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Faux départ pour Baclocur

Publié le 27 juin 2020
Par Matthieu Vandendriessche
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Le baclofène pourra-t-il finalement être prescrit, dispensé et remboursé au-delà d’un dosage de 80 mg par jour ? Cette question, sur laquelle se mobilise depuis plusieurs années l’association Collectif Baclohelp, vient de connaître un nouveau rebondissement. Trois jours seulement après son arrivée dans les officines françaises, le lundi 15 juin, la spécialité Baclocur, qui dispose d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le traitement de l’alcoolodépendance, n’y est déjà plus disponible. Jusqu’à cette date, le baclofène était prescrit et dispensé dans le cadre d’une recommandation temporaire d’utilisation (RTU) faisant appel aux spécialités Liorésal 10 mg et Baclofène Zentiva 10 mg. Un statut avec une mise à disposition encadrée mais aussi une prise en charge possible au-delà de la dose journalière de 80 mg par jour depuis que le Conseil d’Etat avait donné raison, en mai 2018, à une patiente qui se trouvait dans cette situation. Cette utilisation en dehors de la RTU était possible avec Baclofène Zentiva. Le recours faisait suite à la demande de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en juillet 2017 d’une consultation médicale dès lors que les patients en cours de traitement recevraient des doses supérieures à 80 mg par jour. Ceci afin d’engager une réduction progressive de la posologie par paliers du fait d’effets indésirables graves survenant au-delà de cette dose.

Un risque de rupture du traitement

Le 15 juin marquait donc la fin de la RTU. Avec Baclocur, la prescription doit rester limitée à 80 mg par jour selon l’AMM accordée fin 2018. Dépasser la dose est toujours possible, mais hors AMM : les professionnels engagent leur responsabilité et, pour le patient, le traitement n’est pas pris en charge. C’est essentiellement le risque de rupture de traitement induit par cette limitation de dose qui est contesté par le Collectif Baclohelp et qui l’a conduit à saisir en référé le tribunal administratif de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise). Et ce, dès l’annonce fin mai de la mise à disposition de Baclocur. « Les décisions d’AMM sont entachées d’une erreur manifeste d’appréciation dès lors que la posologie est limitée à 80 mg, une telle posologie n’étant pas suffisante pour un certain nombre de patients », argumentent les juges des référés. Selon eux, « il existe un risque très élevé de rupture de ce traitement dès lors que les pharmaciens ne voudront plus délivrer Baclofène Zentiva en l’absence d’une RTU ».

Le 17 juin, l’ordonnance du tribunal est rendue : les AMM de Baclocur sont suspendues à titre conservatoire et dans l’attente d’un jugement au fond. Cette suspension a pour effet de remettre temporairement en vigueur le dispositif de la RTU. Pour sa part, l’ANSM a annoncé avoir immédiatement saisi le Conseil d’Etat sur cette affaire.

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ON NE DÉLIVRE PLUS RIEN !

A la suite de la décision du tribunal administratif de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise), le laboratoire Ethypharm, détenteur de Baclocur, a procédé au rappel de lots des stocks de ce médicament pour les dosages à 10, 20 et 40 mg de baclofène. Il existe également un dosage à 30 mg, mais il n’est pas concerné par la suspension d’AMM et le rappel de lots. Pourquoi ? Simplement du fait d’une omission. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a fondé sa décision sur un document d’officialisation des AMM en date d’octobre 2018. L’AMM n’a été obtenue qu’en décembre 2018 pour le dosage à 30 mg. A ce jour, l’approvisionnement des officines a été stoppé pour les quatre dosages de Baclocur.