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Accompagner le patient douloureux chronique
La prise en charge de la douleur chronique est complexe. Elle nécessite une attention particulière au comptoir et une vigilance sur le mésusage des traitements.
Écouter le patient
- Valider le ressenti. La douleur chronique est une pathologie à part entière. Elle est toujours réelle, même sans lésions visibles1. Tout patient qui dit souffrir doit être cru et entendu. Au comptoir, il faut faire preuve d’empathie. La prise en compte de l’expérience douloureuse des patients par les soignants pourrait même permettre de moduler le ressenti de la douleur2 : « Vous souffrez quotidiennement et cela a des conséquences sur vos activités. Je comprends. Décrivez-moi ce que vous ressentez. »
- Ne pas juger. La perception de la douleur est subjective. Son expression chez les patients est très variable et dépend de facteurs biologiques, psychologiques ou sociaux ainsi que des expériences antérieures. Qu’elle soit liée à une maladie grave (cancer, maladie inflammatoire chronique, etc.) ou sans cause évidente, la réaction d’une personne face à la douleur doit être respectée.
- Permettre de s’exprimer. Si certaines personnes sont capables de décrire leur douleur avec facilité, d’autres gardent cette expérience pour elles, au risque de s’isoler ou de ne pas être bien prises en charge. L’incapacité à communiquer n’exclut pas la possibilité d’éprouver de la douleur. Il faut donc dans certains cas provoquer la discussion : « Vous semblez fatigué depuis quelque temps. Qu’est-ce qui est responsable de cet inconfort ? »
Identifier et évaluer
- Repérer l’existence d’une douleur. Douze millions de Français vivent avec des douleurs chroniques mo-dérées à sévères3. Reconnaître un patient douloureux est facile quand il est traité par des antalgiques. Mais il est important de ne pas négliger ceux qui expriment simplement une douleur au comptoir : « Avez-vous évoqué ces douleurs avec votre médecin ? » ou « Avez-vous déjà pris un traitement contre ces douleurs ? »
- Rechercher sa persistance. La douleur chronique se définit comme une douleur persistante ou se reproduisant sur une période d’au moins trois mois : « Depuis quand ressentez-vous cette douleur ? » ou « Prenez-vous ces médicaments depuis longtemps ? »
- Évaluer son intensité. La douleur chronique n’est pas toujours constante. Elle peut évoluer au fil du temps, malgré un traitement antalgique établi : « Souffrez-vous en ce moment ? » ou « Avez-vous l’impression que les douleurs sont bien soulagées par les médicaments ? » Il est possible de s’appuyer sur des outils d’évaluation spécifiques4, comme l’échelle visuelle analogique (EVA) ou le questionnaire DN4 pour les douleurs neuropathiques.
Apporter des explications
- Les symptômes. Les informations transmises au patient sur sa douleur peuvent l’aider à en améliorer sa gestion. « La douleur est une réaction de protection de votre organisme. Elle résulte d’une stimulation des neurones au niveau d’une lésion. Le message douloureux est ensuite envoyé au cerveau où il est analysé et interprété » ; « Il est possible de ressentir une douleur en l’absence de lésion d’un tissu. Elle est alors due à un dysfonctionnement du système nerveux » ; « Il existe des systèmes physiologiques de contrôle de la douleur » ; « Ce n’est pas parce que la douleur augmente que la maladie sous-jacente évolue négativement ».
- La prise en charge. Au-delà de la douleur perçue, le patient ressent souvent une détresse émotionnelle et un handicap fonctionnel. Le traitement répond à un double enjeu : soulager les douleurs, mais aussi et surtout réduire le fardeau de cette douleur sur la santé et la qualité de vie du patient. « La thérapeutique mise en place doit permettre de soulager votre douleur. Si elle peut ne pas l’annuler complètement, elle doit vous permettre de retrouver un meilleur confort de vie. » Des outils sont disponibles pour mesurer les conséquences de celle-ci sur la qualité de vie, par exemple l’échelle d’évaluation comportementale de la douleur Doloplus 2. Rappelons par ailleurs que la douleur chronique peut altérer la santé mentale, et inversement.
Guider le patient
- Informer. La douleur aiguë peut devenir chronique, surtout lorsqu’elle n’est pas correctement traitée. Un avis mé-dical ainsi qu’une prise en charge adaptée et bien suivie sont donc indispensables pour limiter le risque de chronicisation. Il est important de rappeler que ne pas souffrir est un droit : « Vous n’embêtez personne en exprimant votre douleur. Votre demande de soulagement est légitime, et je suis là pour vous proposer des solutions » Si les douleurs ne sont pas correctement soulagées, si elles s’accentuent ou si elles provoquent de nouveaux symptômes, une réévaluation médicale est nécessaire : « Notez régulièrement votre niveau de douleur pour pouvoir en informer votre médecin » ou « Avez-vous signalé ce nouveau symptôme lors de votre dernière consultation ? »
- Orienter. Des structures douleur chronique (SDC) existent. Elles sont de deux types : les consultations pluriprofessionnelles (médecin, infirmier, psychologue) ; les centres de prise en charge pluridisciplinaire (neurologue, psychiatre, orthopédiste, etc.) avec un accès possible à des lits d’hospitalisation. Un annuaire national est disponible pour connaître les structures spécialisées dans chaque région de France.
Sécuriser la prise en charge
- Lister les traitements antalgiques utilisés. « De quels médicaments dis-posez-vous ? » ; « Savez-vous quelles molécules sont présentes dans cette spécialité ? » ; « Utilisez-vous du paracétamol en complément de vos médicaments habituels ? ». Lors du renouvellement d’ordonnance, vous pouvez faire le point avec le patient sur ses prises de médicaments antalgiques, prescrits ou non. Il est utile de rappeler la posologie, les moments de prise, mais aussi les éventuels effets indésirables et les interactions possibles.
- Repérer le mésusage. Une douleur chronique mal prise en charge peut mener à une surconsommation d’antalgiques qu’il faut rechercher : « Vous avez renouvelé cette ordonnance il y a seulement trois semaines, vous n’avez plus assez de médicaments ? » ; « Je m’aperçois dans votre historique de délivrance que vous avez déjà une ordonnance en cours pour ce traitement ». Ordonnances multiples, renouvellements trop fréquents, achat de médicaments en vente libre… sont autant de situations qui doivent interpeller. Des outils de repérage d’un mauvais usage des médicaments antalgiques existent, comme le questionnaire POMI-5F pour les médicaments opioïdes.
- Connaître les autres propositions thérapeutiques. Plusieurs thérapies non pharmacologiques (acupuncture, neurostimulation transcutanée, sophrologie, aromathérapie, luminothérapie, hypnose, réalité virtuelle) sont disponibles. Il peut être utile d’en informer le patient, principalement quand les médicaments deviennent insuffisants pour le soulager.
Accompagner le patient
- S’impliquer dans le suivi. Lors des renouvellements d’ordonnance ou d’un simple passage à l’officine, demandez au patient des nouvelles de sa santé et de sa douleur : « Comment a évolué la douleur avec ce nouveau traitement ? » Faire régulièrement le point avec le patient permet de créer une alliance thérapeutique et d’entretenir le lien de confiance.
- Évaluer l’impact sur la qualité de vie. Il est important d’évaluer les conséquences de la douleur sur la vie quotidienne du patient : « Dormez-vous mieux ces dernières semaines ? » ; « Avez-vous meilleur appétit ? » ; « Comment se passe votre travail à mi-temps ? » ; « Êtes-vous de bonne humeur ces derniers temps ? ». La distraction est aussi un rempart efficace. Si le patient est occupé, il prête moins d’attention à sa douleur : « Avez-vous repris le sport ? » Un suivi psychologique peut également être utile, afin d’aider à mieux gérer les sensations éprouvées.
Avec l’aimable participation du Dr Jean-Philippe Palliser, médecin de la douleur au sein de l’équipe mobile « Douleurs et soins palliatifs » du Groupe hospitalier Nord Essonne (GHNE).
Sources : Fiches informatives sur la douleur destinées au patient, association Pain Revolution, « Douleur : comment l’empathie soulage », Inserm, 17 juillet 2019, « Parcours de santé d’une personne présentant une douleur chronique », Haute Autorité de santé (HAS), 14 février 2023, « Liste des échelles acceptées pour mesurer la douleur », HAS, 12 janvier 2022, « Les structures spécialisées douleur chronique (SDC) », ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités, 5 avril 2024, « Bien utiliser les médicaments antalgiques contre la douleur », Assurance maladie, 14 mars 2022, « Comment repérer rapidement le mauvais usage d’un antalgique opioïde ? », Observatoire français des médicaments antalgiques (OFMA), 11 avril 2022.
Pas une, mais des douleurs
Toutes les douleurs chroniques ne sont pas identiques. Il est possible de différencier deux types principaux : la douleur nociceptive ou inflammatoire, d’une part, et la douleur neuropathique ou dysfonctionnelle, d’autre part. Ces deux catégories de douleurs peuvent être associées chez un même patient.
- La douleur nociceptive survient après un traumatisme ou à la suite d’une inflammation chronique. La douleur se manifeste à un ou plusieurs endroits de l’organisme, selon le site du stimulus douloureux initial.
- La douleur neuropathique (ou neurogène) est due à un dysfonctionnement dans la perception du message douloureux au niveau du système nerveux. Elle fait suite à l’absence de stimulations douloureuses ou à une stimulation habituellement non douloureuse.
Pour en savoir plus, la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD) propose des outils d’information et de formation.
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