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« Équiper correctement les patients est la condition de l’observance »

Publié le 26 juin 2020
Par Anne-Gaëlle Harlaut
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L’été rallume les warnings de l’insuffisance veineuse. Après un bilan médical, la compression demeure en première ligne pour contrôler les symptômes et stabiliser l’évolution. Le point avec Christine Jurus.

Qu’est-ce que l’insuffisance veineuse ?

C’est un dysfonctionnement des veines. Les valvules déficientes ne font plus correctement leur travail pour assurer le retour sanguin (voir encadré). Le sang reflue et induit une pression sur la paroi veineuse. Les veines superficielles se dilatent et donnent naissance à des branches anarchiques.

Quand est-elle chronique ?

L’insuffisance veineuse est toujours une affection chronique, dont on peut stabiliser et contrôler les symptômes, neutraliser des varices, mais qu’on ne guérit pas.

Les femmes sont davantage concernées ?

Non, c’est avant tout une question de prédisposition génétique, mais la grossesse, tant sur le plan du poids que des hormones, est un facteur aggravant.

Quels signes amènent à consulter ?

Des lourdeurs ou douleurs dans les jambes, des œdèmes, des varices inesthétiques… Un bilan avec écho-doppler cartographie l’état vasculaire, veines et artères, et détermine le stade de l’insuffisance.

Quelles sont les autres complications ?

Principalement la thrombose veineuse superficielle, improprement nommée paraphlébite. Un caillot se forme dans la veine superficielle, mais il peut rejoindre le réseau profond via les perforantes (voir encadré). Dans 25 % des cas, on retrouve une thrombose profonde, avec un risque d’embolie pulmonaire.

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Quelle est la prise en charge ?

Hors complication, cela dépend de la demande du patient. Une chirurgie pour raison esthétique ou une compression pour stabiliser l’évolution. On surveille car le risque de complication d’une varice reste imprévisible.

Quid de la compression élastique ?

C’est elle qui contrôle le mieux l’évolution. En appliquant une force extérieure sur les veines du mollet, elle agit en complément de la pompe musculaire pour favoriser le retour veineux, empêche la dilatation de la veine, réduit l’inflammation avec effet antalgique et limite la néoformation de réseaux superficiels.

Comment la dispenser ?

Le modèle est affaire de confort. Bas, chaussette, collant, l’efficacité est la même car la compression ne s’applique que sur le mollet. Prendre les mesures correctement, sur membres reposés. Faire essayer, enseigner la technique d’enfilage, voire conseiller un enfilebas. Et renouveler régulièrement. On peut prescrire jusqu’à huit paires par an. Une formation en orthopédie est indispensable.

Comment favoriser l’observance ?

Proposer différents modèles et marques pour que la personne choisisse le produit qui lui convient le mieux : pied large, textile fin… Donner les conseils de port : la journée, pas durant le sport car l’activité musculaire remplace l’action de la compression…

Quelle place pour les veinotoniques ?

Leur intérêt est fonctionnel. Ils soulagent certaines personnes, même si on ne peut en attendre qu’une efficacité modeste. Sur demande du patient, j’oriente vers les veinotoniques classiques ou la phytothérapie, marron d’Inde, vigne rouge, en laissant au pharmacien le soin du conseil. En cures de deux à trois semaines lors des périodes sensibles car ils n’ont pas d’effet préventif au long cours.

Et les conseils hygiéno-diététiques ?

Ils restent essentiels car ils participent à protéger tout un système vasculaire.

Le système veineux

→ Les veines assurent le retour du sang de la périphérie vers le cœur. Elles sont munies de valvules, clapets anti-reflux qui se referment ponctuellement pour que le sang ne revienne pas en arrière. La contraction des muscles, qui comprime les veines, et l’appui sur la plante des pieds, qui chasse le sang, participent au retour veineux. Le réseau de veines profondes, invisibles car entourées des muscles, draine environ 90 % du volume sanguin. Le réseau de veines superficielles, lui, intervient peu dans le retour veineux normal, mais vient en relais lorsque le réseau profond est altéré. Ces deux réseaux sont reliés par les veines perforantes.

→ La classification CEAP permet de déterminer le stade de l’insuffisance veineuse selon des critères Cliniques, Étiologiques, Anatomiques et Physiopathologiques.