en compte toutes les attentes clients… L’idée est d’utiliser les technologies pour rendre l’expérience plus rapide, la simplifier et la fluidifier.
PM Aujourd’hui, quelles sont les grandes tendances retail ?
ST La tendance principale est l’omnicanalité. Le client est connecté en permanence et son achat en magasin est influencé par ce qu’il voit, volontairement ou non, sur internet. Cela génère plus de peurs, de défiance vis-à-vis des marques, des laboratoires, et oblige le pharmacien à plus de pédagogie, d’écoute et de partis pris dans le choix de ses gammes. La seconde tendance est le retour de la proximité : les clients privilégient les petits formats, les circuits courts, les artisans, car ils veulent gagner du temps et recherchent de la confiance. Si la pharmacie est en retard pour répondre au premier point, elle est en avance sur le second.
PM Protéger l’environnement est-il devenu un enjeu incontournable pour les retailers ?
ST Absolument. Les distributeurs doivent prendre conscience de leur rôle environnemental et sociétal. Face à ces enjeux, leur pouvoir est grand ! Leur consommation d’énergie est énorme et de nombreuses solutions se développent (toits à panneaux solaires, récupérateurs d’eau…). Les systèmes logistiques utilisent de plus en plus de solutions propres : vrac, réduction des emballages… Avec les marques, les revendeurs pourraient aller beaucoup plus loin en termes de réduction des emballages et aller davantage vers des approvisionnements locaux…
PM Quelles seront les grandes lignes du retail de demain ?
ST Pour le salon Marketing Point de Vente, Monique Large, fondatrice de pollen Consulting a mené des travaux en poussant les points faibles actuels de la distribution à l’extrême. Parmi ses pistes de réflexion : « Et si on bannissait TOUT plastique des points de vente ? », « Et si on pouvait réellement TOUT savoir sur nos produits ? »
L’interrogation « Et si on fabriquait tous nos produits dans les points de vente ? » fera l’objet d’une mise en scène sur le salon (MPV), qui se déroulera du 24 au 26 mars, Portes de Versailles. En pharmacie, des réflexions sont menées sur les packagings de médicaments, l’information médicale, la sollicitation commerciale des marques…
PM Comment faire de la pharmacie un lieu de vie ?
ST La pharmacie est un commerce de proximité, dans lequel toute une communauté se retrouve, sans distinction de revenu, d’origine, de genre, d’âge… Les espaces de confidentialité, les animations « spécialiste » ou « prévention » sont essentiels, plus importants que les promotions… Les laboratoires doivent y participer pour mieux informer les patients sur des sujets qui les préoccupent et sur lesquels internet n’apporte pas de réponses fiables.
BIO EXPRESS
→ 1996
Diplômé de l’Ècole Supérieure de Commerce d’Amiens (Picardie)
→ 1998-2001
Chef de secteur GMS puis relai merchandising chez Kraft Foods
→ 2001-2003
Responsable merchandising national au sein des brasseries Fischer
→ 2015
Directeur général de l’agence Cross, qui développe des concepts et des stratégies merchandising adaptés aux réalités du terrain et aux évolutions des marchés.
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