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3/6 – Traitements : les molécules utilisées dans la narcolepsie
L’arsenal thérapeutique se compose de quelques molécules, d’action symptomatique, dont le mécanisme n’est pas toujours élucidé.
La narcolepsie de type 1 est liée à une perte sélective des neurones à hypocrétine de l’hypothalamus, vraisemblablement en lien avec un processus auto-immun et des facteurs environnementaux. La physiopathologie de la narcolepsie de type 2 reste inconnue.
Mécanisme d’action des traitements
Stimulants de l’éveil
Modafinil. Il inhibe la recapture de la dopamine et potentialise l’activité α1-adrénergique cérébrale.
Pitolisant. C’est un antagoniste/agoniste inverse* des récepteurs présynaptiques histaminergiques H3 (qui contrôlent l’activité de ces neurones par auto-inhibition) présents uniquement dans le système nerveux central. Le pitolisant accroît ainsi la libération d’histamine au niveau central, jouant un rôle d’éveil majeur. Il module également d’autres neurotransmetteurs (acétylcholine, noradrénaline, dopamine) et a une certaine action sur les cataplexies.
Méthylphénidate et solriamfetol. Ils inhibent la recapture de la dopamine et de la noradrénaline au niveau des neurones présynaptiques, augmentant la concentration de ces neurotransmetteurs dans la fente synaptique.
* Composé qui s’oppose à la fois à l’effet induit par la stimulation d’un récepteur et à l’activité de base de celui-ci qui existerait en l’absence de tout agoniste. L’activité de l’agoniste inverse est donc plus forte qu’un antagoniste.
Dépresseur du système nerveux central
Oxybate de sodium (à l’hôpital). Ayant une probable action agoniste des récepteurs GABA B, l’oxybate de sodium s’administre au moment du coucher. Il favorise le sommeil à ondes lentes, en étend la durée et réduit la fréquence des épisodes d’endormissement en sommeil paradoxal. En favorisant le sommeil nocturne, il réduit la somnolence diurne et les cataplexies.
Antidépresseurs (hors autorisation de mise sur le marché)
En élevant le taux de sérotonine et/ou de noradrénaline, les antidépresseurs réduisent le sommeil paradoxal, ce qui leur permet de traiter les cataplexies.
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Pharmacologie
Modafinil
Suspecté d’être à l’origine de malformations congénitales, il impose une contraception efficace à poursuivre jusqu’à 2 mois après l’arrêt du traitement selon la monographie, en sachant qu’il diminue l’efficacité des contraceptifs hormonaux. Il est interdit aux sportifs en compétition (contrôle antidopage positif aux stimulants).
Principaux effets indésirables. Essentiellement des céphalées en début de traitement. Insomnie, troubles digestifs (nausées, douleurs abdominales, etc.) et tachycardie sont fréquents. Des troubles du rythme cardiaque et des affections oculaires (troubles de la vue, sécheresse oculaire, par exemple) sont possibles. Exceptionnelle mais grave, la survenue de troubles cutanés, dont le syndrome de Stevens-Johnson (Dress : éruption médicamenteuse avec éosinophilie et symptômes systémiques), ou psychiatriques (idées suicidaires, manies, hallucinations, etc.) imposent l’arrêt du traitement. Un risque de dépendance, d’abus et de mésusage est potentiellement à surveiller.
Surveillance. Un électrocardiogramme et la recherche de troubles du rythme ou d’une cardiopathie sont recommandés avant l’instauration du traitement. La pression artérielle et la fréquence cardiaque doivent être régulièrement surveillées.
Interactions. Le modafinil peut augmenter en particulier le métabolisme des contraceptifs hormonaux et de la ciclosporine.
Condition de prescription et de délivrance. Médicament d’exception. La prescription initiale annuelle est réservée aux spécialistes en neurologie ou aux médecins exerçant en centre du sommeil, le renouvellement est non restreint.
Pilolisant
Le pitolisant n’est pas recommandé durant la grossesse par manque de données : une contraception efficace est nécessaire durant le traitement et jusqu’à au moins 21 jours après son arrêt selon la monographie.
Principaux effets indésirables. Insomnies et céphalées nécessitent de diminuer la dose ou d’arrêter le traitement s’ils persistent. Irritabilité, sensations vertigineuses sont possibles, parfois une prise de poids et des troubles gastriques (nausées, dyspepsies, etc.). À des doses suprathérapeutiques, un allongement de l’intervalle QT a été rapporté par certaines études.
Interactions. Le pitolisant peut réduire l’effet de certains médicaments, dont les contraceptifs hormonaux et plusieurs médicaments à marge thérapeutique étroite. Des inducteurs enzymatiques (dont le millepertuis) sont susceptibles de diminuer son action et les inhibiteurs du cytochrome P450 (CYP) 2D6 (paroxétine, duloxétine, etc.) de l’augmenter. L’association avec les médicaments qui allongent l’intervalle QT impose une surveillance étroite. Les antidépresseurs tricycliques et les anti-H1 traversant la barrière hématoencéphalique (doxylamine, phéniramine, prométhazine, etc.) peuvent atténuer l’efficacité du pitolisant.
Conditions de prescription et de délivrance. Prescription initiale annuelle réservée aux spécialistes en neurologie ou aux médecins qui exercent en centre du sommeil. Renouvellement non restreint.
Solriamfétol
Le solriamfétol est interdit aux sportifs en compétition.
Principaux effets indésirables. Céphalées, nausées, baisse de l’appétit et effets indésirables psychiatriques (anxiété, insomnie, irritabilité) se résolvent le plus souvent dans un délai d’environ 2 semaines. Leur persistance ou aggravation peut nécessiter de diminuer la posologie ou d’arrêter le traitement. Le solriamfétol accroît la pression artérielle et la fréquence cardiaque de façon dose-dépendante ; le cas échéant, il convient d’adapter le traitement. Le risque d’abus médicamenteux est faible, mais à surveiller en cas d’antécédents d’addictions.
Surveillance. Pression artérielle et fréquence cardiaque doivent être régulièrement surveillées.
Interactions. Prudence avec les médicaments augmentant la pression artérielle.
Conditions de délivrance. Prescription initiale hospitalière annuelle réservée aux spécialistes en neurologie et en pneumologie, ainsi qu’aux médecins spécialistes du sommeil. Renouvellement non restreint.
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Méthylphénidate
Le méthylphénidate est interdit aux sportifs en compétition.
Principaux effets indésirables. Les plus fréquents : baisse d’appétit, nausées, céphalées, irritabilité, insomnies et troubles cardiovasculaires (tachycardie, arythmie, hypertension artérielle, notamment). Des affections respiratoires (rhinopharyngites, toux, etc.), de la peau ou des tissus sous-cutanés (alopécie, hyperhydrose, entre autres) peuvent survenir, ainsi que des troubles psychiatriques (agressivité, agitation, anxiété, dépression, etc.). Le risque de mésusage ou d’abus doit être surveillé.
Surveillance : du poids et de la taille chez l’enfant, de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque de façon régulière, ainsi que de l’apparition de troubles psychiatriques. Palpitations, douleurs thoraciques à l’effort, dyspnée doivent amener à consulter.
Interactions. La prudence est recommandée en association avec des médicaments qui risquent d’augmenter la pression artérielle.
Condition de prescription et délivrance. Médicament stupéfiant dont la prescription sur ordonnance sécurisée est limitée à 28 jours. Prescription initiale annuelle réservée aux neurologues, aux psychiatres, aux pédiatres et aux médecins exerçant dans un centre du sommeil. Renouvellement non restreint. La prise en charge par l’Assurance maladie n’est possible que si le médecin mentionne le nom de la pharmacie dispensatrice sur l’ordonnance.
Oxybate de sodium
Médicament stupéfiant (Xyrem, à l’hôpital), dépresseur du système nerveux central, il s’agit du sel de sodium du ɣ-hydroxybutyrate (GHB), présentant un risque connu de détournement d’usage à des fins festives, de dopage, d’abus et de soumission chimique (le GHB est la « drogue du violeur »). Ses contraintes de prise (au coucher puis 2 h 30 à 4 heures plus tard) nécessitent une bonne adhésion de la part du patient.
Principaux effets indésirables. Les plus fréquents : nausées, vertiges, céphalées et énurésie nocturne chez l’enfant. Il existe un risque de dépression respiratoire et d’apparition de troubles psychiatriques (dépression, anxiété, hallucinations, psychoses, notamment). Les patients ne doivent pas conduire ou entreprendre une activité qui nécessite de la vigilance et de la coordination motrice durant les 6 heures suivant la prise.
Interactions. L’association aux dépresseurs du système nerveux central est déconseillée.
Vigilance
Certaines contre-indications sont à connaître :
- Modafinil : hypertension modérée à sévère non contrôlée, arythmie cardiaque.
- Pitolisant : insuffisance hépatique sévère.
- Ritaline : hyperthyroïdie, troubles cardiovasculaires ou psychiatriques importants (hypertension artérielle sévère, insuffisance cardiaque, arythmies, antécédents de dépression sévère, manie, schizophrénie, etc.).
- Solriamfétol : antécédents d’infarctus du myocarde dans l’année précédente, angor instable, hypertension non contrôlée, affections cardiaques graves.
Antidépresseurs
Sont utilisés en première intention les inhibiteurs mixtes de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNA), comme la venlafaxine (37,5 mg à 300 mg par jour) ou les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS : notamment, la fluoxétine, 20 mg à 60 mg par jour). Les antidépresseurs tricycliques comme la clomipramine (10 mg à 75 mg par jour) sont peu utilisés en raison de propriétés sédatives (ils peuvent aggraver la somnolence diurne) et de leurs autres effets indésirables (prise de poids, troubles de la libido, effets anticholinergiques). Efficaces dès les premières prises sur les cataplexies, ils nécessitent une observance rigoureuse au risque, en cas d’oubli, de développer un « mal cataplectique » caractérisé par des cataplexies particulièrement fréquentes et de longue durée.
Effets indésirables. La venlafaxine, la plus fréquemment prescrite, peut induire des nausées, des sensations vertigineuses et une irritabilité surtout en début de traitement, une baisse de la libido et une prise de poids.
Interactions. L’association aux IMAO est contre-indiquée ou déconseillée. Prudence en cas d’association avec certains médicaments sérotoninergiques (triptans, tramadol, compléments alimentaires renfermant du tryptophane, par exemple) en raison d’un risque de syndrome sérotoninergique (agitation, hallucination, tachycardie, hyperthermie, nausées, vomissements, notamment).
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Avec la collaboration du Pr Yves Dauvilliers, neurologue, et du Dr Pierre Escourrou, cardiologue, spécialiste du sommeil.
Article issu du cahier Formation du n°3506, paru le 23 mars 2024
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