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Les indemnités de licenciement calculées au prorata du temps de travail ou presque

Publié le 23 mai 2020
Par Anne-Charlotte Navarro
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Le 18 mars, la Cour de cassation a posé une exception au principe de calcul de l’indemnité de licenciement qui veut que cette indemnité soit déterminée au prorata du temps de travail.

LES FAITS

Mme J. est engagée le 22 novembre 1999 par la société M. R., en qualité d’assistante commerciale à temps complet. Elle décide de bénéficier d’un congé parental d’éducation à temps partiel à la suite de l’arrivée de son enfant. Ce congé devait s’achever le 29 janvier 2011. Le 6 décembre 2010, elle fait l’objet d’un licenciement pour motif économique. Elle conteste alors le calcul de son indemnité.

LE DÉBAT

L’article L. 3123-5 du Code du travail dispose que « l’indemnité de licenciement du salarié […] ayant été occupé à temps complet et à temps partiel dans la même entreprise [est calculée] proportionnellement aux périodes d’emploi accomplies selon l’une et l’autre de ces deux modalités depuis son entrée dans l’entreprise ». Or Mme J. estime que cette disposition est discriminatoire au regard des règles de l’Union européenne. En effet, elle soutient que la majorité des congés parentaux à temps partiel sont pris par des femmes. Lors d’un licenciement, ces femmes voient leur indemnité réduite en raison de ce passage temporaire à temps partiel. Cette modalité de calcul revient donc à rompre le principe d’égalité de salaire entre les hommes et les femmes garanti par l’article 157 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). La cour d’appel de Toulouse (Haute-Garonne), le 14 octobre 2016, décide que cette règle de calcul prévue par le Code du travail est conforme à l’impératif d’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes. Les magistrats relèvent qu’il n’existe pas d’autres modalités de calcul. Mme J. forme un pourvoi en cassation.

Les hauts magistrats décident de solliciter la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour s’assurer de la conformité de cette disposition du Code du travail au droit européen. Le 8 mai 2019, la CJUE décide que l’indemnité de licenciement doit respecter les principes de non-discrimination établis sur le sexe et d’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes. La cour de justice relève qu’en pratique le congé parental à temps partiel bénéficie en grande majorité à des femmes. Dès lors, le calcul de l’indemnité de licenciement sur une base de rémunération réduite en cas de congé parental à temps partiel procède à une discrimination indirecte fondée sur le sexe. L’affaire est renvoyée à la Cour de cassation.

LA DÉCISION

Le 18 mars, la chambre sociale de la Cour de cassation suit l’interprétation des magistrats de la CJUE. Elle affirme que l’article L. 3123-5 du Code du travail qui prévoit que le calcul de l’indemnité de licenciement soit réalisé sur une base réduite en raison du congé parental à temps partiel du salarié crée une discrimination indirecte fondée sur le sexe puisqu’il sanctionne de fait majoritairement les femmes. Cette discrimination indirecte est contraire tant au droit européen qu’au droit français. Conformément au droit européen, cette disposition n’a plus lieu d’être appliquée. En pratique, quand un salarié (homme ou femme) embauché à temps plein bénéficie ensuite d’un congé parental à temps partiel dans la même entreprise, son indemnité de licenciement sera calculée sur la base de son temps plein sans prendre en compte la période en temps partiel. Cette règle s’applique depuis le 19 mars.

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Source : Cass. soc., 18 mars 2020, n° 16-27825.

À RETENIR

L’indemnité de licenciement est calculée au prorata du temps de travail du salarié, sauf quand le salarié à temps plein a bénéficié pendant sa carrière dans l’entreprise d’un congé parental à temps partiel.

Dans ce dernier cas, l’indemnité est calculée sans prendre en compte le passage temporaire à temps partiel.

Cette règle est aussi valable pour le calcul de l’indemnité retraite.