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A quand un vaccin anti-Covid-19 ?

Publié le 16 mai 2020
Par Anne-Hélène Collin
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A l’heure de la sortie du confinement, certains guettent une potentielle deuxième vague d’épidémie de Covid-19. Pour se protéger du SARS-CoV-2, 70 % de la population doit être immunisée. La proportion de Français infectés par le nouveau coronavirus étant très faible, l’espoir repose sur un vaccin.

Dans une étude mise en ligne le 21 avril, l’Institut Pasteur estimait à 5,7 % la proportion de la population française infectée par le SARS-CoV-2 au 11 mai, premier jour de déconfinement. Bien loin des 70 % nécessaires, selon les chercheurs, pour assurer une immunité collective. Le vaccin anti-Covid-19 est donc attendu par la communauté scientifique, alors que plus d’un quart des Français (plutôt des 26-35 ans et des femmes) refuseraient de se faire vacciner contre le coronavirus, selon un sondage Ifop réalisé fin mars.

Des candidats vaccins en nombre

Plus de 100 candidats vaccins portés par des équipes chinoises, américaines ou encore européennes, publiques ou privées, sont actuellement en phase de test – 110 recensés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) au 11 mai, dont huit au stade des essais cliniques. Et les stratégies d’approche sont bien différentes. 7 % des essais en cours visent à développer un vaccin à virus atténué ou inactivé (vaccin antivirus), comme l’essai lancé le 16 avril par la société de biotechnologie chinoise Sinovac. Très immunogène, ce n’est pourtant pas la voie la plus rapide, les délais pour isoler, cultiver et modifier le virus pouvant être considérables et des tests de sécurité approfondis étant nécessaires. D’autres pistes sont donc exploitées. 28 % des essais concernent les vaccins à vecteur viral. Dans cette stratégie, « un virus tel que la rougeole ou l’adénovirus est génétiquement modifié afin de produire des protéines de coronavirus », explique la revue Nature. C’est l’option choisie par l’Institut Pasteur, dans un essai qui doit débuter cet été, et par l’université d’Oxford (Angleterre), dont l’essai a débuté le 23 avril.

Autre stratégie vers laquelle se tourne le quart des essais : les vaccins à base d’acide nucléique. Ils utilisent des instructions génétiques (sous forme d’ADN ou d’ARN) codant pour une protéine de coronavirus pour induire une réponse immunitaire. C’est la voie choisie par l’Imperial College de Londres, qui testera à compter de juin un vaccin à ARN, ou de la société BioNTech (Allemagne), qui travaille avec Pfizer sur un vaccin à ARN messager. Enfin, la recherche s’intéresse surtout aux vaccins à base de protéines (45 % des études) qui consistent à injecter directement au patient des protéines voire des fragments ou des coquilles de protéines qui imitent l’enveloppe extérieure du SARS-CoV-2. Principale cible, la glycoprotéine S (spike) du coronavirus qui se lie au récepteur ACE2 des cellules humaines, porte d’entrée du virus dans l’organisme. C’est sur cette stratégie que mise le mariage Sanofi (qui apporte son antigène) et GSK (adjuvant) dans un essai qui devrait débuter en septembre.

Transformer l’essai

Devant cette course effrénée au vaccin, l’OMS en appelle à la solidarité mondiale. Message entendu par la Commission européenne qui vient de lever 7,4 milliards d’euros de fonds – dont 500 millions d’euros versés par la France – pour la recherche et pour faire du vaccin « un bien mondial de l’humanité », mais pas des Américains, le gouvernement de Trump ayant décidé de faire cavalier seul.

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Quoi qu’il en soit, il sera aussi nécessaire de faire preuve de patience. Les efforts de la recherche, en reprenant les études préliminaires menées sur les précédentes épidémies à coronavirus (SRAS en 2003 et MERS en 2012), ont certes fait gagner du temps. L’urgence sanitaire a permis aux procédures d’être accélérées et aux études de phases 1 et 2 d’être menées en parallèle. « Jamais les scientifiques ne sont allés aussi vite », explique Sybil Pinchinat, biostatisticienne et membre de l’AFCROs (Les Entreprises de la recherche clinique). Mais même si les délais moyens nécessaires au développement d’un vaccin sont réduits à 18-24 mois, au lieu des sept à douze ans habituellement, dans le meilleur des cas, le premier vaccin contre le nouveau coronavirus ne sera peut-être pas mis sur le marché avant juin 2021…